ARBITRAGE EN VERTU DU RÈGLEMENT SUR LE PLAN DE GARANTIE DES BÂTIMENTS RÉSIDENTIELS NEUFS
(Décret 841-98 du 17 juin 1998)
(Loi sur le bâtiment, L.R.Q., c. B-1.1)
Organisme d’arbitrage autorisé par la Régie du bâtiment :
CENTRE CANADIEN D’ARBITRAGE COMMERCIAL (« CCAC »)
ENTRE : 9187-0725 Québec inc.
(ci-après « l’Entrepreneur »)
ET : Sophia Cunningham
(ci-après « la Bénéficiaire »)
ET : La Garantie des Maisons Neuves de l’APCHQ
(ci-après « l’Administrateur »)
No dossier CCAC : S15-031301-NP
Arbitre : |
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Me Albert Zoltowski |
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Pour l’Entrepreneur : |
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Haissam Karhani |
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Pour la Bénéficiaire : |
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Me Stephen Simmons |
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Pour l’Administrateur : |
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Me Julie Parenteau |
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Date de la sentence : |
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Le 30 mai 2016 |
Identification complète des parties
Arbitre : |
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Me Albert Zoltowski 1010, de la Gauchetière Ouest Bureau 950 Montréal (Québec) H3B 2N2 |
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Entrepreneur : |
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9187-0725 Québec inc./Construction Phoenicia […] Laval (Québec) […] |
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Bénéficiaire : |
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Madame Sophia Cunningham […] Laval (Québec) […] |
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Administrateur : |
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La Garantie des Bâtiments Résidentiels Neufs de l’APCHQ inc. 7333, Place des Roseraies Anjou (Québec) H1M 2X6
À l’attention de Me Julie Parenteau |
SEntence arbitrale
MANDAT :
L’Arbitre a reçu son mandat du Centre Canadien d’Arbitrage Commercial (aussi appelé le « CCAC ») le 24 mars 2015.
HISTORIQUE DU DOSSIER :
22 septembre 2014 : Demande de remboursement d’acompte déposé par la Bénéficiaire auprès de l’Administrateur;
2 décembre 2014 : Rencontre du Conciliateur, Monsieur Jocelyn Dubuc avec l’Entrepreneur;
9 février 2015 : Décision de l’Administrateur;
13 mars 2015 : Réception par le CCAC d’une demande d’arbitrage de l’Entrepreneur;
24 mars 2015 : Nomination de l’Arbitre;
11 mai 2015 : Confirmation de la part du CCAC de sa réception du paiement de la provision pour frais de l’Entrepreneur;
23 juin 2015 : Avis aux parties de la tenue d’une conférence préparatoire;
15 juillet 2015 : Conférence préparatoire de l’Arbitre avec les parties;
15 juillet 2015 : Avis de convocation à l’audience prévue pour le 10 novembre 2015;
10 novembre 2015 : Audience (première journée);
9 février 2016 : Audience (deuxième journée);
23 mars 2016 : Audience et plaidoiries (troisième journée);
29 mars 2016 : Réception par l’Arbitre du complément de la réplique de l’Entrepreneur;
30 mai 2016 : sentence arbitrale.
SENTENCE
Introduction :
1. Cette décision traite du droit de rétention ou de l’obligation de remboursement par l’Entrepreneur des acomptes provenant de la Bénéficiaire pour la construction d’une résidence neuve.
2. La résidence en question (ci-après le « Bâtiment ») n’a jamais été livrée et reçue par la Bénéficiaire. Malgré le fait que l’emplacement et l’adresse exacte du Bâtiment est un des sujets de contestation entre l’Entrepreneur et la Bénéficiaire, il s’agit d’une des 6 maisons de ville en rangée faisant partie d’une nouvelle phase d’un développement résidentiel sur la rue A à Laval. L’adresse de ce Bâtiment est soit le 1840 rue A (selon la Bénéficiaire) ou le 1840 D rue A (selon l’Entrepreneur).
3. Le 25 septembre 2014, la Bénéficiaire a déposé auprès de l’Administrateur une réclamation pour obtenir le remboursement d’acomptes au montant de VINGT MILLE DOLLARS (20 000,00 $) payés à l’Entrepreneur.
4. Monsieur Jocelyn Dubuc, T.P., un inspecteur-conciliateur au sein du service de conciliation de l’Administrateur, s’est rendu sur les lieux du développement immobilier dont le Bâtiment fait partie, a rencontré le président de l’Entrepreneur, Monsieur Haissam Karhani, et a rendu sa décision.
5. Cette décision est datée du 9 février 2015. À la section intitulée « Historique du Dossier », Monsieur Dubuc écrit ce qui suit :
« Le 2 décembre 2014, nous avons eu une rencontre avec l’Entrepreneur qui nous a affirmé que les travaux de construction avaient été retardés de plusieurs mois pour de nombreuses raisons, dont la bénéficiaire ne peut être tenue responsable. »
6. Ensuite, Monsieur Dubuc écrit que malgré le fait que la Bénéficiaire a demandé le remboursement de 20 100,00 $ (20 000$ selon le texte de sa réclamation), d’après la preuve qu’il a retenue, il ordonne à l’Entrepreneur de rembourser 15 100,00 $ dans les trente (30) jours de la réception par ce dernier de la décision.
7. Insatisfait de cette décision, l’Entrepreneur l’a soumise à l’arbitrage auprès du CCAC qui désigna l’Arbitre soussigné (ci-après appelé le « Tribunal Arbitral » ou le « Tribunal ») pour statuer sur les questions découlant de cette demande.
8. L’enquête a duré presque deux (2) jours complets (le 10 novembre 2015 et le 9 février 2016) et les plaidoiries une demie (1/2) journée (23 mars 2016).
9. Deux (2) personnes ont témoigné pour le compte de l’Entrepreneur, soit son président, Monsieur Haissam Karhani, et Monsieur Krishna Gupta.
10. Monsieur Jocelyn Dubuc a témoigné pour le compte de l’Administrateur.
11. Monsieur Christopher Heron, le mari de la Bénéficiaire, ainsi que cette dernière, ont témoigné pour le compte de la Bénéficiaire.
Le contexte factuel
12. Le 11 juillet 2011, la Bénéficiaire et l’Entrepreneur ont signé un « Contrat préliminaire et contrat de garantie » (pièce A-1) sur le formulaire standard approuvé par l’Administrateur pour l’achat du Bâtiment. Comme déjà noté ci-haut, le Bâtiment est une maison de ville en rangée. Elle constitue une des six (6) unités faisant partie de la Phase III d’un développement immobilier sur la rue A à Laval.
13. L’entrée à chacune de ces six (6) unités donne sur une rue privée qui constitue une partie commune de ces unités. Selon le plan d’implantation déposé à l’audience par l’Entrepreneur (pièce E-4), cette rue privée donne également accès à d’autres unités qui, en toute probabilité, constituent les Phases I et II du même projet de développement. Le prix du Bâtiment de la Bénéficiaire, selon le contrat préliminaire, était 285 000,00 $, avant les TPS et TVQ.
14. Au moment de la signature de ce contrat préliminaire, l’emplacement pour la construction des six (6) unités de la Phase III n’est encore qu’un terrain vague. Sur le contrat préliminaire, l’adresse du Bâtiment est le « 1840 A » à Laval, « connu et désigné comme étant le lot numéro 4577-466 ».
15. Ce n’est que plus tard, après la signature du contrat préliminaire, que la municipalité a octroyé les adresses civiques 1840, 1840A, 1840B, 1840C, 1840D et 1840E à chacun des 6 lots faisant partie de la Phase III.
16. L’adresse civique ainsi attribuée au lot 4577-466 était 1840D plutôt que 1840, rue A. Ce lot avec l’adresse 1840D se trouvait sur le cinquième des lots en rangée et était donc au milieu de la rangée des lots. L’adresse 1840 qui apparaît sur le contrat préliminaire s’est vue attribué un autre numéro de lot, dont le numéro n’apparaît pas sur le contrat préliminaire. 1840 A était le premier des six (6) lots et ainsi « un lot de coin » selon le témoignage de la Bénéficiaire.
17. Selon ce contrat préliminaire, la date d’occupation du bâtiment ou, autrement dit, la date de livraison du Bâtiment à la Bénéficiaire, était « November 2011 », soit quelques quatre (4) mois après la date de signature de ce contrat.
18. Le 31 décembre 2011, le terrain pour la construction des six (6) unités de la Phase III demeurait toujours vide et aucune excavation n’y apparaissait encore.
19. Trois (3) mois plus tard, soit en mars 2012, l’Entrepreneur perdait son accréditation auprès de l’Administrateur pour la construction de bâtiments résidentiels neufs. Ensuite, il a eu aussi certains problèmes avec la Régie du bâtiment qui lui enlevait sa licence d’entrepreneur en construction (catégories 1.1.1 et 1.1.2). Ce n’est qu’en décembre 2013 qu’à la suite d’un jugement de la Commission des relations de travail, qu’il a reçu la permission de finir la construction déjà en cours de la Phase III de son projet de développement.
20. La Bénéficiaire, par l’entremise de son mari, Monsieur Christopher Heron, qui était aussi son mandataire pour négocier l’achat du Bâtiment, a remis des acomptes à l’Entrepreneur en plusieurs versements.
21. À l’audience l’Entrepreneur, selon son président M. Karhani, a reconnu avoir reçu QUINZE MILLE HUIT CENT QUATRE-VINGT-DIX DOLLARS ET VINGT-DEUX CENTS (15 890,22 $) en acomptes .
22. La Bénéficiaire, encore une fois par l’entremise de son mari, a remis un autre montant de CINQ MILLE DOLLARS (5 000,00 $) en argent comptant à Monsieur Krishna Gupta, une connaissance commune de la Bénéficiaire et de l’Entrepreneur pour l’achat du Bâtiment.
23. L’Entrepreneur témoigne qu’il n’a jamais reçu ce montant de 5 000.$.
24. Monsieur Gupta n’était ni un employé ni un associé de l’Entrepreneur. Il reconnaît qu’il a reçu ces CINQ MILLE DOLLARS (5 000,00 $) de la Bénéficiaire pour les fins d’achat du Bâtiment. Par ailleurs, il affirme qu’il continue de détenir ce montant mais il refuse de le remettre à l’Entrepreneur ou à la Bénéficiaire car il affirme que la Bénéficiaire doit à sa compagnie un montant non-défini et que sa compagnie n’a jamais facturé à la Bénéficiaire, pour certains services que cette compagnie a rendu à la Bénéficiaire au cours des douze (12) dernières années. Il affirme que ce montant ainsi redevable par la Bénéficiaire à sa compagnie excède CINQ MILLE DOLLARS (5 000,00 $).
25. La Bénéficiaire n’a jamais fait de démarches auprès d’une institution financière pour financer le prix du Bâtiment. Elle avait toujours confiance qu’une présumée courtière hypothécaire, connue sous le nom Vicky K. Daki, et qui lui a été référée par l’Entrepreneur, prendrait les arrangements nécessaires pour qu’elle puisse obtenir ce financement.
26. Ce n’est qu’en mai 2014 que la Bénéficiaire a découvert que Madame Daki n’avait pas la licence requise pour exercer la fonction de courtière hypothécaire.
27. Malgré le fait que l’Entrepreneur n’a pas livré le Bâtiment à la Bénéficiaire en novembre 2011 tel que prévu au contrat préliminaire, la Bénéficiaire n’en a pas été alarmée. Ce n’est qu’en avril 2013, selon la Bénéficiaire, ou en janvier 2014, selon l’Entrepreneur qu’une entente verbale est intervenue entre ces parties. Selon cette entente, pour compenser ce retard de livraison, l’Entrepreneur ferait des modifications au Bâtiment selon des plans soumis par la designer de la Bénéficiaire, Madame Catlin Stothers, sans augmenter le prix du Bâtiment.
28. En janvier 2014, les relations entre l’Entrepreneur et la Bénéficiaire sont devenues plus tendues. La construction de la Phase III, y compris celle du Bâtiment, a été suspendue.
29. La Bénéficiaire allègue qu’elle exigeait de l’Entrepreneur que la construction qui était alors suspendue devait recommencer dans les trente (30) prochains jours, faute de quoi elle résilierait le contrat. L’Entrepreneur allègue pour sa part qu’il a déclaré à la Bénéficiaire qu’il recommencerait la construction si cette dernière lui présentait une lettre de confirmation du financement du prix du Bâtiment émanant d’une institution financière ou d’une autre personne, ce que la Bénéficiaire conteste. Selon la Bénéficiaire, cette confirmation de financement devrait être arrangée par la courtière hypothécaire, Madame Daki.
30. Est-ce que les parties ont convenu d’une nouvelle date de livraison du bâtiment? Non, selon l’Entrepreneur. Selon la Bénéficiaire, la nouvelle date de livraison devrait être le 1er juillet 2014. Quoi qu’il en soit, l’Entrepreneur n’a pas livré le bâtiment pour le 1er juillet 2014.
31. L’Entrepreneur reconnaît que, même à la date de la première journée d’audience du 10 novembre 2015, le Bâtiment n’était pas encore en état d’être livré à un acheteur éventuel.
32. En ce qui concerne la date de résiliation du contrat préliminaire signé par les parties, il n’y a aucune preuve que l’Entrepreneur l’a résilié. De plus, il a reconnu qu’il n’a jamais envoyé d’avis de défaut à la Bénéficiaire à l’effet qu’elle n’avait pas respecté ses engagements quant au financement du prix d’achat du Bâtiment.
33. Selon l’Entrepreneur, au mois de mai 2014 lors d’une conversation téléphonique avec Monsieur Christopher Heron, les deux ont convenu que le contrat est résilié.
34. Le 29 août 2014, Monsieur Heron envoie une lettre à l’Entrepreneur dont le premier paragraphe se lit comme suit : (Pièce A-4)
« This is an official letter from we, the beneficiary (Christopher Heron and Sophia Cunningham), requesting a full refund of twenty thousand dollars ($20,000) from the contractor - Phoenicia Construction / Haissam Karhani - for deposits made in 2011 and 2012 towards the purchase of the house in development by Phoenicia Construction, located at 1852 A, Laval, Quebec, H7T 1L6. »
35. Cette première lettre était suivie d’une deuxième lettre signée par la Bénéficiaire et datée du 14 octobre 2014 qui se lit comme suit : (Pièce A-6)
« This is a second official letter from the beneficiary (Sophia Cunningham), requesting a full refund of TWENTY THOUSAND DOLLARS ) ($20,100) (sic) from the contractor - Phoenicia Construction / Haissam Karhani - for deposits made in 2011 and 2012 towards the purchase of the house in development by Phoenicia Construction, located at 1840 A, Laval, Quebec, H7T 1L6. The first letter was sent August 29, 2014. »
36. La preuve révèle que des échanges de textos entre le mari de la Bénéficiaire et Monsieur Karhani ont eu lieu vers la fin du mois de juillet 2014 concernant le remboursement des acomptes par l’Entrepreneur à la Bénéficiaire. Voici un extrait de ces échanges : (Pièce A-8)
« By the 10 august I will give the money
If August 10, no problem.
Exactly how much money?$18 855?
5 000$ to 10 000$ »
37. Le 19 novembre 2014, l’Entrepreneur écrit à la Bénéficiaire comme suit:
« En mai 2014, avec toute surprise, suite aux modifications demandées et aux commandes spéciales effectuées, Sophia Cunningham et son mari m’annonce (sic) qu’ils ont un problème fiscal avec Revenu Québec et qu’il est impossible d’être qualifié à la banque et qu’elle utilise un compte bancaire d’une autre personne en tant que « prête nom ».
J’ai demandé une réunion avec Madame Sophia Cunningham et son mari, Christopher, afin de leur demander d’essayer de trouver un cosignataire bancaire sinon je n’aurai d’autre choix d’annuler le contrat préliminaire signé le 17 juillet 2011 et de demander une récompensation (sic) pour tous les frais, commandes spéciales auprès des fournisseurs et autres, que j’ai engagés sur la construction et modification du bâtiment au lot numéro 4577-466, pour un montant d’environ 16 000$. » (Pièce A-10)
Le Règlement
38. Le règlement sur le plan des garanties des bâtiments résidentiels neufs[1] (le « Règlement ») à l’article 26 prévoit ce qui suit :
« 26. La garantie d’un plan dans le cas de manquement de l’entrepreneur à ses obligations légales ou contractuelles avant la réception de la partie privative ou des parties communes doit couvrir :
(1) dans le cas d’un contrat de vente :
(a) soit les acomptes versés par le bénéficiaire;
(b) soit le parachèvement des travaux….
(2) dans le cas d’un contrat d’entreprise :
(a)
(b)
(3) le relogement, le déménagement et l’entreposage des biens du bénéficiaire dans les cas suivants :… »
39. Les parties conviennent que dans le cas présent c’est le paragraphe 26(1) qui s’applique plutôt que les paragraphes 26(2) ou 26(3).
40. De plus, le paragraphe 1 de l’article 30 du Règlement se lit comme suit :
« 30. La garantie d’un plan relative à un bâtiment détenu en copropriété divise est limitée au montant suivant :
(1) pour les acomptes, 30 000$ par fraction prévue à la déclaration de copropriété; (39 000$ pour les travaux de construction débutants à compter du 7 août 2006). »
41. Le Tribunal note qu’aucune déclaration de copropriété ou une autre preuve quant à la « fraction prévue à la déclaration de copropriété » ne lui ont été soumises.
Première Question :
42. Est-ce que l’Entrepreneur a manqué à son obligation de livrer le Bâtiment à la Bénéficiaire à l’intérieur du délai convenu?
43. Comme on l’a vu ci-haut, le paragraphe 26 du Règlement prévoit que les acomptes sont garantis dans « le cas de manquement de l’Entrepreneur à ses obligations légales ou contractuelles. »
Prétentions de l’Entrepreneur
44. L’Entrepreneur plaide que lors d’une rencontre entre l’Entrepreneur et Monsieur Christopher Heron, les parties ont convenu que la nouvelle date de livraison sera retardée de 90 à 120 jours après le 4 janvier 2014. Toutefois, il prétend que son obligation de livrer était conditionnelle à la présentation d’une preuve d’acceptation du financement du prix de l’achat du Bâtiment par la Bénéficiaire à l’Entrepreneur le ou avant le 1er février 2014, ce que la Bénéficiaire a omis de respecter.
Prétentions de la Bénéficiaire
45. Selon la Bénéficiaire, ce financement devait être trouvé par la prétendue courtière hypothécaire, Madame Daki.
46. De plus, elle soutient qu’elle n’a jamais reçu de l’Entrepreneur quelques demandes ou avis écrits exigeant une preuve d’une telle acceptation de financement.
Analyse de la Première Question et Décision:
47. Selon la preuve, la date de livraison de novembre 2011 prévue au contrat préliminaire (Pièce A-1) n’a pas été respectée. Toutefois, la Bénéficiaire a consenti à ce retard.
48. Le fardeau de la preuve appartient au demandeur, soit l’Entrepreneur, selon l’article 2803 du Code civil du Québec. Afin de convaincre le Tribunal, cette preuve doit être prépondérante, tel que décrit à l’article 2804 du Code civil du Québec :
« 2804. La preuve que rend l’existence d’un fait plus probable que son inexistence est suffisante, à moins que la loi n’exige une preuve plus convaincante. »
49. Lors de son témoignage à la première audience, le président de l’Entrepreneur, Monsieur Haissam Karhani, a clairement témoigné qu’aucune nouvelle date de livraison du Bâtiment n’a été convenue avec la Bénéficiaire après l’expiration de celle prévue au contrat préliminaire.
50. Toutefois, à l’étape de la plaidoirie qui a eu lieu lors de la troisième audience tenue quatre (4) mois après son témoignage, il invoque l’existence de cette nouvelle date de livraison qui serait conditionnelle à une preuve de financement présentable par la Bénéficiaire.
51. Cette nouvelle date et cette nouvelle condition, il les fonde sur le texte d’un courriel de Monsieur Christopher Heron, envoyé au témoin de l’Entrepreneur, Monsieur Krishna Gupta, et daté du 4 janvier 2014. Ce courriel a été déposé en preuve par Monsieur Gupta comme la Pièce E-6, page 2, lors de la deuxième journée d’audience.
52. Dans ce courriel du 4 janvier 2014, Monsieur Christopher Heron écrit à Monsieur Gupta, comme suit :
« Haissam also said that he can deliver the unit for us by April 1, 2014, if we have a letter of acceptance from the bank by February 1, 2014. This is Vickie’s expertise.
Sophia and I are depending on you and Vickie to get our mortgage approved, so that we can finally move in the next 90 to 120 days. Please instruct Vickie to get in touch with me and Sophia so we can finally get approved and prepare for our move. »
53. La référence à l’obtention du financement par Madame Daki qui, selon la preuve, a été référée à la Bénéficiaire par le président de l’Entrepreneur, Monsieur Haissam Karhani, est conforme au témoignage de Monsieur Heron et n’a pas été contestée par Monsieur Karhani.
54. Selon la preuve retenue par le Tribunal et soumise par l’Entrepreneur lui-même, en avril 2014, une autre entente verbale a été convenue entre l’Entrepreneur et M. Heron, le mari et mandataire de la Bénéficiaire. Selon le courriel du 9 avril 2014 de M. Heron à l’Entrepreneur que ce dernier a déposé comme la Pièce E-5, on apprend ce qui suit :
« Hi Haissam,
I will be preparing a document outlining our verbal agreement between Phoenicia Construction and Christopher Heron / Sophia Cunnigham:
……
3. The home will be completed and ready for us to live in by July 2014.
…….”
55. Il n`y a aucune mention dans ce document (Pièce E-5) que la date de livraison du Bâtiment est conditionnelle à la présentation par la Bénéficiaire à l’Entrepreneur d’une acceptation de financement du prix d’achat du Bâtimemnt.
56. La preuve révèle que le 2 décembre 2014, soit à la date de la visite du conciliateur M. Joceley Dubuc, aucune des six (6) unités comprenant la Phase III du développement dont le Bâtiment faisait partie, n’était encore prête à être livrée.
57. De plus, selon le témoignage de l’Entrepreneur, le Bâtiment n`était pas prêt à être livré même lors du 1er jour de l’audience qui a eu lieu le 10 novembre 2015.
58. Il n’est pas nécessaire pour statuer sur cette question d’analyser en détail les prétentions des parties concernant les raisons pour lesquelles l’Entrepreneur n’a pas complété la construction de ces six (6) unités, y compris celle du Bâtiment. Il suffit de mentionner que, selon la preuve devant le Tribunal, ce retard ne provient pas d’un défaut de la Bénéficiaire de remplir ses obligations en vertu du Contrat préliminaire, d’une force majeure, ou de la survenance d’une cause indépendante de la volonté de l’Entrepreneur
59. Pour ces raisons, le Tribunal vient à la conclusion que l’Entrepreneur a failli à respecter la dernière date de livraison du Bâtiment convenue entre les parties, soit celle du 1er juillet 2014.
Deuxième Question :
60. Est-ce que l’Entrepreneur a le droit de retenir les acomptes reçus de la Bénéficiaire?
Prétention de l’Entrepreneur :
61. Selon l’Entrepreneur, il a le droit de retenir les acomptes reçus selon l’article 31 du Contrat préliminaire (Pièce A-1).
Prétention de l’Administrateur et de la Bénéficiaire :
62. Selon les autres parties, l’Entrepreneur ne peut pas invoquer l’article 31 du Contrat préliminaire car il a omis d’envoyer un avis de défaut à la Bénéficiaire qui constitue une condition préliminaire à son droit de résilier le contrat.
Analyse de la Deuxième Question et Décision:
63. L’article 31 du Contrat préliminaire énonce ce qui suit :
« DÉFAUT DU PROMETTANT-ACHETEUR
31. Le défaut par le promettant-acheteur de respecter l’une ou l’autre des conditions et obligations lui incombant en vertu du présent contrat préliminaire permettra au vendeur de le résilier, après l’écoulement d’un délai de sept (7) jours pour remédier au défaut à compter de l’envoi d’un avis écrit à cet effet, auquel cas le vendeur conservera tous les acomptes déjà reçus du promettant-acheteur, sans préjudice à toute autre recours. »
64. Le président de l’Entrepreneur, Monsieur Karhani a admis lors de son témoignage et l’a confirmé au stade de l’argumentation, que l’Entrepreneur n’a jamais envoyé à la Bénéficiaire l’avis écrit prévu par l’article 31.
65. De plus, il n’y a pas de preuve suffisante devant le Tribunal démontrant que l’Entrepreneur a résilié ou avait l’intention de résilier le Contrat préliminaire avant qu’il reçoive les 2 lettres de mise-en demeure de la part de la Bénéficiaire du 29 août 2014 ( Pièce A-4) et celle du 14 Octobre 2014 (Pièce A-6).
66. Ce n’est qu’après réception de ces 2 lettres de la part de la Bénéficiaire et d’une lettre de l’Administrateur datée du 29 octobre 2014 intitulée « Avis de 15 jours pour remboursement d’acompte » ( Pièce A-9), que le 19 novembre 2014 M. Karhani écrit une lettre à la Bénéficiaire et invoque pour la 1ère fois la position qu’il n’aura d’autres choix que d’annuler le Contrat préliminaire :
« En mai 2014, avec toute surprise, suite aux modifications demandées et aux commandes spéciales effectuées, Sophia Cunningham et son mari m’annoncent qu’ils ont un problème fiscal …
J’ai demandé une réunion avec Madame Sophia Cunningham et son mari, Christopher, afin de leur demander d’essayer de trouver un cosignataire bancaire, sinon je n’aurais d’autre choix d’annuler le contrat préliminaire signé le 17 juillet 2011 et de demander une compensation pour tous les frais, commandes spéciales auprès des fournisseurs et autres, que j’ai engagés sur la construction et modification du bâtiment au lot 4577-466, pour un montant d’environ 16 000$. » (souligné par le Tribunal)
67. À la lumière de cette preuve, le Tribunal conclut que l’Entrepreneur n’a pas prouvé qu’il a le droit de retenir les acomptes reçus en s’appuyant sur l’article 31 du Contrat préliminaire à cause de son omission d’envoyer à la Bénéficiaire un avis écrit prévu par cet article. De plus, l’Entrepreneur n’a pas prouvé par des gestes et des démarches non équivoques son intention de résilier le contrat avant de recevoir les 2 lettres de mise-en demeure de la part de la Bénéficiaire du 29 août 2014 et 14 octobre 2014 et celle de l’Administrateur du 29 octobre 2014.
Troisième Question :
68. Au stade de l’argumentation, l’Entrepreneur n’a pas demandé expressément au Tribunal arbitral de reconnaître son droit de réduire les montants des acomptes reçus par les montants des coûts et dépenses qu’il prétend avoir engagés pour exécuter les modifications au Bâtiment convenues entre les parties en avril 2013.
69. Il se pourrait que ce manquement résulte simplement d’un oubli de Monsieur Karhani lors de sa plaidoirie.
70. Toutefois, Monsieur Karhani a invoqué le droit de l’Entrepreneur à réduire ou annuler le remboursement des acomptes par le montant du coût des modifications précité lors de la visite à son bureau le 2 décembre 2014 du Conciliateur, Monsieur Jocelyn Dubuc, (ce qui est par ailleurs mentionné à la décision de l’Administrateur),et lors de la conférence préparatoire qui a eu lieu entre le Tribunal et les représentants de toutes les parties.
71. De plus, une bonne partie de la preuve présentée lors de l’enquête visait les plans, et les coûts de ces modifications.
72. Pour ces raisons, le Tribunal arbitral considère qu’il s’agit d’une des questions sur lesquelles il doit statuer.
Prétention de l’Entrepreneur :
73. Selon la compréhension du Tribunal arbitral de la prétention de l’Entrepreneur sur cette question, il a le droit de réduire le montant des acomptes reçus par le total des coûts des modifications au Bâtiment situé au 1840D, rue A qui, selon lui, ont été proposées par la Bénéficiaire, par l’entremise de sa décoratrice, Madame Catlyn Stothers.
Prétention de la Bénéficiaire :
74. La Bénéficiaire prétend que pour opérer compensation, il faut que les coûts de ces modifications allégués par l’Entrepreneur soient liquides et exigibles. Ce que l’Entrepreneur n’a pas prouvé.
Prétention de l’Administrateur :
75. Selon lui, l’Entrepreneur n’a pas prouvé que les modifications ont été réalisées. De plus, il n’y a aucune preuve que ces coûts ont été payés par l’Entrepreneur.
Analyse de la Troisième Question et Décision:
76. Selon la preuve, l’Entrepreneur et la Bénéficiaire reconnaissent que l’Entrepreneur devait faire des modifications supplémentaires au Bâtiment et que ces modifications seraient réalisées selon les plans proposés par la décoratrice de la Bénéficiaire, Madame Catlyn Stothers. De plus, les parties reconnaissent que l’Entrepreneur ferait ces modifications à ses propres dépens, sans augmenter le prix du Bâtiment prévu au Contrat préliminaire, en guise de compensation pour le retard de livraison du Bâtiment qui était prévue pour novembre 2011.
77. Pour déterminer le montant des dépenses qu’il a encourues en liaison avec les modifications précitées, l’Entrepreneur dépose en preuve deux (2) documents : le premier est la copie d’une facture datée du 6 mars 2014 émise par l’entreprise nommée Nouvelles Cuisines et qui porte le numéro 1087. Elle est adressée à l’Entrepreneur et elle mentionne la fabrication d’armoires de cuisine sur mesure avec des accessoires de quincaillerie (charnières et glissières). L’adresse de livraison est le 1840D A à Laval. Le prix est de 11 000 $ plus la TPS de 550 $ et la TVQ de 1 097,25 $ pour un montant total de 12 647,25 $ (Pièce E-2). Monsieur Karhani reconnaît qu’il n’a pas encore payé cette facture.
78. Le deuxième document déposé comme la Pièce E-3 est une copie d’un document intitulé « CONTRAT ». Il est daté du 2 février 2014 mais signé par le représentant, M. Daniel Dumont de l’entreprise qui a émis cette facture, IelDan Rénovation seulement le 2 avril 2014. Sur cette facture, à l’endroit prévu pour la signature du représentant de l’Entrepreneur, Monsieur Haissam Karhani, aucune signature n’apparaît. Ce document réfère aux modifications « au 1840D » et au « Changement autoriser (sic) par Mr. Haissam Karhani de Phoenicia Construction Inc. ». Il s’agit de travaux : d’une démolition des divisions actuel (sic), de changement des divisions, d’installation de nouvelles plomberies Brute (sic), d’installation électrique brute et de changement des escaliers. Le montant total avant les taxes est de 7 400 $. La TPS est de 370 $ et la TVQ de 738,15 $, résultant en un GRAND TOTAL de $8,508.15. Monsieur Karhani témoigne que cette 2e facture est partiellement payée, sans toutefois préciser le montant versé. En contre-interrogatoire, toutefois, il reconnaît qu’il n’a pas payé cette facture du tout mais il ajoute que « les créanciers ont le droit de se faire payer ».
79. Est-ce que l’Entrepreneur a le droit d’invoquer le mécanisme juridique de compensation afin de réduire les acomptes versés par les montants qui apparaissent sur les Pièces E-2 et E-3 ?
80. Le mécanisme de compensation n’est pas prévu au Contrat préliminaire signé par les parties ni au Règlement. Toutefois, selon l’article 116 du Règlement « Un arbitre statue conformément aux règles de droit ; il fait aussi appel à l’équité lorsque les circonstances le justifient. » (souligné par le Tribunal)
81. La compensation s’opère entre deux (2) dettes lorsque deux (2) personnes sont réciproquement débitrices et créancières. Ceci est prévu à l’article 1672 du Code civil du Québec qui stipule :
« 1672. Lorsque deux (2) personnes se trouvent réciproquement débitrices et créancières l’une de l’autre, les dettes auxquelles elles sont tenues s’éteignent par compensation jusqu’à concurrence de la moindre.
La compensation ne peut être invoquée contre l’État, mais celui-ci peut s’en prévaloir. »
82. De plus, l’article 1673 exige que les dettes réciproques soient certaines, liquides et exigibles :
« 1673. La compensation s’opère de plein droit dès que coexistent des dettes qui sont l’une et l’autre certaines, liquides et exigibles et qui ont pour objet une somme d’argent ou une certaine quantité de biens fongibles de même espèces.
….. »
83. Pour satisfaire l`exigence de l’article 1672 C.c.Q, il faut que la Bénéficiaire ait une dette couvrant le montant des coûts des modifications et qu`elle en soit une débitrice envers l’Entrepreneur. Or, selon la preuve prépondérante et incontestée, le coût de ces modifications devait être à la charge de l’Entrepreneur pour compenser la Bénéficiaire du retard de livraison du Bâtiment. Il n’y aucune preuve devant le Tribunal qui démontre un engagement ou une obligation contractuelle de la Bénéficiaire à payer le coût de ces modifications.
84. De plus, la dette alléguée par l’Entrepreneur doit être certaine et liquide. Selon la jurisprudence, une dette qui est contestée ou contestable, en autant que cette contestation soit raisonnable et sérieuse, perdra son caractère de certitude et de liquidité. (2)
85. Dans le cas qui nous occupe, la contestation de ces coûts allégués par l’Entrepreneur est sérieuse : l’emplacement et l’adresse exacte du Bâtiment où les modifications devaient être réalisées est contestée par la Bénéficiaire. Selon elle, elle a contracté pour l’achat de l’unité située au 1840 A, qui est l’adresse apparaissant au Contrat préliminaire et qui constitue « l’unité du coin » qu’elle a choisie plutôt que 1840D A. De plus, selon le témoignage du Conciliateur M. Dubuc qui a regardé l’unité 1840 par la fenêtre de la porte d’entrée lors de sa visite, il n`y avait aucune modification effectuée à l’intérieur. De plus, la validité de la facture E-3 de de LelDan Rénovation totalisant 8,508.15$ (incl. TPS et TVQ) qui semble être signée seulement par ce fournisseur de services et où l’emplacement pour la signature de M.. Haissam Karhani est demeuré en blanc - est contestable.
86. Pour ces raisons, le Tribunal conclut que l’Entrepreneur n’a pas prouvé par une preuve prépondérante son droit de réduire le montant des acomptes qu’il a reçus par le montant des coûts alléguées de certaines modifications à l’unité faisant l’objet du Contrat préliminaire, selon le mécanisme juridique de la compensation.
Quatrième Question
87. Quel montant des acomptes l’Entrepreneur doit-il rembourser à la Bénéficiaire ?
Prétention de l’Administrateur :
88. L’Administrateur prétend que le Tribunal devrait confirmer la décision de son Conciliateur, Monsieur Dubuc, et qui a statué qu’un montant de 15 100 $ doit être remboursé.
Prétention de la Bénéficiaire :
89. La Bénéficiaire soumet que l’Entrepreneur devrait rembourser 20 100 $, soit le montant de 15 100 $ ordonné par le Conciliateur ainsi qu’un acompte supplémentaire de 5 000 $ en argent comptant remis à l’Entrepreneur.
90. Subsidiairement, elle soumet que l’Entrepreneur devrait rembourser 15 890,22 $, le montant qu’il a reçu selon son propre aveu.
Prétention de l’Entrepreneur :
91. L’Entrepreneur nie avoir reçu un acompte de 5 000 $ en argent comptant.
Analyse de la Quatrième Question et Décision:
92. Dans sa décision, le Conciliateur réfère à l’allégation de la Bénéficiaire d’avoir versé comme un acompte supplémentaire la somme de 5 000 $ en argent comptant, mais selon lui aucune preuve dans son dossier n’appuie cette allégation.
93. Témoignant pour l’Entrepreneur, M. Karhani a clairement avoué avoir reçu 15 892,22 $ de la Bénéficiaire. Il l’a mentionné également dans sa lettre du 19 novembre 2014 déjà mentionnée ci-haut ( Pièce A-10) adressée à la Bénéficiaire.
94. Étant donné que la Bénéficiaire allègue le paiement de 5 000 $ en argent comptant versé à l’Entrepreneur et demande son remboursement, c’est à elle d’en faire la preuve.
95. Sur ce point, la preuve est contradictoire. Monsieur Heron, le mari de la Bénéficiaire, a témoigné qu’il a laissé 5 000 $ en argent comptant sur une table de café pour Monsieur Karhani lors d’une réunion à la maison de Monsieur Gupta. Selon ce témoignage, les autres personnes présentes lors de cette réunion étaient Messieurs Karhani et Gupta.
96. Toutefois, ce témoignage de Monsieur Heron est affaibli par son propre courriel daté du 4 janvier 2014 qu’il a adressé à Monsieur Gupta. Ce dernier l’a déposé en preuve comme la Pièce E-6, page 2. Les trois paragraphes pertinents de ce courriel se lisent comme suit :
« Hello Mr. Gupta,
I met with Haissam today (Jan 4) and he informed me that he never received the $5000 deposit that I originally gave to you to give to Vicky and Haissam.
I checked my records and I gave you the $5000 deposit on September 28, 2012. I don’t know the exact date you turned over the funds to Vicky but I believe it wasn’t before they resumed construction in early 2013.
Haissam recommended that we set up a meeting on Saturday, January 11, 2014 at his residence to sort out where the money is. »
97. Un autre courriel daté du 9 avril 2014 de Monsieur Heron à Monsieur Karhani a été déposé par ce dernier sous la côte E-5. Monsieur Heron conteste la date exacte d’envoi de ce courriel mais il ne nie pas son contenu. Les deux premiers paragraphes de se courriel se lisent comme suit :
« Hi Haissam,
I will be preparing a document outlining our verbal agreement between Phoenicia Construction and Christopher Heron/Sophia Cunningham.
The agreement will state that I’ve turned over $15,000 to Phoenicia Construction and $5000 to Vicky K. Andre Daki (mortgage broker), as my deposit for the property.”
98. Finalement, Monsieur Krishna Gupta, lors de son témoignage à l’audience, a déclaré :
- qu’il a reçu 5 000 $ en argent comptant de Monsieur Heron pour l’achat du Bâtiment;
- qu’il continue de détenir ce même montant même au jour de sa déposition à l’audience, soit le 23 mars 2016;
- qu’il refuse de livrer ce montant à l’Entrepreneur ou à la Bénéficiaire ou son mari; il prétend qu’il a le droit de le retenir jusqu’à ce que le montant qui est payable à sa compagnie pour les services rendus à la Bénéficiaire mais qui n’ont jamais été facturés, soit réglé.
99. La Bénéficiaire prétend que l’aveu de l’Entrepreneur qu’il a reçu 15 890,22 $, un montant qui est supérieur à la preuve documentaire qui consiste en copies de traites bancaires émises à l’Entrepreneur et encaissées par lui totalisant 15 100 $ déposées en liasses sous les côtes A-3 et A-7, démontre que l’Entrepreneur a reçu une partie de ces 5 000 $ ce qui affaiblit la crédibilité de Monsieur Gupta.
100. Selon le Tribunal, le témoignage de M. Gupta est clair et non équivoque. Le fait que l’Entrepreneur admet sa réception de 15, 890$ ne suffit pas à miner la crédibilité de M. Gupta , comme le voudrait la Bénéficiaire.
101. Pour ces raisons, le Tribunal arbitral conclut que la Bénéficiaire ne s’est pas déchargée de son fardeau de prouver que l’Entrepreneur a reçu 5 000 $ en argent comptant à titre d’acompte supplémentaire pour l’achat du Bâtiment.
102. Si la Bénéficiaire a l’intention de récupérer ces 5 000 $ en argent comptant versés à Monsieur Gupta, elle pourrait considérer prendre un recours devant un tribunal civil contre Monsieur Gupta ou sa compagnie.
LES COÛTS DE L’ARBITRAGE
103. La procureure de l’Administrateur demande au Tribunal arbitral d’ordonner à l’Entrepreneur de payer 100% des coûts de l’arbitrage.
104. La procureure soumet que la durée de l’enquête de plus de deux jours et demi (2 1/2), et de l’argumentation d’un (1) jour et de la soumission de compléments d’arguments par l’Entrepreneur et la Bénéficiaire à la demande de l’Entrepreneur, ont considérablement et de façon injustifiée prolongé la durée des audiences.
105. Selon elle, ce délai supplémentaire est dû au manque d’organisation du représentant de l’Entrepreneur, Monsieur Karhani. Sa demande est fondée sur l’équité.
106. Les autres parties ne soumettent aucun argument à ce sujet.
DÉCISION
107. La réponse à cette demande de la procureure de l’Administrateur se trouve au premier paragraphe de l’Article 123 du Règlement. Il énonce ce qui suit :
« 123. Les coûts de l’arbitrage sont partagés à parts égales entre l’Administrateur et l’Entrepreneur lorsque ce dernier est le demandeur. »
108. Selon le Tribunal arbitral, les dispositions de ce paragraphe sont claires. Elles obligent le Tribunal arbitral à statuer que les coûts d’arbitrage seront partagés entre l’Administrateur et l’Entrepreneur compte tenu du fait que la demande d’arbitrage provient de l’Entrepreneur.
109. Ces dispositions ne permettent pas au Tribunal arbitral d’y déroger en invoquant sa compétence fondée sur l’équité et qui est prévue à l’Article 116 du Règlement mentionné ci-haut.
CONCLUSION SUPPLÉMENTAIRE
110. Le Tribunal arbitral estime que la valeur totale de la réclamation en litige est de 20 100 $, excluant les taxes.
111. La Loi sur les bâtiments et le Règlement ne contiennent pas de clause privative complète. L’Arbitre a compétence exclusive, sa décision lie les parties et elle est finale et sans appel.
POUR CES MOTIFS, LE TRIBUNAL ARBITRAL:
REJETTE la demande d’arbitrage de l’Entrepreneur;
MODIFIE la décision de l’Administrateur du 9 févier 2015, et
ORDONNE à l’Entrepreneur de rembourser les acomptes qu’il a reçus de QUINZE MILLE HUIT CENT QUATRE-VINGT-DIX DOLLARS ET VINGT-DEUX CENTS (15 890,22 $) à la Bénéficiaire à l’intérieur d’un délai de TRENTE-CINQ (35) jours après la date de la présente sentence, à défaut de quoi tout montant impayé par l’Entrepreneur jusqu’à concurrence de QUINZE MILLE HUIT CENT QUATRE-VINGT-DIX DOLLARS ET VINGT-DEUX CENTS (15 890,22 $) devra être payé par l’Administrateur à la Bénéficiaire dans les 15 jours qui suivront l’expiration du délai précité;
DÉCLARE que les coûts de l’arbitrage seront partagés également entre l’Administrateur et l’Entrepreneur.
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Montréal, le 30 mai 2016 |
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ALBERT ZOLTOWSKI / Arbitre CCAC |
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(1) R.Q. c. B.1-1, r.0.2.
(2) Abitibi-Consolidated inc. c. Doughan, 2008 QCCA 79 (CanLII), paragr. 25 et 26.
Jurisprudence citée et lue :
Régie du Bâtiment du Québec c. 9187-0725 Québec inc, Bureau des Régisseurs, Régie du Bâtiment, Me Gilles Mignault, régisseur, 29 novembre 2013, SOQUIJ AZ-51023835.
9187-0725 Québec inc. c. Régie du Bâtiment du Québec , Commission des relations du travail ) Division de la construction et de la qualification professionnelle), Sophie Migneault, juge administrative,, 16décembre 2013, 2013 QCCRT 0587.
9187-0725 Québec inc. c. Régie du Bâtiment, Commission des relations de travail (Division de la construction et de la qualification professionnelle), François Caron, juge administratif, 22 mai 2014, SOQUIJ AZ-51077310.
Paulette Arsenault et al. et 9158-0001 Québec inc. et La Garantie des Bâtiments résidentiels neufs de l’APCHQ inc., Me Jeffrey Edwards, arbitre, 7 novembre 2008, Centre canadien d’arbitrage commercial (CCAC) S08-200501-NP.
Joëlle Gosselin et al. et Les Maisons Zibeline inc. et La Garantie des Bâtiments résidentiels neufs de l’APCHQ inc., Alcide Fournier, arbitre, 23 août 2007, Société pour la résolution des conflits inc. (SORECONI) 070630002-B.