ARBITRAGE

En vertu du Règlement sur le plan de garantie
des bâtiments résidentiels neufs

(Décret 841-98 du 17 juin 1998)

 

CANADA

PROVINCE DE QUÉBEC

 

Groupe d’arbitrage et de médiation sur mesure (GAMM)

Dossier GAMM :

2010-10-005

APCHQ :

078417-4

 

Date :

7 mars  2011

 

 

 

DEVANT L’ARBITRE :

JEAN MORISSETTE

 

 

ÉRIC TRÉPANIER

Bénéficiaire

c.

LES ENTREPRISES ROBERT BOURGOUIN LTÉE

L’Entrepreneur

Et

LA GARANTIE DES BÂTIMENTS RÉSIDENTIELS NEUFS DE L’APCHQ

L’Administrateur de la Garantie

 

 

SENTENCE ARBITRALE

______________________________________________________________________

 

[1]          La décision de l’Administrateur du 23 août 2010 signée du conciliateur Monsieur Richard Bethiaume, T.P., est portée en arbitrage par l’Entrepreneur.

[2]          J’ai été désigné par le Groupe d’arbitrage et de médiation sur mesure (GAMM) pour présider cet arbitrage. Les parties conviennent de ma nomination et de ma compétence à rendre une décision finale et sans appel conformément au Règlement sur le plan de garantie des bâtiments résidentiels neufs (L.R.Q. c. B-1.1, r.0.2), (ci-après nommé ‘’Le Règlement’’).

[3]          Il n’y a pas de requête préliminaire.

[4]          Les témoins ont été assermentés avant d’être entendus.

 

LA DÉCISION SOUS EXAMEN

 

[5]          Voici, inter alia, le corpus de la décision de l’Administrateur qui est portée en arbitrage :

 

‘’Les bénéficiaires ont constaté, le 7 avril 2009, lors d’une période de dégel, une accumulation d’eau sous le plancher du sous-sol, du côté droit du bâtiment, et ce, malgré des correctifs apportés dans le passé par l’Entrepreneur.

Lors de notre inspection, nous avons été en mesure de constater la situation dénoncée; force est donc de constater que les résultats escomptés n’ont pas été atteints.

Considérant la situation, l’Administrateur a donc mandaté la firme Fondasol pour que soit effectuée une expertise géotechnique visant à déterminer la cause la plus probable de l’infiltration d’eau récurrente et les solutions pour la corriger.

À la suite de l’expertise, l’Administrateur a reçu copie du rapport que nous joignons à la présente, lequel résume les travaux de chantier et de laboratoire réalisés ainsi que les commentaires et recommandation relatifs à l’infiltration d’eau.

L’Administrateur doit donc accueillir la demande de réclamation supplémentaire des bénéficiaires et l’Entrepreneur, malgré sa bonne volonté, devra reprendre les travaux correctifs pour que cesse l’infiltration d’eau, ce dernier ayant une obligation de résultat.

Conclusion

Pour tous ces motifs, l’Administrateur :

Accueille la demande de réclamation supplémentaire des bénéficiaires pour le point 22;

Ordonne également à l’Entrepreneur d’effectuer les travaux correctifs requis en ce qui a trait au point 22, et ce, dans un délai de 30 jours suivant réception de la présente.’’

 

DEMANDE DE REMISE

 

[6]          Par courrier du 1er mars 2011, alors que l’audition est fixée le 7 mars 2011, les procureurs de l’Entrepreneur requièrent la remise de l’audition dans les termes suivants :

 

« Or, notre expert s’est présenté sur les lieux le 15 décembre 2010 et croit qu’il est peu probable que le problème d’infiltration d’eau du bénéficiaire, soit relié au drainage.

Il croit plutôt que le problème, qui est d’ailleurs très localisé, découle plutôt de mauvaises pentes du terrain, de la descente de gouttière dont l’eau n’est pas éloignée des fondations et d’une probable fissure à la fondation.

Afin de vérifier le tout, le pourtour de la fondation devra être excavé, ce qui est impossible avant le printemps, considérant la gelée du sol. »

 

[7]          L’autre portion de la demande de remise fait référence à des dispositifs du contrat de vente de l’immeuble et de l’avant-contrat qui seraient pertinents à l’audition. Ces documents étant, à ce jour, non produits, l’Entrepreneur souhaite en prendre connaissance et si cela s’avère important, en faire la production lors de l’audition. N’ayant pas en main ces documents, on me demande de reporter l’audition fixée.

 

[8]          Le bénéficiaire s’objecte à la remise disant que tout le temps requis a été donné aux parties pour préparer leur affaire, l’avis d’audition (944.4 C.p.c.) du 14 décembre 2010, précisant que le rapport d’expertise de l’Entrepreneur devait être produit au plus tard le 7 février 2011.

 

[9]          Pour sa part, l’Administrateur s’en remet à ma décision, sans plus.

 

[10]       Considérant le délai de production du rapport de l’expert de l’Entrepreneur prévu au procès-verbal de la conférence téléphonique du 14 décembre 2010.

 

[11]       Considérant que l’expertise produite par l’Administrateur est connue de l’Entrepreneur depuis au moins le 22 septembre 2010, date de la demande d’arbitrage.

 

[12]       Considérant que les documents dont il est fait référence dans le contrat de vente de l’immeuble sont connus depuis au moins le 2 novembre 2010, date de la réception du cahier de pièces communiqué par l’Administrateur aux parties.

 

[13]       Considérant que l’Entrepreneur et ses experts ont eu toute l’opportunité depuis ce temps de vérifier et effectuer les travaux exploratoires pour déterminer si d’autres sources d’infiltrations sont concernées par la situation vécue par le bénéficiaire et sa famille.

 

[14]       Considérant que le bénéficiaire et sa famille vivent dans une résidence qui est sujette d’infiltrations d’eau.

 

[15]       Considérant qu’il m’apparaît souhaitable que cette affaire soit entendue puisqu’il faut déterminer de la présence d’un désordre couvert ou non par le plan de garantie et non du devis des réparations.

 

[16]       Considérant qu’il appartiendra à l’Entrepreneur de choisir les réparations et d’effectuer les travaux correctifs advenant la présence de malfaçons, vices de construction ou désordres sujets de la garantie.

 

[17]       J’ai rejetté la demande de remise de l’Entrepreneur.

 

L’AUDITION

 

[18]       La visite de la résidence sujette de la garantie s’est faite en compagnie de :

Ø Le bénéficiaire et son épouse;

Ø M. Richard Berthiaume, signataire de la décision du 23 août 2010;

Ø M. Mohammad Hosseini, ingénieur, signataire du rapport de la firme Fondasol du 15 juillet 2010, pièce A-15;

Ø M. Pierre Bonneville, expert de l’Entrepreneur;

Ø Mme Sylvie Gariépy, représentante de l’Entrepreneur;

Ø Les procureurs de l’Entrepreneur et de l’Administrateur du plan de garantie;

 

[19]       Mes constatations effectuées à l’invitation des parties et des experts se résument ainsi :

·          Les joints du plancher flottant du sous-sol font des vaguelettes;

·          La chambre arrière droite, sur le bord du mur arrière, dans l’espace mur-plancher flottant, laisse apparaître de l’humidité.  Au toucher, je constate que le sous-plancher est imbibé d’eau;

·          Les plinthes du mur arrière, d’où proviennent les infiltrations d’eau, laissent apparaître des traces brunâtres/noirâtres, signe d’humidité persistante et constante;

·          Trois déshumidificateurs sont au sous-sol dont l’un fonctionne (le réservoir du déshumidificateur de la chambre arrière droite est plein, celui de la salle familiale contient de deux à trois millimètres d’eau alors que celui de la chambre avant est sec);

·          Dans la pièce de mécanique, près de la pompe submersible, il y a de l’humidité constante sous la structure du mur de bois : le sable résiduel à cet endroit est mouillé;

·          Lorsque la pompe submersible est mise hors fonction et le drain de vidange bouché, l’eau monte à un niveau équivalant aux mesures du rapport de l’ingénieur Hosseini du 15 juillet 2010, c’est-à-dire que la nappe phréatique est à soixante-dix millimètres de la surface du plancher de béton alors que la dalle de béton est d’une épaisseur de cent millimètres (ainsi, le dessous de la dalle de béton se trouve dans l’eau);

·          Le plancher de la salle familiale du sous-sol accuse des gondolements et au pas, le plancher flottant monte et descend;

 

[20]       La visite des lieux terminée, la procureure de l’Entrepreneur annonce qu’elle n’a pas de preuve à offrir pour appuyer la demande d’arbitrage formée le 22 septembre 2010 par l’Entrepreneur, celui-ci ayant été dans l’impossibilité de produire un rapport d’expertise additionnel pour déterminer la cause des infiltrations d’eau et la méthode corrective. 

 

[21]       Par ailleurs, l’Entrepreneur admet la présence d’ocre ferreux et le niveau de la nappe d’eau constatée.

 

[22]       Pour sa part, l’Administrateur dépose son cahier de pièces A-1 à A-18.

 

[23]       Le rapport de la firme Fondasol, pièce A-15 de Mohammad Hosseini  est produit pour valoir comme témoignage de l’ingénieur, de consentement des parties.

 


ANALYSE

 

[24]       J’ai compris des échanges intervenus spontanément entre les témoins, experts et avocats des parties que l’Entrepreneur, tout en admettant la présence d’eau, souhaitent que les travaux qui seront effectués pour réparer le désordre soient finaux.  L’Entrepreneur veut corriger un problème qu’il aurait préféré ne jamais rencontrer.

[25]       Pour sa part, l’Administrateur ne requiert pas du soussigné de choisir les travaux à être effectués. L’Administrateur souhaite que l’audition détermine la validité ou non de la décision rendue par monsieur Richard Berthiaume le 23 août 2010.

 

[26]       À la lecture des conclusions de la décision de l’Administrateur,  on y constate que l’ordonnance est faite à l’Entrepreneur d’effectuer des travaux correctifs pour que cessent les infiltrations d’eau au sous-sol.

 

[27]       L’Entrepreneur a beau dire qu’il a fait les travaux suivant les recommandations de l’Administrateur et de l’expert alors choisi par les parties, il n’en reste pas moins que toute la preuve soumise dans le cahier de pièces émis par l’Administrateur, pièces A-1 à A-17 et les constatations effectuées montrent qu’il existe un vice de conception, de construction ou de réalisation, ou des vices de sol couverts par le  Règlement sur le plan de garantie des bâtiments résidentiels neufs.

 

[28]       À tout événement, une première décision fut rendue constatant que des réparations devaient être effectuées pour réparer un problème étant survenu dans la première année de la garantie.  Il a alors été déterminé qu’il s’agissait d’une malfaçon au sens du Règlement.  L’Entrepreneur a, par la suite, effectué des réparations qui n’ont pas corrigé la malfaçon.

 

[29]       J’ajouterai, que le fait de laisser plus de délai à l’Entrepreneur pour qu’il détermine ou non de la réelle provenance des infiltrations d’eau n’est pas pertinent en l’instance. 

 

[30]       Que les infiltrations d’eau soient causées par une fissure dans le solage, un colmatage des drains français, un vice de sol, un vice de construction ou une malfaçon, ce désordre est couvert par le Règlement et doit être réparé.

 

 

POUR ET PAR CES MOTIFS :

 

REJETTE la demande d’arbitrage de l’Entrepreneur;

 

CONFIRME la décision de l’Administrateur du 23 août 2010;

 

ORDONNE à l’Entrepreneur d’effectuer les travaux correctifs requis pour que cessent les infiltrations d’eau au sous-sol du 5950, rue du Bosquet, La Plaine;

 

Les travaux devront être exécutés aussitôt que la température le permettra et terminés au plus tard le 15 juin 2011.

 

Conformément aux articles 21 et 123 du Règlement, le coût de l’arbitrage est partagé en parts égales entre l’Administrateur et l’Entrepreneur puisque l’Entrepreneur est requérant à la présente instance.

 

 

 

JEAN MORISETTE, arbitre

MONSIEUR ÉRIC TRÉPANIER

Bénéficiaire

 

Et

 

ME MARTINE BRODEUR

Beauchamp Brodeur senc,  pour

L’Entrepreneur

 

Et

 

ME LUC SÉGUIN

Savoie Fournier, avocats pour

L’Administrateur