TRIBUNAL D'ARBITRAGE

(constitué en vertu du REGLEMENT SUR LE PLAN DE GARANTIE DES BÂTIMENTS RÉSIDENTIELS NEUFS sous l'égide du CENTRE CANADIEN D'ARBITRAGE COMMERCIAL (CCAC), organisme d'arbitrage agréé par la RÉGIE DU BÂTIMENT DU QUÉBEC chargée d'administrer la Loi sur le bâtiment (L.R.Q. C. B-1.1))

CANADA

PROVINCE DE QUÉBEC

DISTRICT DE MONTRÉAL

DOSSIER N°: S06-1102-NP (022385-1 GMN)

MONTRÉAL, le 9 avril 2007

 

ARBITRE : Me ROBERT MASSON, ing., arb.

 

ISABELLE AUBIN et ALAIN MARCHAND

Bénéficiaires

c.

GROUPE DOMUS DGI INC.

Entrepreneur - Demandeur

et

LA GARANTIE DES BÂTIMENTS RÉSIDENTIELS NEUFS DE L'APCHQ INC.

Administrateur de la garantie

SENTENCE ARBITRALE

 

[1]         Les bénéficiaires ont passé contrat avec l'entrepreneur, le 25 février 2001, pour la construction d'une résidence à Montréal.

[2]                Alléguant que la construction comporte des malfaçons, et devant le refus de l'entrepreneur de les corriger, les bénéficiaires mettent en oeuvre le programme de garantie contractuelle fournie par l'entrepreneur : la «Garantie maisons neuves» administrée par La Garantie des bâtiments résidentiels neufs de I'APCHQ Inc. (La Garantie).

[3]                L'administrateur rend une décision le 6 octobre 2006 sur les réclamations des bénéficiaires, à la suite d'une inspection effectuée par l'architecte Yvan Mireault, inspecteur de La Garantie.

[4]                Non satisfait de la décision de l'administrateur, l'entrepreneur en demande l'arbitrage le 8 novembre 2006.

[5]                La procédure d'arbitrage débute par une audience préliminaire tenue par conférence téléphonique les 19 et 23 mars 2007.

[6]                La première question à régler lors de la première séance de l'audience préliminaire est la négligence, l'omission, ou le refus de l'entrepreneur de donner suite à une demande de versement de provisions pour frais faite et réitérée à plusieurs reprises par l'organisme d'arbitrage.

[7]                Me Martin de Chantal, de l'étude De Chantal, D'Amour, Fortier, s.e.n.c.r.l., avocats, étant absent, l'audience est reportée.

[8]                A la reprise de l'audience préliminaire, Me de Chantal indique que Alain F. Dupuis n'est pas l'entrepreneur ; qu'il est un indemnitaire aux termes d'un contrat d'indemnisation conclu avec La Garantie et qu'il n'entend pas verser les provisions pour frais demandées en lieu et place de l'entrepreneur. Il fait valoir que le Règlement sur le PLAN DE GARANTIE DES BÂTIMENTS RÉSIDENTIELS NEUFS (Règlement) doit recevoir une interprétation restrictive. Ainsi, c'est l'entrepreneur qui doit payer, avec La Garantie, les frais de l'arbitrage et non l'indemnitaire.

[9]                Après ces représentations de Me de Chantal, il y a lieu de constater l'absence de l'entrepreneur.

[10]           La preuve ne permet pas de connaître le statut de l'entrepreneur. Seule son absence est constatée. Cela permet néanmoins de fournir une explication aux demandes de l'organisme d'arbitrage laissées sans réponse et aux lettres de l'arbitre à toutes les parties annonçant le début des procédures d'arbitrage et la tenue de l'audience préliminaire également demeurées sans réponse.

[11]           Pour une meilleure compréhension de la situation, le Tribunal d'arbitrage estime nécessaire de citer la lettre de Me de Chantal au Centre canadien d'arbitrage commercial, l'organisme d'arbitrage choisi par le demandeur en arbitrage :

"CENTRE CANADIEN D'ARBITRAGE COMMERCIAL

Objet : Garantie des maisons neuves APCHQ

Alain Marchand et Isabelle Aubin

Décision : 6 octobre 2006, dossier # 022385-1

Entrepreneur : M. Alain F. Dupuis (caution - Groupe Domus DGI Inc.)

N/d :        M 1163-43 JM

Madame, Monsieur.

Nous représentons les intérêts de M. Alain Dupuis (sic) dans le présent dossier.

Ce dernier nous mandate afin de vous demander de procéder en arbitrage de la décision de M. Yvan Mireault, architecte, laquelle est jointe sous pli.

La décision de l'administrateur a été reçue le 16 octobre 2006 par les procureurs de M. Alain F. Dupuis.

Veuillez agréer, Madame, Monsieur, l'expression de nos meilleurs sentiments.

DE CHANTAL, D'AMOUR, FORTIER, S.E.N.C.R.L. (S) Martin de Chantal

Martin de Chantal, avocat"

[12]            La première information que l'on retire à la lecture de la lettre, en objet, est que Dupuis est caution de Groupe Domus DGI Inc. et que c'est à titre de caution de l'entrepreneur qu'il demande l'arbitrage.

[13]           Force est de constater, à la suite des indications fournies par Me de Chantal, le procureur de Dupuis l'indemnitaire et non de Dupuis es qualités de caution de l'entrepreneur, qu'il y a eu usurpation équivoque d'identité pour justifier la demande d'arbitrage.

[14]           La demande d'arbitrage a été formée irrégulièrement.

[15]           En conséquence, le Tribunal d'arbitrage rejette la demande d'arbitrage et ordonne à La Garantie, en l'absence de l'entrepreneur, de débuter immédiatement les travaux ordonnés par l'administrateur de la garantie dans sa décision du 6 octobre 2006, conformément aux prescriptions du Règlement sur le PLAN DE GARANTIE DES BÂTIMENTS RÉSIDENTIELS NEUFS. La justification de cette ordonnance est donnée plus bas.

[16]           Par ailleurs, lors de l'audience préliminaire, les bénéficiaires ont produit une facture datée du 11 juillet 2006 de HSST Conseils Inc., spécialiste en hygiène industrielle et santé-sécurité, au montant de 1,409.06 $ et en demandent le remboursement. Cette facture concerne les services d'inspection préliminaire pour la présence des moisissures et la rédaction d'un rapport.

[17]           Le procureur de l'administrateur fait valoir l'article 124 du Règlement qui indique :

"L'arbitre doit statuer, s'il y a lieu, quant au quantum des frais raisonnables d'expertises pertinentes que l'administrateur doit rembourser au demandeur lorsque celui-ci a gain de cause total ou partiel."

et souligne que les bénéficiaires ne sont pas les demandeurs en arbitrage et qu'en conséquence, le Tribunal d'arbitrage ne doit pas donner droit à leur demande de remboursement.

[18]           Avec égards pour l'opinion contraire, le Tribunal d'arbitrage est d'opinion que le statut spécial de cet arbitrage commande une solution spéciale.

[19]           Aussi, compte tenu que cet arbitrage a été formé irrégulièrement et que, n'eut été de la formulation de la demande d'arbitrage, les bénéficiaires n'auraient pas eu à retenir les services d'un expert en salubrité microbienne et compte tenu qu'étant donné la rejet de la demande d'arbitrage, le Tribunal d'arbitrage n'aura pas l'opportunité de pouvoir évaluer toute la nécessité et la pertinence de la commande d'une expertise par les bénéficiaires et la justesse du rapport d'expertise : et compte tenu que la présente situation imposée aux bénéficiaires n'est pas juste à leur égard et qu'il n'est pas équitable qu'il aient à payer cette facture sans pouvoir en justifier l'utilité et compte tenu que les frais d'expertise engagés par les bénéficiaires apparaissent raisonnables, le Tribunal d'arbitrage estime que dans ces conditions, il ne serait ni raisonnable ni équitable que les bénéficiaires doivent assumer ces coûts. C'est pourquoi il s'autorise de l'article 116 du Règlement qui édicte :

"Un arbitre statue conformément aux règles de droit ; il fait aussi appel à l'équité lorsque les circonstances le justifient."

et est d'opinion qu'en l'instance, toutes les circonstances de ce dossier le justifient de décider en équité.

[20]           Le Tribunal d'arbitrage ordonne à l'administrateur de la garantie de payer aux bénéficiaires le montant de 1,409.06 $ au titre de remboursement des frais d'expert. Ce montant porte intérêt au taux légal majoré de l'indemnité additionnelle prévue à l'article 1619 du Code civil du Québec à compter de la date de la sentence arbitrale.

[21]           Quant aux frais d'arbitrage, l'article 123 du Règlement édicte que :

"Les coûts de l'arbitrage sont partagés à parts égales entre l'administrateur et l'entrepreneur lorsque ce dernier est le demandeur.

[22]           Et le Règlement institue un programme de garantie de toutes les obligations contractuelles de l'entrepreneur et l'administrateur de la garantie y est porté caution de ces obligations, solidairement avec l'entrepreneur.

[23]           Les articles pertinents du Règlement sont les suivants

6. Toute personne qui désire devenir un entrepreneur en bâtiments résidentiels neufs visés à l'article 2 doit adhérer, conformément aux dispositions de la section I du chapitre IV, à un plan qui garantit l'exécution des obligations légales et contractuelles prévues à l'article 7 et résultant d'un contrat conclu avec un bénéficiaire.

78. Pour adhérer à un plan de garantie et obtenir un certificat d'accréditation, une personne doit:

3° signer la convention d'adhésion fournie par l'administrateur et comportant les engagements énumérés à l'annexe Il;

ANNEXE II

(a. 78)

LISTE DES ENGAGEMENTS DE L'ENTREPRENEUR

L'entrepreneur s'engage:

 

19° à verser les frais exigibles pour son adhésion au plan ou son renouvellement, ceux pour chaque inspection requise par l'administrateur, le cas échéant, et les coûts exigibles pour l'arbitrage.

135.      La signature de l'entrepreneur doit être apposée sur la dernière page des doubles du contrat de garantie à la suite de toutes les stipulations.

136.      La signature apposée par l'entrepreneur lie l'administrateur.

74. Aux fins du présent règlement et, en l'absence ou à défaut de l'entrepreneur d'intervenir, l'administrateur doit assumer tous et chacun des engagements de l'entrepreneur dans le cadre du plan approuvé.

En conséquence, les frais de l'arbitrage doivent être supportés par l'administrateur de la garantie.

 

POUR CES MOTIFS, LE TRIBUNAL D'ARBITRAGE :

[25]      REJETTE la demande d'arbitrage.

[26]      ORDONNE à La Garantie des bâtiments résidentiels neufs Inc. de débuter immédiatement les travaux ordonnés par l'administrateur de la garantie dans sa décision du 6 octobre 2006, conformément aux prescriptions du Règlement sur le PLAN DE GARANTIE DES BÂTIMENTS RÉSIDENTIELS NEUFS.

[27]      ORDONNE à La Garantie des bâtiments résidentiels neufs Inc. de payer aux bénéficiaires le montant de 1,409.06 $ au titre de remboursement des frais d'expert. Ce montant porte intérêt au taux légal majoré de l'indemnité additionnelle prévue à l'article 1619 du Code civil du Québec à compter de la date de la sentence arbitrale.

[28]      LE TOUT avec les frais de l'arbitrage à la charge de La Garantie des bâtiments résidentiels neufs de I'APCHQ Inc..

            (s) Robert Masson

Me ROBERT MASSON, ing., arb.