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ARBITRAGE

En vertu du Règlement sur le plan de garantie
des bâtiments résidentiels neufs

(Décret 841-98 du 17 juin 1998)

 

CANADA

PROVINCE DE QUÉBEC

 

Groupe d’arbitrage et de médiation sur mesure (GAMM)

Dossier no :

         GAMM 2008-11-001              

 

Date :

4 décembre 2008

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DEVANT L’ARBITRE :

JEAN MORISSETTE

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MADAME LORRAINE JOLY

MONSIEUR SERGE GEOFFRION

Bénéficiaires

Et

LES CONSTRUCTIONS PRESTIGE CTC INC.

Entrepreneur

Et

LA GARANTIE DES BÂTIMENTS RÉSIDENTIELS NEUFS DE L’APCHQ INC.

Administrateur de la Garantie

 

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SENTENCE ARBITRALE

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[1]               Selon les bénéficiaires, l’entrepreneur a été radié pour défaut de production du rapport annuel en vertu de la Loi sur la publicité des personnes morales et les gestionnaires de la Banque Royale, créanciers hypothécaires, ont repris l’administration du projet domiciliaire;

 

 

[2]               Vérification faite aux registres gouvernementaux, la radiation n’est pas effective et un avis de défaut est inscrit en date du 25 février 2008;

[3]               L’Administrateur nous informe que l’entrepreneur n’est plus qualifié au sens du Règlement sur le plan de garantie des bâtiments résidentiels neufs, (L.R.Q., c. B-1.1, r. 0.2) puisqu’il n’est plus détenteur d’une licence de la Régie des Bâtiments du Québec;

[4]               Notre avis de convocation est revenu avec la mention déménagé /parti sans laisser d’adresse;

[5]                Ainsi, l’audition s’est faite en l’absence de l’entrepreneur et lui sera tout de même opposable conformément au Règlement et aux règles de procédure de droit commun;

[6]               Les parties reconnaissent ma compétence pour entendre et décider du présent litige;

[7]               Avant de rendre témoignage, toutes les personnes ont été assermentées;

Le litige

[8]        La décision de l’Administrateur du 5 mai 2008 concerne une défaillance dans le tuyau d’évacuation des eaux usées de la résidence des bénéficiaires. La réclamation a été refusé par l’inspecteur conciliateur Marc-André Savage, pour ne pas rencontrer le critère de gravité suffisante à titre de vice caché au sens du règlement;

La Preuve

[9]        Les faits, non contestés, apparaissent à la décision, Pièce A-7 :

"   1.     ÉGOUT SANITAIRE OBSTRUÉ

Les faits

Les bénéficiaires dénoncent que le 17 septembre 2007, s’est produite une obstruction de l’égout sanitaire, et ils réclament à l’entrepreneur le remboursement des frais de plombier engendrés par ce problème.

Le plombier ayant effectué les correctifs aurait affirmé que le problème pourrait à nouveau se produire, la conduite reliant le bâtiment à l’égout étant probablement responsable de cette situation.

À la suite des conseils du plombier, les bénéficiaires envoient régulièrement de l’eau dans la conduite et depuis cet incident, aucune nouvelle obstruction n’a été constatée. "

 

 

Analyse de la preuve

[10]      En septembre 2007, la maison est sujette d’un refoulement d’égout;

[11]      Serge Geoffrion communique avec un plombier qui n’a pas été en mesure de régler le problème et ce n’est que le lendemain, en passant un débouchoir d’une longueur de cent vingt-cinq (125) pieds que l’écoulement redevient libre;

[12]      Monsieur Geoffrion est alors informé qu’il s’agit peut-être de contre-pente dans le tuyau qui relie le système de la maison au réseau municipal;

[13]      Depuis novembre 2007, monsieur Geoffrion introduit un boyau d’arrosage, sur une longueur de 30/40 pieds dans le tuyau d’évacuation et laisse couler l’eau de trois (3) à quatre (4) heures pour empêcher que s’agglutinent les détritus à nouveau.  Ces gestes préventifs se font à une fréquence de tous les deux mois;

[14]      Les témoins des bénéficiaires sont Dany Potvin, plombier et propriétaire de Plomberie Danny Potvin et Raynald Tisseur entrepreneur général.  Ces deux personnes d’expérience, et ce ne sera pas contredit, m’informent que la pente usuelle du tuyau d’excavation des eaux usées d’une maison est de un (1)% et celle idéale de deux (2)%;

[15]      Invité à examiner par la trappe de nettoyage du tuyau, je constate qu’il y a effectivement une contre-pente qui forme un piège à liquide et gras;

[16]      Le visionnement du vidéo de la colonoscopie montre l’intérieur du tuyau sur toute sa longueur.  Ces images me convainquent qu’à plusieurs endroits, le tuyau forme un arc et accuse des contre-pentes;

[17]      Selon le plombier-expert Potvin, il certifie la présence d’une contre-pente entre six (6) et vingt-deux (22) pieds de distance de la maison.  Le tuyau est rond, non ovalisé et sa qualité n’est pas à mettre en doute;

[18]      La présence d’une seule contre-pente est suffisante pour qualifier la situation de déficiente et problématique.  Sur cette distance, avec le temps, le savon et les gras formeront un bouchon qui entraînera un refoulement.

[19]      Raynald Tisseur est entrepreneur général depuis 1976, il a construit neuf (9) maisons sur le projet du Mont Plante.  Il connaît le terrain sur lequel est construite la maison faisant l’objet de l’arbitrage et les environs. Il dit que le site est dans une zone humide.  C’est à dire qu’une terre noire doit être enlevée et remplacée par un matériau de remplissage avant la construction;

[20]      Il explique qu’il est tout à fait probable qu’il y a eu des affaissements de terrain sous le tuyau et c’est ce qui a amené la présence de contre-pente dans la colonne d’évacuation;

[21]      Il lui apparaît important que les divers affaissements que l’on constate dans le visionnement de la vidéo soient réparés.  Le colmatage de septembre 2007 se reproduira certainement et il s’agit d’un problème important qui doit être corrigé;

[22]      La présence de la colonne d’évacuation sous le stationnement et de l’entrée d’auto est aussi problématique selon lui.   Il suspecte l’affaissement de terrain par le passage multiple de véhicules au-dessus du tuyau;

[23]      Pour sa part, Monsieur Geoffrion, le bénéficiaire, photo à l’appui, témoigne qu’aucun travaux d’excavation n’a été effectué de sa part depuis la construction de la maison;

[24]      Monsieur Marc-André Savage est technologue en architecture et le conciliateur de l’Administrateur;

[25]      Avec les informations reçues des témoins entendus, il sait maintenant  que le tuyau d’évacuation accuse effectivement une et sûrement plusieurs contre-pentes;

[26]      Il y a une malfaçon, mais n’est pas convaincu que la situation est suffisamment grave pour la qualifier de vice caché au sens du règlement;

 

ARGUMENTATION

[27]      Je reprends ici la définition de vice caché de la décision de l’Administrateur, du 5 mai 2008, pièce A-7 :

"           (…)

Donc, en vertu de l’article 3.3 du contrat de garantie, exception faite des éléments dénoncés par écrit lors de la réception, pour être couverts par la garantie, les points mentionnés dans la demande de réclamation du bénéficiaire  doivent répondre aux quatre critères du vice caché à savoir :

a.      Le vice doit être inconnu du bénéficiaire au moment de la réception;

b.      Le vice doit être caché;

c.      Le vice doit être antérieur à la vente;

d.      Le vice doit être grave au point de rendre le bien impropre à l’usage auquel  il est destiné ou diminuer tellement son utilité que le bénéficiaire ne l’aurait pas acquis ou n’aurait pas donné si haut prix s’il l’avait connu.  La gravité du vice doit être d’abord et avant tout s’évaluer en fonction du déficit d’usage, autrement dit, des limitations qu’il pose aux occupants des lieux."

[28]      Je suis convaincu que :

a)            La contre-pente dans le tuyau d’égout est un vice qui était inconnu des bénéficiaires au moment de la réception du bâtiment;

b)            Situé sous la terre, la condition que le vice doit être caché est tout à fait rencontrée;

c)            La condition ayant amené à la présence de la contre-pente, soit l’affaissement du terrain, était existante avant l’achat de la maison;

d)            Le blocage du tuyau d’évaluation causé par la ou les contre-pentes ne s’est pas reproduit grâce au nettoyage régulier de ce tuyau par monsieur Geoffrion, ce serait sans aucun doute reproduit;  Il m’apparaît que d’introduire un boyau d’arrosage sur une longueur de 30 à 40 pieds dans le tuyau d’évacuation des eaux usées et d’y laisser couler l’eau trois (3) à quatre (4) heures, aux deux mois, est une limitation importante dans la libre jouissance d’une résidence;

[29]      Je suis persuadé que cette déficience est à ce point grave qu’une personne ne ferait pas l’achat de la maison, sans l’engagement ferme que la réparation doit être exécutée;

[30]      Dans les circonstances qui m’ont été expliquées, la réclamation des bénéficiaires de 256,39$ (Pièce A-3) à titre de réparations conservatoires et urgentes est accueillie;

[31]      Le montant de 253,97$ (Pièce B-1) pour l’inspection par caméra est accueilli à titre de frais d’expertises raisonnables et nécessaires à la preuve de la partie en faveur de qui la décision est rendue ( Art. 23 du Règlement);

POUR ET PAR CES MOTIFS :

ACCUEILLE la demande d’arbitrage des bénéficiaires;

DÉCLARE la présence d’une ou plusieurs contre-pentes dans le tuyau d’évacuation des eaux usées un vice caché au sens du Règlement sur le Plan de garantie des bâtiments résidentiels neufs (L.Q.R., c. B-1.1, r.0.2);

ORDONNE à l’entrepreneur d’effectuer les travaux selon les règles de l’art pour corriger cette déficience;

CONDAMNE l’entrepreneur à payer 256,39$ aux bénéficiaires à titre de travaux conservatoires et urgents et 253,97$ pour les frais d’expertises;

DÉCLARE la présente décision opposable à l’Administrateur, conformément au règlement sur le Plan de la garantie des bâtiments résidentiels neufs (L.Q.R., c. B-1.1, r.0.2);

Les frais de l’arbitrage étant à la charge de l’Administrateur, conformément aux  articles 21 et 123 du Règlement.

 

Jean Morissette

JEAN MORISSETTE, arbitre

 

 

 

 

Mme Lorraine joly

Et

Serge Geoffrion

Bénéficiaires

 

Me François Plante

Pour l’Administrateur

 

Date d’audience :

4 novembre 2008