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ARBITRAGE EN VERTU DU RÈGLEMENT SUR LE PLAN

DE GARANTIE DES BÂTIMENTS RÉSIDENTIELS NEUFS

(décret 841-98 du 17 juin 1998)

 

Organisme d'arbitrage autorisé par la Régie du bâtiment :

Le Groupe d'arbitrage et de médiation sur mesure (GAMM)

 

 

 

ENTRE :

Hélène LAPOINTE et Marc DIVINCENZO

(ci-après les « bénéficiaires »)

 

ET :

A à Z Construction-Rénovation inc.

(ci-après l'« entrepreneur »)

 

ET :

La Garantie des Maîtres Bâtisseurs inc.

(ci-après l'« administrateur »)

 

 

No dossier GMB : A-20347 / U-509228

No dossier GAMM : 2009-08-004

 

 

SENTENCE ARBITRALE

 

 

Arbitre :

M. Claude Dupuis, ing.

 

Pour les bénéficiaires :

Me James Bonhomme

 

Pour l'entrepreneur :

M. Christian Crousset

 

Pour l'administrateur :

Me Marc Baillargeon

 

Date d’audience :

7 octobre 2009

 

 

Notes et autorités reçues jusqu'au :

13 octobre 2009

 

Lieu d'audience :

Granby

 

Date de la sentence :

6 novembre 2009

 

I : INTRODUCTION

[1]          À la demande de l'arbitre, l'audience s'est tenue à la résidence des bénéficiaires.

[2]          À la suite d'une réclamation des bénéficiaires auprès de l'administrateur, ce dernier a émis un rapport de décision daté du 23 juin 2009.

[3]          Insatisfaits des conclusions de l'administrateur, les bénéficiaires, en date du 13 juillet 2009 et du 31 août 2009, adressaient au Groupe d'arbitrage et de médiation sur mesure (GAMM) une demande d'arbitrage relativement aux éléments suivants du rapport précité :

B       Échangeur d'air

B       Plafond (joints de plâtre)

B       Plafond (peinture)

B       Cadrages de porte

B       Mur (têtes de vis)

B       Coulis (bain)

B       Portes de garde-robes

B       Quart de rond

B       Scellant (bain et lavabo)

B       Plafond (sablage)

B       Chauffage

B       Joints de placoplâtre (craqués)

B       Mur (salle de lavage)

B       Électricité (division intérieure)

[4]          En cours d'enquête, en plus des représentants des parties, les témoins suivants sont intervenus :

B       Mme Hélène Lapointe, bénéficiaire

B       M. Vincent Maruca, entrepreneur en construction

B       M. Réal Lemire, président du syndicat de copropriété

B       M. Marco Caron, conseiller technique, La Garantie des Maîtres Bâtisseurs inc.

[5]          Il s'agit ici d'une partie privative d'un bâtiment détenu en copropriété divise.

II : DÉCISION ET MOTIFS

A)        Échangeur d'air

[6]          L'entrepreneur n'a pas installé d'échangeur d'air dans l'unité d'habitation concernée.

[7]          Cette absence a été notée par les bénéficiaires sur le formulaire d'inspection préréception daté du 15 août 2008. (Cette propriété cumule deux formulaires d'inspection préréception, soit celui daté du 25 juillet 2008 et l'autre daté du 15 août 2008; ce dernier sera retenu par le tribunal un peu plus loin dans la présente sentence.)

[8]          La décision de l'administrateur relativement à cet élément se lit comme suit :

1.   Échangeur d'air

      Décision de GMB

      Ce point porte sur un élément faisant partie des parties communes de l'immeuble en copropriété.

      En effet, ce point devra faire l'objet d'une demande de conciliation par le représentant du Syndicat des copropriétaires pour les parties communes de l'immeuble en copropriété.

      Par conséquent, GMB ne peut reconnaitre [sic] ce point en vertu du texte de garantie.

[9]          De l'avis du soussigné, les échangeurs d'air, les unités d'air climatisé, les chauffe-eau situés à l'intérieur des bornes de chacune des parties privatives appartiennent exclusivement au propriétaire de ces dernières; ces éléments doivent donc être traités comme une partie privative et non comme une partie commune.

[10]            Ces éléments ne peuvent non plus être considérés comme une partie commune à usage restreint; en effet, les parties communes à usage restreint sont généralement situées à l'extérieur des bornes de chacune des parties privatives (par exemple, les espaces de stationnement réservés à chacun des copropriétaires).

[11]            L'extrait de la Déclaration de copropriété relative au présent bâtiment qui a été déposé par le procureur des bénéficiaires ne va pas à l'encontre de cette pratique.

[12]            Le tribunal accepte donc que la réclamation des bénéficiaires relativement à l'échangeur d'air soit traitée dans le présent cadre.

[13]            Mme Hélène Lapointe, bénéficiaire, témoigne qu'elle a conclu une entente verbale avec l'entrepreneur à l'effet d'obtenir un échangeur d'air pour un montant de 5 000 $ supplémentaire; elle a donc payé 130 000 $, taxes incluses, pour sa propriété, alors que le prix régulier était de 125 000 $, taxes incluses, comme en fait foi une photo (pièce B-1) d'un panneau publicitaire de l'entrepreneur affiché en 2008.

[14]            La bénéficiaire admet que les autres condos de la copropriété ne contiennent pas d'échangeur d'air; elle explique que dans son cas, cet appareil était requis à cause de l'état de santé de son conjoint et, à cet égard, elle dépose une ordonnance médicale.

[15]            Mme Lapointe admet également que l'échangeur d'air n'est pas inscrit au contrat, car l'entrepreneur lui aurait alors affirmé, en février 2008, que cet appareil était obligatoire.

[16]            Le tribunal soumet que ce témoignage de Mme Lapointe n'a été ni questionné ni contredit par le représentant de l'entrepreneur présent lors de l'audience.

[17]            En présence de ce témoignage non contredit de la bénéficiaire, en présence d'une preuve prépondérante à l'effet que cette unité d'habitation a été payée 5 000 $ plus cher que le prix régulier, en présence d'un écrit médical justifiant la possession d'un échangeur d'air et justifiant l'insistance des bénéficiaires concernant l'installation de cet appareil, le tribunal conclut qu'il ne s'agit pas ici d'une mésentente contractuelle, mais plutôt d'une obligation contractuelle.

[18]            Le tribunal ORDONNE donc à l'entrepreneur de fournir et installer un échangeur d'air dans l'unité d'habitation des bénéficiaires, selon les règles de l'art, et lui ACCORDE un délai de quarante-cinq (45) jours à compter de la présente pour terminer les travaux.

[19]            À défaut par l'entrepreneur de se conformer à l'ordonnance précédente, le tribunal ORDONNE à l'administrateur de procéder aux travaux correctifs requis, selon les règles de l'art, dans les quatre-vingt-dix (90) jours de la présente.

B)        Plafond (joints de plâtre)

            Plafond (peinture)

            Cadrages de porte

            Mur (têtes de vis)

            Coulis (bain)

            Portes de garde-robes

            Scellant (bain et lavabo)

[20]            Voici la décision de l'administrateur relativement à l'ensemble de ces éléments de réclamation :

Tel qu'il est mentionné au texte de garantie, pour être couvert par le Règlement sur le plan de garantie, les malfaçons existantes et apparentes doivent avoir été dénoncées par écrit sur le formulaire de GMB : Liste d'éléments à vérifier.

Compte tenu que ces points étaient décelables lors de la prise de possession de l'unité résidentielle, il aurait fallu, pour être considéré [sic] par GMB, qu'ils soient inscrits sur la Liste d'éléments à vérifier, signée par les parties le 28 mars 2008.

Après vérification, GMB constate que ces points n'ont pas été inscrits sur cette liste.

Par conséquent, GMB ne peut reconnaitre [sic] ces points en vertu du texte de garantie.

[21]            En cours d'enquête, l'administrateur a modifié la date du 28 mars 2008 pour celle du 25 juillet 2008.

[22]            En effet, un premier formulaire d'inspection préréception a été signé par l'entrepreneur et les bénéficiaires le 25 juillet 2008, et ce document ne fait état d'aucune déficience.

[23]            Toutefois, un second formulaire d'inspection préréception a été signé par l'entrepreneur et les bénéficiaires le 15 août 2008, ce dernier document indiquant un lot de déficiences.

[24]            Ces deux documents sont entachés d'erreur. Le premier, soit celui du 25 juillet 2008, a été signé par les bénéficiaires sans en connaître, selon leur témoignage, la portée. Le second, soit celui daté du 15 août 2008, aurait été signé en blanc par l'entrepreneur et par la suite complété par les bénéficiaires.

[25]            En présence de deux documents entachés, le tribunal s'interroge à savoir lequel des deux correspond le plus à la situation.

[26]            Selon la preuve recueillie, c'est le deuxième document d'inspection préréception, soit celui du 15 août 2008, qui s'apparente le plus à la réalité.

[27]            En effet, le 25 juillet 2008, les travaux n'étaient pas assez avancés dans l'unité d'habitation pour être en mesure d'effectuer la préréception; de fait, les travaux n'étaient pas terminés, il n'y avait pas d'électricité ni d'eau chaude, et l'état des lieux ne permettait pas l'utilisation des meubles.

[28]            La date de livraison promise était le 23 juin 2008, alors que la prise de possession a eu lieu le 1er octobre 2008.

[29]            Les photos prises à l'intérieur de l'unité en juillet 2008 démontrent un vaste chantier; les bénéficiaires y habitaient en camping.

[30]            Dans de telles conditions, la réception d'une partie privative est impensable, car il ne devrait subsister que quelques menus travaux à parachever et à corriger.

[31]            L'acte d'inspection préréception du 15 août 2008 est donc plus collé à la réalité, et c'est ce dernier que le tribunal va retenir.

[32]            Après vérification, M. Marco Caron, conseiller technique pour l'administrateur, a admis en cours d'enquête que les éléments de réclamation ci-devant listés sont bien inscrits dans le formulaire d'inspection préréception du 15 août 2008.

[33]            La visite des lieux a démontré que tous les éléments énumérés plus haut présentent des malfaçons.

[34]            Au plafond, les joints de plâtre sont apparents; après réparation, il faudra les repeindre.

[35]            Sur les cadrages de porte, les têtes de clou sont visibles; par ailleurs, certains cadrages ne sont pas de niveau.

[36]            Sur les murs, les têtes de vis sont aussi apparentes.

[37]            L'enveloppe du bain n'est pas de niveau, les joints de coulis sont inégaux; l'ensemble est inesthétique; les joints de silicone autour du lavabo sont non conformes. Le représentant de l'entrepreneur a avoué qu'il aurait lui-même fait un meilleur travail.

[38]            La face intérieure des portes de garde-robes n'a pas été peinte.

[39]            M. Caron, conseiller technique pour l'administrateur, a admis que tous ces éléments de la réclamation présentaient des malfaçons.

[40]            Pour ces motifs, le tribunal ORDONNE donc à l'entrepreneur d'effectuer les correctifs nécessaires pour tous les éléments ci-devant énumérés, selon les règles de l'art et conformément aux plans et devis; le soussigné ACCORDE à l'entrepreneur un délai de trente (30) jours à compter de la présente pour compléter ces travaux.

[41]            À défaut par l'entrepreneur de se conformer à l'ordonnance précédente, le tribunal ORDONNE à l'administrateur de procéder aux travaux correctifs requis, selon les règles de l'art, dans les soixante (60) jours de la présente.

C)        Quart de rond

[42]            Cet élément a aussi été dénoncé dans le formulaire d'inspection préréception du 15 août 2008.

[43]            Toutefois, aucune norme ne fait référence à l'absence de quart de rond, et la visite des lieux n'a pas démontré de malfaçon, ni technique ni esthétique.

[44]            Pour ces motifs, la réclamation ayant trait à cet élément est REJETÉE.

D)        Plafond (sablage)

            Joints de placoplâtre (craqués)

            Mur (salle de lavage)

            Électricité (division intérieure)

[45]            En cours d'enquête, les bénéficiaires ont retiré ces éléments de leur demande d'arbitrage.

[46]            Le tribunal PREND ACTE du désistement des bénéficiaires relativement aux éléments ci-devant mentionnés.

E)        Chauffage (salon)

[47]            Les bénéficiaires prétendent que durant l'hiver, le chauffage est insuffisant dans la grande pièce qui constitue à la fois le salon, la salle à dîner et la cuisine.

[48]            Suivant les plans qui ont été déposés (pièce B-6), cette pièce rectangulaire mesure 32 pieds de longueur par 18 pieds de largeur, soit environ 576 pieds2.

[49]            Des quatre murs de cette pièce, un seul de 18 pieds donne sur l'extérieur et il est en grande partie composé d'une porte patio.

[50]            Vu de l'intérieur, le plan indique une unité de chauffage de 1 250 watts et une autre de 750 watts, situées respectivement à gauche et à droite de la porte patio.

[51]            Contrairement au plan, l'entrepreneur a plutôt installé une seule unité de chauffage (l'appareil en question aurait une puissance de 2 000 watts, tel qu'indiqué dans le rapport de décision de l'administrateur), laquelle est située sur le mur latéral gauche, tout près du mur extérieur; il s'agit d'un ventilo-converteur ou encore d'un générateur d'air chaud à air pulsé.

[52]            Mme Lapointe a témoigné que pour obtenir dans cette pièce une température intérieure de 60 à 70° F l'hiver dernier, elle a fait l'acquisition d'un foyer électrique qu'elle a placé sur le mur latéral droit, tout près du mur extérieur; d'après ce que nous avons constaté lors de la visite des lieux, cette unité d'appoint, considérant le type et la dimension, possède une puissance d'un minimum de 1 000 watts.

[53]            Premier constat : l'entrepreneur n'a pas suivi le plan d'installation de chauffage; le plan indique deux unités de chauffage, pour un total de 2 000 watts, de chaque côté de la porte patio; l'entrepreneur n'a installé qu'une seule unité de chauffage de 2 000 watts sur le mur latéral gauche adjacent à la porte patio.

[54]            Il s'agit là d'une mauvaise répartition, car vu la largeur de la pièce (18 pieds), une seule unité, quelle que soit sa puissance, ne suffira pas à combattre l'air froid pénétrant par ce mur extérieur.

[55]            Voilà pourquoi les bénéficiaires ont témoigné à l'effet que durant l'hiver, le froid pénétrait jusqu'à l'autre extrémité de la pièce, soit la cuisine.

[56]            Deuxième constat : l'administrateur a témoigné que l'usage courant recommande une puissance de chauffage de 6 watts/pied2. La puissance requise pour cette pièce, dont la superficie est de 576 pieds2, serait donc de 3 456 watts; or, l'installation de l'entrepreneur ne procure que 2 000 watts, et cette puissance, encore une fois, ne respecte pas la répartition prévue au plan.

[57]            Pour les pays nordiques, certains fabricants d'appareils générateurs d'air chaud à air pulsé recommandent 8 watts/pied2 pour les maisons bien isolées et 10 watts/pied2 pour les maisons de moindre isolation.

[58]            L'hiver dernier, les bénéficiaires ont utilisé la puissance de 2 000 watts de l'appareil installé par l'entrepreneur ainsi que la puissance de 1 000 watts d'une unité d'appoint, pour un total de 3 000 watts, ce qui se rapproche du facteur de 6 watts/pied2 spécifié par l'administrateur dans son témoignage.

[59]            Considérant que le plan d'installation n'a pas été suivi par l'entrepreneur et considérant que les bénéficiaires, avec leur foyer électrique d'appoint, ont utilisé une puissance de chauffage se rapprochant des normes reconnues, la réclamation concernant le chauffage du salon, de la salle à dîner et de la cuisine est favorablement ACCUEILLIE.

[60]            Pour ces motifs, le tribunal ORDONNE à l'entrepreneur d'installer dans ladite pièce les unités de chauffage appropriées, selon les règles de l'art; le soussigné ACCORDE à l'entrepreneur un délai de trente (30) jours à compter de la présente pour compléter ces travaux.

[61]            À défaut par l'entrepreneur de se conformer à l'ordonnance précédente, le tribunal ORDONNE à l'administrateur de procéder aux travaux correctifs requis, selon les règles de l'art, dans les quarante-cinq (45) jours de la présente.

F)         Chauffage (salle de bain)

[62]            Cet élément ne faisait pas explicitement partie de la réclamation originale auprès de l'administrateur ni de la demande d'arbitrage auprès du GAMM.

[63]            Il n'y a pas eu d'objection de la part de l'administrateur ni de l'entrepreneur à ce que cet élément soit traité dans le présent cadre.

[64]            Selon le plan déposé, l'unité de chauffage de la salle de bain n'est pas située à l'endroit indiqué. L'appareil est plutôt situé tout près de la cuvette de toilette.

[65]            Selon le conseiller technique de l'administrateur, toute unité de chauffage doit être située à un mètre d'une source ou d'une valve d'eau, ce qui n'est pas le cas actuellement.

[66]            Cet élément de preuve n'a pas été contredit.

[67]            Pour ces motifs, la réclamation ayant trait à cet élément est favorablement ACCUEILLIE.

[68]            Le tribunal ORDONNE donc à l'entrepreneur d'installer l'unité de chauffage de la salle de bain selon les plans et devis et, le cas échéant, selon les règles de l'art; le soussigné ACCORDE à l'entrepreneur un délai de trente (30) jours à compter de la présente pour compléter ces travaux.

[69]            À défaut par l'entrepreneur de se conformer à l'ordonnance précédente, le tribunal ORDONNE à l'administrateur de procéder aux travaux correctifs requis, selon les règles de l'art, dans les soixante (60) jours de la présente.

Résumé

[70]            Si l'on fait abstraction des réclamations abandonnées par les bénéficiaires en cours d'enquête, toutes les autres réclamations soumises par ces derniers, sauf celle concernant les quarts de rond, sont favorablement ACCUEILLIES par le tribunal.

[71]            Conformément à l'article 37 du Règlement sur le plan de garantie des bâtiments résidentiels neufs, les coûts du présent arbitrage sont entièrement à la charge de l'administrateur.

 

BELOEIL, le 6 novembre 2009.

 

 

 

 

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Claude Dupuis, ing., arbitre