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ARBITRAGE EN VERTU DU RÈGLEMENT SUR LE PLAN DE GARANTIE DES BÂTIMENTS RÉSIDENTIELS NEUFS (décret 841-98 du 17 juin 1998)
Organisme d'arbitrage autorisé par la Régie du bâtiment : Le Groupe d'arbitrage et de médiation sur mesure (GAMM)
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ENTRE : |
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Geneviève Vanasse et Scott McCambley |
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(ci-après les « bénéficiaires »)
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ET : |
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4176855 Canada inc. / Boulet construction |
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(ci-après l'« entrepreneur »)
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ET : |
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La Garantie Habitation du Québec inc. |
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(ci-après l'« administrateur »)
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No dossier QH : 68749 - 7021 No dossier GAMM : 2014-07-001
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SENTENCE ARBITRALE
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Arbitre : |
M. Claude Dupuis |
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Pour les bénéficiaires : |
Mme Geneviève Vanasse |
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Pour l'entrepreneur : |
M. André Bissonnette |
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Pour l'administrateur : |
Me François-Olivier Godin |
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Date d’audience : |
7 octobre 2014 |
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Lieu d’audience : |
Gatineau |
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Date de la sentence : |
22 octobre 2014 |
[1] Il s’agit ici d’un bâtiment semi-détaché, situé dans la région de Gatineau; les bénéficiaires actuels sont les deuxièmes acheteurs de ladite propriété.
[2] La réception de l’unité résidentielle s’est effectuée le 20 septembre 2010 par le premier acheteur; les bénéficiaires l’ont acquise le 5 août 2013.
[3] Le 28 janvier 2014, les bénéficiaires adressaient à l’administrateur une réclamation indiquant « qu’une bonne partie des bardeaux d’asphalte sur le cote nord de la toiture sont tombés. Plus spécifiquement, sur la partie très apique qui se retrouve au milieu des semi-détachés (entre 75 et 79 du Carnavalet). » [sic]
[4] À la suite de cette réclamation, l’administrateur a émis un rapport de conciliation en date du 25 avril 2014, dans lequel il conclut comme suit :
N’ayant pas été dénoncé par écrit à l’entrepreneur et à La Garantie Qualité Habitation dans l’année suivant la prise de possession de l’unité résidentielle par le premier acheteur, nous devons nous prononcer dans le cadre d’un vice de construction au sens de l’article 2118 du Code civil du Québec (article 6.4.2.5 du texte de garantie).
Or, selon ce qu’il nous a été possible de constater lors de notre inspection, ce point ne peut être considéré comme un vice de construction pouvant entraîner la perte partielle ou totale de l’unité résidentielle.
● Décision
Considérant nos observations;
Considérant que la situation dénoncée n’est pas un vice de construction;
Par conséquent, La Garantie Qualité Habitation ne peut reconnaître ce point dans le cadre de son mandat.
[5] Insatisfaits de cette décision, les bénéficiaires, en date du 18 mai 2014, adressaient au GAMM une demande d’arbitrage.
[6] En cours d’enquête, les personnes suivantes ont témoigné :
− Mme Geneviève Vanasse, bénéficiaire
− M. Scott McCambley, bénéficiaire
− M. Alain Charron, ing., expert retenu par les bénéficiaires
− M. André Bissonnette, entrepreneur
− M. Sylvain Lauzon, couvreur
− M. Michel Labelle, T.P., conciliateur pour l’administrateur
[7] L’expert retenu par les bénéficiaires, M. Charron, a procédé à la visite des lieux le 13 mai 2014; ce dernier avoue ne pas être monté sur la toiture, ni avoir inspecté le vide sous toit; il a pris des photos.
[8] L’ingénieur estime à sept le nombre de bardeaux fautifs.
[9] Contrairement à la conclusion de Qualité Habitation, M. Charron affirme qu’il y a ici perte de l’ouvrage, que la toiture est non conforme et qu’un remplacement complet s’avère nécessaire.
[10] Le témoin souligne que l’installation des bardeaux a été inadéquate quant au nombre de clous requis par unité pour une forte pente, soit six; en effet, une photo d’un bardeau décollé de marque IKO, prise par M. Labelle, conciliateur pour l’administrateur, montre la présence de trois clous seulement.
[11] M. Charron ne croit pas qu’une tempête survenue à l’automne 2013 puisse être la cause du décollement des bardeaux; si tel avait été le cas, le même phénomène aurait été constaté sur plusieurs autres maisons de la rue.
[12] Les bénéficiaires s’inquiètent pour le long terme; ils exigent donc un remplacement complet. Ils prétendent qu’il n’existe aucune preuve que l’ouvrage a été exécuté selon les normes.
[13] M. Labelle a procédé à son inspection le 9 avril 2014; il s’est rendu au vide sous toit; il n’a découvert aucune trace d’infiltration d’eau.
[14] Il a observé qu’un bardeau était détaché du toit; à cause de la pente sur la tourelle, M. Labelle constate que six clous par bardeau sont requis.
[15] Le témoin note que la garantie d’un an est échue.
[16] Or, la pente de la toiture hors tourelle ne nécessite pas la pose de six, mais plutôt de trois clous.
[17] La solution n’est sûrement pas de remplacer la toiture au complet; or, l’entrepreneur a offert de faire le remplacement nécessaire.
[18] L’observation d’un seul bardeau à trois clous n’est pas un signe qui laisse présager la perte totale ou partielle du bâtiment.
[19] Le procureur souligne que la garantie d’un an est écoulée; or, la présente situation ne s’apparente pas à un vice de construction au sens de l’article 2118 du Code civil du Québec.
[20] Se référant à l’article 12.5° du Règlement sur le plan de garantie des bâtiments résidentiels neufs, le procureur est d’avis que les conditions météorologiques à l’automne 2013 ont pu causer le décollement des bardeaux.
[21] Il rappelle que la toiture a été installée en 2010 et que la présente situation n’est survenue qu’en novembre 2013.
[22] L’expert des bénéficiaires n’a pas été en mesure de prouver qu’il existe un problème sur toute la toiture.
[23] À l’appui de son argumentation, le procureur a soumis la jurisprudence suivante :
− Syndicat de copropriété 8380 à 8390 de Buffalo c. Construction G. Carrier inc. (en faillite) et La Garantie Habitation du Québec inc., sentence arbitrale rendue le 25 juillet 2013 par Me Tibor Holländer (SORECONI).
− Justyna Lizotte et Robin Mongeau et Excellence Construction inc. et La Garantie des maisons neuves de l’APCHQ (« GMN »), sentence arbitrale rendue le 4 juillet 2012 par Me Jeffrey Edwards (GAMM).
[24] M. Sylvain Lauzon, couvreur, est le sous-traitant qui a procédé à la pose des bardeaux d’asphalte sur la toiture de la propriété.
[25] Il témoigne d’une tempête importante survenue le 1er novembre 2013, qui a causé des dommages à plusieurs toitures du secteur, dont certaines installées par d’autres entreprises que la sienne. Il a donc procédé à des réparations sur quelques toitures. Une fois la tempête passée, certains bardeaux deviennent fragilisés et peuvent battre au vent.
[26] Le témoin estime que les feuilles manquantes peuvent être remplacées avec très peu de différence dans la couleur.
[27] L’entrepreneur soutient qu’il n’existe aucune preuve de malfaçon et il rappelle qu’il a de bonne foi offert aux bénéficiaires d’effectuer les réparations.
[28] Le soussigné rappelle que la présente dénonciation a été soumise à l’administrateur dans la quatrième année de la garantie, où trouve application l’article 10.5° du plan relativement aux vices de construction.
10. La garantie d'un plan dans le cas de manquement de l'entrepreneur à ses obligations légales ou contractuelles après la réception du bâtiment doit couvrir:
[…]
5° la réparation des vices de conception, de construction ou de réalisation et des vices du sol, au sens de l'article 2118 du Code civil, qui apparaissent dans les 5 ans suivant la fin des travaux et dénoncés, par écrit, à l'entrepreneur et à l'administrateur dans un délai raisonnable, lequel ne peut excéder 6 mois de la découverte ou survenance du vice ou, en cas de vices ou de pertes graduelles, de leur première manifestation.
[29] Ce dernier article se réfère à la clause 2118 du Code civil du Québec, soit :
2118. À moins qu'ils ne puissent se dégager de leur responsabilité, l'entrepreneur, l'architecte et l'ingénieur qui ont, selon le cas, dirigé ou surveillé les travaux, et le sous-entrepreneur pour les travaux qu'il a exécutés, sont solidairement tenus de la perte de l'ouvrage qui survient dans les cinq ans qui suivent la fin des travaux, que la perte résulte d'un vice de conception, de construction ou de réalisation de l'ouvrage, ou, encore, d'un vice du sol.
[30] Est-ce qu’il y a eu perte de l’ouvrage dans le présent dossier?
[31] Or, le tribunal n’a reçu aucune preuve concluante comme quoi il existe une perte de l’ouvrage, totale ou partielle.
[32] L’expert des bénéficiaires n’est pas monté sur le toit et n’a pas visité le vide sous toit. Selon lui, sept bardeaux sont actuellement fautifs.
[33] Il existe une preuve prépondérante à l’effet qu’il n’y a pas d’infiltration d’eau.
[34] M. Charron, l’expert retenu par les bénéficiaires, appuie sa conclusion sur l’observation par M. Labelle d’un bardeau dont on ne connaît pas la provenance; ce bardeau provient-il de la tourelle dont la pente nécessite six clous par feuille ou du reste de la toiture dont la pente nécessite moins de clous? Nul ne le sait.
[35] Les photos prises par les parties ne permettent pas d’établir que les bardeaux arrachés ou les bardeaux restants ont été mal installés.
[36] M. Charron a témoigné qu’il ne croit pas que la tempête de novembre 2013 puisse être la cause du décollement; le cas échéant, le même phénomène aurait été observé sur plusieurs autres maisons de la rue.
[37] Or, M. Sylvain Lauzon, couvreur, a témoigné à l’effet qu’après cette tempête de 2013, il a été appelé à effectuer des réparations de toitures dans le secteur de la présente habitation; qui plus est, il a aussi noté des décollements sur des toitures qui avaient été installées par d’autres contracteurs.
[38] La preuve se rapportant à la mise en place des clous n’est pas concluante.
[39] La preuve se rapportant à la tempête du 1er novembre 2013 m’apparaît très logique et plausible, et a donc prépondérance sur celle des clous.
[40] POUR CES MOTIFS, la présente réclamation est REJETÉE.
[41] Conformément à l’article 22 du Règlement sur le plan de garantie des bâtiments résidentiels neufs, les bénéficiaires n’ayant pas eu gain de cause, le tribunal doit refuser toute demande de remboursement des frais d’expertise des bénéficiaires.
[42] Conformément à l’article 21 du Règlement sur le plan de garantie des bâtiments résidentiels neufs, l’arbitre départage les coûts du présent arbitrage comme suit : cent dollars (100,00 $) à la charge des bénéficiaires, le solde à la charge de l’administrateur.
BOUCHERVILLE, le 22 octobre 2014.
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__________________________________ Claude Dupuis, arbitre |