ARBITRAGE

 

En vertu du Règlement sur le plan de garantie des bâtiments résidentiels neufs

(Décret 841-98 du 17 juin 1998, tel qu’amendé, c. B-1.1, r.0.2,

Loi sur le bâtiment, Lois refondues du Québec (L.R.Q.), c. B-1.1, Canada)

 

Groupe d’arbitrage Juste Décision – GAJD

 

 

ENTRE

S.D.C. 4217-4219 FABRE

 Bénéficiaire

 

Et

9299-5372 QUÉBEC INC.

  Entrepreneur

 

Et

GARANTIE CONSTRUCTION RÉSIDENTIELLE (GCR)

  Administrateur

 

No dossier / Garantie 

:

164594-6336

No dossier / GAJD 

:

20220811

No dossier / Arbitre 

:

35304-73

 

 

DÉCISION ARBITRALE

 

 

Arbitre

:

Me Pierre Brossoit

 

 

 

Pour le Bénéficiaire

:

Tony Belmonte

 

 

 

Pour l’Entrepreneur

:

Absent

 

 

 

Pour l’Administrateur 

:

Me Nancy Nantel

 

 

 

Date d’audience

:

Le 16 février 2024

 

 

 

Lieu

:

800 du Square Victoria, #4600, Montréal

 

Immeuble concerné 

:

4217-4219 rue Fabre, Montréal

 

 

 

Date de la décision

:

Le 4 avril 2024

 


LES PIÈCES

[1]                Les pièces produites par le Bénéficiaire sont les suivantes :

B-1:         

Photo de la cage d’escalier de secours SDC 4217-4219;

B-2:         

CV de l’ingénieur Monsieur Gino Lanni;

B-3:         

Expertise de Monsieur Gino Lanni;

B-4:         

En liasse, échanges courriels avec l’expert de l’entrepreneur, Monsieur Frédéric Tremblay, ingénieur.

[2]                L’Entrepreneur n’a produit aucune pièce.

[3]                Les pièces produites par l’Administrateur sont les suivantes :

A-1:         

Avis de fin des travaux signé le 10 novembre 2020;

A-2:         

Procès-verbal de la réunion du CA du syndicat des copropriétaires daté du 10 novembre 2020;

A-3:         

Rapport d’inspection des parties communes effectué par Charles Matos, inspecteur daté du 20 avril 2021, suivant la visite du 20 avril 2021;

A-4:         

Courriel du Bénéficiaire transmis à l’Entrepreneur le 7 juin 2021, incluant :

      Plan de colonnes;

      Lettre de la ville de Montréal datée du 31 mars 2021;

      Synthèse des points à corriger des parties communes;

      Rapport d’inspection daté du 20 avril 2021 (Voir A-3);

      Formulaire de dénonciation daté du 7 juin 2021;

A-5:         

Formulaire de réclamation signé par le Bénéficiaire le 24 juin 2021;

A-6:         

En liasse, le courriel de l’avis de 15 jours transmis par l’Administrateur à l’Entrepreneur et au Bénéficiaire le 1er juillet 2021, incluant :

      Formulaire de dénonciation daté du 7 juin 2021 (Voir A-4);

      Synthèse des points à corriger des parties communes (Voir A-4);

      Formulaire vierge de mesures à prendre par l’Entrepreneur (non inclus dans le cahier).

A-7:         

Courriel de l’Entrepreneur transmis aux parties le 12 juillet 2021 à la suite de la dénonciation, incluant :

      Formulaire de mesures à prendre par l’Entrepreneur le 12 juillet 2022;

A-8:         

Relevé du Registraire des entreprises du Québec concernant l’Entrepreneur;

A-9:         

Relevé du Registraire des entreprises du Québec concernant le S.D.C. 4217-4219 Fabre;

A-10:     

Attestation de conformité des assises des escaliers de Frédéric Tremblay, ingénieur datée du 11 mai 2022;

A-11:     

Courriel de GCR à l’Entrepreneur en date du 19 mai 2022, avisant que l’attestation de conformité du 11 mai 2022 est incomplète;

A-12:     

Attestation de conformité révisée avec photos datée du 25 août 2022;

A-13:     

La décision de l’Administrateur datée du 1er mars 2022;

A-14:     

En liasse, la décision supplémentaire de l’Administrateur datée du 17 octobre 2022, ainsi que les accusés réception de Postes Canada de l’Entrepreneur et du Bénéficiaire daté du ou vers le 21 octobre 2022;

A-15:     

En liasse, courriel de la notification de l’organisme d’arbitrage daté du 8 novembre 2022, incluant :

      Demande d’arbitrage du Bénéficiaire du 7 novembre 2022;

      Décision de l’Administrateur (Voir A-14);

      Lettre de notification de l’organisme d’arbitrage et nomination de l’arbitre datée du 8 novembre 2022;

A-16:     

Curriculum vitae de la conciliatrice Catherine Beausoleil-Carignan;

A-17:     

Lettre du 29 novembre 2023 de l’ingénieur Sohrab Saidi, Les Consultants Carpian inc.

LES TÉMOINS ENTENDUS LORS DE L’AUDIENCE

[4]                Pour le Bénéficiaire :

      Tony Belmonte

 

[5]                Pour l’Entrepreneur :

      N/A

[6]                Pour l’Administrateur :

      Catherine Beausoleil-Carignan, conciliatrice et technologue professionnelle

LES FAITS

[7]                Le 10 novembre 2020, l’Entrepreneur 9299-5373 Québec inc. (l’« Entrepreneur »), remet (A-1) au Syndicat de la copropriété 4217-4219 Fabre (le « Bénéficiaire ») un avis (A-1) de la fin de ses travaux en lien avec le projet de construction de l’immeuble sis au 4217-4219 rue Fabre, à Montréal (l’« Immeuble »).

[8]                Le 10 mai 2021, le Bénéficiaire dénonce (A-4) à l’Entrepreneur certains travaux à corriger à l’Immeuble.

[9]                Le 24 juin 2021, le Bénéficiaire présente à l’Administrateur une réclamation (A-5) pour que soient corrigés les items mentionnés à l’avis de dénonciation (A-4).

[10]           Le 1er mars 2022, suivant le défaut de l’Entrepreneur de corriger les malfaçons dénoncées par le Bénéficiaire, la conciliatrice et technologue professionnelle, Catherine Beausoleil-Carignan, rend pour l’Administrateur une décision (A-13) (la « Décision 1 ») sur les items de la réclamation (A-5) du Bénéficiaire.

[11]           À la Décision (A-13), Mme Beausoleil-Carignan accueille l’item 1 « Points d’ancrage de poteaux de soutien de l’escalier arrière » de la réclamation du Bénéficiaire et mentionne à ce sujet ce qui suit aux pages 7 et 8 de la Décision 1 (A-13) :

« Le syndicat de copropriété dénonce que les points d’ancrage des poteaux de soutien (poutres de soutien) des balcons arrières [sic] ne sont pas centré [sic] sur les sonotubes (piliers) (….).

Lors de la visite des lieux, le représentant du syndicat indique que selon le représentant de l’entrepreneur, M. Daniel Collin, un rapport a été produit par un ingénieur de Métautek qui atteste que l’installation actuelle de l’escalier arrière et de la fixation de ses appuis est conforme et sécuritaire.

Le représentant de l’entrepreneur, M. Collin, confirme qu’il a fait la demande d’un écrit d’un ingénieur de Métautek, manufacturier de l’escalier, et d’un dessin technique scellé par celui-ci attestant de la conformité de l’installation.

Il confirme que l’entrepreneur transmettra ces documents dès leur réception, proposition acceptée par le représentant du syndicat de copropriété. 

Suivant la visite des lieux, le représentant de l’entrepreneur, M. Robert Bohbot, mentionne que les démarches promises par M. Collin n’ont pas été effectuées et qu’après vérifications auprès de Métautek, ceux-ci procéderont à une visite des lieux.

Il précise que l’ingénieur de Métautek transmettra alors un écrit officiel et un dessin technique indiquant que la fixation des appuis de l’escalier est conforme.

Le 19 janvier 2022, M. Robert Bohbot transmet à l’administrateur des dessins techniques provenant de Métautek.

Dans ce document étampé par M. Frédéric Tremblay, ingénieur en structure du bâtiment, il y a une mention indiquant que les sonotubes n’auraient pas été positionnés correctement lors de leur installation et nous y retrouvons également des détails avec le descriptif de la méthode corrective à prévoir pour les colonnes de l’escalier arrière du bâtiment (voir annexe 5).

L’administrateur est d’avis que l’entrepreneur devra s’adjoindre des services professionnels qualifiés pour procéder aux travaux correctifs conformément aux recommandations de M. Tremblay, ing.

De plus, l’administrateur est d’avis que l’entrepreneur devra effectuer tous les travaux de finition nécessaires résultants [sic] des travaux correctifs, s’il y a lieu et remettre les lieux dans l’état original. » (nos soulignés)

[12]           Le 17 octobre 2022, Mme Beausoleil-Carignan rend une décision supplémentaire (la « Décision 2 ») concernant l’item 1 de la Décision 1 (A-13).

[13]           Mme Beausoleil-Carignan mentionne ce qui suit aux pages 5 et 6 de la Décision 2 (A-14) :

« Suivant l’émission de la décision de l’administrateur, l’entrepreneur informe la conciliatrice que les travaux correctifs ont déjà été réalisés par son sous-traitant (Métautek), mais qu’il reste toujours en attente de la lettre d’attestation de conformité de son ingénieur.

Le 11 mai 2022, l’entrepreneur transmet à l’administrateur une lettre d’attestation de conformité des assises des escaliers au 4217-4219 rue Fabre.

Le 19 mai 2022, après consultation de la lettre de conformité signée par l’ingénieur au dossier, l’administrateur juge que la lettre est incomplète, car celle-ci réfère à des photos qui ne sont pas en annexe de ladite lettre sur lequel l’ingénieur appuie son attestation de conformité.

La conciliatrice au dossier demande alors qu’une version rectifiée incluant les photos de référence lui soit acheminée et que seulement dans ce cas, elle puisse envisager de fermer le point concerné de la réclamation.

Toutefois, à la fin du délai de rigueur, l’entrepreneur n’a toujours pas transmis une version révisée à l’administrateur. Le point est alors transféré en prise en charge par l’administrateur.

En date du 25 août 2022, conformément à la demande de l’administrateur, Me Lacasse, avocat de l’entrepreneur, transmet à l’administrateur une lettre d’attestation révisée avec les photos demandées signées par M. Frédéric Tremblay, ingénieur de l’entrepreneur et ayant réalisé les plans du 16 décembre 2021.

Par le fait même, l’administrateur est d’avis que M. Tremblay engage sa responsabilité professionnelle quant aux fixations des appuis de l’escalier de secours arrière et considère cet aspect du point comme étant maintenant réglé.

Le point étant pris en charge, mais la demande de l’administrateur étant maintenant remplie par l’entrepreneur et en l’absence de malfaçon, vice caché ou vice majeur, l’administrateur n’a alors plus à intervenir pour ce point. » (nos soulignés)

[14]           Mme Beausoleil-Carignan conclut ensuite comme suit à la page 7 de la Décision 2 (A-14) :

« (…)

En effet, les informations reçues depuis la visite initiale des lieux nous ont permis de constater que les travaux qui ont été réalisés par l’entrepreneur respectent les normes en vigueur ainsi que les règles de l’art. Dans les circonstances, en l’absence de malfaçon, l’administrateur doit rejeter la réclamation du bénéficiaire à l’égard du point 1. »

[15]           Le 7 novembre 2022, le Bénéficiaire demande l’arbitrage de la Décision 2.

QUESTION EN LITIGE

[16]           Les travaux correctifs exécutés par l’Entrepreneur en lien à l’item 1 « Points d’ancrage de poteaux de soutien à l’escalier arrière » respectent-ils les normes de construction en vigueur et les règles de l’art?

MOTIFS DE LA DÉCISION

[17]           Le 7 décembre 2021, l’ingénieur Tremblay de Métautek confirme à ses dessins (en annexe à la pièce B-3) que « les sonotubes n’ont pas été positionnés correctement lors de l’installation ».

[18]           Pour corriger la malfaçon, l’ingénieur Tremblay détaille les travaux correctifs à exécuter (dessins colonne-001 et colonne-002 préparé par l’ingénieur Tremblay, en annexe à la pièce B-3).

[19]           Le 11 mai 2022, l’Entrepreneur transmet à l’Administrateur une lettre confirmant l’exécution des travaux correctifs des colonnes 001 et 002 selon la méthode de l’ingénieur Tremblay.

[20]           Le 25 août 2022, l’ingénieur Tremblay atteste que son analyse des photos des plaques d’assise des colonnes 001 et 002 lui permet de confirmer quelles ont été construites en conformité avec ses instructions (A-14, annexe III – lettre de l’ingénieur Tremblay).

[21]           Le 29 novembre 2023, suite à une demande de l’Entrepreneur, l’ingénieur Sohrab Saidi, de Les Consultants Carpian inc., confirme que les mesures correctives effectuées aux colonnes portant les balcons arrière, fondation et sonotube selon les dessins reçus de Métautek (dessins colonne-001 et colonne-002 préparé par l’ingénieur Tremblay, en annexe à la pièce B-3) sont acceptables et sécuritaires (A-17).  

[22]           Le Bénéficiaire soutient toutefois que les attestations de conformité des ingénieurs Tremblay et Saidi sont incomplètes et réfère le Tribunal au rapport de son expert, l’ingénieur Gino Lanni daté du 5 février 2023 (B-3) qui conclut comme suit :

« -Selon les plans, les colonnes qui sont déxaxés [sic] font l’objet d’une surcharge en flexion créé (sic) par l’excentricité des charges verticales. Donc, en ce moment dû à l’excentricité devrait [sic] tenu [sic] compte dans la vérification de chaque pilastre ou sonotube en béton ainsi que leur empattement. L’ingénieur devrait attester la conformité du sonotube et l’empattement au point de vue résistance et stabilité en considérant le moment additionnel venant de la charge excentrique.

-Concernant les travaux correctifs, on recommande une [sic] avis de conformité de l’ingénieur basé sur une inspection visuelle sur les lieux des quatre colonnes et non basé sur les photos. »

[23]           Les attestations des ingénieurs Tremblay et Saidi convainquent le Tribunal que les travaux correctifs exécutés respectent les normes de construction et sont sécuritaire et qu’il n’y a pas lieu d’effectuer des tests supplémentaires comme le suggère l’ingénieur Lanni. La demande d’arbitrage du Bénéficiaire est par conséquent rejetée.

[24]           Dans l’exercice de sa discrétion le Tribunal a tenu compte que le Bénéficiaire n’a constaté aucun désordre structural des escaliers arrière de l’Immeuble depuis les travaux correctifs exécutés par l’Entrepreneur au printemps 2022 et aucun indice ne laisse présager un désordre futur.

POUR CES MOTIFS, LE TRIBUNAL D’ARBITRAGE :

REJETTE la demande d’arbitrage du Bénéficiaire.

ORDONNE que les frais d’arbitrage soient payés en totalité par l’Administrateur.

RÉSERVE à la Garantie de Construction Résidentielle (GCR) ses droits à être indemnisée par l’Entrepreneur pour les coûts exigibles pour l’arbitrage selon la Convention d’adhésion prévue à l’article 78 du Règlement.

 

 

                    

Me Pierre Brossoit, arbitre

 

 

Les autorités soumises par l’Administrateur :

 

1-

Eliane Hecht Gaertner et La Garantie bâtiments résidentiels neufs de l’APCHQ inc. et Réseau Viva International Inc., APCHQ 132155-1 (09-362SP), GAMM 2009-13-002;

2-

Monique Patenaude et 9129-3464 Québec inc. et La Garantie bâtiments résidentiels neufs de l’APCHQ inc., APCHQ 131866-2, GAMM 2010-09-011;

3-

Guylaine Gaudet et Hugo Harton c. Le Groupe JSMD In. et La Garantie Abritat inc., Centre canadien d’arbitrage commercial, Me Roland-Yves Gagné, arbitre, 27 mai 2014.