ARBITRAGE
En vertu du Règlement sur le plan de garantie
des bâtiments résidentiels neufs
(Décret 841-98 du 17 juin 1998)
Organisme d’arbitrage autorisé par la Régie du bâtiment :
Société pour la résolution des conflits inc. (SORECONI)
Entre
Mme Fernande Spooner et M. Pierre Bergeron
Bénéficiaires
Et
9020-8034 Québec Inc. (Les Entreprises Robert Gagnon)
Entrepreneur
Et
LA GARANTIE DES BÂTIMENTS RÉSIDENTIELS NEUFS DE L’APCHQ INC.
Administrateur mis en cause
No dossier Garantie : 073490-1-2-3
No dossier SORECONI : 070630001
SENTENCE ARBITRALE
Arbitre : Alcide Fournier
Pour les bénéficiaires : Nil
Pour l’entrepreneur : Nil
Pour l’administrateur : Me François Laplante
Date(s) d’audience : 29 février 2008
Lieu d’audience : Carignan
Date de la décision : 6 mars 2008
Identification des parties
Bénéficiaires :
M. Pierre Bergeron
266, Pente Douce
Magog, Qc
J1X 3W3
Entrepreneur :
Les Entreprises Robert Gagnon
655, chemin des Patriotes
Saint Mathias sur Richelieu,Qc
J3L 6A2
Administrateur :
La Garantie des bâtiments résidentiels neufs de l’APCHQ Inc.
5930, boul. Louis-H. Lafontaine
Anjou, Qc
H1M 1S7
Et son procureur :
Me François Laplante
(Savoie Fournier)
Mandat : L’arbitre a reçu son mandat de Soreconi le 7 août 2007
Historique du dossier :
29 mars 2004 : Contrat préliminaire et contrat de garantie
3 août 2004 : Liste préétablie d’éléments à vérifier et réception
6 janvier 2005 : Décision de l’administrateur
11 août 2005 : Décision de l’administrateur
12 décembre 2005 : Décision de l’administrateur
29 mars 2006 : Sentence arbitrale portant sur les 3 décisions antérieures
10 juillet 2006 : Décision de l’administrateur
31 août 2006 : Demande d’arbitrage du bénéficiaire (formulaire complété)
19 décembre 2006 : Décision arbitrale
2 novembre 2006 : Décision de l’administrateur
30 juin 2006 : Demande d’arbitrage
7 août 2007 : Nomination d’un arbitre
17 août 2007 : Réception du cahier de pièces de l’administrateur
6 décembre 2007 : Convocation des parties à l’arbitrage
16 janvier 2008 : Nouvelle convocation des parties à l’arbitrage
29 février 2008 : Audience
[1] À l’audience, les personnes suivantes sont présentes :
-M. Pierre Bergeron, (Mme Spooner s’est présentée à compter de midi),
-M. Hugues Alarie, de la Compagnie Hydrofuge Imperméabilisation,
-M. Alain Deschesnes, inspecteur et Me François Laplante, procureur de l’administrateur.
[2] En début d’audience, l’arbitre soussigné rappelle aux parties quelques règles de procédure dont, entre autre, le fait qu’il s’agit de l’audience d’un tribunal, qu’une seule personne peut s’exprimer à la fois et que la décision de l’arbitre est finale.
[3] M. Bergeron, le bénéficiaire, demande la permission d’enregistrer l’audience, ce qui lui est accordée. Il est à noter que la présente décision ne reprend pas le mot à mot des témoignages, mais résume les éléments importants de ceux-ci.
[4] L’arbitre soussigné résume les éléments pertinents au litige, à
savoir :
a) la décision de l’administrateur du 2 novembre 2006 : point 4.
4. -INFILTRATION D’EAU AU SOUS-SOL
Travaux :
L’entrepreneur devra se conformer aux conclusions du rapport d’expertise de la firme d’experts « Donat Bilodeau experts- conseils inc » que nous joignons à la présente, et mettre en œuvre les travaux qui y sont indiqués.
b) le rapport d’expertise du 25 octobre 2006 indiqué à la page 7 :
CONCLUSIONS :
À notre avis, l’efficacité du drain français en place devrait être vérifié à l’aide d’une inspection à la caméra et, si requis, réaménagé conformément à toutes les normes en vigueur et à une profondeur maximale afin d’optimiser le rabattement de la nappe d’eau près de la fondation.
De plus, les deux mesures correctives envisageables
immédiatement sont :
1. Ajouter un puisard central et des drains sous la dalle et, aménager des cheminées d’accès au drain périphérique pour en permettre l’entretien périodique.
2. Ceinturer la résidence par une tranchée drainante qui atteindrait 2.5 centimètres de profondeur et qui serait équipée d’un poste de pompage si l’écoulement gravitaire à l’égout pluvial n ’est pas possible. Des cheminées d’accès pour les fins d’entretien périodique seraient aussi requises. Toutefois, la construction de cet ouvrage de drainage sera compliquée par la présence de très gros blocs granitiques dans une zone de remblai.
Si ces solutions s’avéraient insuffisantes, il pourra être envisagé de rehausser la résidence de l’ordre de 90 centimètres, après confirmation du niveau des plus hautes eaux mesuré à la crue printanière. »
c) le devis de construction soumis par la Firme Hydrofuge Imperméabilisation :
DEVIS DE CONSTRUCTION
CONDITIONS
GÉNÉRALES/ Installer des protections contre la poussière, enlever temporairement l’appareil de chauffage et le chauffe-eau, nettoyage journalier du chantier et final. (Le prix n’inclus pas le démantèlement et la réinstallation du système d’eau potable.)
DÉMOLITION/
Finis Enlever et évacuer hors du site les revêtements de sol, enlever une marche de l’escalier, enlever les lisses basses endommagées au bas des murs et le gypse.
DRAINAGE/
Intérieur Construire un système de tranchée drainante au périmètre
des fondations comprenant : sciage du béton, cassage du béton, excavation du remblai, tuyauterie, empierrement, bassin de captation avec raccordement de plomberie, membrane et bétonnage des tranchées. Dimension : +- 130 pi. X 24 po. X 12 po. (Budget incluant le drain, son raccordement et la pompe). Excaver une tranchée à l’extérieur vers le fossé et installer un tuyau de pvc de 4 ".
Construction/ Remplacer les lisses basses, rebâtir les cloisons et remettre en
Cloisons place l’escalier. Peindre les murs la même couleur.
GARANTIE/ Garantie de 3 ans sur les travaux effectués. Un nettoyage périodique de tout le système de drainage devra être effectué pour maintenir sa performance et éviter le colmatage. Le prix de la pierre et du béton est sujet à changement.
[5] Pour compléter ce résumé, Me Laplante demande à M. Alain Deschesnes, inspecteur médiateur, de déposer un plan des travaux à réaliser et de l’expliquer.
[6] M. Deschesnes explique que les travaux consistent essentiellement à :
-couper les murs de finition à 24 pouces du sol tout autour des murs de fondation,
-scier la dalle de béton et creuser une tranchée de 24 pouces de large tout autour des murs de fondation jusqu’à une profondeur dépassant le niveau le plus bas des semelles des murs de fondation,
-installer au fond de cette tranchées un drain de 4 pouces en PVC, -procéder au remblayage de cette tranchée avec de la pierre de granit ¾,
-installer à la grandeur du plancher du sous-sol et jusqu’à 24 pouces des murs de fondation, une membrane d’imperméabilisation,
-couler une dalle de béton de 3 pouces d’épaisseur par-dessus la membrane d’imperméabilisation,
-les travaux prévoient également l’installation d’un nouveau bassin de captation, des cheminées de nettoyage, d’une pompe plus performante que celles actuellement en place, etc…
-après les travaux, les lieux seront remis dans l’état, c'est-à-dire, les murs de finition seront refaits, une nouvelle peinture sera appliquée, etc…
[7] Interrogé par le bénéficiaire, M. Deschesnes de la Garantie affirme qu’après les travaux, les prises de courant seront replacées au
niveau requis par le code, que la dalle de béton sera repeinte comme la dalle actuelle, que les cadres et les portes seront rehaussés, etc…
[8] Il indique qu’avant la réalisation des travaux, il est d’accord pour faire une réunion avec le bénéficiaire afin de prévoir par écrit tous les éléments qui seront à corriger.
[9] Interrogé par le bénéficiaire, M. Alarie admet que durant les conversations antérieures, il avait parlé d’une dalle de béton de 7 pouces d’épaisseur et non pas de trois pouces d’épaisseur.
[10] Cependant, M. Alarie précise que cette nouvelle proposition n’affecte pas la garantie des travaux.
[11] Il admet également que son entreprise « Hydrofuge Imperméabilisation » n’a pas renouvelé sa licence d’entrepreneur en mai 2007.
[12] Il explique qu’il travaille actuellement avec une autre firme qui possède les licences d’entrepreneur requises pour effectuer les travaux.
[13] Notons au passage que lorsque la compagnie « Hydrofuge imperméabilisation » a soumis, le 3 avril 2007, un estimé pour réaliser les travaux, son entreprise détenait une licence d’entrepreneur.
[14] M. Alarie, précise que les pourparlers actuels lui permettent d’affirmer qu’il aura sa licence lors des travaux.
[15] Pour le bénéficiaire M. Bergeron, le fait de rehausser le plancher du sous-sol ne lui permet pas de finir adéquatement son sous-sol.
[16] En effet, il dépose les instructions d’installations de tuiles pour plafond suspendu qui précisent qu’il faut prévoir un espace de 3 pouces plus bas que la structure du plafond.
[17] Selon le bénéficiaire, le rehaussement de 3 pouces du plancher combiné à l’abaissement du plafond de 3 pouces ne lui permet pas d’avoir un sous-sol convenable.
[18] Il affirme que si cette situation s’était produite au moment de la construction de la maison, il n’aurait pas procédé à son achat.
[19] M. Alarie, l’entrepreneur spécialisé a procédé séance tenante au mesurage de la hauteur actuelle du plafond du sous-sol qui s’établit à 7 pieds 6 pouces.
[20] Selon M. Deschesnes, le code national du bâtiment qui s’applique à la maison des bénéficiaires prévoit que la hauteur minimale des plafonds des sous-sols doit être de 6 pieds 10 pouces.
[21] Selon lui, le plancher peut être rehaussé de 3 pouces, le plafond abaissé de 3 pouces tout en respectant les normes du code du bâtiment.
[22] M. Deschesnes soumet également que d’autres méthodes de finition pourrait être utilisées pour ne pas abaisser la hauteur du plafond de façon aussi marquée qu’un plafond suspendu.
[23] À cette proposition, le bénéficiaire rappelle que certains équipements du bâtiment sont installés dans le plafond, que ces équipements doivent demeurer accessibles, ce qui explique son choix pour un plafond suspendu car les tuiles demeurent amovibles.
[24] Pour le bénéficiaire, pour mettre fin aux infiltrations d’eau au sous-sol, c’est la méthode de cuvelage extérieur des fondations qui devrait être utilisée.
[25] Pour lui, le fait qu’il y ait de grosses roches dans le terrain ne constitue pas un obstacle, compte tenu des équipements d’excavation qui sont à la disposition des entrepreneurs de nos jours.
[26] Selon M. Deschesnes, le rapport d’expertise de M. Donat Bilodeau, ingénieur, énonce trois méthodes « envisageables » pour solutionner le problème d’infiltration d’eau au sous-sol, à savoir :
a) cuvelage intérieur des fondations
b) cuvelage extérieur des fondations
c) rehaussement de la résidence, si les deux premières méthodes s’avéraient insuffisantes.
[27] Selon M. Alarie, l’entrepreneur spécialisé, le cuvelage intérieur des fondations est la méthode la plus efficace.
[28] Il a, selon lui, utilisé cette méthode à plusieurs reprises et les résultats ont toujours été excellents.
[29] Plus tard durant l’audience, le bénéficiaire mentionne qu’un inspecteur du Ministère des Transports, dont il a la carte d’affaires, lui a dit que pour régler tout ce problème d’infiltration d’eau, il suffisait d’installer un tuyau à partir de la résidence du bénéficiaire, passant sous la route, traversant le terrain du voisin d’en face et se rendant déverser l’eau directement dans la rivière Richelieu.
[30] Le procureur de l’administrateur s’objecte à cette prétention du bénéficiaire, puisqu’il s’agit simplement d’une hypothèse qui n’est soutenue par aucune preuve, qu’il s’agit de ouï-dire puisque cet inspecteur n’est pas présent et n’a pas témoigné.
Décision
[31] En vertu du règlement sur le Plan de garantie, l’arbitre a le pouvoir de réviser les décisions rendues par l’administrateur d’un plan de garantie.
[32] L’arbitre doit rendre sa décision conformément à la preuve qui est faite devant lui à l’aide des témoignages entendus et de la documentation déposée.
[33] Dans le présent litige, la décision de l’administrateur du 2 novembre 2006 ordonne à l’entrepreneur d’effectuer des travaux pour mettre fin aux infiltrations d’eau au sous-sol de la résidence des bénéficiaires et ce , conformément à un rapport d’expertise de M. Donat Bilodeau, ingénieur, daté du 25 octobre 2006.
[34] À la page 7 de son rapport, cet expert soumet que trois méthodes correctives sont envisageables, deux, immédiatement, soit le cuvelage intérieur des fondations ou le cuvelage extérieur des fondations et une troisième, le rehaussement de la résidence, si les deux premières méthodes ne donnent pas les résultats escomptés.
[35] Cet expert n’impose donc pas un choix en particulier de l’une ou l’autre méthode, sauf si les deux premières méthodes échouent alors là, il faudra précéder au rehaussement de la résidence.
[36] En vertu du code civil et du règlement sur le plan de garantie, l’entrepreneur a une obligation de résultat, c’est-à-dire comme dans le présent litige, de faire cesser les infiltrations d’eau au sous-sol.
[37] En contre partie, l’entrepreneur a le choix des moyens pour parvenir au résultat qui lui est imposé par la loi et le règlement, à moins qu’il ne soit prouvé que la méthode choisie n’est pas adéquate, ne peut donner les résultats escomptés ou est contraire au code du bâtiment.
[38] Dans le présent litige, la méthode préconisée pour régler le problème d’infiltration d’eau est conforme aux pratiques de l’industrie et ne va pas à l’encontre du code de bâtiment.
[39] Au contraire, selon M. Alarie, entrepreneur spécialisé, c’est la méthode la plus efficace présentement sur le marché.
[40] Quant au fait que l’ajout d’une dalle de béton de 3 pouces réduise la hauteur du sous-sol, cet inconvénient respecte les normes du code du bâtiment.
[41] Quant à l’affirmation rapportée par le bénéficiaire d’un inspecteur du Ministère des Transports à l’effet que la pose d’un tuyau jusqu’à la rivière règlerait tout le problème, il s’agit d’une hypothèse qui n’est pas supportée techniquement et qui n’a aucune valeur probante.
[42] Pour demeurer dans les hypothèses, il est à se demander si le Ministère des Transports n’a pas la responsabilité d’assurer l’égouttement naturel des eaux le long des routes qu’il construit.
[43] Concrètement, la garantie prévue au règlement s’applique uniquement au bâtiment des bénéficiaires et à ses équipements, le terrassement est exclus du contrat de garantie à moins d’être spécifiquement mentionné au contrat de construction et, encore là, il s’agit uniquement du terrain appartenant aux bénéficiaires.
[44] Quant au fardeau de la preuve, que ce soit devant les tribunaux civils ou en arbitrage, il appartient à la personne qui réclame qu’une autre pose un geste.
[45] Dans le présent litige, il appartient aux bénéficiaires de prouver que la méthode que préconise l’administrateur en lieu et place de l’entrepreneur, n,est pas la bonne, n’est pas adéquate ou qu’il est approprié d’en utiliser une autre.
[46] Après analyse de la preuve, l’arbitre soussigné constate qu’aucune preuve n’a été faite dans ce sens et qu’en conséquence, la décision de l’administrateur doit être maintenue.
[47] Selon le règlement, lorsque le bénéficiaire n’a pas gain de cause, l’arbitre doit partager les frais d’arbitrage.
[48] L’arbitre soussigné estime que le règlement sur le Plan de garantie peut être assimilé aux autres règlements pour la protection des consommateurs et que les frais encourus par les bénéficiaires pour en appeler de la décision de l’administrateur doivent être du même ordre que les frais judiciaires prévus pour l’inscription d’une réclamation à la Division des petites créances de la Chambre civile de la cour du Québec.
[49] Après analyse de la preuve, l’arbitre soussigné :
-maintient la décision de l’administrateur,
-condamne les bénéficiaires à payer la somme de 86 $ à titre de frais d’arbitrage,
-condamne l’administrateur à payer la balance des frais d’arbitrage.
Alcide Fournier