ARBITRAGE
RÈGLEMENT SUR LE PLAN DE GARANTIE
DES BÂTIMENTS RÉSIDENTIELS NEUFS
(Chapitre B-1.1, r. 8)
Organisme d’arbitrage autorisé par la Régie du bâtiment du Québec:
CENTRE CANADIEN D’ARBITRAGE COMMERCIAL
CANADA
PROVINCE DE QUÉBEC
DISTRICT DE TERREBONNE
No : S22-110301-NP Denis Roy
Bénéficiaire
c.
9276-7342 Québec Inc./
Gestion immobilière AB
Entrepreneur
Et :
La Garantie Construction Résidentielle (GCR)
Administrateur
SENTENCE ARBITRALE
Arbitre : Roland-Yves Gagné
Pour le Bénéficiaire : Denis Roy
Mario Roy (témoignage d’expert écrit)
Pour l’Entrepreneur : Tony Boulanger
Nadine Filion (témoignage écrit)
Pour l’Administrateur : Me Marc Baillargeon
Anne Delage
Date de l’audition : 15 février 2023
Date de la décision : 23 février 2023
DESCRIPTION DES PARTIES
BÉNÉFICIAIRE :
Denis Roy
[...]
Mirabel, Qc. [...]
ENTREPRENEUR :
9276-7342 Québec Inc./
Gestion immobilière AB
a/s Tony Boulanger
18605 rue Lemire
Mirabel, Qc. J7N 0H8
ADMINISTRATEUR :
La Garantie Construction Résidentielle
a/s Me Marc Baillargeon
4101 3e étage, rue Molson
Montréal, Qc. H1Y 3L1
INTRODUCTION 4
Cadre juridique quant à la preuve 4
DÉCISION POINT 20 6
Point 20 – Portes du lavoir déficientes 6
DÉCISION POINT 24 7
Point 24 - Dimensions des fenêtres des chambres non conformes au plan 7
DÉCISION POINT 26 11
Point 26. Isolant acoustique non conforme au devis 11
Preuve et plaidoirie sur le Point 26 12
Le Bénéficiaire (Denis Roy) 12
Le représentant de l’Entrepreneur (Tony Boulanger) 14
L’inspectrice-conciliatrice de l’Administrateur (Anne Delage) 16
Décision 17
FRAIS 18
CONCLUSION 19
Pièces
L’Administrateur a produit les pièces suivantes :
Document(s) contractuel(s)
A-1 Contrat préliminaire signé par le Bénéficiaire et l'Entrepreneur le 27 avril 2020;
A-2 Contrat de garantie signé par le Bénéficiaire et l'Entrepreneur le 1er août 2021;
A-3 Formulaire d’inspection pré-réception signé par le Bénéficiaire et l'Entrepreneur le 25 novembre 2021;
Dénonciation(s) et réclamation(s)
A-4 Courriel du Bénéficiaire transmis à l’Entrepreneur le 14 mars 2022, incluant :
Rapport d’expertise;
Formulaires de dénonciation datés du 6 mars 2022;
A-5 Formulaire de réclamation;
A-6 Courriel de l’Entrepreneur transmis à l’Administrateur le 24 mars 2022, incluant :
Lettre de Charland Avocat Inc. daté du 14 mars 2022;
Lettre de l’Entrepreneur daté du 8 mars 2022;
A-7 En liasse, le courriel de l’avis de 15 jours transmis par l’Administrateur à l’Entrepreneur et au Bénéficiaire le 11 avril 2022, incluant :
Formulaires de dénonciation datés du 6 mars 2022 (voir A-4);
Formulaire de mesures à prendre par l’Entrepreneur (non inclus dans le cahier de pièces);
Correspondance(s)
A-8 Courriel du Bénéficiaire transmis à l’Entrepreneur le 25 mai 2022, incluant :
Photos;
A-9 Courriel du Bénéficiaire transmis à l’Administrateur le 7 juin 2022, incluant :
Photos
A-10 Courriel du Bénéficiaire concernant l’insonorisation daté du 7 juin 2022, incluant :
Annexes;
A-11 Courriel du Bénéficiaire concernant la fondation daté du 7 juin 2022, incluant :
Photos;
A-12 Courriel du Bénéficiaire concernant la pente du garage daté du 9 juin 2022, incluant :
Photos;
Annexe D datée du 22 novembre 2021;
A-14 Courriel de l’Entrepreneur concernant la largeur des fenêtres daté du 20 juin 2022, incluant :
Lettre de Fenêtres 2000;
Autre(s) document(s) pertinent(s) et/ou expertise(s)
A-15 Relevé du Registraire des entreprises du Québec concernant l’Entrepreneur;
Décision(s) et demande(s) d’arbitrage
A-16 En liasse, la décision de l’Administrateur datée du 29 septembre 2022, ainsi que les accusés de réception de Postes Canada du Bénéficiaire et de l’Entrepreneur datés du 3 octobre 2022;
A-17 Courriel de la notification de l’organisme d’arbitrage daté du 15 novembre 2022, incluant :
Demande d’arbitrage du Bénéficiaire datée du 3 novembre 2022;
Décision de l’Administrateur datée du 29 septembre 2022 (voir A-10);
Lettre de nomination de l’arbitre datée du 15 novembre 2022;
A-18 Curriculum Vitae de la conciliatrice Anne Delage.
Le Bénéficiaire a produit les pièces suivantes :
B-1 Annexe D du 22 novembre 2021 – modifications à un contrat préliminaire;
B-2 Annexe 2 au contrat;
B-3 Plan de l’architecte;
L’Entrepreneur a produit les pièces suivantes :
E-1 Courriel de Nadine Filion du 14 février 2023;
E-2 Tableau de recouvrement;
E-3 Confirmation Max Largeur (citée dans la décision de l’Administrateur).
[1] Le Tribunal est saisi d’une demande d’arbitrage du Bénéficiaire en vertu de l’article 19[1] du Règlement sur le plan de garantie des bâtiments résidentiels neufs (ci-après, le « Règlement »), d’une décision de l’Administrateur datée du 29 septembre 2022 et livrée par Xpresspost le 3 octobre 2022, demande reçue par le Centre Canadien d’Arbitrage Commercial (CCAC) le 3 novembre 2022, et par la nomination du soussigné comme arbitre le 15 novembre 2022.
[2] Les différends que le Bénéficiaire a avec la décision de l’Administrateur du 29 septembre 2022 qu’il demande au Tribunal d’arbitrage de trancher sont :
[2.1] Point 20. Portes du lavoir déficientes ;
[2.2] Point 24. Dimensions des fenêtres des chambres non conformes au plan ;
[2.3] Point 26. Isolant acoustique non conforme au devis.
[3] Le formulaire de l’inspection pré-réception a été signée le 25 novembre 2021 (pièce A-3).
[4] Le Bénéficiaire a affirmé à l’audience avoir emménagé le 29 novembre 2021.
[5] La réclamation écrite du Bénéficiaire est du 14 mars 2022 (pièce A-4), à laquelle était jointe un rapport de Mario Roy, inspecteur en bâtiment, à la suite d’une inspection du 22 février 2022 ; ce rapport a constitué le témoignage d’expert écrit de Mario Roy à l’audience d’arbitrage.
[6] Notre ancien collègue Jeffrey Edwards, alors arbitre aujourd’hui juge à la Cour supérieure, écrivait en 2006 dans Gauthier et Gagnon c. Goyette Duchesne Lemieux inc. et La Garantie des Bâtiment Résidentiels Neufs de l’APCHQ inc.[2] :
[130] [...] il n’en demeure pas moins que la demande d’arbitrage donne droit à un procès de novo et le Tribunal d’arbitrage est requis de faire sa propre évaluation de la preuve administrée contradictoirement et d’en tirer ses propres conclusions. [...]
[7] La Cour supérieure a réitéré dans 9264-3212 Québec Inc. c. Moseka[3] que l’arbitrage est un procès « de novo », au cours duquel les participants peuvent apporter toute preuve nouvelle :
[20] […] L’arbitre peut entendre des témoins, recevoir des expertises et procéder à l’inspection des biens ou à la visite des lieux.
[…] [24] Le Tribunal rappelle que l’arbitre ne siège pas en appel ou en révision de la décision du Conciliateur. Il ne procède pas non plus à décider en se basant uniquement sur le dossier transmis. […]
[8] Le fardeau de la preuve revient au Bénéficiaire en vertu des articles 2803 et 2804 du Code civil[4], alors que la preuve qui rend l'existence d'un fait plus probable que son inexistence est suffisante.
[9] La Cour d’appel écrit dans Boiler Inspection and Insurance Company of Canada c. Moody Industries Inc.[5] :
B. Fardeau de preuve
[57] La première juge a attentivement examiné les divers éléments de preuve, à la fois de nature profane et technique, pour déterminer où se situe la vérité. Cette vérité demeure relative plutôt qu'absolue, sans avoir à atteindre un niveau de certitude, puisque s'applique la norme de la prépondérance de preuve fondée sur la probabilité (art. 2804 C.c.Q.), soit celle qui rend l'existence d'un fait plus probable que son inexistence, laquelle excède la simple possibilité.
« Lorsque la preuve offerte de part et d'autre est contradictoire, le juge ne doit pas s'empresser de faire succomber celui sur qui reposait la charge de la preuve mais il doit chercher d'abord à découvrir où se situe la vérité en passant au crible tous les éléments de conviction qui lui ont été fournis et c'est seulement lorsque cet examen s'avère infructueux qu'il doit décider en fonction de la charge de la preuve. »[6]
[10] Pour Me Sylvie Rodrigue et Me Jeffrey Edwards[7] (aujourd’hui juge à la Cour supérieure) :
« De même, la gravité de la malfaçon ne paraît pas pertinente car l’obligation ne distingue pas selon l’intensité de l’effet engendré par la non-conformité ».
[11] Dans la réclamation du Bénéficiaire sur le Point 20, l’expert du Bénéficiaire affirme (pièce A-4) :
17 – Les portes devant la laveuse et sécheuse dans les logements, obstruent l’accès aux appareils.
[12] Dans sa décision sur le Point 20, l’Administrateur rejette la réclamation en raison de sa dénonciation tardive par rapport au délai prévu au Règlement :
Au cours du mois de février 2022, le bénéficiaire constate que les portes du lavoir des logement obstruent l'accès aux appareils.
L'administrateur est d'avis que les portes installées ne sont pas conformes au plan de construction mais que cette situation était visible dès la réception.
La visite des lieux nous a permis de constater que le point 20 rencontre les critères de la malfaçon apparente au sens du paragraphe 2 de l'article 27 du Règlement sur le plan de garantie des bâtiments résidentiels neufs. [...]
Toutefois, l'analyse du dossier nous permet de constater que cette malfaçon apparente n'a pas été dénoncée dans les délais prévus au Règlement.
Dans les circonstances, en raison d'une dénonciation tardive, soit après la réception du bâtiment ou plus de 3 jours après la réception le cas échéant, l'administrateur doit rejeter la réclamation du bénéficiaire à l'égard du point 20.
[13] Vu la preuve, vu le Règlement, le Tribunal accueille la demande d’arbitrage du Bénéficiaire.
[14] Pour les portes du lavoir des logements, le Tribunal retient de la preuve :
[14.1] que bien que les portes en accordéon étaient visibles à la réception du 25 novembre 2021, les laveuses sécheuses n’étaient pas installées à ce moment-là ;
[14.2] ce n’est qu’à l’installation de ses laveuses – sécheuses que le Bénéficiaire a été en mesure de constater la problématique objet de sa réclamation ;
[14.2.1] le Tribunal a demandé lors de l’audience de façon précise, quand ses laveuses et sécheuses ont été installées, le Bénéficiaire a répondu lors de son emménagement le ou vers le 29 novembre 2021 ;
[14.2.2] l’Administrateur a reconnu dans sa décision que « les portes installées ne sont pas conformes au plan de construction » ;
[14.3] c’est après les Fêtes, en janvier 2022, que l’Entrepreneur a été averti verbalement, et que l’Entrepreneur et l’Administrateur ont été averti par écrit le 14 mars 2022 (pièce A-4) ;
[14.4] de façon subsidiaire, le Tribunal ajoute que le Bénéficiaire a affirmé ne pas avoir produit de réclamation avant mars 2022 vu les promesses de l’Entrepreneur de régler la problématique, alors que ce dernier a affirmé à l’audience que le règlement de la problématique était conditionnel au paiement du solde toujours retenu par le Bénéficiaire ; le soussigné n’est pas saisi du paiement du solde.
[15] Dans l’affaire Ulric Rousseau c. 9253-5400 Québec inc. et PriceWaterhouseCoopers ès qualité d’administrateur provisoire de la Garantie Habitation du Québec Inc.[8], notre collègue Jean Philippe Ewart avait conclu :
[55] D’autre part, le Tribunal prend en considération que la preuve indique que les appareils électroménagers n’ont été livrés pour l’Unité que suite à la réception, et que ce n’est qu’à ce moment que le Bénéficiaire peut raisonnablement constater l’erreur entre les dimensions du comptoir et modules (armoires et tiroirs) de cuisine (espace trop large) en fonction des dimensions du réfrigérateur.
[56] Quant à l’argument de l’inspection pré-réception sans réserve (selon le formulaire pré-imprimé de l’Administrateur, au nom de Qualité Habitation) celui-ci ne peut trouver application :
2113. Le client qui accepte sans réserve, conserve, néanmoins, ses recours contre l’entrepreneur aux cas de vices ou malfaçons non apparents.
[16] La réclamation du Bénéficiaire est donc accueillie sur ce point.
[17] Dans la réclamation du Bénéficiaire sur le Point 24, l’expert du Bénéficiaire affirme :
26- Selon le propriétaire des fenêtres installées dans les chambres du logement du propriétaire n’est pas conforme aux données au plan de l’architecte. Les fenêtres installées sont de plus petites dimensions que le plan.
[18] Dans sa décision sur le Point 24, l’Administrateur rejette la réclamation en raison d’une dénonciation tardive par rapport au délai prévu au Règlement :
Au cours du mois de février 2022, soit en première année de garantie, le bénéficiaire constate que les fenêtres des chambres de l'unité 702 ne sont pas de dimensions conformes au plan de construction.
L'entrepreneur affirme que les fenêtres coulissantes de la dimension prévue au plan ne se fabriquent pas et soumet une lettre du fabricant.
L'administrateur est d'avis que cette situation était visible dès la réception et n'a pas été dénoncée.
La visite des lieux nous a permis de constater que le point 24 rencontre les critères de la malfaçon apparente au sens du paragraphe 2 de l'article 27 du Règlement sur le plan de garantie des bâtiments résidentiels neufs.
Toutefois, l'analyse du dossier nous permet de constater que cette malfaçon apparente n'a pas été dénoncée dans les délais prévus au Règlement.
Dans les circonstances, en raison d'une dénonciation tardive, soit après la réception du bâtiment ou plus de 3 jours après la réception le cas échéant, l'administrateur doit rejeter la réclamation du bénéficiaire à l'égard du point 24.
[19] Vu les dispositions expresses du Règlement quant à la couverture du plan de garantie et aux délais de dénonciation prévus, vu la preuve, le Tribunal n’a d’autres options que de rejeter la demande d’arbitrage du Bénéficiaire et son recours sur le Point 24 à l’encontre de l’Administrateur du plan de garantie, tout en réservant les recours du Bénéficiaire devant les tribunaux de droit commun contre toute personne autre que l’Administrateur, à supposer qu’il ait un recours fondé.
[20] Pour les fenêtres ;
[20.1] le Bénéficiaire affirme :
[20.1.1] avoir vu la problématique au 25 novembre 2021 lors de l’inspection pré-réception ;
[20.1.2] mais ne pas l’avoir mentionné, ni verbalement, ni par écrit sur le formulaire d’inspection pré-réception ;
20.1.2.1. dans le but d’être sûr de pouvoir emménager à la date prévue, ne pouvant pas rester dans le logement où il était car le logement était loué, qu’il craignait qu’il allât se retrouver dans la rue sans accès à sa maison car dans le passé l’Entrepreneur lui a envoyé une lettre par huissier lui interdisant l’accès au chantier ;
20.1.2.2. se disant qu’il avait tous les documents nécessaires pour prouver la malfaçon et qu’il pourrait faire valoir ses recours après ;
[20.2] le Tribunal note que le formulaire de réception des travaux (pièce A-3) indique que les travaux sont acceptés sans réserve (tel que coché sur le formulaire).
[21] Le Règlement, alors qu’il prévoit que l’Administrateur cautionne les obligations de l’Entrepreneur selon les dispositions du Règlement :
[21.1] ne prévoit pas une telle exception, soit de choisir de retarder une dénonciation écrite qui doit impérativement être faite lors de l’inspection pré-réception pour éviter tout conflit avec l’Entrepreneur susceptible, selon la perception du Bénéficiaire, de retarder l’entrée dans le bâtiment ;
[21.2] ne prévoit plutôt que ceci à l’article 19.1 :
19.1. Le non-respect d’un délai de recours ou de mise en oeuvre de la garantie par le bénéficiaire ne peut lui être opposé lorsque l’entrepreneur ou l’administrateur manque à ses obligations prévues aux articles 17, 17.1, 18, 66, 69.1, 132 à 137 et aux paragraphes 12, 13, 14 et 18 de l’annexe II, à moins que ces derniers ne démontrent que ce manquement n’a eu aucune incidence sur le non-respect du délai ou que le délai de recours ou de mise en oeuvre de la garantie ne soit échu depuis plus d’un an.
Le non-respect d’un délai ne peut non plus être opposé au bénéficiaire, lorsque les circonstances permettent d’établir que le bénéficiaire a été amené à outrepasser ce délai suite aux représentations de l’entrepreneur ou de l’administrateur.
[21.2.1] quant au premier alinéa, le Bénéficiaire n’a allégué aucun manquement à l’Entrepreneur quant à l’inspection du 25 novembre 2021 ou autre manquement cité au premier alinéa de 19.1 ;
[21.2.2] quant au deuxième alinéa qui parle d’outrepasser le délai suite aux représentations de l’entrepreneur, il n’y a eu aucune représentation de l’entrepreneur quant aux fenêtres visibles le 25 novembre 2021 qui aurait pu entrainer de dépasser les délais de dénonciation qui aurait dû avoir lieu lors de l’inspection du 25 novembre 2021.
[22] Avec égards, le Tribunal rappelle la nature du recours du Bénéficiaire dont il est saisi.
[23] Le Règlement sur le plan de garantie des bâtiments résidentiels neufs n’est pas un chapitre du Code civil, ni une loi de l’Assemblée nationale, mais un Décret gouvernemental adopté en vertu de la Loi sur le bâtiment, Règlement qui stipule, à ses articles 7, 74 et 27 :
7. Un plan de garantie doit garantir l'exécution des obligations légales et contractuelles d'un entrepreneur dans la mesure et de la manière prévues par la présente section.
74. Aux fins du présent règlement et, en l'absence ou à défaut de l'entrepreneur d'intervenir, l'administrateur doit assumer tous et chacun des engagements de l'entrepreneur dans le cadre du plan approuvé.
27. La garantie d’un plan dans le cas de manquement de l’entrepreneur à ses obligations légales ou contractuelles après la réception de la partie privative ou des parties communes doit couvrir:
1° le parachèvement [...]
2° la réparation des vices et malfaçons apparents visés à l’article 2111 du Code civil et dénoncés, par écrit, au moment de la réception ou, tant que le bénéficiaire n’a pas emménagé, dans les 3 jours qui suivent la réception. Pour la mise en oeuvre de la garantie de réparation des vices et malfaçons apparents du bâtiment, le bénéficiaire transmet par écrit sa réclamation à l’entrepreneur et en transmet copie à l’administrateur dans un délai raisonnable suivant la date de fin des travaux convenue lors de la réception;
3° la réparation des malfaçons existantes et non apparentes au moment de la réception et découvertes dans l’année qui suit la réception, visées aux articles 2113 et 2120 du Code civil et dénoncées, par écrit, à l’entrepreneur et à l’administrateur dans un délai raisonnable de la découverte des malfaçons; [...]
[24] Le Règlement donne aux acheteurs de maisons neuves qui bénéficient d’un recours à l’encontre de leur entrepreneur ou vendeur en vertu du Code civil, un recours supplémentaire à l’encontre de l’Administrateur du plan de garantie.
[25] Notre Cour d’appel[9] a jugé à plusieurs reprises que le Règlement était d’ordre public, dont dans l’arrêt Garantie des bâtiments résidentiels neufs de l'APCHQ c. Desindes[10] ;
[11] Le Règlement est d’ordre public. Il pose les conditions applicables aux personnes morales qui aspirent à administrer un plan de garantie. Il fixe les modalités et les limites du plan de garantie ainsi que, pour ses dispositions essentielles, le contenu du contrat de garantie souscrit par les bénéficiaires de la garantie, en l’occurrence, les intimés.
[12] L’appelante est autorisée par la Régie du bâtiment du Québec (la Régie) à agir comme administrateur d’un plan de garantie approuvé. Elle s’oblige, dès lors, à cautionner les obligations légales et contractuelles des entrepreneurs généraux qui adhèrent à son plan de garantie.
[13] Toutefois, cette obligation de caution n’est ni illimitée ni inconditionnelle. Elle variera selon les circonstances factuelles […];
[26] Dans l’affaire Brisson c. 9141-1074 Québec Inc. et La Garantie des Bâtiments Résidentiels Neufs de l’APCHQ Inc.[11], notre collègue, Michel A. Jeanniot, arbitre, écrit :
[25] […] La loi, sa réglementation ainsi que le contrat qui lie les parties (contrat de garantie) prévoient qu’afin que l’Administrateur soit aussi responsable de malfaçon apparente ou de l’inachèvement des travaux, cette responsabilité est limitée aux éléments dénoncés par écrit et que cette dénonciation ait lieu au même moment de la réception du bâtiment (ou dans certains cas, trois jours qui suivent si le bénéficiaire n’avait pas encore aménagé). Donc, s’il est possible qu’une réclamation ait été valablement faite à l’Entrepreneur (ce qui n’est pas admis ou même inféré), c’est à regret que je me dois de constater qu’elle fut représentée hors délai à l’Administrateur, ce qui la rend inopposable à l’Administrateur. (Nos soulignés)
[27] Le Tribunal rappelle qu’il n’entend ici que le recours du Bénéficiaire à l’encontre de l’Administrateur du plan de garantie.
[28] La Cour supérieure écrit dans l’affaire Garantie d'habitation du Québec c. Jeanniot[12] :
[63] Il est clair des dispositions de la Loi et du Règlement que la garantie réglementaire ne remplace pas le régime légal de responsabilité de l'entrepreneur prévu au Code civil du Québec. Il est clair également que la garantie prévue à la Loi et au Règlement ne couvre pas l'ensemble des droits que possède un bénéficiaire, notamment envers des dispositions du Code civil du Québec et que les recours civils sont toujours disponibles aux parties au contrat.
[29] Selon la Cour d’appel dans l’arrêt Gestion G. Rancourt inc. c. Lebel [13]:
[10] Le plan de garantie constitue « un complément aux garanties contre les vices cachés du Code civil ». Rien dans le Règlement n’impose au bénéficiaire de renoncer au droit d’action que le Code civil lui reconnaissait avant l’institution d’un Plan et qu’il lui reconnaît encore aujourd’hui.
[30] Dans son arrêt Consortium MR Canada ltée c. Montréal (Office municipal d'habitation de)[14], la Cour d’appel confirme la coexistence des recours en vertu du Règlement et du droit commun, le Règlement étant un complément aux garanties du droit commun :
[17] La juge avait raison de souligner les différences de vocation entre les recours arbitral et de droit commun.
[18] La procédure d'arbitrage expéditive prévue au Règlement pour réparer rapidement les malfaçons est, comme le note la juge, un complément aux garanties contre les vices cachés du Code civil. Régime d’ordre public, [...].
[31] Le Tribunal d’arbitrage réservera les droits du Bénéficiaire de porter ses prétentions quant au Point 24 devant les tribunaux de droit commun contre toute personne autre que l’Administrateur du Plan de Garantie, le tout, à supposer qu’il ait une réclamation valide et sujet aux règles de la prescription civile et du droit commun, sans que cette affirmation puisse être interprétée dans un sens ou dans l’autre.
[32] Pour sa réclamation quant au Point 26, l’expert du Bénéficiaire affirme :
28- L’ensemble de l’isolant acoustique requis au contrat du propriétaires, pour les planchers entre les logements, n’est pas installé correctement. La totalité de la cavité doit être remplies, avec la pression de compactage recommandée en matière d’isolation acoustique. Les photos 30 et 31 montrent une cavité sans isolant.
[33] L’Administrateur a rejeté la réclamation du Bénéficiaire en ces termes :
Au cours du mois de février 2022, le bénéficiaire constate que la laine soufflée dans le plafond séparant l'unité du rez-de-chaussée et les unités de l'étage ne remplit pas entièrement la cavité, lequel a pu constater que l'épaisseur de la laine soufflée varie de 4 à 5 pouces.
L'annexe 1 au contrat mentionne la présence d'une laine soufflée compactée.
L'administrateur est d'avis que cette situation relève d'une mésentente contractuelle et non pas de la malfaçon puisqu'il n'y a pas de déficience quant à l'insonorisation.
Pour statuer sur le point 26, l'administrateur doit référer à l'article 10 ou 27 du Règlement, lequel concerne la couverture de la garantie en ce qui a trait aux parachèvement, malfaçons, vices cachés et vices majeurs (vices de conception, de construction ou de réalisation et des vices de sol).
Considérant ce qui précède, nous constatons que la réclamation des bénéficiaires ne correspond pas aux exigences applicables à l'article 10 ou 27 de la garantie.
Par conséquent, l'administrateur doit rejeter la réclamation des bénéficiaires à l'égard du point 26.
[34] Le Bénéficiaire affirme qu’avant d’acheter, il a demandé à l’Entrepreneur d’établir un devis écrit pour qu’« on » se comprenne sur la qualité ou le type de bâtiment à construire.
[35] Ce devis, produit sous B-1 (Annexe), montre qu’il a bien spécifié pour l’insonorisation ;
[35.1] il a demandé à l’Entrepreneur comment il faisait l’insonorisation, et ce dernier a répondu « je mets de la laine soufflée compactée, je remplis les soliveaux », qui est la structure entre les plafonds et les planchers de l’étage supérieure, l’Entrepreneur a confirmé qu’il remplissait l’assemblage plafond-plancher ;
[35.2] il affirme que c’est ce qui est spécifié à l’Annexe quand on a établi le devis, c’est écrit « laine soufflée compactée » (à la section qui a pour titre « Rez-de-chaussée et 2e étage »), entre le rez-de-chaussée et le 2e étage.
[36] Au 2e étage, il a deux unités locatives.
[37] Sur le plan, on voit une structure de poutrelles de 16 pouces de haut, donc « laine soufflée compactée », c’est 16 pouces de « laine soufflée compactée », c’est ça pour lequel on a établi un prix d’achat.
[38] Ce que l’Entrepreneur a plutôt « shooté » dans le plafond, c’est 4-5-6 pouces seulement pas plus, et même si une laine soufflée s’affaisse avec le temps, cela va être d’un ou deux pouces, mais pas de 10 pouces.
[39] On n’a pas un problème d’affaissement, mais un problème de malfaçon, de non-respect du contrat pour lequel il a payé sur la base d’un devis détaillé, l’Entrepreneur calculant son prix global selon le devis bien détaillé.
[40] Il a vérifié ça lui-même, aussi par son inspecteur Mario Roy et par l’inspectrice conciliatrice de la GCR – on le constate très bien en enlevant une lumière encastrée, il y a deux photos dans le rapport Mario Roy (#30 et #31).
[41] Le devis n’a pas dit « seulement 4 ou 5 pouces », mais laine soufflée compactée entre les soliveaux pour avoir une épaisseur uniforme :
[41.1] ici, ce n’est pas un entretoit où on peut voir car c’est assez grand pour diriger l’épaisseur, mais dans un habitacle fermé entre deux soliveaux et un polythène « tacké » au plafond ;
[41.2] pour vraiment gérer une épaisseur, c’est difficile si on ne remplit pas les soliveaux, il peut y avoir 4-5 pouces à un endroit, 6 pouces ailleurs, mais ça n’a jamais été rempli.
[42] À la question du Tribunal,
[42.1] où c’est écrit que la laine doit être sur les 16 pouces ? ;
il répond,
[42.2] quand on dit « laine soufflée compactée », pour pouvoir compacter la laine, il faut remplir la cavité complètement, sinon la laine est juste soufflée : c’est le terme « compactée » qui vient « faire la chose ».
[43] À la mention « Laine soufflée », il n’y a pas d’épaisseur, mais quand on spécifie « laine soufflée compactée », c’est là que pour obtenir une compaction, on n’a pas le choix de remplir une cavité, c’est la seule façon d’avoir une compaction, ça signifie une cavité de 16 pouces remplie, sinon on ne peut pas faire une compaction.
[44] Le but de l’insonorisation est de remplir la cavité entre les soliveaux, le plafond du rez-de-chaussée et le contre-plaqué du 2e étage pour éliminer les caisses de résonnance, ce qui donne une insonorisation nettement supérieure à « shooter » un tapis de laine, avec une caisse de résonnance au-dessus de la laine et le contre-plaqué, le mot « compactée » est très pertinent dans l’interprétation du devis.
[45] La différence de 10 pouces n’est pas un affaissement comme indiqué dans la fiche technique produite par l’Entrepreneur, mais un non-respect du contrat.
[46] Le rapport d’expert A-4 en fait foi avec les photos 30 et 31, avec une caméra qui photographie dans le noir.
[47] En contre-interrogatoire, il convient qu’aucun document ne spécifie un remplissage sur 16 pouces, mais souligne ;
[47.1] que l’Annexe au devis, est à la suite de sa question « comment tu fais l’insonorisation » et l’Entrepreneur lui a répondu « je mets de la laine soufflée pis je remplis de laine du plafond au plancher », alors il a dit « c’est de la laine compactée », l’Entrepreneur a dit « oui », c’est là qu’on l’a écrit sur le devis, sinon on aurait seulement écrit « laine soufflée »;
[47.2] si l’Entrepreneur avait répondu « je mets une couche de laine soufflée » il aurait demandé « on va mettre un nombre de pouces », mais il a toujours dit « que la cavité va être remplie ».
[48] À la question, s’il a eu un problème quelconque quant à l’insonorisation, il répond oui, il entend plus les locataires d’en haut que si ça avait été bien fait, et de plus, il est un mélomane qui fait jouer de la musique, il a posé un filage dans ses murs pour mettre (il ne les a pas encore mis) des haut-parleurs encastrés, mais il se prive en attendant que le problème soit réglé pour ne pas déranger ses locataires.
[49] Si on avait rempli la cavité sachant qu’il avait mis le filage pour installer des haut-parleurs ça aurait été la façon de faire.
[50] Quand il a parlé avec l’Entrepreneur, il a toujours été question de remplir la cavité, il lui avait dit qu’il voulait installer des haut-parleurs encastrés, l’Entrepreneur lui a dit « oui je te remplis ça bien plein ».
[51] Son immeuble est différent des autres immeubles construits par l’Entrepreneur qui sont du type locatif, les poutrelles ont réellement seize pouces, ça prend plus de produit que si on a des poutrelles de dix pouces ou douze pouces qui est plus standard – évidemment ça prend plus pour remplir la cavité.
[52] En plaidoirie, il plaide qu’il y a au moins 6 pouces de « pas remplis », c’est impossible que ce soit un simple affaissement.
[53] Il est d’accord avec la « chart » fournie par l’Entrepreneur, ça peut se compacter de 1 pouce ou 2, mais pas de 6 pouces ou 8 ou 10 ; on devrait respecter son entente, de remplir la cavité tel que demandé, il avait spécifié que c’était important, c’est pour cela qu’il avait demandé aussi une membrane Insonomat pour une meilleure insonorisation.
[54] On devrait retenir le correctif de son expert, et remplir la cavité.
[55] À la question du Tribunal,
[55.1] ce qu’il avait à dire sur la « laine soufflée compactée »,
il répond,
[55.2] ça fait 35 ans qu’il fait beaucoup de multi-logements, 52 triplex à Laval, « c’est toutte la même affaire », pour souffler dans les plafonds, il fait cela depuis 35 ans, les triplex au Québec à 98% sont faits comme cela :
[55.2.1] on fait un plancher de béton en haut, un pouce et demi de béton ;
[55.2.2] on met un polythène à la grandeur du plafond ;
[55.2.3] on entre une ose de 4 pouces qui part du camion de l’installateur et qui rentre dans le plafond, « il sort ça à mesure qu’il souffle la laine » ;
[55.2.4] oui, la laine va accotter partout et ça remplit la cellule ;
[55.2.5] c’est sûr qu’avec le temps, ça baisse, ce n’est pas rempli sur le plywood d’en haut, c’est sûr que ça baisse, personne ne peut le faire autrement.
[56] Quant à l’inspection de Mario Roy, le Bénéficiaire a dit avoir enlevé un spot encastré pour vérifier, mais quand on enlève un spot encastré, la laine soufflée nous tombe dans la face, comme un sac de patates de 10 livres, il se vide de laine, l’inspecteur qui enlève un spot, c’est sûr qu’il enlève de laine.
[57] Il ajoute que le Bénéficiaire a mis des speakers partout au plafond ce qui a enlevé de la laine ;
[57.1] le Bénéficiaire intervient et affirme :
[57.1.1] qu’il n’a jamais installé de speakers au plafond, il voulait en installer mais ne l’a pas fait, il attend la décision, il ajoute que l’installation d’un haut-parleur est de le pousser vers le haut, sans percer le polythène et sans perte de laine ;
[57.1.2] quant à la caméra de l’inspecteur Roy, elle est entrée avec un petit bras pour prendre ses photos plus loin qu’au niveau du spot pour faire un travail professionnel ;
[57.1.3] ce n’est pas le bâtiment de Pierre – Jean – Jacques qu’il a acheté, mais le sien selon un devis qu’il a établi.
[58] Le représentant de l’Entrepreneur ajoute que le Bénéficiaire a demandé un extra en plus du plancher de béton et de la laine soufflée qu’il a fait dans les quatorze duplex du projet (et il n’a pas eu de plainte) : soit de mettre une membrane Insonomat à la grandeur du plancher, entre le béton et la laine soufflée, « il a comme une Cadillac de son ».
[59] A la question du Tribunal,
[59.1] que le Bénéficiaire affirme que « compactée » sur le devis veut dire rempli à la grandeur,
le représentant de l’Entrepreneur répond,
[59.2] non, c’est comme il l’a expliqué, quand il entre avec son tuyau de quatre pouces, il entre ça dans la laine, il souffle cela, c’est de la laine soufflée, oui c’est compactée, le polythène fait un rond car on rempli cela de laine, mais c’est sûr qu’après une couple de semaines ou de mois ça baisse, ça ne reste pas accoté sur le plywood en haut, c’est tout à fait normal.
[60] A la question du Tribunal,
[60.1] que le Bénéficiaire dise que ça peut baisser d’un pouce ou deux, mais ça ne peut pas baisser de 10 pouces,
il répond,
[60.2] les poutrelles n’ont pas 16 pouces, il devrait aller le voir, c’était facile pour l’expert de faire des tests sans sa présence et d’enlever un pied et de prendre des photos ;
[60.3] son sous-traitant fait ce travail partout, et il aurait bien des problèmes s’il ne faisait pas son travail correctement en remplissant seulement la moitié de la cellule ;
[60.4] ça a été rempli au complet et ça a baissé comme cela a normalement lieu – il réfère au tableau, ils sont tous soufflés pareil, ça peut manquer 1 ou 2 pouces, mais il ne croit pas qu’il manque autant de pouces, il faudrait faire des tests ailleurs.
[61] Il réfère à la lettre de Nadine Filion (pièce E-1) du 14 février 2023, admise à titre de témoignage écrit, qui se lit comme suit :
Nous sommes l’entreprise Isolation Matrice 2018 qui ont exécutés les travaux d’isolation à l’uréthane et l’isolation, insonorisation à la cellulose pour le bloc #[...] à Mirabel pour l’entrepreneur Gestion Immobilière AB. Les travaux ont été fait selon les règles de l’art et conforme à notre soumission. Les poutrelles ont été injectés à pleine capacité. Vous allez constater sur la charte du fournisseur que la cellulose s’affaisse avec le temps d’environ 15% qui varie de 1.5`` à 2``;
[61.1] le Tribunal note pendant son délibéré sur le tableau de recouvrement (pièce E-2) que :
[61.1.1] 15% est cité dans une marge à la droite du tableau lui-même « Un taux d’affaissement de 15% pour RSI 8,6) R-49 et RSI 8,8 (R-50)... ont été appliqués » ;
[61.1.2] à la gauche du tableau, R-49 et R-59 réfèrent respectivement à une épaisseur de 15,5 et 15,9 pouces, avec une épaisseur après affaissement de 13,5 et 13,8 pouces.
[62] Pour l’inspectrice-conciliatrice,
[62.1] inévitablement, quand on remplit une cavité avec ce type d’isolant, il y a un compactage ;
[62.1.1] donc que ça a été écrit « laine soufflée » ou « laine soufflée compactée », ça va de soi que cette laine-là se compacte en soi ;
[62.2] si on avait voulu remplir la cavité on aurait utilisé un autre matériau et un autre type d’isolant et la cavité aurait été remplie ;
[62.3] de plus, ça aurait été précisé sur le plan que la cavité devait être remplie, tout ce qu’on a ici est « laine soufflée compactée », ça ne veut pas dire que la cavité doit être remplie.
[63] La situation actuelle est conforme au devis, à l’entente entre les parties, elle ne voit pas de problème en soi ;
[63.1] et on n’a pas de problème d’acoustique.
[64] Elle en vient à la conclusion que c’est une mésentente, et une mésentente, ce n’est pas couvert par le plan de garantie.
[65] L’Administrateur plaide que :
[65.1] le Tribunal d’arbitrage n’entend que le recours en vertu du Règlement et la décision rendue par l’Administrateur avait été rendue en vertu du Règlement. ;
[65.2] le Bénéficiaire n’a pas rempli le fardeau de preuve qui était le sien ;
[65.3] le problème d’insonorisation était visible à la réception :
[65.3.1] sur ce dernier élément, avec égards, le Tribunal note que cela n’a pas été soulevé dans la décision de l’Administrateur, qu’on n’a pas à défaire les murs et les plafonds ou enlever les « spots » lors d’une inspection pré-réception et que la problématique soulevée ici était non apparente à l’inspection du 25 novembre 2021.
[66] Le Tribunal rend sa décision en fonction de la preuve et du Règlement et n’a d’autre option que de rejeter la demande d’arbitrage et le recours à l’encontre de l’Administrateur du plan de garantie.
[67] Le Tribunal note de la preuve que l’Entrepreneur n’affirme pas qu’il suffisait qu’il y ait un tapis de laine et aucune cavité, mais :
[67.1] qu’il est convaincu qu’il y en a partout ;
[67.2] qu’il est normal qu’il y ait un affaissement ;
[67.3] qu’il doute des conclusions du Bénéficiaire quant à l’espace présent.
[68] Dans le rapport d’expert produit par le Bénéficiaire,
[68.1] il n’y a aucune mesure :
[68.1.1] sur l’épaisseur de l’isolant présent ;
[68.1.2] et sur l’épaisseur des cavités présentes ;
[68.2] il n’y a que deux photos montrant une cavité, sans aucune perspective quant à l’ordre de grandeur des cavités, sans instrument de mesures sur ces photos ;
[68.3] les deux seules photos produites montrent des cavités non mesurées.
[69] Le Bénéficiaire n’a pas rempli son fardeau de preuve, n’ayant pas prouvé :
[69.1] comment il a pu déterminer :
[69.1.1] qu’il n’y avait que 4 à 6 pouces et pas plus, ou 4-5 pouces à un endroit et 6 pouces à un autre,
[69.1.2] qu’il y avait une cavité de 10 pouces, ramenée à 6 pouces lors des plaidoiries,
sur la seule base des deux photos 30 et 31 prises avec une caméra qui voit dans le noir, alors qu’il n’y a eu aucune allégation d’une autre inspection invasive ;
[69.2] comment les cavités qui contiennent de la laine en présence d’une membrane Isonomat, peuvent être qualifiées de « caisse de résonnance » qui amplifierait les sons et les vibrations.
[70] Contrairement à ce que le Bénéficiaire affirme dans son témoignage, il n’est pas écrit dans la décision que l’inspectrice-conciliatrice a elle-même constaté l’épaisseur présente ou la grosseur des cavités, elle rapporte les propos du Bénéficiaire.
[71] Quant à la décision de l’Administrateur, contrairement à ce que l’Administrateur affirme, ce n’est pas « puisqu’il n’y a pas de problèmes acoustiques » qu’il y a une mésentente contractuelle non couverte par le Règlement,
[71.1] d’ailleurs à l’audience, l’inspectrice-conciliatrice a plutôt parlé de ces problèmes comme une preuve supplémentaires et non, suffisant à eux seuls,
la réclamation n’est pas couverte par le Règlement :
[71.2] parce que le Bénéficiaire n’a pas été en mesure de remplir son fardeau de preuve d’une faute contractuelle couverte par le plan de garantie en vertu du Règlement ;
[71.3] parce que, de plus, le Bénéficiaire n’a pas été en mesure de prouver des problèmes acoustiques présents causés par une faute contractuelle couverte par le plan de garantie en vertu du Règlement.
[72] Faute de preuve pouvant entraîner la responsabilité de l’Administrateur contre lequel le présent recours est dirigé, le Tribunal considère n’avoir d’autre option que de conclure comme l’Administrateur, c’est-à-dire, de rejeter son recours contre l’Administrateur du plan de garantie, vu l’absence de preuve d’une faute à laquelle l’Administrateur serait responsable en vertu du Règlement, tout en réservant les droits du Bénéficiaire contre toute autre personne devant les tribunaux de droit commun.
[73] L’article 123 du Règlement stipule :
Les coûts de l'arbitrage [...] Lorsque le demandeur est le bénéficiaire, ces coûts sont à la charge de l'administrateur à moins que le bénéficiaire n'obtienne gain de cause sur aucun des aspects de sa réclamation, auquel cas l'arbitre départage ces coûts.
[74] Le Bénéficiaire ayant eu gain de cause sur au moins un des aspects de sa réclamation, les coûts de l’arbitrage seront assumés par l’Administrateur, sous réserve de ses recours récursoires prévus au Règlement.
[75] POUR CES MOTIFS, le Tribunal d’arbitrage :
[75.1] Point 20 – Portes du lavoir déficientes :
[75.1.1] ACCUEILLE la demande d’arbitrage du Bénéficiaire quant au Point 20 ;
[75.1.2] ORDONNE à l’Entrepreneur de procéder aux travaux correctifs le tout conformément à son obligation de résultat selon les normes et les règles de l’art de l’industrie de la construction applicables, dans les quarante-cinq (45) jours à partir de la date de cette décision ET, à défaut par l’Entrepreneur de s’y conformer, ORDONNE à l’Administrateur, sans autre avis ni délai, comme caution de l’Entrepreneur, de les exécuter à l’intérieur d’un délai supplémentaire de quarante-cinq (45) jours de calendrier après l’expiration de ce premier délai ;
[75.2] Point 24 – Dimensions des fenêtres des chambres non conformes au plan et Point 26 - Isolant acoustique non conforme au devis
[75.2.1] REJETTE la demande d’arbitrage du Bénéficiaire quant aux Points 24 et 26 ;
[75.2.2] RÉSERVE le droit du Bénéficiaire, à supposer qu’il ait un recours fondé, de porter devant les tribunaux de droit commun, sa réclamation sur ces deux Points contre toute personne autre que l’Administrateur et sujet aux règles de droit commun et de la prescription civile ;
[75.3] Frais :
[75.3.1] LE TOUT, avec les frais de l’arbitrage, à la charge de Garantie de Construction Résidentielle (GCR) (l’Administrateur) conformément au Règlement sur le plan de garantie des bâtiments résidentiels neufs, avec les intérêts au taux légal majoré de l’indemnité additionnelle prévue à l’article 1619 du Code civil du Québec à compter de la date de la facture émise par CCAC, après un délai de grâce de 30 jours ;
[75.3.2] RÉSERVE à Garantie de Construction Résidentielle (GCR) (l’Administrateur) ses droits à être indemnisé par l’Entrepreneur, pour les coûts exigibles pour l’arbitrage (par.19 de l’annexe II du Règlement) en ses lieux et place, et ce, conformément à la Convention d’adhésion prévue à l’article 78 du Règlement.
Montréal, le 23 février 2023
_______________________
ROLAND-YVES GAGNÉ
Arbitre / CCAC
Autorités citées :
Gauthier et Gagnon c. Goyette Duchesne Lemieux inc. et La Garantie des Bâtiment Résidentiels Neufs de l’APCHQ inc., SORECONI 050629001, 3 novembre 2006, Jeffrey Edwards, arbitre,
9264-3212 Québec Inc. c. Moseka 2018 QCCS 5286 (Hon. Juge Johanne Brodeur).
Immobilier Versant Ouest Inc. c. SDC de la Bâtisse Savage et Raymond Chabot Administrateur Provisoire Inc. ès qualités d’administrateur provisoire du plan de garantie La Garantie Abritat, CCAC S19-012101-NP, 19 juillet 2019, Michel A. Jeanniot, arbitre
3093-2313 Québec c. Létourneau et Bouchard et la Garantie des maisons neuves de l’APCHQ CCAC S15-022401-NP, Décision rectifiée du 12 novembre 2015, Roland-Yves Gagné, arbitre.
Syndicat des copropriétaires 6613-6635 boul. des Laurentides Laval c. 9141-0001 Québec Inc. et Garantie des Bâtiments Résidentiels Neufs de l’APCHQ, CCAC S14-070901-NP, 1er juin 2015, Yves Fournier, arbitre.
Boiler Inspection and Insurance Company of Canada c. Moody Industries Inc. 2006 QCCA 887.
Ulric Rousseau c. 9253-5400 Québec inc. et PriceWaterhouseCoopers ès qualité d’administrateur provisoire de la Garantie Habtion du Québec Inc., AZ-51526030, CCAC S16-112001-NP, 8 juin 2017, Jean Philippe Ewart, arbitre.
Gestion G. Rancourt inc. c. Lebel 2016 QCCA 2094.
Consortium M.R. Canada Ltée c. Office municipal d’habitation de Montréal 2013 QCCA 1211.
Garantie des bâtiments résidentiels neufs de l'APCHQ inc. c. MYL 2011 QCCA 56.
La Garantie des Bâtiments Résidentiels Neufs de l’APCHQ Inc. c. Maryse Desindes et Yvan Larochelle, et René Blanchet mise en cause AZ-50285725, J.E. 2005-132 (C.A.).
Brisson c. 9141-1074 Québec Inc. et La Garantie des Bâtiments Résidentiels Neufs de l’APCHQ Inc. CCAC S8-080401-NP, 28 octobre 2008, Me Michel A. Jeanniot, arbitre.
Garantie d'habitation du Québec c. Jeanniot 2009 QCCS 909 (Johanne Mainville, j.c.s.).
Me Sylvie Rodrigue et Me Jeffrey Edwards La responsabilité légale pour la perte de l’ouvrage et la garantie légale contre les malfaçons, « La construction au Québec : perspectives juridiques », Wilson & Lafleur Ltée 1998, Montréal.
Daunais c. Farrugia, [1985] R.D.J. 223 (C.A.).
[1] 19. Le bénéficiaire ou l'entrepreneur, insatisfait d'une décision de l'administrateur, doit, pour que la garantie s'applique, soumettre le différend à l'arbitrage dans les 30 jours de la réception par poste recommandée de la décision de l'administrateur [...]
[2] Gauthier et Gagnon c. Goyette Duchesne Lemieux inc. et La Garantie des Bâtiment Résidentiels Neufs de l’APCHQ inc., SORECONI 050629001, 3 novembre 2006, Jeffrey Edwards, arbitre, paragraphe [130].
[3] 9264-3212 Québec Inc. c. Moseka 2018 QCCS 5286 (Hon. Juge Johanne Brodeur). Voir aussi, au même effet : Immobilier Versant Ouest Inc. c. SDC de la Bâtisse Savage et Raymond Chabot Administrateur Provisoire Inc. ès qualités d’administrateur provisoire du plan de garantie La Garantie Abritat, CCAC S19-012101-NP, 19 juillet 2019, Michel A. Jeanniot, arbitre (paragraphes [89] et [90]); 3093-2313 Québec c. Létourneau et Bouchard et la Garantie des maisons neuves de l’APCHQ CCAC S15-022401-NP, Décision rectifiée du 12 novembre 2015, Roland-Yves Gagné, arbitre, paragraphe [335]; Syndicat des copropriétaires 6613-6635 boul. des Laurentides Laval c. 9141-0001 Québec Inc. et Garantie des Bâtiments Résidentiels Neufs de l’APCHQ, (CCAC S14-070901-NP, 1er juin 2015, Yves Fournier, arbitre), paragraphes [68] à [76].
[4] « 2803. Celui qui veut faire valoir un droit doit prouver les faits qui soutiennent sa prétention. […] 2804. La preuve qui rend l'existence d'un fait plus probable que son inexistence est suffisante, à moins que la loi n'exige une preuve plus convaincante. »
[5] 2006 QCCA 887.
[6] [1] Daunais c. Farrugia, [1985] R.D.J. 223 (C.A.), p. 228, j. Monet.
[7] La responsabilité légale pour la perte de l’ouvrage et la garantie légale contre les malfaçons, « La construction au Québec : perspectives juridiques », Wilson & Lafleur Ltée 1998, Montréal.
[8] AZ-51526030, CCAC S16-112001-NP, 8 juin 2017, Jean Philippe Ewart, arbitre.
[9] Gestion G. Rancourt inc. c. Lebel 2016 QCCA 2094, paragraphe [19] ; Consortium M.R. Canada Ltée c. Office municipal d’habitation de Montréal 2013 QCCA 1211 paragraphe [18] ; Garantie des bâtiments résidentiels neufs de l'APCHQ inc. c. MYL 2011 QCCA 56 paragraphe [13] ; La Garantie des Bâtiments Résidentiels Neufs de l’APCHQ Inc. c. Maryse Desindes et Yvan Larochelle, et René Blanchet mise en cause AZ-50285725, J.E. 2005-132 (C.A.), paragraphe [11].
[10] 2004 CanLII 47872 (QC CA).
[11] S8-080401-NP, 28 octobre 2008, Me Michel A. Jeanniot, arbitre.
[12] 2009 QCCS 909 (Johanne Mainville, j.c.s.).
[13] 2016 QCCA 2094.
[14] 2013 QCCA 1211.