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ARBITRAGE

En vertu du Règlement sur le plan de garantie

des bâtiments résidentiels neufs

(Décret 841-98 du 17 juin 1998)

Organisme d’arbitrage autorisé par la Régie du bâtiment :

Société pour la résolution des conflits inc. (SORECONI)

 

 


ENTRE          

MADAME PASQUALINA MAIETTA

et

MONSIEUR MIGUEL ENRIQUE BERREONDO GAMEZ

(ci-après « le Bénéficiaire »)

 

ET                      GROUPE IMMOBILIER CLÉ D’OR INC.         

(ci-après « l’Entrepreneur »)

 

ET :                     LA GARANTIE HABITATION DU QUÉBEC INC (Qualité-Habitation)

(ci-après « l’Administrateur »)

 

No dossier Garantie:    QH -41884-1

No dossier SORECONI :   0810120001

 

 

 

SENTENCE ARBITRALE

Décision rendue le 20 avril 2009

 

 

 

Arbitre :                                  Guy Pelletier

Pour le Bénéficiaire :           Madame Pasqualina Maietta

Pour l’Entrepreneur :            Monsieur Yves Bertrand

Pour l’Administrateur :        Me Avelino De Andrade

 

Mandat :

L’arbitre a reçu son mandat de SORECONI  le 30 octobre 2008.

 

Historique et pièces :

 

1er février 2007 :       Réception du bâtiment

12 juillet 2007 :          Première dénonciation écrite à l’Administrateur

20 juin 2008 :            Deuxième dénonciation écrite à l’Administrateur

18 janvier 2008 :       Première décision de l’Administrateur

8 septembre 2008 :  Deuxième décision de l’Administrateur

12 octobre 2008:      Demande d’arbitrage

9 avril 2009:              Audition de la demande d’arbitrage

 

 Introduction :

 

[1]            La date de réception du bâtiment est établie au 31 janvier 2007 sur le formulaire d’inspection préréception non signé par le Bénéficiaire ni par l’Entrepreneur (pièce A7 du cahier de l’Administrateur). D’autre part, la réception de l’unité apparaît comme étant le 1er février 2007 dans les rapports d’inspection rédigés par l’Administrateur.

[2]            Le 12 juillet 2007, le Bénéficiaire fait une réclamation écrite à l’Administrateur. Ce dernier rend une première décision sur 14 points dont un concerne le verni du plancher de bois franc dans la salle à manger.

[3]            L’Administrateur ayant constaté la présence de bulles de verni éclatées dans cette pièce, ordonne à l’Entrepreneur d’apporter les correctifs requis.

[4]            Le 20 juin 2008, malgré les correctifs apportés au verni sur le plancher de la salle à manger, le Bénéficiaire fait une seconde réclamation, car il considère que les défectuosités sont toujours apparentes de sorte que les résultats obtenus lui apparaissent insatisfaisants.

[5]            Le 8 septembre 2008, après avoir constaté la situation, l’Administrateur rejette la réclamation du Bénéficiaire. Cette deuxième décision concernant la finition du plancher de bois se lit ainsi :   (extrait de la décision)

[5.1]           « Lors de notre inspection, après une attention particulière, l’état du plancher nous est apparu très acceptable étant donné le type de plancher. Par conséquent, La garantie Qualité Habitation ne peut reconnaître ce point dans le cadre de son mandat. »

[6]            Insatisfait de la décision, le Bénéficiaire demande l’arbitrage le 12 octobre 2008.

 

L’audition :

 

[7]            L’audition est précédée d’une visite des lieux qui a permis à l’arbitre de constater l’état du verni sur le plancher de bois franc de la salle à manger et du passage qui mène à l’entrée principale.

[8]            Madame Maietta indique que la finition dans cette partie du plancher où des réparations ont été faites, est maintenant différente des autres parties adjacentes, notamment du plancher du palier de l’escalier qui n’a pas été retouché.

[9]            Sous différents angles et éclairages, madame Maietta fait observer aux parties que les résultats obtenus suite aux correctifs sont inacceptables car on y note encore des défectuosités telles que des bulles et une quantité insuffisante de verni à la jonction des planches.

[10]        Madame Maietta témoigne à l’effet qu’elle n’a jamais eu un plancher ayant un tel fini, notamment dans sa « maison de 40 ans » et que « même chez sa sœur la qualité du fini de plancher est nettement meilleure».

[11]        Me Avelino De Andrade, procureur de l’Administrateur, fait témoigner monsieur Normand Pitre, qui a rendu les deux décisions. Ce dernier indique qu’il a plusieurs années d’expérience dans le domaine de l’inspection.

[12]        Monsieur Pitre précise qu’il a constaté qu’il y avait des correctifs à faire lorsqu’il a inspecté le plancher en janvier 2008 et que ceux-ci ont été faits par la suite.  Il explique que ce type de plancher, verni sur place et non en usine, peut comporter certaines imperfections acceptables, telles que des bulles et des traces de poussières qui rendent le fini rugueux à certains endroits.

[13]        Pour appuyer ces constats, il dépose quelques pages du Guide de performance de l’APCHQ. On y retrouve certaines remarques en regard du « manque de fini ou d’uniformité sur le plancher », notamment qu’on « ne doit jamais accepter ou refuser un plancher en évaluant son inégalité sous une lumière réfléchie. »

[14]        En contre-interrogatoire, madame Maietta, demande à monsieur Pitre, pourquoi le fini de son plancher est différent de celui qu’elle  a pu observer ailleurs.

[15]        Monsieur Pitre rappelle que la finition d’un plancher de bois exécutée sur place, comparativement à celle faite en usine, peut varier sensiblement d’un bâtiment à l’autre compte tenu des conditions différentes de chantier.

[16]        Madame Maeitta argumente « qu’elle n’aurait pas fait faire les travaux correctifs si elle avait su que l’apparence du plancher allait être pire qu’avant. » Elle se considère la « malchanceuse » dans ce dossier

[17]        Me De Andrade plaide que les arguments du Bénéficiaire sont purement subjectifs, qu’il n’y a aucune preuve de malfaçon et que la preuve de la présence de bulles n’a pas été faite malgré une observation attentive du plancher lors de la visite des lieux. Il ajoute que les résultats obtenus suite aux correctifs sont conformes à ce qu’on retrouve dans l’industrie de la construction. Il demande donc que la décision de l’Administrateur soit maintenue.

 

Analyse :

 

[18]              Dans le présent cas, l’arbitre doit déterminer si le problème dénoncé par le Bénéficiaire dans l’année qui suit la réception du bâtiment constitue une malfaçon couverte par la garantie.

[19]              Il convient de rappeler le droit applicable dans le cas où le Bénéficiaire découvre des malfaçons ou des vices cachés. Le règlement sur le plan de garantie des bâtiments résidentiels neufs se lit ainsi à l’article 10:

10.   La garantie d'un plan dans le cas de manquement de l'entrepreneur à ses obligations légales ou contractuelles après la réception du bâtiment doit couvrir:

  3°    la réparation des malfaçons existantes et non apparentes au moment de la réception et découvertes dans l'année qui suit la réception, visées aux articles 2113 et 2120 du Code civil et dénoncées, par écrit, à l'entrepreneur et à l'administrateur dans un délai raisonnable, lequel ne peut excéder 6 mois de la découverte des malfaçons;

 

[20]        Le Bénéficiaire a dénoncé un problème de finition de plancher apparent dans la salle à manger au cours de la première année de garantie et le délai n’a pas été constesté par l’Administrateur. Il a même reconnu le problème et a exigé des correctifs de la part de l’Entrepreneur.

[21]        Le Bénéficiaire doit donc prouver la malfaçon et démontrer un manquement de l’Entrepreneur à ses obligations légales ou contractuelles.

[22]        La Régie du bâtiment du Québec fournit dans ses publications grand public[1] une définition des termes règles de l’art, vices ou malfaçons :

Règles de l’art : Ensemble des techniques et pratiques de construction reconnues, approuvées ou sanctionnées. Ces règles ont un caractère évolutif car les méthodes de construction, les équipements et les matériaux disponibles évoluent constamment.

Elles trouvent notamment leurs sources dans les documents suivants:

·        les instructions ou guides fournis par les fabricants d’équipements

·        ou de matériaux entrant dans la construction des immeubles;

·        les normes ou standards publiés par les organismes de normalisation;

·        les lois ou règlements contenant des prescriptions obligatoires

·        relativement à l’ouvrage à construire;

·        les publications scientifiques ou techniques utilisées à des fins

·        d’enseignement des professions ou des métiers, ou servant

·        à la diffusion du savoir le plus récent.

« Vices ou malfaçons : Travail mal fait ou mal exécuté compte tenu des normes qui lui sont applicables. Ces normes se trouvent dans les conditions contractuelles et les règles de l’art (voir ci-dessus la notion de « règles de l’art »). Ces défauts d’exécution se distinguent des vices cachés et des vices de conception, de construction ou de réalisation par leur degré de gravité : il s’agit de défauts mineurs. » 

[23]        Lors de la visite des lieux, le Bénéficiaire a tenté de démontrer par une inspection visuelle que la fini du plancher ne correspondait pas aux standards de qualité auxquels doit s’attendre un acheteur d’une résidence.

[24]        L’examen de la surface, à la lumière du jour sous différents angles, a permis de constater que la planitude de la finition était imparfaite. Cependant, la preuve n’a pas été faite que cette situation était non conforme aux normes applicables pour un plancher de bois franc verni sur place.

[25]        Malgré toute l’attention apportée par l’arbitre à l’apparence du fini de plancher, il n’est pas apparu que la surface comportait des imperfections telles qu’elles puissent être qualifiées de malfaçons.

[26]        Le Bénéficiaire qui avait le fardeau de la preuve, n’a pas convaincu le tribunal que l’Entrepreneur a manqué à ses obligations.

[27]        L’argumentation de l’Administrateur doit être retenue à l’effet que les imperfections difficilement perceptibles correspondent à des standards acceptables pour un plancher verni sur place.   

 

 

 

 

DÉCISION :

 

[28]        L’arbitre doit statuer « conformément aux règles de droit;  il fait aussi appel à l’équité lorsque les circonstances le justifient.»

[29]         À titre d’arbitre désigné, le soussigné est autorisé par la Régie du bâtiment du Québec à trancher tout différend découlant des plans de garantie.  La décision doit prendre appui sur le texte du Règlement sur le plan de garantie des bâtiments résidentiels neufs.

[30]        Suivant mon appréciation des faits, de la preuve versée au dossier et présentée à  l’audition et du droit applicable, je suis d’avis que le problème dénoncé par le Bénéficiaire ne peut être qualifié de malfaçon au sens du Règlement sur le plan de garantie des bâtiments résidentiels neufs.

[31]             En vertu de l’article 123 du Règlement sur le plan de garantie des bâtiments résidentiels neufs et comme le Bénéficiaire n’a pas obtenu gain de cause sur aucun point de sa réclamation, l’arbitre doit partager les coûts. Conséquemment, considérant que le présent règlement peut être assimilé aux autres règlements visant la protection des consommateurs, l’arbitre fixe à 69.00$ le montant des frais judiciaires à être payé par le Bénéficiaire, suivant la grille des frais de la Division des petites créances  de la chambre civile de la Cour du Québec

 

POUR  CES MOTIFS LE TRIBUNAL D’ARBITRAGE :

 

[32]        REJETTE la demande d’arbitrage du Bénéficiaire;

[33]        MAINTIENT la décision de l’Administrateur en date du 8 septembre 2008;

[34]        CONDAMNE le Bénéficiaire à payer 69.00$ à titre de frais d’arbitrage;

[35]        CONDAMNE l’Administrateur à payer la balance des frais d’arbitrage;

 

Guy Pelletier

Architecte et arbitre

Laval, ce 20 avril 2009



[1] http://www.rbq.gouv.qc.ca/dirPublication/dirGrandPublic/dirPlanGarantie/web_maison_fr.pdf