ARBITRAGE EN VERTU DE LA LOI SUR LE RÉGIME DE RETRAITE DES

 

ARBITRAGE EN VERTU DU 

RÈGLEMENT SUR LE PLAN DE GARANTIE 

DES BÂTIMENTS RÉSIDENTIELS NEUFS (Décret 841-98)

 

CANADA

PROVINCE DE QUÉBEC

 

Groupe d’arbitrage et de médiation sur mesure (GAMM)

Dossier no :

GAMM :     2012-19-003

                         GQH :         60283

 

 

ENTRE :

SÉBASTIEN MAILLOUX

(ci-après le «Bénéficiaire»)

 

ET :

LES CONSTRUCTIONS J.F. DUBORD INC.

                                                                                                          

  (ci-après l’«Entrepreneur»)

 

ET :

LA GARANTIE QUALITÉ HABITRATION INC.

                                                                                                          

  (ci-après l’«Administrateur»)

 

 

 

 

DEVANT L’ARBITRE :

 Me Karine Poulin

 

 

Pour l’entrepreneur :                                                      

Absent

Pour l’administrateur :                                                     

Me Jean-Raymond Paradis

Pour le bénéficiaire :                                                       

Monsieur Sébastien Mailloux 

 

 

Date d’audience : 

6 février 2013

Date de la sentence :                                                      

5 mars 2013

 

 

 

 

 

SENTENCE ARBITRALE

 

 

 

 

I

LE RECOURS

                        [1] Monsieur Sébastien Mailloux conteste en vertu de l’article 19 du Règlement  sur le Plan de garantie des bâtiments résidentiels neufs (ci-après le «Règlement»), la décision suivante de l’Administrateur datée du 26 juin 2012 à l’effet que la réclamation en litige avait a été faite hors délai et ne se qualifiait pas comme vice caché:

 

«Or, selon ce qu’il nous a été possible de constater lors de notre inspection, ce point ne peut être considéré comme un vice caché.

 

De plus, tel que stipulé aux articles 6.4.2.3, 6.4.2.4 et 6.4.2.5 du contrat de garantie obligatoire de maison neuve, la situation décrite doit être dénoncée par écrit à l’entrepreneur et à l’administrateur dans un délai raisonnable, lequel ne peut excéder six (6) mois de la découverte des vices et des malfaçons. Selon les observations prises sur le site, entre la situation observée et la dénonciation il s’est écoulé plus de 6 mois»

 

                        [2] Lors de l’audition, l’Administrateur a fait l’admission suivante : 

 

«Si la dénonciation avait été faite dans les délais, la garantie aurait considéré le vice couvert par la garantie.»

 

                        [3] Le présent arbitrage consiste donc à déterminer si la réclamation concernant des fissures dans la dalle de béton du sous-sol a été présentée à l’intérieur du délai de six (6) mois prévu au Règlement.

                        [4] Le Tribunal a pris acte de l’absence de l’Entrepreneur lequel ne s’est jamais manifesté au dossier, malgré qu’il ait été dûment convoqué aux conférences téléphoniques ainsi qu’à l’audition.

                        [5] Les articles suivants du Règlement et du Code civil du Québec sont pertinents au débat :

 

 Règlement

«10.  La garantie d'un plan dans le cas de manquement de l'entrepreneur à ses obligations légales ou contractuelles après la réception du bâtiment doit couvrir:

 

(…)

 

  4°    la réparation des vices cachés au sens de l'article 1726 ou de l'article 2103 du Code civil qui sont découverts dans les 3 ans suivant la réception du bâtiment et dénoncés, par écrit, à l'entrepreneur et à l'administrateur dans un délai raisonnable, lequel ne peut excéder 6 mois de la découverte des vices cachés au sens de l'article 1739 du Code civil;

 

 (…)

 

16.  La garantie d'un plan bénéficie à tout acquéreur subséquent pour le terme qui reste à courir à la garantie.

 

Code civil du Québec

«1739. L'acheteur qui constate que le bien est atteint d'un vice doit, par écrit, le dénoncer au vendeur dans un délai raisonnable depuis sa découverte. Ce délai commence à courir, lorsque le vice apparaît graduellement, du jour où l'acheteur a pu en soupçonner la gravité et l'étendue.

 

Le vendeur ne peut se prévaloir d'une dénonciation tardive de l'acheteur s'il connaissait ou ne pouvait ignorer le vice.»

 

II

 LES FAITS 

                        [6] Le 7 janvier 2009, Nicolas Dubé et Ariane Langis signent avec l’Entrepreneur un contrat préliminaire et de garantie obligatoire pour la construction d’une propriété située au 219, rue Saillant à Auteuil, lequel est signé par l’Entrepreneur le 12 janvier de la même année (ci-après la «Propriété»).

                        [7] Le 9 mars 2009, Ariane Langis, Nicolas Dubé et l’Entrepreneur procèdent à la réception de la Propriété et signent le contrat de vente le lendemain, soit le 10 mars 2009. Les acheteurs y  emménagent par la suite.

                        [8] En novembre 2011, Madame Langis et Monsieur Dubé se séparent et la Propriété est mise en vente le 15 février 2012.

 

                        [9] Les fissures en litige sont dénoncées à l’Administrateur et à l’Entrepreneur le 1er mars 2012. S’en suivent la visite des lieux par l’Administrateur le 27 avril 2012 et sa décision rendue le 26 juin 2012, objet de la présente contestation.

                        [10] Dans l’intervalle, le 18 avril 2012, Sébastien Mailloux a acquis la Propriété et c’est ce dernier qui continue la demande d’arbitrage des propriétaires initiaux en vertu de l’article 16 du Règlement.

 

III

LA PREUVE

Bénéficiaire

                        [11] Lors de l’audition, Sébastien Mailloux a témoigné. Le Tribunal en retient que Monsieur Mailloux a été informé avant l’achat de la Propriété de la réclamation des vendeurs auprès de l’Administrateur et qu’il a donc acquis la Propriété en toute connaissance de cause. Il affirme  n’avoir eu aucune raison de douter des vendeurs lorsqu’ils lui ont déclaré avoir dénoncé la situation à l’Entrepreneur et à l’Administrateur dès la découverte des fissures.

                        [12] Monsieur Mailloux a aussi ajouté remettre en question la décision de l’Administrateur notamment en ce que l’inspecteur conciliateur ne l’aurait pas prise seul puisqu’il aurait consulté ses supérieurs.

                        [13] Par la suite, l’ancienne propriétaire Ariane Langis a témoigné à l’effet que lors de l’achat en 2009, elle n’avait noté aucune altération ni aucune fissure dans la dalle de béton. 

                        [14] Selon son témoignage, cette partie du sous-sol (la pièce du fond) était jonchée de biens et de boîtes de toutes sortes. Environ un (1) an après avoir acquis la Propriété, Madame Langis et Monsieur Dubé ont installé un tapis d’exercice de caoutchouc d’environ un-quart de pouce d’épaisseur. Le tapis était installé plus ou moins au milieu de la pièce, et des meubles, boîtes, appareils d’exercice etc. étaient placés tout autour du tapis. Il était impossible de circuler parmi les boîtes, seul le centre de cette pièce étant accessible pour la circulation. 

 

                        [15] Quant au reste du sous-sol, il est recouvert de céramique et aucune tuile n’était craquée et donc, aucun signe de fissure ailleurs au sous-sol.

                        [16] Madame Langis a expliqué que durant la vie commune, Monsieur Dubé et elle faisaient régulièrement de l’exercice sur le tapis de la pièce du fond, notamment à l’aide d’un DVD.

                        [17] Elle affirme n’avoir jamais, à ces occasions, vu de fissures ni senti quelque dénivellation lorsqu’elle était assise ou couchée sur le tapis d’exercice.

                        [18] Elle a également expliqué que les boîtes contenaient des items dont ils n’avaient pratiquement jamais besoin, ce qui explique qu’ils n’accédaient pas auxdites boîtes, ni ne les déplaçaient. Bien qu’il y ait de petits interstices entre les boîtes, elle n’a rien remarqué.

                        [19] En novembre 2011, Madame Langis et Monsieur Dubé se sont séparés et c’est elle qui a quitté le domicile. 

                        [20] Lorsque le 15 février 2012 la Propriété est mise en vente par les soins d’un courtier immobilier, celui-ci leur recommande de réaménager cette pièce du sous-sol; en somme, enlever tout le superflu, afin de faciliter la vente. 

                        [21] Ainsi, affirme-t-elle, c’est au moment de déplacer et d’enlever des boîtes et le tapis de caoutchouc qu’ils découvrent les fissures en litige. Elle en situe la découverte entre le 15 février et le 1er  mars 2012. 

                        [22] Selon la preuve administrée, Madame Langis contacte alors l’Administrateur pour s’enquérir de la procédure de réclamation le 1er mars 2012 et le même jour fait parvenir à l’Entrepreneur, avec copie à l’Administrateur, la dénonciation écrite suivante :

 

«À qui de droit,

 

La présente a pour but de vous faire une demande de réparation concernant une fissure observée sur la dalle de béton du sous-sol en vertu de la garantie Qualité-Habitation. Le dommage consiste en une fissure d’environ 1 cm et on peut y remarquer un léger soulèvement de la dalle de béton.

 

Dans l’attente d’une réponse de votre part,

 

Ariane Langis»

                        [23] Cela constitue l’essentiel du témoignage de Madame Langis.

                        [24] Le Bénéficiaire a par la suite fait entendre Monsieur Marc-Antoine Desjardins de P&R Desjardins à titre de témoin expert dont le rapport d’expertise a été produit.

                        [25] Lors de sa visite, la pièce du fond est dégarnie, affirme Monsieur Desjardins. Des  fissures sont apparentes et une légère dénivellation à peine visible est aussi observée, comme en fait foi la photo 3 de son rapport. 

                        [26] Selon son rapport, les fissures observées sont profondes et seraient d’une largeur variable allant d’un-huitième à un-quart de pouce. 

                        [27] Selon lui, dans les circonstances entourant le présent litige, pour percevoir la dénivellation, il aurait fallu que celle-ci soit télégraphiée sur le tapis de caoutchouc. Or, le tapis de caoutchouc à une épaisseur d’un-quart pouce alors que la dénivellation est d’un-seizième de pouce sur 4 pieds et d’un-huitième de pouce sur 2 pieds. Selon son expérience, il est fort possible que Madame Langis et Monsieur Dubé n’aient pas perçu cette dénivellation, même en position couchée ou assise sur le tapis.

                        [28] Le témoin a également noté que lorsqu’on marche dessus, la dalle est stable et ne bouge pas.

                        [29] En contre-interrogatoire, Monsieur Desjardins admet ne pas avoir, au moment de sa visite, posé sur le sol un tapis comme celui utilisé par Madame Langis et Monsieur Dubé ni avoir refait des mesures récentes. 

 

Administrateur

                        [30] Pour sa part, l’Administrateur a invité le Tribunal à effectuer une visite des lieux immédiatement avant l’audition; ce qui fût fait.

                        [31] À l’audience qui a suivi, il a fait entendre Monsieur Richard Massé, inspecteur-conciliateur qi possède des connaissances particulières en matière de béton.

 

                        [32]  Monsieur Massé raconte qu’au moment de sa visite le 27 avril 2012, le Bénéficiaire avait déjà pris possession de la Propriété. À ce moment, la pièce du fond était totalement dégarnie et il a pu voir que le béton y était fissuré de manière anormale et aussi observé la présence de gonflements.

                        [33] Il a pris des mesures avec le niveau qu’il avait sous la main mais, insatisfait des résultats non concluants, il est revenu en après-midi avec un niveau de 3 pieds. Il a alors mesuré une dénivellation de l’ordre de 8 mm de chaque côté du niveau; donc, une dénivellation de 8 mm sur une distance de 1 pied et demi. Selon lui, il s’agit-là de fissures de retrait extrêmes, lesquelles apparaissent normalement dans les 12 à 24 premiers mois suivant la construction.

                        [34] Au moment de sa visite, la pièce était vide de sorte que Monsieur Massé n’a pas vu de tapis de caoutchouc.

                        [35] Il admet ne pas être en mesure d’indiquer précisément quelle dénivellation est perceptible à l’œil nu et que cela varie d’un individu à l’autre. Il ajoute que vu que dans le cas présent, la dénivellation observée se trouve de chaque côté des fissures, elle est plus accentuée et selon lui, les bénéficiaires initiaux auraient dû s’en rendre compte, d’autant qu’elle est de 8 mm sur une distance de 1,5 pieds, donc supérieure à l’épaisseur du tapis décrit plus tôt.

                        [36] Par ailleurs, Monsieur Massé n’est pas en mesure de dire si la dénivellation est plus accentuée aujourd’hui qu’au jour de sa visite, aucune autre mesure n’ayant été prises depuis.

                        [37] Enfin, Monsieur Massé confirme avoir consulté ses supérieurs dans le cadre du présent dossier mais précise que c’était pour vérifier une question d’application du Règlement et non sur une question technique.

 

 

 

 

 

 IV

LES PLAIDOIRIES

Bénéficiaire

                        [38] Le Bénéficiaire soutient qu’il n’avait aucune raison au moment de son achat de la Propriété de douter de la bonne foi des vendeurs et que le témoignage d’Ariane Langis est clair au sujet des circonstances  ayant entouré la découverte des fissures.

                        [39] Par ailleurs, dit-il, les dénivellations mesurées se situent dans des endroits auxquels les vendeurs n’avaient pas accès, vu l’encombrement de la pièce du fond. Les fissures situées sous  le tapis de caoutchouc étaient, quant à elles, mineures et peu discernables.

                        [40] Selon le Bénéficiaire, les fissures observées le jour de l’audience sont plus prononcées qu’au jour du rapport ce qui attesterait du fait qu’il s’agit d’une situation en progression. Quant au reste du sous-sol, il est recouvert de céramique et les tuiles n’y sont pas craquées. 

                        [41] À tout événement, les vendeurs sont de bonne foi et il n’existe aucune raison de croire que s’ils avaient découverts ces fissures avant, ils ne les auraient pas déclarées plus tôt.

 

 

Administrateur

                        [42] L’Administrateur plaide que même si la pièce était encombrée, il s’agit tout de même d’une pièce d’environ 25 pieds sur 10 donc une pièce, somme toute, relativement petite et que s’il est vrai que les vendeurs l’utilisaient régulièrement, ils auraient dû se rendre compte de la présence des fissures et des dénivellations. Plus particulièrement, ils auraient dû les sentir en position assise ou couchée lorsqu’ils faisaient leurs exercices. Selon l’Administrateur, le tapis qui recouvrait le sol était malgré tout assez rigide et n’épousait certainement pas la forme de la dalle de béton.

                        [43] Pour l’Administrateur, les vendeurs ont découvert les fissures bien avant et ont été négligents puisque les manifestations observées se sont vraisemblablement produites dans les 12

 

                        à 24 premiers mois suivant la construction et elles ne sont donc pas apparues soudainement en 2012.

                        [44] Il est vraisemblable, selon l’Administrateur, que ces fissures aient été apparentes à l’œil nu et décelables en se couchant sur le sol ou en marchant. À tout événement, selon lui, les boîtes qui auraient masqué la vue auraient été bancales si elles s’étaient trouvées sur une fissure de cette ampleur.

                        [45] Conséquemment, conclu-t-il, ces fissures étaient là depuis longtemps et le délai de dénonciation de 6 mois suivant la découverte était largement dépassé en l’instance. 

                        [46] L’Administrateur a invoqué la sentence Bégin c. Les constructions SPR Pouliot inc.1 relative au caractère impératif du délai en question, s’agissant d’un délai de déchéance.

 

1 CCAC S09-191101-NP, 15 avril 2010, arbitre Reynald Poulin.

V

ANALYSE ET DÉCISION

 

                        [47] Selon l’article 10 du Règlement ainsi que l’article 1739 du Code civil du Québec, le Bénéficiaire qui découvre un vice qui affecte sa propriété doit le dénoncer par écrit à l’Entrepreneur et à l’Administrateur dans un délai de 6 mois suivant sa découverte.  Si le vice est graduel, le délai court à partir du moment où l’on a pu en soupçonner la gravité.  

                        [48] Comme nous l’avons dit au départ, la seule question en litige est celle de la tardiveté de la dénonciation, l’Administrateur ayant reconnu que si celle-ci avait été faite dans le délai, le problème se qualifiait comme un vice couvert par le plan de garantie.

                        [49] Pour sa part, le Bénéficiaire soutient que le vice a été dénoncé à l’intérieur du délai de 6 mois, dès sa découverte, ce que nie l’Administrateur selon qui le problème aurait été découvert ou à tout le moins dû l’être bien avant, de sorte que dénoncé tardivement au sens de l’article 10 du Règlement.

 

                        [50] Il est bien établi que le délai dont il s’agit en est un de déchéance et une analyse rigoureuse des faits s’impose afin de déterminer s’il a ou non été respecté en l’espèce.  

                        [51] En cette matière, le fardeau de la preuve repose sur le Bénéficiaire qui devait donc démontrer de manière prépondérante que la décision de l’Administrateur est mal fondée et que le Tribunal doit la renversée.

                        [52] Les faits pertinents au débat remontent à l’époque où le Bénéficiaire n’était pas encore propriétaire de la Propriété de sorte que le témoignage d’Ariane Langis est particulièrement pertinent et utile au débat.

                        [53] Je précise d’emblée que le témoignage de Madame Langis m’a semblé, dans son ensemble, sincère et honnête. Je n’ai noté chez elle aucune hésitation, tant lors de l’interrogatoire que lors du contre-interrogatoire. Ce témoin a rapporté spontanément et naturellement les faits, et ses propos sur la matérialité et les circonstances des fissures ne sont pas contredits.

                        [54] Madame Langis décrit une pièce jonchée de meubles, de boîtes, d’appareils d’exercice et autres items en périphérie au milieu d’une pièce où se trouvait un tapis d’exercice d’une épaisseur d’un-quart de pouce. Elle rapporte avoir utilisé la pièce régulièrement, plus précisément, lors de ses séances d’exercice au cours desquelles elle s’assoit et s’allonge sur le tapis. Elle affirme que l’encombrement de la pièce est tel qu’on ne peut y circuler ailleurs que sur le tapis d’exercice et qu’elle et son conjoint d’alors ne déplaçaient ni les boîtes ni les appareils. Elle affirme sans hésiter n’avoir découvert les fissures qu’entre le 15 février et le 1er mars 2012, soit lors du ménage fait dans la pièce en vue de vendre la Propriété. Or, c’est le 1er mars 2012 que la situation est dénoncée à l’Entrepreneur et à l’Administrateur, soit dans un délai d’au plus  15 jours.

                        [55] Même s’il peut paraître étonnant que la pièce du fond ait été encombrée au point de rendre impossible aux propriétaires de l’époque d’apercevoir les fissures en litige, aucune preuve contraire n’est offerte et le témoignage entendu à ce sujet est néanmoins crédible et demeure non contredit.

 

                        [56] Les autres témoins entendus n’ont pas vu la pièce du fond dans l’état où elle se trouvait en février-mars 2012 lors de la découverte des fissures. En revanche, les deux conviennent en réalité qu’il s’agit d’un problème s’étant manifesté avec le temps. Il s’agit là d’un élément essentiel puisque le Tribunal doit déterminer à quel moment les fissures ont été découvertes.

                        [57] Également, aucun de ces témoins n’a reproduit la pièce telle que celle-ci se trouvait avant la découverte des fissures ou à tout le moins, en y disposant un tapis du même type que celui utilisé par les vendeurs et mesurant un-quart de pouce d’épaisseur.

                        [58] Aucun de ces deux témoins n’a repris de mesures le matin de l’audience de sorte qu’aucun d’entre eux n’a été en mesure d’affirmer si la situation a effectivement évolué depuis leurs observations rapportées. Aucun des deux n’était en mesure d’affirmer que les dénivellations observées étaient perceptibles à l’œil nu pour un profane.

                        [59] Les témoignages ont d’ailleurs porté principalement sur le fait de savoir si Madame Langis ou Monsieur Dubé auraient dû sentir les dénivellations en position assise ou couchée sur le tapis de caoutchouc.

                        [60] Avec égards, le Tribunal a noté, lors de la visite des lieux, que les dénivellations les plus marquées se trouvent au niveau des fissures observées en périphérie de la pièce et donc, selon le témoignage non contredit d’Ariane Langis, aux endroits où précisément se trouvaient les meubles, boîtes et appareils d’exercice qui obstruaient leur vue.

                        [61] De plus, le Tribunal est convaincu de la description faite par les témoins versés dans ces questions que la situation a évolué depuis la dénonciation de mars 2012 et que nous sommes en présence d’une situation évolutive.

                        [62] En effet, la dénonciation en litige fait état d’une fissure de 1 cm. Lors de notre visite, il y a de multiples fissures sur la dalle de béton et celle-ci se soulève par endroits. Ainsi, vu la preuve, la question n’est pas de savoir si les vendeurs auraient pu ou dû découvrir ce vice plus tôt mais bien de déterminer à quel moment il a été, dans les faits, découvert. Telle est l’essence même de l’article 10 du Règlement et de l’article 1739 du Code civil du Québec.

 

                        [63] Par conséquent, j’en viens à la conclusion que la preuve prépondérante démontre que les fissures dénoncées ont été découvertes à l’intérieur du délai de 3 ans prévu à l’article 10 du Règlement et dénoncées à l’intérieur du délai de 6 mois prévu au même article.

 

 

 

POUR CES MOTIFS, LE TRIBUNAL  :

 

ACCUEILLE le recours;

 

DÉCLARE que le vice reconnu comme vice caché au sens du Règlement a été dénoncé à l’intérieur du délai raisonnable de 6 mois prévu au Règlement;

 

PREND ACTE de l’admission de l’Administrateur à l’effet que le vice en question est couvert par la garantie;

 

ORDONNE à l’Entrepreneur d’effectuer les travaux correctifs requis selon les règles de l’art d’ici trente (30) jours ou dans tout autre délai dont les parties pourront convenir;

 

À DÉFAUT par l’Entrepreneur de corriger la situation dans le délai susdit,

 

ORDONNE à l’Administrateur de procéder aux travaux correctifs nécessaires en conformité avec le Règlement;

 

ORDONNE que le coût du présent arbitrage soit défrayé par l’Administrateur conformément à l’article 123 du Règlement.

 

Montréal, ce 5 mars 2013.

 

 

 

 

 

 

Me Karine Poulin, arbitre

 

 

Karine Poulin avocate inc.

G1115-11

S/A 105