TRIBUNAL D’ARBITRAGE

ARBITRAGE

RÈGLEMENT SUR LE PLAN DE GARANTIE

DES BÂTIMENTS RÉSIDENTIELS NEUFS

(Chapitre B-1.1, r. 8)

 

Organisme d’arbitrage autorisé par la Régie du bâtiment du Québec:

CENTRE CANADIEN D’ARBITRAGE COMMERCIAL

CANADA

PROVINCE DE QUÉBEC

DISTRICT DE MONTRÉAL

No S17-122201-NP 

                                                                       Micheline Leduc

 

Bénéficiaire

 

c.

 

Les développements immobiliers BCG

 

L’Entrepreneur

                                                                      

Et :                                        

 

Raymond Chabot Administrateur Provisoire inc. ès qualités d’administrateur provisoire du plan de garantie de

La Garantie Abritat Inc.

 

L’Administrateur    

 

 

DÉCISION ARBITRALE

 

 

Arbitre :                                                         Roland-Yves Gagné

 

Pour le Bénéficiaire :                                  Madame Micheline Leduc

                                                                       Madame Alexandra Leduc-Aubin

 

Pour l’Entrepreneur :                                   Absent

           

Pour l’Administrateur :                                Me Marc Baillargeon

 

Date de l’audition :                                      5 mars 2018

 

Date de la décision :                                   21 mars 2018


 

Description des parties

 

Bénéficiaire :

 

Madame Micheline Leduc 

[...]

Montréal, Qc.

[...]

 

Entrepreneur :

 

Les développements immobiliers BCG

Adresse d’après CIDREQ

4837 rang des Soixante

Saint-Jean-Baptiste, Qc.

J0L 2B0

 

Administrateur:

 

Me Marc Baillargeon

Contentieux des garanties Abritat/GMN

7333 Place des Roseraies, 3ième étage

Anjou, Qc.

H1M 2X6

 

 


PIECES

 

À l’audience, l’Administrateur a produit les pièces suivantes[1] :

 

A-1 :    Déclaration de copropriété en date du 9 juin 2014;

 

A-2 :    Contrat préliminaire et contrat de garantie en date du 27 août 2014;

 

A-3 :    Formulaire d’inspection préréception;

 

A-4 :    Acte de vente en date du 24 octobre 2014;

 

A-5 :    Lettre de dénonciation en date du 10 septembre 2017;

 

A-6 :    Décision de l’administrateur et lettres en date du 27 novembre 2017;

 

A-7 :    Demande d’arbitrage en date du 10 janvier 2018 (note : nomination de l’arbitre soussigné à cette date, avec courriel de la Bénéficiaire du 3 janvier 2018)

 

Après l’audience, les parties ont soumis des courriels à la demande du Tribunal, que le soussigné cote T-1.


 

MANDAT ET JURIDICTION

 

[1]       Le Tribunal d’arbitrage est initialement saisi du dossier suite à une demande d’arbitrage par la Bénéficiaire, reçue par le Centre Canadien d’Arbitrage Commercial (CCAC) le 22 décembre 2017, et par la nomination de l’arbitre soussigné en date du 10 janvier 2018.

[2]       Aucune objection quant à la compétence du Tribunal d’arbitrage n’a été soulevée par les parties et la juridiction du Tribunal d’arbitrage est alors confirmée.

[3]       L’Entrepreneur était absent; il aurait fait l’objet d’une liquidation judiciaire.

 

LE DROIT

 

[4]       La Bénéficiaire a produit une demande d’arbitrage en vertu de l’Article 35 du Règlement sur le plan de garantie des bâtiments résidentiels neufs (ci-après nommé le Règlement) :

Le bénéficiaire ou l'entrepreneur, insatisfait d'une décision de l'administrateur, doit, pour que la garantie s'applique, soumettre le différend à l'arbitrage dans les 30 jours de la réception par poste recommandée de la décision de l'administrateur à moins que le bénéficiaire et l'entrepreneur ne s'entendent pour soumettre, dans ce même délai, le différend à un médiateur choisi sur une liste dressée par le ministre du Travail afin de tenter d'en arriver à une entente. Dans ce cas, le délai pour soumettre le différend à l'arbitrage est de 30 jours à compter de la réception par poste recommandée de l'avis du médiateur constatant l'échec total ou partiel de la médiation.

 

[5]       La Cour d’appel du Québec, dans trois arrêts, a jugé que ce Règlement était d’ordre public: 

[5.1]       en 2013 dans Consortium M.R. Canada Ltée c. Office municipal d’habitation de Montréal[2]:

[17] La juge avait raison de souligner les différences de vocation entre les recours arbitral et de droit commun.

 

[18] La procédure d'arbitrage expéditive prévue au Règlement pour réparer rapidement les malfaçons est, comme le note la juge, un complément aux garanties contre les vices cachés du Code civil. Régime d’ordre public, le Règlement vise notamment à obliger que les réparations des bâtiments résidentiels neufs soient effectuées rapidement par l'entrepreneur ou prises en charge par l'administrateur de la garantie.


 

[5.2]       en 2011 dans Garantie des bâtiments résidentiels neufs de l'APCHQ inc. c. MYL[3]:

[13]        Le Règlement est d'ordre public.  Il détermine notamment les dispositions essentielles du contrat de garantie en faveur des tiers.  Le contrat doit de plus être approuvé par la Régie du bâtiment (art. 76);

[5.3]       en 2004 dans La Garantie des Bâtiments Résidentiels Neufs de l’APCHQ Inc. c. Maryse Desindes et Yvan Larochelle, et René Blanchet mise en cause[4]

[11] Le Règlement est d’ordre public. Il pose les conditions applicables aux personnes morales qui aspirent à administrer un plan de garantie. Il fixe les modalités et les limites du plan de garantie ainsi que, pour ses dispositions essentielles, le contenu du contrat de garantie souscrit par les bénéficiaires de la garantie, en l’occurrence, les intimés.

[12] L’appelante est autorisée par la Régie du bâtiment du Québec (la Régie) à agir comme administrateur d’un plan de garantie approuvé. Elle s’oblige, dès lors, à cautionner les obligations légales et contractuelles des entrepreneurs généraux qui adhèrent à son plan de garantie.

[13] Toutefois, cette obligation de caution n’est ni illimitée ni inconditionnelle. Elle variera selon les circonstances factuelles […];

 

[15] La réclamation d’un bénéficiaire est soumise à une procédure impérative.

 

 

Version du Règlement applicable

[6]       Puisque la réception des travaux a eu lieu avant le 1er janvier 2015, c’est la version du Règlement d’avant le 1er janvier 2015 qui s’applique au présent arbitrage.

[7]       La question de la rétroactivité de la nouvelle version du Règlement a déjà été tranchée par plusieurs décisions arbitrales, le tout, pour les motifs déjà exprimés par le soussigné et par d’autres arbitres dans les décisions citées au support de ces motifs dans Nazco et Milian c. 9181-5712 Québec Inc. et Garantie des Bâtiments résidentiels neufs de l’APCHQ[5] et 3093-2313 Québec c. Létourneau et Bouchard et la Garantie des maisons neuves de l’APCHQ[6].


 

[8]       Selon la version de l’article 27 du Règlement applicable au présent arbitrage, l’Administrateur couvre le parachèvement, les vices et malfaçons apparents, les malfaçons existantes et non apparentes au moment de la réception, les vices cachés et les vices majeurs de la façon suivante :

 

27.  La garantie d'un plan dans le cas de manquement de l'entrepreneur à ses obligations légales ou contractuelles après la réception de la partie privative ou des parties communes doit couvrir:

 

  1°    le parachèvement des travaux dénoncés, par écrit:

 

  a)      par le bénéficiaire, au moment de la réception de la partie privative ou, tant que le bénéficiaire n'a pas emménagé, dans les 3 jours qui suivent la réception ;

 

  b)      par le professionnel du bâtiment, au moment de la réception des parties communes ;

 

  2°    la réparation des vices et malfaçons apparents visés à l'article 2111 du Code civil et dénoncés, par écrit, au moment de la réception ou, tant que le bénéficiaire n'a pas emménagé, dans les 3 jours qui suivent la réception;

 

  3°    la réparation des malfaçons existantes et non apparentes au moment de la réception et découvertes dans l'année qui suit la réception, visées aux articles 2113 et 2120 du Code civil et dénoncées, par écrit, à l'entrepreneur et à l'administrateur dans un délai raisonnable, lequel ne peut excéder 6 mois de la découverte des malfaçons;

 

  4°    la réparation des vices cachés au sens de l'article 1726 ou de l'article 2103 du Code civil qui sont découverts dans les 3 ans suivant la réception et dénoncés, par écrit, à l'entrepreneur et à l'administrateur dans un délai raisonnable, lequel ne peut excéder 6 mois de la découverte des vices cachés au sens de l'article 1739 du Code civil;

 

  5°    la réparation des vices de conception, de construction ou de réalisation et des vices du sol, au sens de l'article 2118 du Code civil, qui apparaissent dans les 5 ans suivant la fin des travaux des parties communes ou, lorsqu'il n'y a pas de parties communes faisant partie du bâtiment, de la partie privative et dénoncés, par écrit, à l'entrepreneur et à l'administrateur dans un délai raisonnable, lequel ne peut excéder 6 mois de la découverte ou survenance du vice ou, en cas de vices ou de pertes graduelles, de leur première manifestation.

 

 


DÉCISION

[9]       Le Tribunal d’arbitrage souligne que la réclamation de la Bénéficiaire avait été rejetée par l’Administrateur pour la seule raison que le délai de dénonciation de six mois de la découverte prévu à l’article 27 du Règlement n’avait pas été respecté.

[10]    Vu les faits et le droit et malgré les arguments soulevés par la Bénéficiaire, le Tribunal d’arbitrage n’a d’autres choix que de rejeter sa demande de renverser la décision de l’Administrateur du 27 novembre 2017, pour les motifs qui suivent.

[11]    Vu la conclusion du Tribunal d’arbitrage quant au délai de dénonciation, la présente décision ne porte que sur ce délai de dénonciation, à supposer que la problématique était couverte par le plan de garantie, et non sur le fond de la problématique, sans que cette affirmation puisse être interprétée dans un sens ou dans l’autre quant à la problématique elle-même[7].

[12]    La Bénéficiaire et sa fille, qui ont toutes les deux fait des études universitaires, ont témoigné avec franchise et bonne foi.

[13]    La Bénéficiaire a d’abord fait part de circonstances au moment de l’achat puis au cours des mois suivants (l’Entrepreneur a fait l’objet d’une liquidation judiciaire, des sous-traitants impayés se sont manifestés auprès d’elle et elle a dû les payer, l’agent d’immeuble était l’épouse du signataire pour l’Entrepreneur[8] du contrat de vente du 24 octobre 2014 (pièce A-4)) qui, d’après elle, démontraient que l’Entrepreneur, aurait mis de la pression sur elle pour acheter l’unité de copropriété rapidement car il était dans une situation précaire.

[14]    La réception de l’unité est du 21 octobre 2014 et la fille de la Bénéficiaire a emménagé peu après; quant à la Bénéficiaire, elle habite à plus de 100km des lieux.

[15]    Avant l’inspection/visite de préréception du 21 octobre, le frère de la Bénéficiaire, un architecte, effectue une visite des lieux et envoie par courriel ses remarques à sa sœur le 17 octobre, qui l’envoie le 19 octobre à l’agent d’immeuble chargé de vendre l’unité; nous y reviendrons.

[16]    La fille de la Bénéficiaire/occupante des lieux affirme que le premier été (2015) a été plus ou moins confortable et qu’elle n’était pas dans un « mode d’alarme ».

[17]    La fille de la Bénéficiaire a eu beaucoup de difficulté au cours de l’été 2015 pour avoir un retour d’appel du manufacturier qui a dit qu’il ne pouvait rien faire.

[18]    C’est au cours de l’été 2016 qu’un expert a été envoyé sur les lieux par « Chauffage Bertrand » et il a constaté qu’une conduite d’air était écrasée.

[19]    Il n’y a que trois branchements qui fonctionnent, deux vers sa chambre et un seul fonctionnel vers le salon qui aurait dû en compter deux (l’un est écrasé).

[20]    En 2016, on aurait réglé le problème de givrage en changeant un petit outil mais les autres problèmes demeurent (voir la dénonciation ci-après, paragraphe [38]).

[21]    La preuve démontre que ce n’est pas au cours de l’été 2015 que la Bénéficiaire a découvert la situation, comme l’Administrateur l’a jugé dans sa décision, mais au cours de l’été 2016 : en effet, ce n’est pas la Bénéficiaire qui habite sur les lieux mais sa fille, et cette dernière l’a annoncé à sa mère au cours de l’été 2016.

[22]    C’est un an plus tard en 2017, au cours d’une assemblée de copropriétaires, que la fille de la Bénéficiaire s’est fait dire qu’elle pouvait faire un recours contre l’Administrateur Abritat.

[23]    Elle a alors contacté sa mère pour qu’elle fasse la réclamation auprès de l’Administrateur, d’où la lettre de dénonciation du 10 septembre 2017 (voir ci-après).

[24]    Elle affirme que l’avoir su plus tôt, elle aurait contacté sa mère plus tôt pour que cette dernière fasse la réclamation auprès de l’Administrateur plus tôt.

 

Plaidoiries

 

[25]    En plus des circonstances entourant l’achat de l’immeuble (voir paragraphe [13] ci-haut), sur lesquelles elle a beaucoup insisté, la Bénéficiaire ajoute :

[25.1]    que sa fille considérait devoir faire des démarches auprès de l’Entrepreneur, le manufacturier, l’installateur et non auprès de l’Administrateur;

[25.2]    qu’avant d’avoir un dossier avec l’Administrateur, sa fille a pensé voir si elle pouvait régler le problème elle-même;

[25.3]    que ne sachant pas ce qui causait le problème sa fille a agi avec diligence;

[25.3.1]        elle a fait venir un représentant du manufacturier, qui est venu en 2015 et qui a dit qu’il ne pouvait rien faire;

[25.3.2]        elle a fait venir un expert envoyé par « chauffage Bertrand », installateur, en 2016;

[25.3.3]        elle ignorait que le problème était aussi gros avant l’été 2016;

[25.3.4]        que même si sa fille lui a dit à l’été 2016 qu’il y avait un problème, la Bénéficiaire s’est dit que le problème pourrait se résoudre de lui-même à l’été 2017;

25.3.4.1.           la Bénéficiaire admet toutefois que rien de précis pouvait l’amener à une telle conclusion, ajoutant « mais on ne sait jamais »;

[25.4]    qu’elle a bien reçu le contrat de garantie mais;

[25.4.1]        qu’elle a seulement « regardé à travers », elle n’a pas vérifié le contenu;

[25.4.2]        que l’agent d’immeuble aurait dû lui expliquer son contenu;

[25.4.3]        qu’il y a un manquement de la part de l’agent d’immeuble qui aurait dû lui dire en remettant le contrat de garantie « veuillez-vous assurer de comprendre vos recours »;

[25.4.4]        elle admet avoir reçu en 2014 une copie de la Brochure explicative sur le contenu de son plan de garantie, elle a vu qu’il y avait une section sur les délais mais elle n’avait pas fait la nuance entre délai de dénonciation après la découverture et délai pour entamer un recours;

[25.5]    que sa lettre de dénonciation du 10 septembre 2017 est sa première dénonciation écrite à l’Administrateur;

[25.6]    en résumé, elle est la victime de la mauvaise situation économique de l’Entrepreneur qui lui aurait fait pression pour bâcler l’achat et qui ne lui a pas expliqué le contenu de sa garantie.

[26]    L’Administrateur rappelle que la Bénéficiaire n’a pas effectué les bonnes démarches, soit celles prévues au Règlement.

[27]    Il cite les décisions suivantes :

[27.1]    Syndicat de la Copropriété 3670 De Rouen c. Les Développements MAS Inc. et Garantie Abritat[9];

[27.2]    Cloutier et Dion c. 9200-2344 Québec Inc. et Garantie Abritat[10].

 

Ordonnance intérimaire - La liste des points établie par le frère de la Bénéficiaire

 

[28]    À l’audience, la Bénéficiaire ne se souvient pas, et cela est crédible trois ans et demi après les faits, si elle a remis à l’Entrepreneur au moment de la réception des travaux, avant ou après, la liste des éléments mentionnés par son frère architecte après la visite de ce dernier, visite qui a eu lieu avant son achat; elle n’a pas cette liste avec elle.


 

[29]    Malgré le fait que la Bénéficiaire n’avait pas produit de liste avant l’audience, et qu’elle ne l’avait pas à l’audience, le Tribunal d’arbitrage,

[29.1]    tenant à s’assurer avant de rendre sa décision finale, si la Bénéficiaire n’avait pas dénoncé par écrit sous l’article 27 ce qu’elle réclame à l’audience;

[29.2]    considérant l’alinéa 2o de l’article 27 du Règlement, qui se lit ainsi :

27.  2°    la réparation des vices et malfaçons apparents visés à l'article 2111 du Code civil et dénoncés, par écrit, au moment de la réception ou, tant que le bénéficiaire n'a pas emménagé, dans les 3 jours qui suivent la réception;

 

[29.3]    considérant, entre autres;

[29.3.1]        que son rôle est de faire apparaître les faits et le droit;

[29.3.2]        que la décision de l’Administrateur portée en arbitrage concerne la déchéance du droit de la Bénéficiaire pour non-respect d’un délai de dénonciation;

[29.3.3]        que la Bénéficiaire a mentionné l’existence d’une liste de points écrite par un architecte envoyée par courriel mais ne se souvenait plus quand, alors qu’un courriel est normalement archivé à sa date dans un boîte de courriels;

[29.3.4]        l’absence de préjudice si l’Administrateur se voyait accorder un temps raisonnable de réponse;

[29.4]    a conclu qu’il devait faire appel à l’équité prévue à l’article 116 du Règlement et

[29.5]    a jugé pertinent d’ordonner proprio motu à la Bénéficiaire de vérifier si elle n’avait pas fait parvenir en 2014 cette liste, au contenu précis inconnu lors de l’audience, avant ou au moment de la réception ou dans les trois jours de l’emménagement.

[30]    Le Tribunal d’arbitrage a émis lors de l’audience du 5 mars 2018 l’Ordonnance intérimaire suivante :

ORDONNE à la Bénéficiaire de transférer par courriel au Tribunal d’arbitrage soussigné, en c.c. au procureur de l’Administrateur, tout courriel envoyé à l’Entrepreneur ou à qui ce soit d’autres en 2014 mentionnant l’air climatisé au plus tard, d’ici jeudi 8 mars 2018 à 16 :30.

[31]    L’Administrateur dans ses représentations écrites a soutenu que seules les malfaçons inscrites au formulaire de préréception étaient valides au sens du Règlement

Le désordre allégué, concernant le système de climatisation, s’il était perceptible lors de la réception de l’unité de condo en octobre 2014, devait obligatoirement être dénoncé, par écrit, sur le Formulaire d’inspection préréception (ci-après le «Formulaire»), qui nous vous le rappelons est d’utilisation impérative, conformément à l’article 33 du Règlement.

 

[32]    Ce qui suit est basé strictement sur la version applicable du Règlement.

[33]    Avec égards, d’une part, l’article 33 du Règlement parle d’une inspection à partir d’une liste préétablie par l’Administrateur et ne traite pas directement de la dénonciation qui elle, est prévue à l’article 27, comme l’ajoute d’ailleurs l’Administrateur dans ses représentations.

[34]    Toujours avec égards, d’autre part, de nombreuses décisions arbitrales, basées sur les faits particuliers des dossiers et sur la version applicable du Règlement à l’origine de ces décisions, ont conclu que le Bénéficiaire pouvait valablement avoir fait sa dénonciation lors de l’inspection préréception même si cette dénonciation n’avait pas été écrite telle quelle sur le formulaire auquel fait référence l’Administrateur dans ses représentations (voir le paragraphe [31]).

[35]    Vu les conclusions auxquelles il en arrive, soit que ce qui a été dénoncé en 2014 n’est pas ce qui a été dénoncé en 2017, l’élaboration de ce point (inscription sur le formulaire lui-même ou non) n’est ici qu’une question purement académique et ne sera donc pas élaboré dans la présente décision.

[36]    La preuve démontre que :

[36.1]    la Bénéficiaire a dénoncé par écrit le 19 octobre 2014 (voir les courriels T-1) à l’agent d’immeuble représentant l’Entrepreneur que la tuyauterie de la  climatisation n’était pas raccordée;

·         La tuyauterie de l’unité de climatisation ne semble pas entièrement complétée.  Il y a au moins 3 tuyaux qui devraient être raccordés; probablement au drainage dans la panne sous le chauffe-eau pour évacuer le condensat […]

[36.2]    le 21 octobre 2014, la Bénéficiaire avait cette liste entre les mains lors de l’inspection prévue selon l’article 33 du Règlement et elle en a discuté avec l’Entrepreneur qui avait déjà cette liste écrite et qui lui a dit qu’il allait s’en occuper.

[37]    La problématique qu’elle a découverte en 2016 lors d’une conversation téléphonique avec sa fille qui occupait les lieux, et dénoncée plus d’un an plus tard en 2017, n’est pas que la tuyauterie de la climatisation n’était pas raccordée.

[38]    Le 10 septembre 2017 (réception à la même date par l’Administrateur, pièce A-5), la Bénéficiaire dénonce par écrit ce qui suit à l’Entrepreneur et l’Administrateur, le lecteur peut lui-même comparer la dénonciation du 19 octobre 2014 (voir le paragraphe [36.1]) avec ce qui suit (nos caractères gras) :

(extraits) […] je demande à Les Développements immobiliers BCG inc. d’apporter les correctifs nécessaires au système d’air climatisé (AC) lequel présente des problèmes de fonctionnement et d’efficacité.

[…]

Été 2015 : premier diagnostic que l’AC ne fonctionne pas bien.

 

-       Alexandra a contacté la compagnie dont le nom figurait sur le système d’AC.

-       Un représente de cette compagnie s’est présenté sur les lieux et a soumis l’analyse suivante :

o   Selon la superficie du condo (environ 650 pi.c.a), il n’y aurait pas assez de sorties d’air. Il y en a quatre présentement.

o   Il faudrait que le diamètre des sorties d’air soit plus gros et que les sorties d’air soient mieux réparties OU idéalement, il devrait y en avoir au moins huit.

o   Il y a deux sorties d’air dans la chambre à coucher (espace d’environ 100 pi.ca.) dont une qui est très mal située (sur le mur et derrière une porte au lieu d’être au plafond;

o   Il y a deux sorties d’air dans le salon. À l’aide d’un escabeau, le représentant a été en mesure de constater qu’une des conduites d’air était écrasée, ce qui bloque la circulation d’air jusqu’à sa sortie.  (note du soussigné, les faits rapportés en caractères gras et italiques dans ce paragraphe se sont déroulés à l’été 2016)

o   L’appareil AC était givré (glace solide), ce qui n’est pas normal

-          Puisque le technicien qui a fait l’analyse ne représentait que le manufacturier de l’appareil et non la compagnie qui a fait l’installation du système, la responsabilité du vice d’installation ne relevait pas de lui.

-          Alexandra a par la suite tenté de contacter Chauffage Bertrand, la compagnie qui a installé le système d’AC.

o   Malgré ses nombreux messages laissés, Chauffage Bertrand a ignoré ses appels.

Automne 2015 et hiver :

-       Quelques appels ont été faits à Chauffage Bertrand - aucun retour d’appel.

Été 2016 :

-       Alexandra a contacté à nouveau Chauffage Bertrand. Même scénario qu’à l’été 2015 - aucun retour d’appel, suivi, etc.

-       Ce n’est qu’après beaucoup d’insistance de la part d’Alexandra que Chauffage Bertrand a finalement envoyé quelqu’un pour examiner la situation.

-       Cette personne n’était pas directement au service de la compagnie Chauffage Bertrand, probablement un expert indépendant mandaté par Chauffage Bertrand.

-       Voici son analyse de la situation :

o   il confirme qu’il n’y a pas de sortie d’air considérant la superficie du condo.

o   Il propose de changer le filtre pour essayer d’améliorer la situation sachant que cela ne réglerait pas le problème au complet. Le filtre a été changé mais cela n’a pas eu les résultats escomptés. Lorsqu’Alexandra a repris contact avec le technicien, il lui a dit de tout simplement l’enlever.

o   Environ un mois plus tard, le technicien revient et ajoute une petite pièce à l’appareil A/C dont la fonction est de réguler le problème de givrage (c.-à-d. le système arrête automatiquement lorsqu’il y a du givrage au lieu de devoir l’arrêter manuellement).

     Été 2017 :

-       Depuis l’installation en 2016 de la petite pièce sur l’appareil A/C, le problème du givrage semble être plus ou moins contrôlé mais le problème de circulation d’air climatisée demeure entier.

o   Conduites d’air écrasées; pas assez de sorties d’air; circulation d’air inadéquate.

[39]    Dans sa décision du 27 novembre 2017 (pièce A-6), l’Administrateur écrit :

[…] Quoiqu’il en soit, l’administrateur convient d’une problématique mais constate cependant que la situation fut découverte pour la première fois au cours de l’été 2015 en ce qui a trait à la ventilation et au cours de l’automne 2015 pour l’échangeur d’air, la situation ne lui fut dénoncée par écrit pour la première fois que le 10 septembre 2017, soit plus de vingt-quatre (24) mois après la première découverte.

ANALYSE ET DÉCISION (point 1)

Le bénéficiaire a déclaré avoir découvert la situation décrite au point 1 au cours de l’été 2015. Quant à l’administrateur, il fut informé par écrit de l’existence de cette situation pour la première fois le 10 septembre 2017.

En ce qui a trait au délai de dénonciation, les paragraphes 3e, 4e oui 5e de l’article 10 ou 27 du Règlement, selon le type de bâtiment, stipule que les malfaçons, les vices cachés ou les vices majeurs, selon le cas, doivent être dénoncés par écrit à l’entrepreneur.

[40]    Vu la preuve, vu le droit applicable, le Tribunal d’arbitrage conclut que la dénonciation de 2014 qu’il reste à brancher la tuyauterie de la climatisation n’était pas la dénonciation du 10 septembre 2017.

[41]    Décider autrement serait de changer les termes de l’article 27 du Règlement que trois arrêts de la Cour d’appel ont jugé être d’ordre public.

[42]    Considérant la décision de l’Administrateur à l’effet que la dénonciation avait été faite plus de six mois après la découverte du problème, la Bénéficiaire avait le fardeau de prouver que sa dénonciation était effectuée au plus tard dans les six mois de la découverte, et elle n’a pas fait cette preuve.

[43]    La preuve démontre qu’elle a découvert la problématique à l’été 2016 et qu’elle a dénoncé la problématique le 10 septembre 2017, après le délai de six mois.

[44]    Comme le soussigné le rappelait dans l’affaire Abdellatif Bensari c. Les Constructions M.C. et La Garantie Qualité Habitation[11], le délai de dénonciation de six mois est un délai de déchéance (l’article 10 cité est l’équivalent de l’article 27 pour les maisons non détenues en condo):

[64] […] l’état du droit à cet effet est clair : le délai de six mois prévu à l’article 10 du Règlement est un délai de rigueur et de déchéance.

[65] Dans l’affaire Abderrahim Moustaine et al. c. Brunelle Entrepreneur Inc. et La Garantie des Bâtiments Résidentiels Neufs de L’APCHQ (Soreconi 070424001) du 9 mai 2008, Me Jean Philippe Ewart, arbitre, écrit :

[31] Le Tribunal est d’avis […] que le délai maximum de six (6) mois prévu aux alinéas 3e, 4e et 5e respectivement de l’article 10 (…) du Règlement est de rigueur et de déchéance et ne peut conséquemment être sujet à extension.

[36] En résumé, la dénonciation prévue à l’article 10 du Règlement se doit d’être par écrit, est impérative et essentielle, le délai de six mois prévu au même article emporte et est un délai de déchéance, et si ce délai n’est pas respecté, le droit des Bénéficiaires à la couverture du plan de garantie visé et à le (sic!) droit à l’arbitrage qui peut en découler sont respectivement éteints, forclos et ne peuvent être exercés

[66] Baudouin explique ce qu’est un délai de déchéance[12]

Dans le cas des délais de déchéance, la créance est absolument éteinte après l'expiration du temps fixé. Le tribunal est alors tenu de suppléer d'office au moyen en résultant (art. 2878 C.c.). Dans ces cas donc, ce n'est plus seulement l'action en justice qui est éteinte, mais bien le droit lui-même.

[45]    L’avis doit être donné par écrit dans les délais fixés par le Règlement à l’Administrateur qui cautionne les obligations contractuelles de l’Entrepreneur pour qu’il puisse intervenir à brève échéance.

[46]    Malgré tous les pouvoirs qui sont dévolus à l’arbitre en vertu du Règlement et selon la jurisprudence à cet effet[13], le Tribunal d’arbitrage ne peut pas faire appel à l’équité pour faire réapparaître un droit déchu qui n’existe plus, il ne s’agit pas ici de suppléer au silence du Règlement ou l’interpréter de manière plus favorable à une partie, malgré toute la sympathie qu’il pourrait avoir envers le Bénéficiaire.

[47]    Dans l’affaire Garantie des bâtiments résidentiels neufs de l'APCHQ inc. c. Dupuis[14], l’honorable juge Michèle Monast de la Cour supérieure écrit :

[75] Il est acquis au débat que l'arbitre doit trancher le litige suivant les règles de droit et qu'il doit tenir compte de la preuve déposée devant lui. Il doit interpréter les dispositions du Règlement et les appliquer au cas qui lui est soumis. Il peut cependant faire appel aux règles de l'équité lorsque les circonstances le justifient. Cela signifie qu'il peut suppléer au silence du règlement ou l'interpréter de manière plus favorable à une partie.

 

[76] L'équité est un concept qui fait référence aux notions d'égalité, de justice et d'impartialité qui sont les fondements de la justice naturelle. Dans certains cas, l'application littérale des règles de droit peut entraîner une injustice. Le recours à l'équité permet, dans certains cas, de remédier à cette situation.

 

[77] Les propos tenus par la professeure Raymonde Crête dans un article récent permettent de mieux saisir la nature et les limites du pouvoir de l'arbitre en matière d'équité:

« PRELIMINARY REMARKS ON THE CONCEPT OF EQUITY

7. For a better understanding of the scope of the equitable remedies that are provided by the legislation, it is important to shed some light on the foundational concept of equity.7 According to its first accepted understanding, equity refers to the notions of equality, fairness, and impartiality, which are associated with the standards of natural justice.8 In this broad sense, the concept of "equity" encompasses all the institutions and rules of law designed to attain the objective of justice.

8. In certain circumstances, the application of the rules of substantive law can, due to their general nature, result in injustice. They are sometimes incapable of capturing the complex reality of life in society.9 For the purposes of preventing injustice, "equity", in a more restricted sense, leads judicial authorities to override or supplement the strict rules of law by taking into account the particular circumstances of each case.10 One author refers to these overriding and supplementary functions of "equity" in the following terms: "an opposition to the rigidity of the law, of the 'strict law'".11

[…] 11. […] As mentioned by Philippe Jestaz, the auxiliary function of equity is possible, "when the legislator refuses to give a precise command and leaves in the hands of the judges the task of preceding individual treatment (within certain legal limits).» [CRETE, Raymonde: «Dealing with Unfairness: Some observations on the Role of the Courts in Designing a Fair Solution», (2003) 36 U.B.C.L. Rev.519-540].

 

Autres arguments de la Bénéficiaire

 

[48]    La Bénéficiaire affirme ne pas avoir lu le contrat de garantie, ni la brochure explicative envoyée par l’Administrateur du Plan de Garantie, sinon « à travers », et que l’agent d’immeuble ne lui a pas expliqué ses recours en vertu du contrat de garantie.

[49]    L’absence de lecture pour un Bénéficiaire n’est pas une cause d’exemption des dispositions impératives du Règlement, ni le fait que l’agent d’immeuble qui lui a remis le contrat de garantie ne lui aurait pas expliqué son contenu.

[50]    Bien que des objectifs de protection du consommateur sous-tendent le Règlement adopté par le Législateur, il appartenait à ce dernier d’ajouter au Règlement un « cas expressément prévu par la Loi » comme le stipule l’article 1405 du Code civil :

1405.  Outre les cas expressément prévus par la loi, la lésion ne vicie le consentement qu'à l'égard des mineurs et des majeurs protégés.

 

[51]    Ajoutons que la Cour d’appel dans Desindes[15] a déjà décidé que le contrat de garantie n’était pas un contrat d’adhésion mais un contrat réglementé :

[35]           L’arbitre a ordonné le remboursement d’acomptes limités à 30 000 $ selon ce qu’autorisent le sous-paragraphe 9 20 a) et le paragraphe 13 1o du Règlement. Le juge de première instance a plutôt ordonné à l’appelante de défrayer le coût de parachèvement de tous les travaux, sans limite aucune, […]

[37]           Mon désaccord se situe également au niveau de l’importance que le juge accorde au contrat de garantie […]. Le juge y voit (paragraphe 31, note 26 et paragraphe 37) un contrat d’adhésion qui l’autorise, par application de la règle contenue à l’article 1432 C.c.Q., à laisser de côté les limites de couverture au motif qu’il peut interpréter le contrat « dans tous les cas en faveur de l’adhérent ».

[38]           Avec égards pour l’opinion contraire, je suis d’avis que l’article 1432 C.c.Q. ne s’applique pas en l’espèce. Les droits des parties et les difficultés d’interprétation susceptibles de se poser, le cas échéant, ne découlent pas du contrat mais du Règlement lui-même, ce qui exclut le recours à une règle d’interprétation qui ne s’applique qu’à certains types de contrats. […]

[39]           Au mieux, nous sommes en présence d’un contrat réglementé, c’est-à-dire d’un contrat dont le contenu est imposé par le législateur et non par l’appelante, elle aussi obligée de se plier aux volontés du législateur et de faire approuver son plan par la Régie. […]  

 

[52]    Dans l’affaire Daigle c. Le Marquis Concept et La Garantie Habitation du Québec[16], notre collègue, Claude Dupuis, arbitre, écrit :

[73] […] il s’agit d’un règlement d’ordre public, et tout consommateur le moindrement averti doit s’informer lors de l’achat auprès d’un fournisseur des conditions minimales de la garantie du produit. […]

 

[53]    D’autre part, qu’un vice se manifeste seulement pendant une saison sur quatre au cours d’une année ne change pas le contenu de la version applicable du Règlement qui n’a pas prévu d’interruption de délai de dénonciation en cas de changement de saison.

[54]    Dans l’affaire Evangelista et Lamolinara c. Construction Trilikon et la Garantie Abritat[17] entendu par le soussigné, il s’agissait de glace qui ne se manifestait que l’hiver :

[160] Le Règlement à l’article 10 dit très clairement que le délai de dénonciation est de six mois de la découverte, les Bénéficiaires ont attendu trois hivers avant de le dénoncer par écrit à l’Administrateur et à l’Entrepreneur.

[55]    Quant aux circonstances au moment de l’achat et ennuis par la suite, cités au paragraphe [13] ci-haut, le Tribunal d’arbitrage rappelle qu’il doit décider ici si la Bénéficiaire a respecté le délai de dénonciation de six mois de la découverte prescrit au Règlement sur le système de climatisation.

[56]    Les circonstances et les ennuis allégués n’ont pas de pertinence sur le non-respect du délai de dénonciation, même si le mot « pertinence » doit avoir une interprétation large[18].

[57]    D’autre part, le Tribunal d’arbitrage soussigné comprend bien que la Bénéficiaire vivait à plus de 100 km de l’unité de copropriété; cependant, elle a tout de même dénoncé hors le délai de six mois.

[58]    Dans l’affaire Domaine c. Construction Robert Garceau Inc. et la Garantie Qualité Habitation[19], notre collègue Me Michel A. Jeanniot, arbitre, écrit:

[58]    Le Tribunal comprend qu’il ne s’agit pas ici de plaider sa propre turpitude mais, l’ignorance du délai de six (6) mois prévu aux articles 3.2, 3.3 et/ou 3.4 du contrat de garantie et/ou de l’article 10 du Règlement ainsi que la bonne foi des parties ne constituent pas des éléments en droit qui habilitent le décideur à faire fi d’un délai de déchéance. Tout motif, quel qu’il soit, (si noble soit-il) ne peut reposer sur un fondement juridique puisque même si la preuve révèle qu’il pouvait s’agir de l’erreur ou de la négligence d’un tiers mandataire et/ou conseiller, il s’agit ici d’un délai de déchéance; sitôt le calendrier constaté, l’arbitre est dans l’impossibilité d’agir. (nos soulignés)

[59]    Le sens d’autonomie de la fille de la Bénéficiaire/occupante des lieux pour effectuer les réparations en appelant le manufacturier, l’installateur ou autres (mais pas l’Administrateur), ne change pas les termes du Règlement quant à l’obligation de la Bénéficiaire quant au délai de dénonciation à l’Administrateur de six mois de la découverte.


 

RÉSERVE DES DROITS

 

[60]    L’article 11 de la Loi sur le bâtiment[20] stipule :

11. La présente loi n'a pas pour effet de limiter les obligations autrement imposées à une personne visée par la présente loi.

[61]    Le Tribunal rappelle la décision de la Cour supérieure dans l’affaire Garantie d'habitation du Québec c. Jeanniot[21]:

[63] Il est clair des dispositions de la Loi et du Règlement que la garantie réglementaire ne remplace pas le régime légal de responsabilité de l'entrepreneur prévu au Code civil du Québec. Il est clair également que la garantie prévue à la Loi et au Règlement ne couvre pas l'ensemble des droits que possède un bénéficiaire, notamment en vertu des dispositions du Code civil du Québec et que les recours civils sont toujours disponibles aux parties au contrat.

[62]    Le Tribunal d’arbitrage réservera les droits de la Bénéficiaire de porter ses prétentions devant les tribunaux de droit commun contre toute personne autre que l’Administrateur du Plan de Garantie, le tout, sujet aux règles de la prescription civile et de droit commun, sans que cette affirmation ne puisse être interprétée comme étant une opinion, dans un sens ou dans l’autre, sur le bien-fondé de la réclamation du Bénéficiaire quant au fond.

 

FRAIS

 

[63]    L’article 37 du Règlement stipule : 

Les coûts de l'arbitrage sont partagés à parts égales entre l'administrateur et l'entrepreneur lorsque ce dernier est le demandeur.

Lorsque le demandeur est le bénéficiaire, ces coûts sont à la charge de l'administrateur à moins que le bénéficiaire n'obtienne gain de cause sur aucun des aspects de sa réclamation, auquel cas l'arbitre départage ces coûts.

 

[64]    Chaque cas est un cas d’espèce.

[65]    Vu tous les faits, vu que la demande d’arbitrage fut produite de bonne foi, vu l’article 116 du Règlement, le Tribunal départage les frais d’arbitrage de la façon suivante, soit $50.00 pour le Bénéficiaire et le solde à l’Administrateur.


 

[66]    PAR CES MOTIFS, LE TRIBUNAL D’ARBITRAGE

 

[67]    REJETTE la demande de la Bénéficiaire, MAINTIENT la décision de l’Administrateur du 27 novembre 2017 Et RÉSERVE le droit de la Bénéficiaire, à supposer qu’elle ait un recours fondé, de porter devant les tribunaux de droit commun, sa prétention quant à sa réclamation ainsi que de rechercher les correctifs qu’elle réclame contre toute personne autre que l’Administrateur, sujet aux règles de droit commun et de la prescription civile;

 

[68]    ORDONNE au Bénéficiaire à payer au CCAC la somme de $50.00 pour sa part des frais d’arbitrage.

 

[69]    ORDONNE à l'Administrateur du Plan de Garantie à payer les frais d'arbitrage encourus dans le présent dossier moins la somme de $50.00.

Montréal, le 21 mars 2018

__________________________

ROLAND-YVES GAGNÉ

Arbitre / CCAC

 

Autorités citées :

 

Consortium M.R. Canada Ltée c. Office municipal d’habitation de Montréal 2013 QCCA 1211.

 

Garantie des bâtiments résidentiels neufs de l'APCHQ inc. c. MYL, 2011 QCCA 56.

 

La Garantie des Bâtiments Résidentiels Neufs de l’APCHQ Inc. c. Maryse Desindes et Yvan Larochelle, et René Blanchet mise en cause 2004 CanLII 47872 (QC C.A.).

 

Garantie des bâtiments résidentiels neufs de l'APCHQ inc. c. Dupuis 2007 QCCS 4701 (Michèle Monast, J.C.S.).

 

Nazco et Milian c. 9181-5712 Québec Inc. et Garantie des Bâtiments résidentiels neufs de l’APCHQ CCAC S16-011902-NP, 8 avril 2016, MRoland-Yves Gagné, arbitre.

3093-2313 Québec c. Létourneau et Bouchard et la Garantie des maisons neuves de l’APCHQ CCAC S15-022401-NP, Décision rectifiée du 12 novembre 2015, Me Roland-Yves Gagné, arbitre.

Syndicat de la Copropriété 3670 De Rouen c. Les Développements MAS Inc. et Garantie Abritat CCAC S17-041201-NP, 13 octobre 2017, Me Roland-Yves Gagné, arbitre.

Cloutier et Dion c. 9200-2344 Québec Inc. et Garantie Abritat CCAC S17-070301-NP, 20 décembre 2017, Yves Fournier, arbitre.

Daigle c. Le Marquis Concept et La Garantie Habitation du Québec GAMM 2012-08-033, 17 juin 2013, Claude Dupuis, arbitre.

 

Evangelista et Lamolinara c. Construction Trilikon et la Garantie Abritat CCAC S15-101101-NP, Me Roland-Yves Gagné, arbitre, 19 avril 2017.

La Corporation McKesson Canada c. Martin Losier 500-09-014166-045 (Qc. C.A.). 

Domaine c. Construction Robert Garceau Inc. et la Garantie Qualité Habitation CCAC S13-091201-NP, 16 juillet 2014, Me Michel A. Jeanniot, arbitre.

Abdellatif Bensari c. Les Constructions M.C. et La Garantie Qualité Habitation, SORECONI 100508001, 26 novembre 2010, Me Roland-Yves Gagné, arbitre.

 

Abderrahim Moustaine et al. c. Brunelle Entrepreneur Inc. et La Garantie des Bâtiments Résidentiels Neufs de L’APCHQ, Soreconi 070424001, 9 mai 2008, Me Jean Philippe Ewart, arbitre.

 

Jean-Louis Baudouin, La prescription civile, 7e édition, 2007, Éditions Yvon Blais, Cowansville p. 1219, I-1447.

 

Domaine c. Construction Robert Garceau Inc. et la Garantie Qualité Habitation, CCAC S13-091201-NP, 16 juillet 2014, Me Michel A. Jeanniot, arbitre.

Garantie habitation du Québec inc. c. Lebire J.E. 2002-1514 (Hon. juge Jacques Dufresne, J.C.S.).

Garantie des bâtiments résidentiels neufs de l’APCHQ Inc. c. Décarie 2006 QCCS 907 (Hon. juge Gilles Hébert, J.C.S.).

Garantie des bâtiments résidentiels neufs de l'APCHQ inc. c. Dupuis 2007 QCCS 4701 (Hon. Michèle Monast, J.C.S.).

CRETE, Raymonde: «Dealing with Unfairness: Some observations on the Role of the Courts in Designing a Fair Solution», (2003) 36 U.B.C.L. Rev.519-540.

Garantie d'habitation du Québec c. Jeanniot 2009 QCCS 909 (Hon. Johanne Mainville, J.C.S.).

 



[1] Cette liste ne correspond pas à la liste de pièces de l’Administrateur au début de son cahier.

[2] 12 juillet 2013, Cour d’appel, 2013 QCCA 1211.

[3] 2011 QCCA 56.

[4] AZ-50285725, 15 décembre 2004, J.E. 2005-132 (C.A.).

[5] CCAC S16-011902-NP, 8 avril 2016, Me Roland-Yves Gagné, arbitre, paragraphes [128] et seq.

[6] CCAC S15-022401-NP Décision rectifiée du 12 novembre 2015, Me Roland-Yves Gagné, arbitre, paragraphes [446] à [467]; voir aussi au même effet, entre autres, Syndicat des Copropriétaires Lot 3 977 437 c. Gestion Mikalin et La Garantie Abritat GAMM 2013-15-011, 24 avril 2015, Jean Morissette, arbitre; Rénovation Michel Robert Inc. c. SDC du 325 et 327 Ovila-Rhéaume et La Garantie des bâtiments résidentiels neufs de l’APCHQ CCAC S16-051602-NP, 23 mars 2017, Me Michel A. Jeanniot, arbitre.

[7] Le soussigné aurait pu rendre une ordonnance quant au fond, si sa conclusion avait été autre : La Garantie des Bâtiments Résidentiels Neufs de l’APCHQ Inc. c. Maryse Desindes et Yvan Larochelle, et René Blanchet mise en cause (cité au renvoi 4) : [33]   Je conclus de ce qui précède que le différend n’est pas fonction de la seule réclamation des bénéficiaires; qu’il est le produit de l’insatisfaction du bénéficiaire ou de l’entrepreneur face à la décision prise par l’administrateur à la suite de son investigation du conflit entre le bénéficiaire et son entrepreneur[11], et que ce différend, s’il n’est pas résolu par entente (avec ou sans l’intervention d’un médiateur), le sera par la décision d’un arbitre qui est finale et sans appel et qui lie le bénéficiaire, son ancien entrepreneur et l’administrateur du plan de garantie[12]; enfin, que la décision arbitrale prendra en compte toutes les modalités et respectera toutes les limites et exclusions que prévoit le Règlement. (nos soulignés).

[8] Pendant son délibéré, le soussigné a pu sur internet faire corroborer l’état matrimonial allégué par la Bénéficiaire, y retrouvant sans difficulté un document officiel à l’effet qu’un couple portant les mêmes noms s’était effectivement légalement marié bien avant la vente.

 

[9] CCAC S17-041201-NP, 13 octobre 2017, Me Roland-Yves Gagné, arbitre.

[10] CCAC S17-070301-NP, 20 décembre 2017, Yves Fournier, arbitre.

[11] Soreconi 100508001, 26 novembre 2010, Me Roland-Yves Gagné, arbitre.

[12] La prescription civile, 7e édition, 2007, Éditions Yvon Blais, Cowansville, p. 1219, I-1447.

[13] Voir, par exemple, Garantie habitation du Québec inc. c. Lebire J.E. 2002-1514 (Hon. juge Jacques Dufresne) : 97. L'article 116 du Règlement est une autre manifestation de la volonté du législateur d'accorder une grande latitude à l'Arbitre appelé à décider d'un différend : «Un arbitre statue conformément aux règles de droit ; il fait aussi appel à l'équité lorsque les circonstances le justifient.»
98. Il n'est pas fréquent de retrouver une disposition expresse autorisant un décideur à faire appel à l'équité. Cette mention est significative d'une volonté de mettre en place, au bénéfice des parties visées par le Règlement, un mécanisme de règlement des différends qui soit efficace. ;
Garantie des bâtiments résidentiels neufs de l’APCHQ Inc. c. Décarie 2006 QCCS 907 (Hon. juge Gilles Hébert) : [26] En équité et à l'égard de Charles qui s'est toujours conformé aux directives de l'APCHQ, l'arbitre juge bon de rappeler à la Garantie que l'entrepreneur a souscrit un engagement qui a causé problème et qui peut encore causer problème et il rappelle à la Garantie son devoir moral d'intervenir. [27] Le but de la Loi sur le bâtiment et du Règlement sur le plan de garantie des bâtiments résidentiels neufs est d'assurer que l'acquéreur d'une maison neuve auprès d'un entrepreneur faisant partie de l'APCHQ a une assurance que la maison neuve sera en bon état. Il serait naïf de croire que le prix de vente établi par un entrepreneur ne tient pas compte des coûts reliés au contrat de Garantie. [28] Le tribunal conclut que l'arbitre a exercé une certaine discrétion en faisant appel à l'équité comme la loi le lui permet et il n'a pas excédé sa juridiction.

[14] 2007 QCCS 4701.

[15] Voir renvoi 4 ci-haut.

[16] GAMM 2012-08-033, 17 juin 2013.

[17] CCAC S15-101101-NP, Me Roland-Yves Gagné, arbitre, 19 avril 2017.

[18] Dans l’arrêt La Corporation McKesson Canada c. Martin Losier, la Cour d’appel note : Et, de fait, si l’on consulte les décisions de notre Cour auxquelles l’auteur fait ici référence, on constate que la Cour d’appel s’est souvent prononcée en faveur d’une interprétation large de la notion de pertinence, sans d’ailleurs évoquer l’effet préjudiciable des preuves ou des allégations attaquées[7]. 500-09-014166-045  Renvoi [7] : Ainsi, voir St-Basile-le-Grand (Ville de) c. Flibotte, J.E. 94-868 (C.A.), Promo Marketing Canada inc. c. Banque Toronto-Dominion, J.E. 94-65 (C.A.), Bertucci c. Banque Toronto-Dominion, J.E. 94-1347 (C.A.), Restaurants Mikes c. Restos Van-Mil inc., J.E. 93-176 (C.A.), Sumabus inc. c. Gestion Pode inc., [1993] R.D.J. 528 (C.A.), Construction Bérou inc. c. Varennes (Ville de), [1993] R.D.J. 463 (C.A.), Dagenais c. Del Busso, J.E. 93-963 (C.A.), Bow Plastics Ltd. c. Bern, [1993] R.D.J. 584 (C.A.), Anselme c. 2155-2328 Québec inc., [1993] R.D.J. 173 (C.A.), et Paiement c. Québec (Sous-ministre du Revenu), [1988] R.D.F.Q. 286 (C.A.).

[19] CCAC S13-091201-NP, 16 juillet 2014, Me Michel A. Jeanniot, arbitre.

[20] B-1.1

[21] 2009 QCCS 909 (Hon. Johanne Mainville, J.C.S.).