Canada Centre canadien d’arbitrage commercial
PROVINCE DE QUÉBEC C.C.A.C.
Dossier C.C.A.C. S06-0608-NP
Dossier GARANTIE 039044
Madame Rita Robert
3239, François-de-Villars
Arrondissement Beauport
Québec (Québec)
Bénéficiaire
c.
La Garantie des maisons neuves de
l'A.P.C.H.Q.
2825, boul. Wilfrid-Hamel
Québec (Québec)
Représentant : Mr Jacques Breault
Procureur : Me François Laplante
Administrateur du plan de garantie
et
Habitations Consultants H.L. inc.
104, Seigneuriale
Québec (Québec)
Représentant : Mr Franks Hayes
Entrepreneur
SOMMAIRE DES ÉVÉNEMENTS ET DE L’OBJET DU LITIGE
Le 27 août 2002 Mme Rita Robert (ci-après la Bénéficiaire) signait un contrat avec « Habitations onsultants H.L. inc. » (ci-après l’Entrepreneur) pour la construction d’une maison unifamiliale à être érigée sur la rue François-de-Villars dans l’arrondissement Beauport de la Ville de Québec.
Ce contrat était couvert par le plan de « La Garantie des maison neuves de l’A.P.C.H.Q. » (ci-après la Garantie).
Le document intitulé Déclaration de réception du bâtiment a été signé le 28 octobre 2002 par la Bénéficiaire et l’Entrepreneur.
Aucun élément n’a été mentionné quant à des travaux de parachèvement, correction ou réparation à exécuter, ce qui laisse donc présumer que le bâtiment avait été construit selon les plans et devis, et que les termes du contrat avaient été respectés par les parties.
Au printemps 2003, la Bénéficiaire constate qu’une fissure transversale s’est produite sur le perron en béton de sa résidence. Après avoir avisé l’Entrepreneur de la présence de cette fissure et devant le peu d’empressement de ce dernier à y apporter les corrections satisfaisantes, la Bénéficiaire demandait, en date du 30 juillet 2003, à la Garantie d’intervenir dans ce litige et de refaire complètement le perron de béton.
Le 25 août 2003, la Garantie demandait à l’Entrepreneur d’apporter des corrections dans un délai de 15 jours et de l’informer par écrit des mesures que ce dernier entendait prendre pour remédier à la situation dénoncée.
Le 2 septembre 2003, l’Entrepreneur informait la Garantie qu’après vérification, il considérait l’escalier de béton correctement construit. Il ajoutait que la fissure constatée était très légère et normale pour ce genre de galerie et que cela n’affectait pas la solidité ni même l’esthétique du perron. Il mentionnait également que ce genre de fissure était causée par le retrait du béton suite au séchage.
Le 27 octobre 2003, la Garantie suite à une inspection effectuée le 7 octobre indiquait dans son rapport qu’il s’agissait d’une fissure capillaire qui faisait la largeur du perron et redemandait à l’Entrepreneur d’y apporter les correctifs nécessaires selon les règles de l’art.
Le 12 novembre 2003, l’Entrepreneur informait la Garantie et la Bénéficiaire qu’il effectuerait les réparations, mais que compte tenu de la période automnale celles-ci seraient faites au printemps 2004.
L’Entrepreneur a effectué au cours de l’été 2004 des réparations au perron de béton en y faisant poser un revêtement de finition. Le travail n’était pas satisfaisant pour la Bénéficiaire car le crépi s’effritait et se décollait. La Garantie intervenait de nouveau en octobre 2005 pour constater l’état du balcon.
Dû à des circonstances particulières de l’aveu même de la Garantie, ce n’est que le 10 juillet 2006 que la Garantie émettait son rapport final dans lequel elle juge que les travaux de corrections ont été fait de façon appropriée, que la fissure n’a pas évoluée depuis 2005 et qu’en ce sens la Garantie n’a pas à intervenir.
Devant ce refus d’intervenir de la part de la Garantie, la Bénéficiaire s’adressait, en date du 21 août 2006, au Centre canadien d’arbitrage commercial (C.C.A.C.) pour demander l’arbitrage.
Le 23 août, le soussigné était pressenti par le Centre pour agir en tant qu’arbitre.
Le 1er septembre, il était saisi du dossier et le 21 septembre, le procureur de la Garantie transmettait aux parties le cahier des pièces qu’il entendait soumettre lors de l’audition.
AUDITION
Après entente entre les parties, l’audition a été fixée au 6 octobre au domicile de la Bénéficiaire.
En premier lieu, le Tribunal d’arbitrage explique aux parties la procédure qu’il entend suivre et les règles de droit et de preuves applicables.
La visualisation du perron a permis de constater que la fissure est toujours présente et apparente. De plus, les personnes présentes ont été à même de constater que le recouvrement de finition du type crépi appliqué à l’été 2004 par un sous-traitant de l’Entrepreneur s’écaille et décolle de façon importante.
La Bénéficiaire lors de son témoignage mentionne qu’un perron en béton cassé de cette façon n’est pas acceptable pour une maison construite en 2002. Selon elle, cette fissure observée au printemps 2003 après le premier hiver s’est aggravée avec le temps. L’eau s’y infiltre et elle croit que cela va causer un vieillissement prématuré du perron en béton.
Elle demande donc que le balcon soit refait car elle craint qu’il s’effondre.
L’Entrepreneur pour sa part affirme que le perron de béton a été construit selon les normes de qualités habituelles que l’on retrouve sur le marché.
Il mentionne que le béton est pourvu de tiges d’acier d’armature dans les deux sens ce que confirme un détail de construction transmis par l’Entrepreneur.
Selon lui, la fissure n’affecte que l’aspect esthétique du perron et ne met aucunement en cause sa solidité. Il mentionne également qu’il n’était pas responsable de la finition du terrain, mais par contre qu’il a constaté que des matériaux de remblais s’étaient retrouvés sous la première marche du perron et que sous l’effet du gel cela a peut-être contribué à faire se fissurer le béton.
Toujours selon l’Entrepreneur, s’il avait à refaire ce perron, il procéderait de la même façon car c’est la façon habituelle du marché de construire un tel ouvrage qui s’appuie sur une équerre en béton pour une partie et qui est en porte-à-faux pour la section des marches.
L’Entrepreneur admet toutefois que le crépi qui a été appliqué pour corriger l’esthétique et réduire les risques d’infiltration d’eau dans la fissure n’est pas le produit approprié et n’a pas donné les résultats escomptés. Selon lui, il existe sur le marché des produits de meilleure qualité.
Il ajoute également qu’il a tenté de discuter avec la Bénéficiaire au cours du mois de septembre, mais que devant son refus catégorique à toute entente, il préfère s’en remettre à la décision du Tribunal d’arbitrage.
Pour sa part, le représentant de la Garantie, M. Breault, indique qu’il n’a pas constater de détérioration ou d’agrandissement de la fissure en comparant les photos prises en 2005 et lors de l’inspection supplémentaire qu’il a faite le 26 juin 2006.
Selon lui, il n’y a pas de risque de cassure ou d’effondrement donc aucun risque de perte de l’ouvrage. Il mentionne également que le dessous de la première marche doit être dégagé en tout temps afin d’éviter un possible soulèvement ou gonflement des matériaux durant les périodes de gel.
Dans son plaidoyer, le Procureur de la Garantie admet que cette dernière a déjà reconnu que des corrections devaient être apportées à l’ouvrage, mais que le Plan de garantie ne couvre pas l’esthétique, et que la fissure découle d’un comportement normal du béton.
Il mentionne que la demande de la Bénéficiaire de démolir et de refaire le perron en béton est démesurée par rapport à la situation. Selon lui, les correctifs apportés par l’Entrepreneur démontrent sa bonne volonté de corriger la situation même s’il n’est pas en faute.
Il ajoute qu’il appartient à la Bénéficiaire de s’assurer que le dessous de la première marche soit dégagé et que cela relève d’un entretient normal de l’ouvrage. Il maintient que la Garantie n’a pas à intervenir davantage dans ce dossier.
DÉCISION ARBITRALE
Le Tribunal d’arbitrage, suite aux témoignages des parties, à l’examen de la fissure transversale du perron de béton et à la visualisation des photos prises à différentes périodes au cours des trois dernières années, en vient à la décision suivante.
Il comprend que la Bénéficiaire ne trouve pas acceptable l’état actuel du perron surtout à la suite du recouvrement de finition qui y a été posé et qui s’effrite de façon accélérée. Par contre, il ne partage pas ses craintes quant à une possibilité d’effondrement de celui - ci.
L’examen du détail de construction du perron de béton démontre que celui-ci a été construit selon les règles de l’art et que l’acier d’armature qui y a été posé en assure son intégrité avec les fondations du bâtiment.
Le Tribunal d’arbitrage considère que la démolition du perron et sa reconstruction à neuf est sans commune mesure avec la situation qui prévaut. Par contre, il considère que le recouvrement de finition qui a été posé ne remplit pas sa fonction qui était de corriger l’esthétique du perron et assurer l’étanchéité de la fissure.
En conséquence, le Tribunal d’arbitrage ordonne à la Garantie :
- de faire procéder à l’enlèvement du recouvrement de finition qui a été posé
- de faire appliquer un nouveau recouvrement de finition pour corriger l’esthétique du perron et assurer l’étanchéité de la fissure;
- de s’assurer que le produit qui sera utilisé ait les propriétés requises pour absorber d’éventuels mouvements du béton et que sa surface soit antidérapante;
- de s’assurer que ledit produit soit appliqué par un spécialiste conformément aux règles de l’art et aux recommandations du manufacturier.
Québec, le 18 octobre 2006
L’Arbitre
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Claude Desmeules, ing.