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ARBITRAGE EN VERTU DU RÈGLEMENT SUR LE PLAN DE GARANTIE

DES BÂTIMENTS RÉSIDENTIELS NEUFS

 

Organisme d'arbitrage autorisé par la Régie du bâtiment:

CENTRE CANADIEN D'ARBITRAGE COMMERCIAL (CCAC)

 

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   ENTRE:                               SYNDICAT DE COPROPRIÉTÉ 8420-8430, DE BUFFALO

 

                                                                         (ci-après désigné « le Bénéficiaire »)

 

 

                                                CONSTRUCTION G. CARRIER INC.

 

                                                                          (ci-après désignée « l'Entrepreneur »)

 

 

                                                LA GARANTIE HABITATION DU QUÉBEC INC. (LA GARANTIE QUALITÉ HABITATION)

 

                                                                        (ci-après désignée « l'Administrateur »)

 

 

 

   No dossier CCAC:  S10-020602-NP

 

 

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DÉCISION ARBITRALE

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   Arbitre:                                                       Me Reynald Poulin

 

   Pour le Bénéficiaire:                                  Mme Guylaine Brisson

 

   Pour l'Entrepreneur:                                  M. Ghislain Carrier

 

   Pour l'Administrateur:                               Me Stéphane Audy

 

 

 

Identification complète des parties

 

 

Arbitre:                                                        Me Reynald Poulin

                                                                   79, boul. René-Lévesque Est

                                                                   Bureau 200

                                                                   C.P. 1000, Haute-Ville

                                                                   Québec (Québec)  G1R 4T4

 

 

Bénéficiaire:                                               Syndicat de copropriété 8420-8430, de                                                                    Buffalo

                                                                   (Mme Guylaine Brisson)

8424. de Buffalo

Québec (Québec)  G2C 0E7

 

 

 

Entrepreneur:                                             Construction G. Carrier inc.

(M. Mario Carrier)

1751, avenue Lapierre

Québec (Québec)  G3E 1N5

 

 

 

Administrateur:                                          La Garantie Habitation du Québec inc.

                                                                  (La Garantie Qualité Habitation)

7400, boul. Les Galeries d'Anjou, bur. 200

Montréal (Québec)  H1M 3M2

Et son procureur:

Me Stéphane Audy

KSA, Avocats

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

DÉCISION ARBITRALE

 

 

[1]           Le Bénéficiaire, Syndicat de copropriété 8420-8430, de Buffalo (ci-après désigné le «Bénéficiaire») a demandé l'arbitrage d'une décision de l'Administrateur, La Garantie Qualité Habitation, rendue le 5 mai 2010 et statuant sur une série de vingt-et-une (21) demandes de réclamation. Ces demandes ont été formulées à l'intérieur de la première année de la réception de la copropriété 8420-8430, de Buffalo, ville de Québec.

[2]           Conformément à une décision interlocutoire rendue le 9 septembre 2010, les demandes de réclamation portant les numéros 11, 13, 17 et 19, telles que décrites à la décision de l'Administrateur, ont été visées par la demande d'arbitrage du Bénéficiaire.

[3]           Tant le Bénéficiaire que l'Administrateur ont eu l'occasion de requérir la production de rapports d'experts à l'appui de leurs prétentions dans le présent dossier.

[4]           Lors de l'audience, les parties ont respectivement produit au dossier d'arbitrage les documents identifiés ci-après:

Par le Bénéficiaire:

Pièce B-1

Rapport produit par Groupe Hudini inc. daté du 7 août 2010 et préparé par M. Guy Harvey, ingénieur

Pièce B-1A

Curriculum vitae de M. Guy Harvey, ingénieur

Pièce B-1B

Photographie

Pièce B-1C

Extrait d'une feuille de plan portant le numéro 1-10 et datée de juillet 2007 signée par Michel L. Grimard, architecte

Pièce B-1D

Extrait du Code national du bâtiment - Canada 1995, articles 5.7.1.1 et 9.15.4.3

Pièce B-1E

Extrait du Code national du bâtiment - Canada 1995, art. 9.20.5.1

Pièce B-1F

Extrait d'un plan ayant servi à la construction de l'immeuble en cause

Pièce B-1G

En liasse, un document composé de quatre (4) feuilles comportant des calculs de Groupe Hudini inc. et des extraits de plans d'architecture de l'immeuble en cause

Pièce B-1H

Trois (3) photographies de lézardes à l'immeuble

Pièce B-1I

Extrait d'un plan de la Ville de Québec

Pièce B-1J

Feuille A-203 d'un plan d'architecture signé par André Roy, architecte, le 1er février 2008 pour le projet «Immeuble 6 condominiums Quartier Les Méandres.

Après l'audience, le Bénéficiaire a transmis au Tribunal d'arbitrage le détail des honoraires de Groupe Hudini inc., expert, les courriels (2) échangés entre l'expert Guy Harvey de Groupe Hudini inc. et l'ingénieur Stéphane Blanchette les 9 et 10 août 2010, une lettre datée du 11 août 2009 de la représentante du Bénéficiaire adressée à Construction G. Carrier inc., dont copie conforme à Qualité Habitation et une lettre de l'Administrateur datée du 19 août 2009 adressée à la représentante du Bénéficiaire en réponse à la lettre du 11 août 2009.

Quant à l'Administrateur et Construction G. Carrier inc., ceux-ci ont produit les documents identifiés ci-après:

Pièce A-1

Décision de l'Administrateur datée du 5 mai 2010 portant sur les vingt-et-une (21) demandes de réclamation

Pièce A-2

Formulaire d'inspection préréception datée du 24 août 2009 et prévoyant une date de fin de travaux le 30 octobre 2009

Pièce A-3

Exemplaire d'un contrat préliminaire de vente et contrat de garantie obligatoire

Pièce A-4

Série de six (6) photos démontrant l'extérieur du bâtiment en cause

Pièce A-5

Rapport d'expertise portant sur la structure du bâtiment préparé par Yves Gilbert inc. pour l'Administrateur et daté du 7 décembre 2010

Pièce A-5-1

Curriculum vitae de M. Yves Gilbert, ingénieur et expert pour l'Administrateur

Pièce A-5-2

Lettre et note d'honoraires de l'expert Yves Gilbert, ingénieur

Après l'audition, le procureur de l'Administrateur a communiqué la note finale d'honoraires de M. Yves Gilbert pour ses services dans le cadre de l'arbitrage.

OBJECTIONS SOULEVÉES LORS DE L'ARBITRAGE

[5]           Dès le début de l'audience, le procureur de l'Administrateur a soulevé une objection quant au rapport d'expert de M. Guy Harvey, ingénieur, au Groupe Hudini inc.

[6]           Plus particulièrement, le procureur de l'Administrateur a requis que soient retirés du rapport d'expert des passages qui reproduisent un résumé de texte d'une décision arbitrale sur un sujet que l'expert estime analogue à celui en espèce. Le procureur de l'Administrateur soumet que ce passage de l'expertise est illégal en ce qu'elle constitue ni plus ni moins un témoignage écrit sur l'état du droit en la matière, ressort exclusif du Tribunal.

[7]           Il est connu que l'opinion d'un témoin expert doit demeurer dans les limites de son expertise et ne pas empiéter sur ce qui est du ressort exclusif du juge ou de l'arbitre. L'affaire Confédération des syndicats nationaux et al c. Procureur général du Québec, décision rendue par l'honorable Danielle Grenier, j.c.s., constitue une autorité en la matière. Citant les principes généraux applicables, la juge Grenier rappelle que la preuve d'expert repose sur l'application des critères suivants:

a)         la pertinence;

b)         la nécessité d'aider le juge des faits;

c)         l'absence de toute règle d'exclusion; et

d)         la qualification suffisante de l'expert.

Pour être nécessaire, la preuve d'expert doit dépasser la connaissance et l'expérience d'un juge ou d'un arbitre. De plus, cette preuve doit être présentée par un témoin qui a acquis des connaissances spéciales ou particulières grâce à des études ou une expérience relatives aux questions visées dans son témoignage. En ce qui concerne la plaidoirie, la juge Grenier cite le «Traité sur l'administration de la preuve» du professeur Ducharme, lequel souligne, à juste titre selon le Tribunal, que le rôle d'un expert ne consiste pas à témoigner sur l'état du droit interne et qu'il incombe plutôt aux avocats d'instruire le tribunal à ce sujet:

«103. [...] L'obligation faite au tribunal de prendre connaissance d'office du droit interne procède de la nature même de la fonction judiciaire qui est de dire le droit. Il en découle que le tribunal a pour mission de prendre les mesures nécessaires pour connaître le droit afin de pouvoir l'exprimer.

104. Dans l'exercice de sa fonction de dire le droit, le tribunal compte évidemment sur la collaboration des plaideurs. Toutefois, à la différence de ce qui se passe au sujet des faits générateurs de droit, toute information concernant l'état du droit ne lui est pas transmise selon les règles de preuve. Bien plus, il est même interdit de soumettre une preuve concernant le droit interne et notamment de faire entendre des témoins experts.

[...] »

[8]           À la lumière de ces principes, la section se retrouvant à la page 5 du rapport de Groupe Hudini inc. citant un résumé d'une décision arbitrale doit être retirée du rapport puisqu'il s'agit d'un exercice illégal par l'expert, lequel ne peut s'immiscer dans ce domaine d'expertise qui n'est pas le sien.

[9]           De plus, le procureur de l'Administrateur s'est également objecté à ce que la demande de réclamation identifiée sous le numéro 15 dans la décision de l'Administrateur A-1 fasse l'objet de l'arbitrage. Selon l'expert, Groupe Hudini inc., le constructeur aurait reconnu que des dommages avaient été occasionnés à la surface de certaines marches des escaliers et de celles du palier de l'immeuble. Un travail de réfection aurait été entrepris à l'été 2010 après qu'un autre aurait été effectué à l'automne précédent. L'expert allègue autre chose que la qualité du béton, soit des espaces pouvant être sources d'éventuelles chutes. Or, cette demande de réclamation n'a pas été formulée de cette façon initialement et conformément à la décision interlocutoire, l'arbitrage ne porte pas sur cette réclamation. Le Tribunal d'arbitrage fait donc droit à l'objection et ne se prononcera pas à ce sujet puisqu'il n'est pas saisi de cette question.

LA PREUVE ET LES DÉCISIONS SUR LES DEMANDES DE RÉCLAMATION

[10]        Le Bénéficiaire, demandeur en arbitrage, a fait entendre M. Guy Harvey, représentant de Groupe Hudini inc. Le procureur de l'Administrateur s'est objecté à la reconnaissance de M. Harvey à titre d'expert. Une preuve a donc été nécessaire à ce sujet. Selon le curriculum vitae de M. Harvey produit comme pièce B-1A, celui-ci est détenteur d'un baccalauréat en sciences appliquées option génie mécanique. Interrogé à ce sujet, l'expert Harvey a reconnu que rien dans le présent dossier ne concernait le génie mécanique. Il a néanmoins soutenu être compétent concernant la structure du bâtiment en prétendant connaître le Code du bâtiment, d'un couvert à l'autre. Néanmoins, l'expert Harvey ne se considère pas un expert en structure et ajoute même ne pas avoir lui-même calculé les charges que pouvait supporter l'immeuble, élément notamment pertinent concernant les demandes de réclamation numéros 5 et 17.

[11]        Il peut être imprudent de rejeter à ce stade un rapport d'expert basé sur des représentations comme celles avancées par le procureur de l'Administrateur. Évidemment, cela ne signifie en rien que dès qu'un rapport d'expert est produit, son auteur doit être reconnu à ce titre devant le Tribunal. Tout est une question de circonstances. Dans le présent dossier, l'expert, détenteur d'une formation universitaire, prétend avoir des compétences au niveau de la structure d'un bâtiment et être capable de livrer un témoignage utile et nécessaire devant le Tribunal. Cet expert sera donc reconnu comme expert devant la Cour et les éléments soulevés par le procureur de l'Administrateur seront considérés au niveau de la crédibilité et de la pertinence.

[12]        M. Harvey explique d'abord avoir effectué une visite préliminaire de l'immeuble, en date du 16 mai 2009, pour le Bénéficiaire et ce, dans le but de l'éventuelle signature du rapport de prise de possession, pièce A-2. Il ajoute qu'il a effectué une visite des lieux où il aurait constaté la présence d'eau sur le terrain et ce, le 4 juillet 2009. Tel qu'il appert au formulaire d'inspection préréception, pièce A-2, M. Harvey a également signé la déclaration de réception des parties communes du bâtiment, avec réserve, pour le Bénéficiaire et ce, en date du 24 août 2009. Le 25 janvier 2010, il dit avoir constaté la présence d'eau au-dessus des chantepleures. Le 13 avril 2010, il a effectué une visite additionnelle des lieux en prévision d'une rencontre prévue le lendemain et visant, selon lui, la correction des travaux identifiés lors de la prise de possession. Le lendemain, il affirme avoir été présent lors de l'inspection et avoir discuté avec le représentant de l'Administrateur sur différents éléments problématiques à l'immeuble. Après avoir été avisé de la décision de l'Administrateur rendue le 5 mai 2010, pièce A-1, il aurait donné son accord pour que soit demandé l'arbitrage.

[13]        Après qu'on lui en a fait la demande, il prépara un rapport d'expert pour les fins de l'arbitrage. Le mandat qu'on lui a confié était le suivant:

1.   Analyser le rapport de M. Bernard Gaudichon de Qualité Habitation;

2.   Argumenter les points qui devraient être soumis à l'arbitrage.

[14]        Ainsi, M. Harvey a produit un rapport d'expert portant sur les demandes de réclamation numéros 5, 11, 13, 17 et 19. Lors de l'audition, les parties ont convenu de procéder dans l'ordre en suivant les différentes demandes de réclamation du Bénéficiaire. Le Tribunal traitera donc de celles-ci dans le même ordre.

Demande de réclamation no. 11:   Pentes de terrain inversées à l'arrière

Demande de réclamation no. 13:   Dégagement du parement via le sol

[15]        Dans sa décision, l'Administrateur a appliqué l'article 6.7.9 du Contrat de garantie et déclaré exclues de celle-ci lesdites demandes de réclamation. Alléguant que tout ouvrage situé à l'extérieur du bâtiment, tels le terrassement et le système de drainage des eaux de surface du terrain étaient exclus, ces deux (2) demandes de réclamation ont donc été rejetées.

[16]        M. Harvey a témoigné pour le Bénéficiaire concernant ces demandes. Citant les dispositions 5.7.1.1 et 9.15.4.3 du Code national du bâtiment - Canada 1995, l'expert a soumis que la problématique de pente de terrain inversée n'était pas un problème d'aménagement du terrain mais bien la conséquence d'une implantation trop basse du bâtiment. À la demande de l'arbitre, l'expert a produit, comme pièce B-1D, copie du texte du Code national du bâtiment auquel il se référait. Citant les pages 3 et 4 de son rapport, il soumet que les pentes à l'arrière de l'immeuble sont inversées et que cela cause un préjudice puisque l'eau se dirige vers le bâtiment. Un problème serait survenu en janvier 2009 lors d'un «redoux» et il prétend que si ce problème se répète, cela risque de causer des dommages à l'immeuble. L'expert n'a fait aucune preuve de tels dommages et de leurs ampleurs, ni non plus, de façon prépondérante, que cela risque effectivement de survenir à nouveau.

[17]        Contre-interrogé, l'expert Harvey confirme qu'il n'a effectivement fait aucun constat de dommages ajoutant même que le solin aurait fait son travail jusqu'à maintenant. Concernant l'hypothèse que l'immeuble aurait été construit trop bas, l'expert ne peut informer le Tribunal à quel niveau l'immeuble devait être construit ni donné quelque détail que ce soit concernant l'implantation de celui-ci puisqu'il n'avait aucun document en sa possession. Il ajoute que la pente inverse pourrait être corrigée. Interrogé sur l'hypothèse d'une construction plus haute avec une pente toujours inversée vers ce même immeuble, il reconnaît étonnamment alors qu'il s'agirait d'un problème d'aménagement de sol. C'est ce que d'ailleurs a reconnu l'Administrateur dans sa décision excluant du plan de garantie une problématique semblable. Il ajoute n'avoir vérifié aucun rapport météo lors de ses visites.

[18]        Mme Brisson, représentante du Bénéficiaire a témoigné qu'il n'y avait pas de dommages à l'immeuble à l'endroit où l'eau s'est déjà accumulée selon elle mais qu'elle a une crainte que cela pourrait se produire en raison du phénomène du gel-dégel. Contre-interrogée, elle réitère qu'il n'y a eu aucune infiltration d'eau visible, selon elle.

[19]        M. Ghislain Carrier, représentant de l'Entrepreneur a témoigné a sujet de ces demandes de réclamation. Il a mentionné que les eaux de surface étaient captées par le drain placé en périphérie des fondations et que cette situation était inévitable compte tenu de l'érection d'un stationnement se retrouvant à l'arrière de l'immeuble et à une position surélevée. Ce qui précède est constaté aux photos produites au dossier comme pièce A-4. M. Mario Carrier a également témoigné pour l'Entrepreneur. Il affirme que le drain de surface a été effectué autour de l'immeuble et qu'il n'y avait aucun dégât qui ait été constaté à l'intérieur de celui-ci. Il ajoute témoigne que des calculs ont été effectués pour la gestion des eaux de surface autour de l'immeuble. L'arpenteur Robert Giroux est également intervenu à ce sujet, selon lui, et la hauteur du bâtiment était à la limite des demandes de la Ville. Il ajoute que si les pentes inversées causent un problème, cela se corrige assez simplement en enlevant de la tourbe et un peu de remblai. La solution, selon lui, ne réside aucunement dans le soulèvement complet du bâtiment, ce qui lui apparaît illogique et déraisonnable.

[20]        Toujours selon M. Carrier, le terrain était plat à l'arrière du bâtiment. Après la construction de celui-ci, il y a eu soulèvement du terrain pour l'érection d'un stationnement à l'arrière de l'immeuble. Cette nouvelle construction était prévue dans le plan d'ensemble avant la construction et la Ville de Québec en a accepté les particularités. Un drain de captation a été installé à l'arrière de l'immeuble justement en raison de la pente minimale se retrouvant à l'arrière, selon lui. Si un problème de pente subsiste, celui-ci n'est pas très problématique en raison de la présence du drain de captation et que la pente peut facilement se corriger.

[21]        La déclaration de réception des parties communes du bâtiment, signée par l'expert à titre de représentant du Bénéficiaire le 24 août 2009, décrit précisément ce qui suit à la section «Terrain»:

«Pente inversée - hauteur - sol vs fondation moins de 6 po. - puits perdu pour égouttement».

[22]        Cette section «Terrain» audit formulaire est décrit comme suit:

«Niveau de sol aux abords du bâtiment (espace entre le parement et le sol) pentes descendantes qui éloignent l'eau du bâtiment».

[23]        Cette description est suivie d'un astérisque (*) qui renvoie à une mention au formulaire qui se lit comme suit:

«* L'aménagement de terrain est exclu de la garantie».

[24]        Tel que l'a reconnu l'expert dans le cadre de son témoignage, la problématique n'est pas liée au niveau d'élévation du bâtiment mais bien à l'aménagement du terrain extérieur qui comporte une pente inversée tout comme il a été identifié à la déclaration de réception des parties communes par ce même expert. Dans le formulaire de déclaration de réception des parties communes, il est fait clairement référence au fait que l'aménagement de terrain est exclu de la garantie tout comme l'a décidé l'Administrateur dans le présent dossier. Considérant la preuve, le Tribunal d'arbitrage ne peut faire droit à la réclamation du Bénéficiaire puisque celle-ci est liée à une problématique qui est exclue du contrat de garantie.

Demande de réclamation no. 19:   Ouvertures du plafond via le mur 8424 (première                                                        constatation hiver 2008

[25]        Dans sa décision, l'Administrateur a conclu que cette demande visait une partie privative et devait donc être dénoncée par le propriétaire de l'unité en question, ce qui n'aurait pas été fait selon lui. De plus, l'Administrateur invoque qu'une demande de réclamation aurait dû être formulée, par écrit, à l'Entrepreneur et à l'Administrateur dans un délai raisonnable ne pouvant excéder six (6) mois de sa découverte. Dans le cas présent, l'Administrateur a décidé que la demande de réclamation était connue plus de un (1) an avant sa déclaration par écrit. Il a donc rejeté cette réclamation.

[26]        Témoignant à l'appui de son rapport, M. Harvey a réitéré que l'ouverture au haut de la moulure du plafond a été signalée à l'Entrepreneur à l'hiver 2008. Au printemps 2009, l'expert précise que la fissure s'était résorbée pour réapparaître à nouveau à l'hiver 2009. Selon l'expert, le problème serait causé par une mauvaise installation du gypse et est occasionné par le mouvement des fermes de toit, donc par une partie commune. Il conclut sommairement que l'Entrepreneur devrait apporter les correctifs, sans plus. À l'audition, il a référé à la photo produite comme pièce B-1B.

[27]        Contre-interrogé au sujet de la photo, l'expert mentionne que celle-ci a été prise avec une caméra avec système de rapprochement. Prétendant que la fissure est aussi large qu'un crayon, il a été incapable d'en donner une mesure.

[28]        Telle est la preuve à propos de cette réclamation.

[29]        Ayant le fardeau de la preuve, le Bénéficiaire se doit de convaincre le Tribunal de la justesse de sa réclamation. Or, en plus d'une photo qui est imprécise et sur laquelle n'apparaît aucun objet qui pourrait aider le Tribunal à comprendre l'ampleur du phénomène. En l'absence de toute mesure, il est difficile et même hasardeux de juger à ce sujet. Il se pourrait aisément qu'il s'agisse d'un mouvement de retrait dû au comportement normal des matériaux. Il semble, selon l'expert du Bénéficiaire, que ce problème serait «occasionné par le mouvement des fermes de toit». Aucune preuve technique n'a été apportée à ce sujet. Par conséquent, le Tribunal ne peut donc que conclure que la décision de l'Administrateur est bien fondée. La preuve prépondérante révèle qu'il s'agit d'une problématique affectant une partie privative et que le Bénéficiaire ne peut s'en plaindre. Le Bénéficiaire a communiqué, après l'audience, des documents dont une lettre du 11 août 2009 suivie d'un accusé de réception du 19 août 2009 par l'Administrateur. Or, l'arbitre constate à la décision de cet Administrateur survenue le 5 mai 2010, que la réclamation écrite auquel fait référence le dossier d'arbitrage aurait plutôt été daté du 16 février 2010. Cette réclamation écrite n'a pas été produite au dossier d'arbitrage par quiconque de sorte qu'il est impossible pour le soussigné de conclure autrement que l'a fait l'Administrateur à ce sujet. De plus, la preuve révèle, et cela n'a pas été contesté par le Bénéficiaire, que la problématique aurait été dénoncée à l'extérieur du délai prévu au contrat de garantie et au Règlement sur le plan de garantie des bâtiments résidentiels neufs (ci-après désigné le «Règlement»), soit dans un délai raisonnable ne pouvant excéder six (6) mois de sa découverte.

Demande de réclamation no. 5:     Fissure à la maçonnerie en façade

Demande de réclamation no. 17:   Plan de structure

[30]        Dans sa décision, l'Administrateur a reconnu la demande numéro 5 concernant les fissures à la maçonnerie en façade. En effet, l'Administrateur était d'avis que la plupart des fissures avaient été réparées par l'Entrepreneur mais que certaines devaient encore être exécutées en façade aux portes d'entrée principales. Quant à la réclamation des plans de structure, la demande numéro 17, l'Administrateur a décidé que cela ne faisait pas partie des protections prévues au plan de garantie et qu'il ne pouvait, par conséquent, y donner suite.

[31]        À la déclaration de réception des parties communes, la mention suivante a été apportée:

«À fournir plans + attestation de structure par un ingénieur façade et toits des balcons.»

[32]        Se référant à son rapport, l'expert Harvey, pour le Bénéficiaire, a témoigné concernant ces réclamations. Il a tout d'abord référé le Tribunal à l'article 9.20.5.1 du Code national du bâtiment - Canada 1995, lequel prévoit que la maçonnerie doit reposer sur de la maçonnerie, du béton ou de l'acier. Toutefois, un contre-mur extérieur en maçonnerie peut reposer sur une fondation en bois conforme au paragraphe 9.15.1.3.3.

[33]        À l'époque de la déclaration de réception des parties communes, il mentionne avoir demandé une attestation d'un ingénieur parce qu'il n'était pas un spécialiste en la matière. Il ajoute également avoir noté que quelques fissures demeuraient toujours à être réparées lors de la visite du représentant de l'Administrateur. Par contre, il témoigne avoir communiqué avec M. Stéphane Blanchette, ingénieur chez Clyvanor, entreprise responsable et sous-traitante des éléments structuraux ayant servi à la construction du bâtiment. Après l'audition d'arbitrage, la représentante du Bénéficiaire a transmis au Tribunal, avec copie conforme aux autres parties, un échange de courriels entre l'expert Harvey et l'ingénieur Stéphane Blanchette à ce sujet. Nous pouvons lire au courriel initial de M. Harvey, daté du 9 août 2010, que celui-ci avait «simplement besoin d'un courriel m'indiquant que les poutrelles de plancher n'ont pas été conçues pour porter la maçonnerie mais les charges normales de plancher». À cette question, l'ingénieur Stéphane Blanchette a répondu qu'il n'y avait pas de charge de maçonnerie prévue pour être reprise par la structure de bois. Il ajouta que les poutres en porte-à-faux servent à soutenir la structure du bâtiment en bois, soit les poutrelles, murs et toit du dernier étage. Puisque M. Harvey, lors de sa visite de l'immeuble en date du 16 juillet 2010, n'avait pas trouvé d'éléments d'acier pour supporter la maçonnerie à l'avant de l'immeuble, il s'est dit d'opinion que cette construction ne rencontrait pas le Code national du bâtiment. N'étant pas un spécialiste en structure, il a ajouté à l'audience que des calculs de charge (qu'il n'a pas faits lui-même) pourraient faire en sorte qu'il n'y ait pas de problème. Sans élaborer sur ce qui précède, il a tout de même ajouté qu'il lui fallait obtenir une approbation ou une attestation d'un ingénieur pour le rassurer.

[34]        Ayant reçu copie du rapport de l'ingénieur mandaté à cette fin par l'Administrateur, l'expert Harvey a soulevé une série de six (6) interrogations additionnelles et ce, malgré que le Bénéficiaire avait, à ce moment, un rapport d'un professionnel, ingénieur civil spécialisé dans l'ingénierie du bâtiment et des infrastructures, concluant comme suit:

«Les fissures à la maçonnerie en façade avant, aux porte-à-faux à l'élévation du plancher du niveau 3 sont dues au tassement par séchage de l'ossature de bois.

Ce séchage est actuellement terminé et les tassements additionnels à venir ne seront pas significatifs.

La structure de bois est stable et sécuritaire et est apte à supporter adéquatement le porte-à-faux en maçonnerie.»

[35]        Cet exercice par l'expert Harvey a laissé quelque peu perplexe le Tribunal. En effet, compte tenu qu'il a reconnu lui-même ne pas avoir de compétence particulière en matière de structure, un débat à ce sujet avec l'expert Gilbert peut apparaître paradoxal. À tout événement et suivant les commentaires du soussigné quant à la crédibilité et la pertinence de l'expertise de l'expert Harvey à ce sujet, les interrogations de ce dernier seront néanmoins traitées par le Tribunal d'arbitrage dans le cadre du témoignage de M. Gilbert.

[36]        Enfin, l'expert Harvey produit en liasse comme pièce B-1H, trois (3) photos de fissures se retrouvant dans les joints de maçonnerie de l'immeuble. Deux (2) auraient été prises les 13 ou 14 avril 2010 et une (1) le 9 novembre 2010.

[37]        Le Tribunal croit utile de décrire certains passages de l'expertise de M. Harvey au sujet de la structure:

«Présence de fissures sur les côtés du mur en porte-à-faux. Ce dernier aspect représente une problématique complexe et qui pourrait être majeure. Attestation d'un ingénieur exigée

Le représentant du constructeur nous a assuré qu'il n'y avait pas de problème et qu'il nous transmettrait une copie des plans de l'ingénieur.

Bien que des correctifs aient été apportés avant l'inspection de M. Gaudichon, de nouvelles fissures sont apparues et même celles observées par M. Gaudichon n'ont pas été corrigées (point 5).

(...)

Nous sommes donc en désaccord avec la position de monsieur Gaudichon puisque l'attestation viendra éliminer les interrogations des copropriétaires, étant donné que de nouvelles fissures sont apparues après les correctifs apportés par le constructeur. Le représentant de Qualité-Habitation prétend que ces fissures sont dues au retrait des éléments de bois et qu'il n'y a pas de problèmes, nous prenons pour acquis, étant donné sa position que Qualité Habitation, se porte garant de la structure.»

[38]        Ces passages sur des éléments aussi essentiels de la demande de réclamation sont nettement insuffisants pour faire droit à la demande du Bénéficiaire. N'ayant, de toute évidence, pas compétence en cette matière, l'expert se limite malheureusement à prétendre à une problématique complexe et à demander une attestation d'un ingénieur ce qu'il est étrangement lui-même. Bien plus, il requiert une attestation d'un ingénieur pour éliminer «les interrogations» de ses clients. Quant aux fissures, l'expert va jusqu'à prétendre que la «position» de Qualité Habitation fait en sorte que celle-ci se porte garante de la structure. Il s'agit d'une profonde méconnaissance des garanties offertes par le contrat de garantie et le Règlement. L'Administrateur est confronté à des obligations aux termes du contrat de garantie et du Règlement si les conditions et les critères prévus à ceux-ci sont respectés. Il en va du fardeau d'un bénéficiaire ou d'un entrepreneur, le cas échéant, de démontrer le bien fondé d'une réclamation en arbitrage.

[39]        Contre-interrogé par le procureur de l'Administrateur, l'expert Harvey témoigne de ce qui suit:

1.         Il n'a fait aucun calcul structural pour l'immeuble;

2.         Ce qui précède ne faisait pas partie de son mandat;

3.         Il n'est pas un spécialiste en structure;

4.         Il a eu mandat de poser des questions suite à la réception du rapport de l'expert Gilbert.

[40]        Interrogé sur le lien à faire entre les fissures et un prétendu problème de structure, l'expert Harvey est peu loquace. Il prétend que cela peut avoir une relation sans donner d'explication. Interrogé si la charge des murs en porte-à-faux peut avoir un lien avec l'apparition des fissures, il réitère ne pas être un expert en cette matière et que si une attestation par un expert était fournie «qu'il fermerait les livres».

[41]        En fait, il témoigne n'avoir aucune idée sur ce qu'un mur porte-à-faux est capable de supporter sans se fissurer ni non plus avoir vérifié quelque calcul que ce soit, n'ayant eu mandat que de soulever des questions. Enfin, il témoigne que si M. Gilbert avait signé ses calculs, le Bénéficiaire se serait désisté de sa demande de réclamation.

[42]        Par la suite, Mme Brisson a témoigné pour le Bénéficiaire.

[43]        Les éléments suivants ont paru pertinents au Tribunal.

[44]        Mme Brisson soulève avoir des inquiétudes puisque sa garantie prendra fin en 2014. Elle mentionne que si elle avait eu une attestation de conformité au Code national du bâtiment, cela viendrait clore le débat. Ne l'ayant pas, elle prétend qu'il y a un problème qui va au-delà de la correction de fissures.

[45]        M. Mario Carrier, représentant de l'Entrepreneur, a témoigné au sujet du mur porte-à-faux se retrouvant à l'avant du bâtiment. Il a mentionné étonnamment avoir expliqué à l'expert Harvey que des fers angles avaient été installés pour supporter adéquatement les murs en porte-à-faux. La preuve n'a pas révélé la date à laquelle celui-ci aurait informé l'expert Harvey. M. Carrier ajoute que les fers angles de 5 po. X 5 po. avec une épaisseur de ½ po. avaient été ancrés sur la structure de bois. Il identifie l'endroit où ces fers angles ont été posés sur la pièce B-1G en liasse, page 2 de 4. En fait, ce fer angle semble avoir été posé, selon le témoin, à l'intersection du mur où l'on retrouve les deux (2) fenêtres à l'étage de l'immeuble avec le toit surplombant les quatre (4) portes principales. Il témoigne que l'expert Harvey n'a pas recommuniqué avec lui concernant une offre qui lui avait été faite d'enlever de la pierre pour qu'il puisse observer la présence des fers angles. Il précise qu'il n'y a eu aucun problème d'implantation et qu'aucun avis d'infraction n'a été transmis par la Ville, laquelle n'a non plus émis aucun reproche quant à la conformité de la réglementation municipale. Contre-interrogé par la représentante du Bénéficiaire, M. Carrier explique qu'un calcul est effectué avec le fournisseur de pierre pour que le fer angle en acier, ajouté aux poutres, soit assez fort. Selon lui, le briqueteur aurait pris soin de bien fixer les attaches de fer angle à la brique.

[46]        À l'encontre de ces réclamations, le procureur de l'Administrateur a également fait témoigner M. Yves Gilbert, auteur du rapport d'expert daté du 7 décembre 2010 et produit comme pièce A-5 au dossier d'arbitrage.

[47]        Après une révision sommaire du curriculum vitae de M. Gilbert, déposé au dossier d'arbitrage comme pièce A-5-1, celui-ci a été reconnu comme expert et ce, sans contestation. En effet, M. Gilbert possède plus de trente (30) ans d'expérience à titre d'ingénieur civil et il bénéficie d'une formation continue depuis ce temps dans le domaine de l'ingénierie du bâtiment et des infrastructures. Il a agi à plusieurs dizaines de reprises à titre d'expert reconnu devant différents tribunaux au Québec. Nous pouvons succinctement lire au curriculum vitae de M. Gilbert que celui-ci a exécuté certains types d'expertises similaires à celle qui lui était requis dans le présent dossier, soit la stabilité de l'infrastructure et la stabilité et la compétence de charpentes de bâtiments.

[48]        M. Gilbert, ingénieur ayant une compétence établie en matière d'éléments structuraux de bâtiments, s'est vu confier un mandat spécifique d'émettre une opinion sur la possible atteinte à la sécurité structurale du bâtiment et particulièrement au niveau de la poutre en porte-à-faux en bois qui supporte un parement de pierre à l'avant du bâtiment.

[49]        Il explique avoir procédé à l'ouverture du «soffite» au plafond de la marquise à l'avant du bâtiment. Selon lui, la construction correspondait aux plans de Clyvanor. Il explique qu'une distance de 9 pi. 1 po. existait entre les poutres et que celles-ci excédaient de 24 po. de la structure du bâtiment. Il a expliqué qu'il a constaté des fissures à la maçonnerie au-dessus du porte-à-faux, de même qu'à la maçonnerie en-dessous de celui-ci.

[50]        L'expert Gilbert a constaté qu'il s'agissait en fait d'un bâtiment à ossature de bois avec parements non structuraux en maçonnerie de pierre artificielle. La maçonnerie est appuyée sur les fondations en béton, sauf pour une partie de la façade avant, au niveau 3, où l'appui est sur l'ossature de bois. La structure de bois est décrite aux plans de Clyvanor déposés au dossier. La partie qui supporte en porte-à-faux la maçonnerie au centre de l'avant du niveau 3 est montrée à la référence 3 de son rapport. À la section 4.2 de son rapport, l'expert Gilbert élabore sa méthode de calcul des charges sur les poutres de l'immeuble. Après avoir calculé le poids de la maçonnerie et du plancher, côté extérieur du porte-à-faux, il établit une charge totale (plancher et maçonnerie) de 14,3 kN (non pondéré). Par la suite, il établit le poids de la structure de bois et les autres éléments permanents, tels le gypse et le contreplaqué, à l'intérieur du porte-à-faux. Il calcule par la suite l'équilibre des forces. Selon lui, l'hypothèse la plus défavorable montre néanmoins que la poutre demeure stable. Le moment de flexion générée par la charge morte côté intérieur est quatre (4) fois plus grand que celui généré par la charge de maçonnerie côté extérieur du porte-à-faux. Enfin, il confirme avoir vérifié que la poutre a la capacité de supporter adéquatement et conformément aux règles de l'art les charges en présence. L'ensemble de ces calculs se retrouvent détaillés aux références 4, 5 et 6 à l'appui de son rapport qu'il a dûment signé.

[51]        Rendant son opinion sur la cause des fissures, il explique que la partie à ossature de bois du bâtiment est sujette à tassement dû au séchage du bois. L'ampleur du tassement dépend, selon lui, du taux d'humidité du bois lors de la construction. Le tassement dure jusqu'à ce que le taux d'humidité du bois soit en équilibre avec son environnement, soit généralement 1 à 2 ans. Selon lui et comme le bâtiment a été construit à l'hiver 2008-2009, les tassements dus au séchage de l'ossature devraient actuellement être complétés.

[52]        Il aborde par la suite le mouvement différentiel. Dans un premier temps, la partie de maçonnerie appuyée sur la fondation de béton (en-dessous du toit en porte-à-faux) ne subit pas de tassement significatif. Par conséquent, toute fissure ne peut être reliée à la présence des deux (2) poutres en porte-à-faux. Par contre, le tassement de l'ossature de bois (dont les deux (2) poutres en porte-à-faux qui supportent la maçonnerie de la partie centrale de la façade avant du niveau 3) a entraîné un mouvement entre cette partie de la maçonnerie et le reste, d'où les fissures. Pour prévenir ce type de fissures, il aurait fallu, selon l'expert, faire un joint élastique permettant le mouvement attendu. À l'audience, il caractérise ce joint élastique (joint de contrôle), de plus ou moins esthétique, dû, selon le Tribunal, au mouvement normal des matériaux.

[53]        À l'audience, tant la représentante du Bénéficiaire que son expert se sont montrés très satisfaits du travail de l'expert Gilbert qui a su apporter les explications adéquates pour expliquer, selon lui, les phénomènes en présence. En fait, bien que le Bénéficiaire ait le fardeau de démontrer au Tribunal que sa demande est bien fondée, soit que les fissures, selon sa thèse, apparaissent en raison d'une problématique de soutènement du mur porte-à-faux, aucune preuve technique supportant cette réclamation (ou plutôt cette inquiétude) du Bénéficiaire n'a été faite, bien au contraire. Le témoignage de M. Gilbert est non contredit.

[54]        Quant aux six (6) interrogations soulevées par l'expert Harvey lors de son interrogatoire, celles-ci n'ont fait l'objet d'aucune question en contre-interrogatoire à l'expert Gilbert. Malgré cela, le Tribunal traitera rapidement des éléments soulevés.

[55]        Le Bénéficiaire a émis un doute quant à l'exactitude des plans d'architecte se retrouvant à la référence 2 de l'expertise de M. Gilbert. Aucune preuve contraire n'a été apportée et le Tribunal ne voit pas comment il peut mettre en doute la référence de l'expert de l'Administrateur. Le Bénéficiaire a tout au plus produit un extrait de plan de l'architecte portant le sceau de Michel L. Grimard, architecte, pour Construction G. Carrier inc. Aucune question n'a été posée aux représentants de l'Entrepreneur à ce sujet bien qu'ils  étaient disponibles à l'audience et si l'on se réfère à la section 3.2 du rapport de M. Gilbert, le Tribunal constate que les extraits de plans dont s'est servi cet expert ont servi à démontrer la disposition des murs. Si tant est que cette disposition ne serait pas exacte puisqu'il ne s'agirait pas des bons plans, le Tribunal est incapable d'en comprendre les conséquences probables. L'expert Harvey s'est également interrogé sur l'absence de référence, à la section 4.1 du rapport de l'expert Gilbert, à la section 9.20.5.1 du Code national du bâtiment. Soulever cette absence de référence au Code national du bâtiment ne permet pas au Tribunal de conclure, de façon prépondérante, que l'exercice mathématique, qui par ailleurs était satisfaisant aux yeux des parties lors de l'audience, est inexact. Au contraire, si telle était l'intention du Bénéficiaire, une preuve en ce sens aurait dû être administrée devant le Tribunal.

[56]        L'expert Harvey a également soulevé une possible erreur de mesures prises par l'expert Gilbert à la section 4.1 de son rapport, soit au niveau de la longueur du porte-à-faux qu'il a estimé à 2 pi. plutôt qu'à 2 pi. 5 po. Or, si tant est qu'il s'agisse d'une erreur, ce qui n'a pas été démontré de façon prépondérante par une preuve à l'audience, il ne fut démontré aucune conséquence mathématique de celle-ci pouvant influer sur quelque résultat que ce soit. L'expert Harvey soulève également certaines différences dans les mesures de fenêtres entre celles prises par l'expert Gilbert et les siennes. Par contre, aucune conséquence n'a été expliquée au Tribunal pouvant provenir de cette différence ni non plus l'impact que cela pourra occasionner sur les chiffres avancés par l'expert de l'Administrateur.

[57]        Enfin, le même constat se dégage concernant la différence de largeur entre les poutres porte-à-faux. Ayant le fardeau de la preuve, le Bénéficiaire se doit de convaincre le Tribunal de la justesse de sa réclamation. Force est de constater que l'expert de l'Administrateur a expliqué avoir pris les mesures sur place, lui-même, et appliqué celles-ci aux calculs ayant mené aux résultats apparaissant à son rapport. Le Tribunal retient donc son témoignage et décide que la preuve du Bénéficiaire n'est pas prépondérante à l'existence d'un vice visé par le contrat de garantie ou le Règlement et non prévu à l'exclusion de comportement normal des matériaux.

[58]        La demande d'arbitrage concernant les demandes de réclamation numéros 5 et 17 est donc rejetée.

[59]        Compte tenu de ce qui précède et considérant que le Bénéficiaire, demandeur en arbitrage, n'a eu gain de cause sur aucune des demandes qu'il a formulé, le Tribunal d'arbitrage, usant de sa discrétion à cet égard et invoquant également l'équité entre les parties qui ont toutes deux eu recours à des experts en arbitrage, décide que le Bénéficiaire assumera une somme de 100,00 $ à titre de coût d'arbitrage, le solde étant payable par l'Entrepreneur et l'Administrateur. Quant aux frais d'experts et pour les mêmes motifs, chaque partie assumera les leurs.

POUR CES MOTIFS, LE TRIBUNAL D'ARBITRAGE:

[60]        REJETTE la demande d'arbitrage du Bénéficiaire, Syndicat de copropriété 8420-8430, de Buffalo, portant sur les demandes de réclamation numéros 5, 11, 13, 17 et 19;

[61]        MAINTIENT la décision de l'Administrateur rendue le 5 mai 2010;

[62]        LE TOUT avec frais (coûts de l'arbitrage) à être départagés entre le Bénéficiaire pour la somme de 100,00 $, le solde étant payable par l'Entrepreneur et l'Administrateur, étant entendu que chaque partie assume ses propres frais d'experts.

 

 

Québec, le 15 septembre 2011

 

 

 

 

 

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                                                                     Me Reynald Poulin

                                                                     Arbitre / Centre canadien d'arbitrage commercial (CCAC)