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ARBITRAGE EN VERTU DU RÈGLEMENT SUR LE PLAN DE GARANTIE DES BÂTIMENTS RÉSIDENTIELS NEUFS

(Décret 841-98 du 17 juin 1998)

(Loi sur le bâtiment, L.R.Q., c. B-1.1)

 

Organisme d’arbitrage autorisé par la Régie du bâtiment : CENTRE CANADIEN D’ARBITRAGE COMMERCIAL (CCAC)

 

 

ENTRE :

 

Madame Chantal Daigneault et monsieur Peter Jones

 

 

                   (ci-après « les Bénéficiaires »),

 

 

 

ET :

 

Les constructions Yves Brunette inc.

 

 

                   (ci-après « L’Entrepreneur »),

 

 

 

ET :

 

La Garantie des bâtiments résidentiels neufs de l’APCHQ inc.

 

 

                   (ci-après « L’Administrateur »).

 

 

 

No dossier CCAC : S09-260101-NP

 

 

 

 

DÉCISION ARBITRALE

 

 

Arbitre :

 

Me Albert Zoltowski

 

 

 

Pour le Bénéficiaire :

 

Madame Chantal Daigneault et monsieur Peter Jones

 

 

 

Pour l’Entrepreneur :

 

Aucun procureur ni représentant

 

 

 

Pour l’Administrateur :

 

Me Luc Séguin


 

 

 

Date de la décision :

 

29 juin 2009

 

 

Identification complète des parties:

 

 

 

Arbitre :

 

Me Albert Zoltowski

1010, de la Gauchetière Ouest

Bureau 950

Montréal (Québec) H3B 2N2

 

 

 

Bénéficiaire :

 

Madame Chantal Daigneault et monsieur Peter Jones

648, rue de l’Estérel

Saint-Lazare (Québec) J7T 3J1

 

 

 

Entrepreneur :

 

Les constructions Yves Brunette inc.

418, rue Chicoine

Vaudreaul-Dorion (Québec) J7V 7E4

 

À l’attention de monsieur Yves Brunette

 

 

 

Administrateur :

 

La Garantie des bâtiments résidentiels neufs de l’APCHQ inc..

5930, boul. Louis-H.-Lafontaine

Anjou (Québec) H1M 1S7

 

À l’attention de Me Luc Séguin

 

 

Mandat :

 

L’arbitre a reçu son mandat du Centre Canadien d’Arbitrage Commercial le 16 février 2009.

 

 

Historique du dossier :

 

 

21 février 2006 :

Signature du contrat préliminaire;

 

 

1er mars 2006 :

Contrat de garantie;

 

 

1er mars 2006 :

Déclaration de réception du bâtiment;

 

 

9 mars 2006 :

Contrat de vente notarié;

 

 

23 mai 2008 :

Lettre de mise en demeure des Bénéficiaires à l’Entrepreneur avec copie à l’Administrateur

 

 

10 juin 2008 :

Nouvelle lettre de mise en demeure des Bénéficiaires à l’Entrepreneur avec copie à l’Administrateur;

 

 

1er octobre 2008 :

Avis de15 jours de l’Administrateur à l’Entrepreneur;

 

 

2 décembre 2008 :

Inspection de l’Administrateur;

 

 

8 décembre 2008 :

Décision de l’Administrateur;

 

 

26 janvier 2009 :

Réception par le Centre Canadien d’Arbitrage Commercial de la demande d’arbitrage des Bénéficiaires datée du 23 janvier 2009;

 

 

16 février 2009 :

Nomination de l’arbitre;

 

 

27 février 2009 :

L’arbitre communique avec les parties pour fixer une date d’audience;

 

 

13 mars 2009 :

Avis d’audience préliminaire et d’audience au mérite transmis aux parties;

 

 

20 mars 2009 :

Audience préliminaire par conférence téléphonique;

 

 

31 mars 2009 :

Deuxième audience préliminaire par conférence téléphonique pour choisir une nouvelle date d’audience;

 

 

12 mai 2009 :

Troisième conférence téléphonique pour choisir une nouvelle date d’audience;

 

 

1er juin 2009 :

Audience;

 

 

29 juin 2009 :

Décision arbitrale

 

 

 

 

DÉCISION

 

Introduction

 

[1]        Il s’agit de problèmes d’installation du revêtement de planches à déclin en vinyle sur la façade arrière et la façade latérale gauche d’une maison unifamiliale située à Saint-Lazare.

 


[2]        Au printemps 2009, les Bénéficiaires transmettent deux lettres de mise en demeure à l’Entrepreneur avec copie à l’Administrateur pour qu’il corrige les problèmes d’installation du parement en planches à déclin en vinyle de leur maison. Malgré ces deux lettres de mise en demeure, suivies quelques mois plus tard par une lettre de l’Administrateur en date du 1er octobre 2008, l’Entrepreneur ne donne aucun signe de vie.

 

[3]        L’Administrateur, suivant la procédure habituelle, procède à l’inspection du bâtiment le 2 décembre 2008 et rend une décision le 8 décembre 2008.

 

[4]        Dans la décision de l’Administrateur, l’inspecteur-conciliateur monsieur François Lalancette rejette la réclamation des Bénéficiaires quant aux problèmes de revêtement de planches à déclin en vinyle à la façade arrière ainsi que sur la façade latérale gauche du bâtiment pour deux raisons. La première est que ces défauts de construction ne rencontrent pas tous les critères de vices cachés. La deuxième est que les Bénéficiaires ont dénoncé ces défauts par écrit, avec une copie de cette dénonciation à l’Administrateur plus de six (6) mois après leur découverte, et ce contrairement aux formalités prescrites par le Règlement[1] (ci-après le « Règlement ») et le contrat de garantie.

 

[5]        Lors de la deuxième audience préliminaire par voie de conférence téléphonique, les parties ont décidé de débattre lors de la première journée de l’audience, la question du dépassement du délai de dénonciation de six (6) mois. Elles ont également convenu que si le tribunal décidait que le délai de six (6) mois n’avait  pas été dépassé, l’autre motif  de la décision de l’Administrateur serait débattu lors d’une nouvelle audience, à savoir si les défauts de construction allégués rencontraient les autres critères de vices cachés.

 

[6]        Le 1er juin 2009, une audience est tenue dans les locaux du Centre Canadien d’Arbitrage Commercial au 1010 De la Gauchetière Ouest, bureau 950 à Montréal en présence des personnes suivantes :

 

            a)         Monsieur Peter Jones (co-Bénéficiaire);

            b)         Madame Chantal Daigneault (co-Bénéficiaire);

            c)         Monsieur François Lalancette (représentant de l’Administrateur);

            d)         Me Luc Séguin (procureur de l’Administrateur).

 

[7]        Le jour même de l’audience, le représentant de l’Entrepreneur, monsieur Yves Brunette, a téléphoné à l’arbitre soussigné pour l’informer qu’il ne pourra pas se présenter à l’audience à cause d’autres engagements.

 

[8]        L’Entrepreneur ne fut donc pas représenté à l’audience malgré qu’il a été dûment convoqué.

 

[9]        Avant l’audience, le procureur de l’Administrateur a déposé son cahier de pièces contenant copie des pièces suivantes :

 

-          Pièce A-1 (en liasse) - contrat préliminaire, promesse d’achat et autres documents;

-          Pièce A-2 - contrat de garantie (copie incomplète) en date du 1er mars 2006;

-          Pièce A-3 - liste préétablie d’éléments à vérifier et réception du bâtiment en date du 1er mars 2006;

-          Pièce A-4 - acte de vente notarié en date du 9 mars 2006;

-          Pièce A-5 - lettre des Bénéficiaires à l’Entrepreneur en date du 23 mai 2008;

-          Pièce A-6 - lettre des Bénéficiaires à l’Entrepreneur en date du 10 juin 2008;

-          Pièce A-7 - demande de réclamation en date du 15 août 2008;

-          Pièce A-8 (en liasse) - avis de 15 jours de l’Administrateur en date du 1er octobre 2008 et récépissé postal;

-          Pièce A-9 (en liasse) - photographies;

-          Pièce A-10 (en liasse) - décision de l’Administrateur en date du 8 décembre 2008 et récépissés postaux;

-          Pièce A-11 (en liasse) - notification de la demande d’arbitrage en date du 26 janvier 2009 et demande d’arbitrage.

 

[10]      Les Bénéficiaires à leur tour déposent comme pièce les documents suivants :

-          Pièce B-1 - (en liasse) rapport d’expert préparé par ProspecPlus, génie-conseil, signé par monsieur Claude Guertin, ingénieur, avec photos libellées C-1 à C-21.

 

[11]      Étant donné que l’expert Claude Guertin n’était pas présent à l’audience, les parties se sont entendues que les Bénéficiaires ont le droit de soumettre en preuve seulement les photos libellées C-1 à C-21 annexées à la pièce B-1, mais pas son rapport.

 

Juridiction

 

[12]      Aucune objection préliminaire à la constitution du tribunal ou à la tenue de l’audition n’ayant été soulevée, le tribunal déclare que juridiction lui est acquise.

 

Question en litige précisée

 

[13]      Le tribunal a rappelé aux parties que les Bénéficiaires ont le fardeau de prouver qu’ils ont découvert les défauts de construction dans un délai raisonnable qui ne peut pas excéder six (6) mois de la date de leur découverte.


Toutefois, lorsque, selon la preuve qui devra être soumise à l’enquête, le défaut apparaît graduellement, la date de sa découverte est celle à laquelle les Bénéficiaires ont pu soupçonner sa gravité et son étendue.

 

Preuve

 

Témoignage de monsieur Peter Jones - Bénéficiaire

 

[14]      Monsieur Peter Jones, un des deux Bénéficiaires, dépose en premier.

 

[15]      Il déclare que, malgré le fait que lui et son épouse, madame Chantal Daigneault (l’autre Bénéficiaire) ont signé une déclaration de réception du bâtiment (Pièce A-3) le 1er mars 2006, le revêtement de planches à déclin en vinyle n’était pas encore installé à cette date.

 

[16]      Ce n’est qu’au mois d’avril 2006 que ce revêtement a été installé.

 

[17]      Au mois de juillet 2006, le témoin aperçoit le désagrafage de certaines planches à clin en vinyle, causant ainsi un espacement entre les planches, en dessous du toit à l’arrière de sa maison (photo C-6 de la Pièce B-1).

 

[18]      Également au mois de juillet 2006, le témoin découvre que certaines planches à déclin en vinyle sont bombées sur la façade latérale gauche de sa maison et particulièrement près de la sortie extérieure de la hotte de cuisinière (photos C-3 et C-3A de la pièce B-1).

 

[19]      Le Bénéficiaire a immédiatement appelé l’Entrepreneur. Ce dernier vient constater les problèmes quelques mois plus tard, fin septembre/début octobre 2006.

 

[20]      À la demande de l’Entrepreneur, un sous-traitant vient en novembre 2006 et procède à une première réparation du vinyle sur la façade latérale gauche près de la sortie de la hotte de cuisinière. Cette réparation s’est révélée être seulement une légère amélioration mais pas une solution adéquate au problème ci-haut mentionné ci-haut sur le côté gauche du bâtiment.

 

[21]      Le sous-traitant n’a pas voulu réparer le problème du revêtement sur la façade arrière du bâtiment (photo C-6 de la Pièce B-1) car « l’Entrepreneur ne lui en avait pas parlé ».

 

[22]      Déçu, le Bénéficiaire téléphone à l’Entrepreneur qui lui promet de s’occuper de la réparation du revêtement sur la façade arrière du bâtiment et lui envoie Martin, son employé clé, quelque…. 18 mois plus tard, soit au printemps 2008.

 

[23]      Arrivé à la résidence des Bénéficiaires au printemps 2008, Martin, l’employé-clé de l’Entrepreneur annonce aux Bénéficiaires que la couleur des planches à déclin en vinyle qui recouvrent leur maison n’existe plus.

 

[24]      Lorsque le témoin appelle l’Entrepreneur, ce dernier lui fait savoir qu’il ne se sent plus concerné par ces problèmes et lui conseille de contacter l’Administrateur.

 

[25]      Le témoin déclare alors qu’il a envoyé au printemps 2008 une première lettre de dénonciation à l’Entrepreneur. Aucune copie de cette lettre n’est déposée en preuve à l’audience.

 

[26]      Ensuite, les Bénéficiaires envoient une lettre à l’Entrepreneur avec copie à l’Administrateur en date du 23 mai 2008 (Pièce A-5) et ils reviennent à la charge une autre fois en expédiant une nouvelle lettre de dénonciation à l’Entrepreneur avec copie à l’Administrateur, le 10 juin 2008 (Pièce A-6).

 

[27]      L’Entrepreneur n’a pas réagi à ces lettres de dénonciation.

 

[28]      Le témoin termine sa déposition en affirmant qu’il s’est rendu compte que le revêtement de sa maison a été mal installé causant ainsi des bombements et des ondulations à plusieurs endroits non seulement sur la façade arrière et sur la façade latérale gauche mais également sur le revêtement du devant du bâtiment. De plus, il a découver la présence d’infiltration d’eau sur la façade avant de sa résidence. Il s’est rendu compte de toute la gravité et de l’étendue des problèmes seulement le 25 mars 2009 lors de l’inspection de sa maison par l’expert Claude Guertin, ingénieur, qui a ensuite rédigé un rapport (Pièce B-1).

 

Témoignage de madame Chantal Daigneault

 

[29]      Le deuxième témoin est madame Chantal Daigneault co-Bénéficiaire avec son mari, monsieur Peter Jones dans la présente cause.

 

[30]      Elle témoigne qu’elle a d’effectué plusieurs appels téléphoniques afin de rejoindre monsieur Yves Brunette, l’âme dirigeante de l’Entrepreneur.

 

[31]      Chaque fois, elle se butait au personnel de l’Entrepreneur qui lui expliquait l’impossibilité de monsieur Brunette de prendre son appel téléphonique ou qui lui promettait que monsieur Brunette la contacterait bientôt, des promesses qui s’avéraient vaines.

 

Preuve de l’Administrateur

 

[32]      L’Administrateur n’a pas présenté aucun témoin malgré le fait que monsieur François Lalancette, l’auteur de la décision de l’Administrateur était présent à l’audience.

 

Prétention des parties

 

[33]      Les prétentions des parties peuvent être groupées sous deux grandes rubriques :

 


La gravité et l’étendue

 

[34]      Les Bénéficiaires prétendent qu’ils n’ont pas de connaissances dans le domaine de la construction. Ils ont réalisé la gravité et l’étendue des problèmes reliés à l’installation du revêtement de leur résidence seulement en mars 2009 lors de l’inspection par monsieur Claude Guertin, ingénieur.

 

[35]      L’Administrateur plaide que les Bénéficiaires ont constaté la gravité et l’étendue du problème déjà en juillet 2006 quand ils ont demandé, pour la première fois, à l’Entrepreneur de faire les réparations et que ce dernier, par l’entremise d’un sous-traitant, les a effectuées à l’automne 2006, quoique de façon insatisfaisante. Par conséquent, selon l’Administrateur, la découverte a eu lieu en juillet 2006 et marque le début du délai de dénonciation par écrit de six mois.

 

Le comportement de l’Entrepreneur

 

[36]      Sous la deuxième rubrique, les parties traitent du comportement de l’Entrepreneur et son effet sur le délai de dénonciation de six mois.

 

[37]      Les Bénéficiaires prétendent qu’ils ont dénoncé verbalement les problèmes du revêtement à l’Entrepreneur depuis juillet 2006. Ils se sont fiés aux promesses verbales de l’Entrepreneur à l’effet que les réparations seraient effectuées et c’est seulement quand ces promesses n’ont pas été tenues qu’ils ont envoyé la mise en demeure du 23 mai 2008 suivie d’une deuxième mise en demeure du 10 juin 2008. Ils précisent qu’ils ont toujours été de bonne foi et se sentent des victimes de pratiques douteuses de l’Entrepreneur.

 

[38]      L’Administrateur plaide que le comportement de l’Entrepreneur (la réparation par le sous-traitant à l’automne 2006, la visite de monsieur Brunette à l’automne 2006 et la deuxième visite de l’employé de l’Entrepreneur, Martin, (au printemps 2008) pourrait être interprété comme une reconnaissance de sa responsabilité mais cette reconnaissance ne suspend pas, n’interrompt pas et ne prolonge pas le délai de six mois requis par le Règlement qui est d’ordre public.

 

Analyse et décision

 

[39]      Étant donné que la réception du bâtiment a eu lieu le 1er mars 2006 et la dénonciation écrite à l’Entrepreneur et à l’Administrateur fut effectuée le 23 mai 2008, soit dans la troisième année de la date de réception, les défauts de construction allégués par les Bénéficiaires doivent rentrer dans la catégorie des « vices cachés » ou des « vices de conception, de construction ou de réalisation et des vices de sol au sens de l’article 2118 du Code civil du Québec » pour être couverts par la garantie,.

 


[40]      Ni les Bénéficiaires, ni les autres parties n’ont plaidé ni même mentionné la possibilité que les problèmes de parement de vinyle qui font l’objet de la présente cause sont des vices de conception, de construction ou de réalisation ou des vices de sol au sens de l’article 2118 du Code civil du Québec.

 

[41]      Conséquemment, le tribunal doit se pencher seulement  sur les dispositions du Règlement traitant de « vices cachés ».

 

[42]      Le paragraphe 4 de l’article 10 du Règlement qui traite des vices cachés se lit comme suit :

 

            « 10.   La garantie d’un plan dans le cas de manquement de l’entrepreneur à ses obligations légales ou contractuelles après la réception du bâtiment doit couvrir :

 

1.     

2.     

3.     

4.      La réparation des vices cachés au sens de l’article 1726 ou de l’article 2103 du Code civil qui sont découverts dans les 3 ans suivant la réception du bâtiment et dénoncés, par écrit, à l’entrepreneur et à l’administrateur dans un délai raisonnable, lequel ne peut excéder 6 mois de la découverte des vices cachés au sens de l’article 1739 du Code civil; »

 

[43]      L’article 1739 du Code civil du Québec précise que :

 

            « Art. 1739…Ce délai commence à courir, lorsque le vice apparaît graduellement, du jour où l’acheteur a pu soupçonner la gravité et l’étendue.

 

            …. »

 

[44]      Dans un premier temps, le tribunal doit déterminer la date à laquelle les Bénéficiaires ont pu soupçonner la gravité et l’étendue des problèmes affectant le revêtement de planches à déclin en vinyle sur la façade arrière et la façade latérale gauche de leur résidence. Cette date marque la date de leur découverte de ces problèmes.

 

[45]      Les Bénéficiaires ont soumis en preuve seulement deux dates : soit un jour indéterminé au mois de juillet 2006 lorsqu’ils ont contacté pour la première fois l’Entrepreneur ou le 25 mars 2009 qui correspond à la date de l’inspection par l’ingénieur Guertin qui a précédé la rédaction de son rapport (Pièce B-1).

 

[46]      Selon la preuve soumise, le tribunal estime que dès juillet 2006, les Bénéficiaires avaient un soupçon suffisant de la gravité et de l’étendue des problèmes liés au revêtement de vinyle sur les façades arrière et latérale gauche de leur résidence pour qu’ils appellent l’Entrepreneur et lui demandent de procéder aux réparations nécessaires.

 

[47]      Leur soupçon était suffisant pour marquer la date de leur découverte du vice, laquelle correspond au début du délai de six mois pour les fins de la dénonciation écrite à l’Entrepreneur et à l’Administrateur même si à cette date, soit en juillet 2006, ils n’avaient pas encore une bonne connaissance de toute la gravité et de toute l’étendue des problèmes précités. Ils n’ont acquis cette connaissance que beaucoup plus tard, soit  lors de l’inspection par l’íngénieur Guertin en mars 2009.

 

[48]      Le tribunal vient donc à la conclusion que le délai de dénonciation a commencé à courir en juillet 2006. Il s’ensuit qu’une dénonciation écrite à l’Entrepreneur et à l’Administrateur aurait dû leur être envoyée au plus tard à l’expiration du délai de six mois, soit en janvier 2007 pour que ces défauts de construction soient couverts par la garantie selon les exigences du Règlement et du contrat de garantie.

 

[44]      Avant de continuer son analyse, le tribunal doit se demander est-ce que la dénonciation verbale de juillet 2006 peut remplacer une dénonciation écrite aux termes du paragraphe 4 de l’article 10 du Règlement cité au paragraphe 42 ci-haut?

 

[45]      Selon le tribunal, ce paragraphe prévoit clairement que la dénonciation doit être par écrit et une dénonciation verbale ne suffit pas.

 

[46]      Le tribunal doit maintenant se pencher sur les prétentions des parties décrites sous la deuxième rubrique mentionnée ci-haut aux paragraphes 37 et 38. 

 

[47]      Est-ce que la première promesse de l’Entrepreneur aux Bénéficiaires d’effectuer la réparation lors de la dénonciation de juillet 2006, suivie de la réparation partielle et inadéquate en octobre/novembre 2006 par un sous-traitant de l’Entrepreneur et ensuite la promesse verbale de l’Entrepreneur en novembre 2006 de poursuivre les réparations ont eu comme effet de suspendre, interrompre ou prolonger le délai de six mois qui a débuté en juillet 2006 et qui s’est terminé le 23 mai 2008?

 

[48]      Pour pouvoir considérer les paroles ou les gestes de l’Entrepreneur comme une cause de suspension, d’ interruption, ou de prolongement du délai de six (6) mois, le tribunal doit s’appuyer sur une règle de droit. Lorsque les circonstances le justifient, le tribunal peut faire aussi appel à l’équité[2].

 

[49]      Malgré la sympathie du tribunal envers les Bénéficiaires qui se sont fait berner par les promesses malhonnêtes de l’Entrepreneur, le tribunal ne retrouve pas de circonstances appropriées pour qu’il puisse faire appel à l’équité.

 

[50]      Le tribunal constate qu’entre la dernière promesse de l’Entrepreneur de faire des nouvelles réparations en novembre 2006 et la dénonciation écrite du 23 mai 2008, quelque 18 mois se sont écoulés.

 

[51]      Pourquoi les Bénéficiaires n’ont pas jugé bon d’envoyer une dénonciation écrite à l’Entrepreneur et à l’Administrateur dans les semaines qui ont suivi cette promesse de l’Entrepreneur en novembre 2006 plutôt que d’attendre jusqu’au 23 mai 2008 pour le faire? Aucune preuve convaincante n’a été soumise au tribunal à ce sujet.

 

[52]      En ce qui concerne une règle de droit qui pourrait aider les Bénéficiaires, il y aurait l’article 19.1 du Règlement. Dans situations appropriées, cet article peut aider un ou des bénéficiaires qui n’ont pas respecté un délai de recours ou de mise en œuvre de la garantie. Malheureusement pour les Bénéficiaires, cet article ne peut pas être invoqué dans la présente cause. Selon le décret[3], l’article 19.1 s’applique seulement aux bâtiments dont les travaux de construction débutent après le 7 août 2006. Dans cette cause, la construction de la résidence des Bénéficiaires a débuté avant le 7 août 2006.

 

[53]      En conclusion, le tribunal déclare que les Bénéficiaires n’ont pas dénoncé par écrit à l’Entrepreneur et à l’Administrateur les défauts de construction affectant le revêtement de planches à déclin en vinyle sur la façade arrière et la façade latérale gauche de leur résidence. Conséquemment ces défauts ne sont pas couverts par la garantie de l’Administrateur.

 

Conclusion

 

[54]      La Loi sur les bâtiments ainsi que le Règlement ne contiennent pas de clauses privatives complètes. L’arbitre a compétence exclusive, sa décision lie les parties et elle est finale et sans appel.

 

[55]      Selon l’article 21 du Règlement, lorsque le demandeur est le Bénéficiaire, les coûts de l’arbitrage sont à la charge de l’Administrateur à moins que le Bénéficiaire n’obtienne gain de cause sur aucun des aspects de sa réclamation, auquel cas, l’arbitre départage ces coûts.

 

[56]      De plus, aux termes de l’article 22 du Règlement, l’arbitre doit statuer, s’il y a lieu quant au quantum des frais raisonnables d’expertise pertinents que l’Administrateur doit rembourser au demandeur lorsque celui-ci a gain de cause total ou partiel.

 

[57]      Dans cette affaire, les Bénéficiaires n’ont obtenu gain de cause sur aucun des aspects de leur réclamation. Toutefois, vu les circonstances, le tribunal considère qu’il serait juste que les coûts de l’arbitrage soient payés comme suit : 100 $ par les Bénéficiaires et le solde par l’Administrateur.

 


[58]      Pour ce qui est des frais d’expertise payables par les Bénéficiaires pour la préparation de l’expertise cotée comme Pièce B-1, étant donné que ce rapport n’a pas été reçu en preuve à l’exception des photos cotées C-1 à C-21 et que son auteur ne s’est pas présenté à l’audience, l’Administrateur n’aura pas à les supporter.

 

[59]      En ce qui concerne la valeur totale de la réclamation des Bénéficiaires, il n’y a pas de consensus sur ce point entre les Bénéficiaires et l’Administrateur. Selon l’Administrateur, ce montant se situe entre 5 000 $ et 10 000 $. Selon les Bénéficiaires, il s’agirait plutôt d’un montant entre 12 000 $ et 15 000 $. Le tribunal estime que la valeur totale de la réclamation en litige des Bénéficiaires est entre 8 000 $ et 14 000 $, excluant les taxes.

 

 

POUR CES MOTIFS, LE TRIBUNAL D’ARBITRAGE :

 

REJETTE la demande d’arbitrage des Bénéficiaires;

 

DÉCLARE que les Bénéficiaires sont conjointement et solidairement responsables de payer 100 $ des frais de cet arbitrage et que l’Administrateur est tenu de supporter le solde de ces frais;

 

DÉCLARE que l’Administrateur n’est pas tenu de payer quelques frais d’expertise que ce soit.

 

 

 

Montréal, le 29 juin 2009

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Me ALBERT ZOLTOWSKI

Arbitre  / CCAC

 



[1]               Règlement sur le plan de garantie des bâtiments résidentiels neufs, R.Q.c. B-1.1, r.O.2.

[2]               Article 116 du Règlement

[3]               Décret 39-2006 du 25 janvier 2006 publié dans la Gazette officielle du Québec, le 8 février 2006, Partie II, pages 994 et ss.