En vertu du Règlement sur le plan de garantie
des bâtiments résidentiels neufs
(Décret 841-98 du 17 juin 1998)
Organisme d’arbitrage autorisé par la Régie du bâtiment :
Société pour la résolution des conflits Inc. (SORECONI)
ENTRE MADAME VALÉRIE BLAIS ET MONSIEUR MAXIME MONETTE
(ci-après « les Bénéficiaires »)
ET GOUVERNEUR HABITATION INC.,
(ci-après « l’Entrepreneur »)
ET : LA GARANTIE HABITATION DU QUÉBEC INC (Qualité-Habitation)
(ci-après « l’Administrateur »)
No dossier Garantie: 55985-2340
No dossier SORECONI : 090302001
Arbitre : Guy Pelletier
Pour les Bénéficiaires : Madame Valérie Blais et Monsieur Maxime Monette
Pour l’Entrepreneur : Monsieur Patrick Gauvin
Pour l’Administrateur : Me Avelino De Andrade, procureur
Monsieur Michel Labelle, responsable conciliation
Date de la décision: le 3 juillet 2009
Mandat :
L’arbitre a reçu son mandat de SORECONI le 3 mars 2009.
Historique et pièces :
6 octobre 2006 : Certificat d’autorisation pour l’installation septique émis par la Ville de Ste-Adèle;
21 novembre 2007 : Réception du bâtiment;
9 juillet 2008 : Mise en demeure des Bénéficiaires adressée à l’Entrepreneur;
19 août 2008 : Première réclamation à l’Administrateur;
28 août 2008 : Contrat de garantie;
5 septembre 2008 : Première décision de l’Administrateur;
24 septembre 2008 : Rapport d’expertise de Géo-Max, à la demande des Bénéficiaires;
9 octobre 2008 : Mise en demeure des Bénéficiaires à l’Entrepreneur et copie à l’Administrateur;
21 novembre 2008 : Demande d’avis à la Ville de Ste-Adèle (non-conformité du champ d’épuration);
11 décembre 2008 : Compte-rendu de l’inspection de l’installation sanitaire, par la Ville de Ste-Adèle;
27 janvier 2009 : Deuxième décision de l’Administrateur;
2 mars 2009 : Demande d’arbitrage;
27 avril 2009 : Compte-rendu de l’inspection de l’installation sanitaire, par la Ville de Ste-Adèle;
15 juin 2009 : Audition de la demande d’arbitrage.
Introduction :
[1] En novembre 2006, l’Entrepreneur construit les installations de traitement des eaux usées tel qu’en témoignent les photographies au dossier. Elles sont inspectées le 30 novembre 2006, par Isabel Roberge, responsable du dossier à la Ville de Ste-Adèle,
[2] Un an plus tard, soit le 21 novembre 2007, les Bénéficiaires procèdent à l’achat du bâtiment. À ce moment-là, aucun contrat de garantie n’étant alors signé, l’inspection pré-réception n’est pas effectuée selon la démarche prévue à la réglementation. Cette date est toutefois considérée par l’Administrateur comme étant celle de la réception des travaux.
[3] Le 9 juillet 2008, les Bénéficiaires signalent à l’Entrepreneur plusieurs problèmes suivant l’achat de la propriété et le mettent notamment en demeure de rendre conforme le système de traitement des eaux usées :
[3.1] « … le système de traitement des eaux usées (champ d’épuration) présente plusieurs irrégularités. En effet le 9 mai 2008 nous avons remarqué que des tuyaux sont à découvert en plus d’être brisés et/ou écrasés. Nous vous demandons de refaire cette installation selon les lois et les normes en vigueur. »
[4] Dans cette lettre, les Bénéficiaires rappellent à l’Entrepreneur qu’un plan de garantie est obligatoire et lui demandent d’identifier le plan qui s’applique à leur propriété.
[5] Le 19 août 2008, les Bénéficiaires font une réclamation écrite à l’Administrateur; celle-ci porte sur plusieurs points dont le champ d’épuration et la porte extérieure, mur ouest.
[6] Un contrat de garantie est signé par ceux-ci quelques jours plus tard, le 28 août suivant.
[7] Le 5 septembre 2008, l’Administrateur rend une décision non contestée qui se lit ainsi :
« 1. Champ d’épuration
Les bénéficiaires nous mentionnent avoir constaté… la présence de tuyaux à découvert faisant parties intégrantes de l’élément épurateur (champ d’épuration) desservant l’installation septique…
Lors de notre inspection, nous avons constaté la situation pour laquelle l’érosion nous semble de toute évidence être en cause….
Il est d’ailleurs exiger (sic) de gazonner le champ épurateur à l’article 24 du Règlement sur l’évacuation et le traitement des eaux usées des résidences isolées, Loi sur la qualité de l’environnement, c. Q-2, r.8.
Extrait du règlement :
Article 24. Recouvrement : le terrain récepteur d’un élément épurateur classique doit être recouvert d’une couche de sol perméable à l’air et être stabilisé avec de la végétation herbacée. Une pente doit lui être donnée pour faciliter l’écoulement des eaux de ruissellement.
Par conséquent, l’entrepreneur devra faire les vérifications nécessaires et les correctifs requis afin de corriger la situation au niveau des conduites de l’élément épurateur et permettre aux bénéficiaires de procéder à l’aménagement paysager avant la prochaine période de gel, selon les règles de l’art et l’usage courant du marché.
Pour ce qui est de l’obligation de recouvrir le terrain de l’élément épurateur, nous rappelons l’existence de l’article 6.7.9 du contrat de garantie :
Tel que stipulé à l’article 6.7.9 du contrat de garantie sont EXCLUS de la garantie : Les espaces de stationnement et les locaux d’entreposage situés à l’extérieur du bâtiment où se trouvent les unités résidentielles et tout ouvrage situé à l’extérieur du bâtiment tels les piscines extérieures, le terrassement, les trottoirs, les allées et le système de drainage des eaux de surface du terrain.
…
4. Porte extérieure : mur ouest
Les bénéficiaires nous mentionnent avoir constaté que le coupe-froid de la porte ouest est mal ajusté.
Lors de notre inspection, nous n’avons pas constaté la situation.
Par conséquent, La garantie Qualité Habitation ne peut reconnaître ce point dans le cadre de son mandat. »
[8] Suite à cette décision, les Bénéficiaires confient un mandat d’expertise visant la vérification des différents éléments existants composant l’installation septique, en fonction du Règlement sur l’évacuation et le traitement des eaux usées des résidences isolées Q-2, r.8.
[9] La firme Géo-Max remet sont rapport le 24 septembre 2008 et recommande le remplacement immédiat du système.
[10] Le 9 octobre suivant, les Bénéficiaires transmettent le rapport de Géo-Max à l’Entrepreneur et le mettent en demeure de refaire le champ d’épuration dans sa totalité pour le rendre conforme au règlement Q-2, r.8. L’Administrateur est mis en copie de cette mise en demeure.
[11] Le 14 octobre 2008, les Bénéficiaires font une nouvelle réclamation auprès de l’Administrateur qui porte sur 5 points dont les installations sanitaires et la porte extérieure du côté ouest.
[12] Le 21 novembre 2008, l’Administrateur procède à une nouvelle inspection.
[13] La journée même, suite à cette inspection, les Bénéficiaires demandent à la Ville de Ste-Adèle d’intervenir et d’établir sa position quant aux conclusions du rapport de Géo-Max, tout en précisant que « notre garantie des maisons neuves, Qualité Habitation, mentionne que la seule autorité compétente à émettre un avis de non-conformité est la municipalité. »
[14] Le 11 décembre 2008, la municipalité informe les Bénéficiaires que le test de coloration effectué deux jours plus tôt, ne s’est pas révélé concluant compte-tenu des conditions climatiques difficiles, dont la présence de neige, et ajoute qu’un nouveau test est à prévoir au printemps.
[15] Le 27 janvier 2009, l’Administrateur rend une seconde décision qui se lit ainsi :
[15.1] « 2. Installation sanitaire
Lors de notre inspection, les bénéficiaires et leur expert n’ont pas été en mesure de nous démontrer aucune défaillance de l’installation sanitaire, laquelle a fait l’objet d’un rapport d’installation sanitaire préparé par Isabel Roberge… représentant la municipalité de Ste-Adèle, suite à une visite des lieux le 30 novembre 2006.
Dans les circonstances, nous croyons que seul un avis de non-conformité des autorités compétentes doit être émis afin que nous puissions intervenir auprès de l’entrepreneur.
3. Porte extérieure : mur ouest
Les bénéficiaires nous mentionnent avoir constaté des infiltrations d’air récurrentes durant l’hiver dernier.
Lors de notre inspection et après vérification à l’aide d’un appareil approprié, nous n’avons pas constaté la situation. Au contraire, nos lectures indiquent une bonne étanchéité au pourtour de la dite porte. »
[16] Le 2 mars 2009, insatisfaits de la décision, les Bénéficiaires demandent l’arbitrage.
[17] Le 15 avril 2009, madame Kristine St-Louis Poitras, préposée à l’urbanisme à la municipalité de Sainte-Adèle, procède à un nouveau test de coloration dans la fosse septique et quelques minutes plus tard, observe que le liquide sort hors du sol à l’endroit suspecté.
[18] Le 27 avril 2009, madame St-Louis Poitras transmet aux Bénéficiaires ses conclusions qui se lisent ainsi :
[18.1] « Vous devez donc refaire l’installation selon les exigences du règlement sur le traitement des eaux usées des résidences isolées (Q-2, r.8). Vous trouverez ci-joint une demande de permis pour installation sanitaire que vous devrez remplir et joindre une nouvelle étude de caractérisation du sol fait (sic) par une personne compétente en la matière proposant une nouvelle installation sanitaire. »
L’audition :
[19] L’audition se tient le 15 juin 2009 au domicile des Bénéficiaires et est précédée d’une visite des installations de traitement des eaux usées.
[20] À la demande des Bénéficiaires, les personnes suivantes ont été assignées à comparaître :
[20.1] Madame Kristine St-Louis Poitras, préposée à l’urbanisme de la municipalité de Sainte-Adèle;
[20.2] Monsieur Éric Bordeleau, Géo-Max;
[20.3] Monsieur Jean-yves Castonguay, Géo-Max.
[21] Au nom des Bénéficiaires, madame Valérie Blais rappelle les faits et présente des photographies des écoulements observés en bordure du champ d’épuration, écoulements qui ont d’ailleurs été constatés lors de la visite des lieux.
[22] D’autre part, monsieur Maxime Monette exhibe des bouts de tuyaux brisés et écrasés qu’il a conservés suite aux réparations faites par l’Entrepreneur en octobre 2008.
[23] Lors de son témoignage, Monsieur Monette identifie plusieurs éléments qui contreviennent au règlement Q-2, r.8, soit :
- une granulométrie trop fine pour le gravier;
- des traces signalant la circulation de véhicule;
- la présence d’un arbre et de grosses roches à proximité du lit de filtration;
- la présence de grosses pierres sur le champ d’épuration;
- l’absence de matériau anti-contaminant.
[24] Les Bénéficiaires appellent leur premier témoin, monsieur Éric Bordeleau de la firme Géo-max, qui a préparé le rapport de vérification des installations sanitaires.
[25] L’Administrateur soulève une objection quant à la qualification de monsieur Bordeleau en tant qu’expert. Considérant que celui-ci n’a pas rédigé le rapport, l’arbitre autorise monsieur Bordeleau à témoigner sur les données et les mesures qu’il a recueillies lors de son inspection.
[26] Monsieur Bordeleau témoigne à l’effet qu’il a mesuré le débit de la fosse septique et que celui-ci était satisfaisant. Il a aussi constaté, en septembre 2008, la présence de tuyaux brisés et écrasés à découvert. Le témoin mentionne aussi qu’il a observé que la dimension des pierres du lit de gravier est de plus faible diamètre que les exigences réglementaires et que le recouvrement des tuyaux à la sortie de la fosse septique était insuffisant et créait un potentiel de gel.
[27] Appelé à témoigner, monsieur Castonguay de Géo-Max suggère, suite à l’observation de photographies, que l’apport de remblai pour supporter les tuyaux qui sont dans le vide est une source de tassement qui explique en partie le bris des tuyaux. Cette situation explique aussi la présence de sable dans les conduits.
[28] Monsieur Castonguay témoigne à l’effet que la conception de l’installation est conforme mais que la réalisation des travaux est déficiente. Il précise que la présence de résurgence observée au pourtour du lit de filtration est une situation de non-conformité.
[29] À la demande de Me De Andrade, qui désire savoir ce qui peut être fait pour réparer une telle installation, monsieur Castonguay recommande deux opérations avant de faire des travaux, soit une inspection par caméra et un test de percolation pour déterminer si la base du lit de filtration est acceptable. Ce dernier ajoute qu’il faut de plus s’assurer qu’il n’y a pas de roches à moins de 3 mètres.
[30] Madame Kristine St-Louis Poitras est appelée à témoigner de ses observations en tant que préposée à l’urbanisme à la Ville de Sainte-Adèle. Elle rapporte que, suite au test de coloration qu’elle a fait, elle a observé des résurgences majeures inacceptables et c’est pour ce motif qu’elle a demandé aux Bénéficiaires de refaire l’installation sanitaire.
[31] À la demande de Me De Andrade, madame St-Louis Poitras explique que la municipalité émet des constats d’infraction dans de telles situations; cependant, dans ce cas-ci, il n’y en a pas eu encore d’émission d’un constat d’infraction car une démarche d’arbitrage était en cours. Éventuellement, ajoute-elle, si les délais sont trop longs, des constats seront émis. Elle confirme que la lettre adressée aux Bénéficiaires le 27 avril 2009 constitue un avis de non-conformité de l’installation sanitaire quant à son fonctionnement.
[32] Monsieur Castonguay, en réponse à une question de Me De Andrade, rappelle que la couche de sol perméable recouverte de végétation herbacée exigée dans le règlement Q-2 r.8, doit être installée le plus tôt possible pour stabiliser le champ d’épuration. Il souligne que le rôle de cette couche de sol est de protéger les tuyaux du gel, d’éviter les affaissements et les écrasements en répartissant les pressions exercées en surface.
[33] Monsieur Gauvin, représentant l’Entrepreneur, témoigne à l’effet qu’il a toujours fait rapidement les réparations en s’appuyant sur les conseils de monsieur Labelle, conciliateur de la garantie parce que, selon ses propos, il « ne connaît rien là-dedans ». Son opinion est à l’effet que « les experts c’est Qualité Habitation».
[34] Monsieur Gauvin reconnaît que l’installation sanitaire est demeurée sans recouvrement d’une couche de sol stabilisée par un revêtement végétal lors de la construction du bâtiment, soit de novembre 2006 à novembre 2007. Durant cette période, il confirme que les travailleurs de la construction ont utilisé le système de traitement des eaux usées qui fonctionnait normalement et que le tuyau n’était pas découvert au moment de la livraison de la résidence. Il ajoute cependant que les Bénéficiaires ont refusé qu’il pose du graminée sur le champ d’épuration en novembre 2008 dans le but de stabiliser l’installation.
[35] Monsieur Michel Labelle est invité à expliquer la décision qu’il a rendue au nom de l’Administrateur. Il explique avoir observé des tuyaux dénudés, déboîtés et écrasés lors de son inspection en août 2008. Il ajoute que cette situation est attribuable à l’érosion.
[36] Selon son témoignage, cette situation n’était pas normale et, pour cette raison, il a demandé à l’Entrepreneur, dans la première décision rendue le 5 septembre 2008, d’apporter des correctifs. Il rappelle cependant que le terrassement est exclu de la garantie en vertu de l’article 6.7.9 du contrat de garantie.
[37] Monsieur Labelle explique qu’il n’avait pas en main d’avis de non-conformité lorsqu’il a rendu la deuxième décision le 27 janvier 2009. Par contre, il reconnaît que l’installation n’est pas conforme car des écoulements d’eau usée sont visibles au pied du talus.
[38] En contre-interrogatoire, monsieur Monette demande à monsieur Labelle comment il peut affirmer que les grosses pierres localisées à l’extrémité du champ d’épuration sont à une distance suffisante de l’installation sanitaire et qu’elles n’écrasent pas les tuyaux.
[39] Monsieur Labelle dit qu’il a mesuré « avec ses pas » la dimension du champ d’épuration et que, selon ses observations, les pierres en question ne constituent pas un risque pour le bon fonctionnement du système.
[40] En argumentation monsieur Monette contredit les conclusions de monsieur Labelle à l’effet que l’érosion a entraîné le bris des tuyaux puisque des traces de circulation véhiculaire sont encore visibles sur la surface du champ d’épuration.
[41] Monsieur Monette ajoute que personne n’a empêché l’Entrepreneur de compléter les travaux pour recouvrir le champ d’épuration de gazon tel que l’exige le règlement Q-2, r.8. Il rappelle que l’Entrepreneur a terminé les travaux à l’automne 2006 et ce n’est qu’à la suite de la première décision de l’Administrateur deux ans plus tard, en septembre 2008, qu’il a voulu faire les travaux.
[42] Monsieur Monette explique que, suite à la réclamation adressée à l’Administrateur, il n’était pas question, quant à lui, de cacher la preuve de l’existence d’un vice en la recouvrant de gazon.
[43] Me De Andrade argumente que les Bénéficiaires n’ont pas fait la preuve d’un manquement de l’Entrepreneur à ses responsabilités puisqu’ils l’ont empêché de compléter les travaux de recouvrement du champ d’épuration lors de la réparation des tuyaux endommagés.
[44] Me De Andrade ajoute que le plan de garantie exclut spécifiquement les réparations dues aux faits et gestes des bénéficiaires.
[45] Le point 3, (porte extérieure : mur ouest), est traité en fin d’audition.
[46] Monsieur Monette souligne que la porte est mal ajustée et présente en preuve des photographies illustrant la présence de glace sur le chant de la porte extérieure. Il conteste la décision de l’Administrateur au motif que cette situation n’a pu être observée.
[47] L’Administrateur s’objecte à la présentation de cette preuve car il n’est pas possible d’établir le moment où cette photographie a été prise.
[48] L’arbitre demande que la situation décrite soit observée sur place. Monsieur Monette fait la démonstration qu’en position normalement fermée, les coupe-froid magnétiques offrent une étanchéité satisfaisante. Par contre, lorsqu’une légère pression est exercée de l’extérieur sur la porte, celle-ci s’ouvre suffisamment, faisant en sorte que les coupe-froid s’écartent de la porte et ne remplissent plus leur fonction d’étanchéité.
[49] L’Entrepreneur argumente que la porte avait été bien ajustée lors de la livraison du bâtiment.
Analyse :
[50] Dans le présent cas, il y a lieu de rappeler que la demande d’arbitrage porte sur la deuxième décision de l’Administrateur le 27 janvier 2009, tel que cité au paragraphe 15.1 de la présente.
[51] L’arbitre doit déterminer dans un premier temps si l’installation sanitaire est conforme aux règlements en vigueur.
[52] Dans un deuxième temps, il y a lieu d’établir si les deux problèmes en cause sont couverts par le Règlement sur le plan de garantie des bâtiments résidentiels neufs.
[53] Il convient de rappeler le droit applicable:
[53.1] Le Règlement sur l'évacuation et le traitement des eaux usées des résidences isolées Q-2 r.8, se lit ainsi :
3. Prohibitions: Nul ne peut rejeter ni permettre le rejet dans l'environnement des eaux provenant du cabinet d'aisances d'une résidence isolée ou des eaux usées ou ménagères d'une résidence isolée.
…
21. Normes de construction: Un élément épurateur classique construit avec un système de distribution gravitaire doit être conforme aux normes de construction suivantes:
a) la longueur d'une ligne de tuyaux perforés doit être d'au plus 18 m, mesurée à partir du point d'alimentation des eaux;
b) la largeur des tranchées d'absorption doit être d'au moins 60 cm;
c) la distance entre la ligne centrale de chacune des tranchées d'absorption doit être d'au moins 1,8 m et doit permettre que la barrière hydraulique séparant 2 tranchées d'absorption consécutives ait une largeur minimale de 1,2 m;
d) la profondeur du gravier ou de la pierre concassée sous les tuyaux perforés visés au paragraphe h doit être d'au moins 15 cm;
e) les tuyaux perforés visés au paragraphe h doivent être posés dans une couche de gravier ou de pierre concassée d'une épaisseur totale d'au moins 30 cm;
f) la grosseur du gravier ou de la pierre concassée, débarrassée de ses particules fines, doit être comprise entre 1,5 et 6 cm;
g) la couche de gravier ou de pierre concassée doit être recouverte d'un matériau anticontaminant constitué d'un matériel perméable à l'eau et à l'air permettant la rétention des particules du sol, et de 60 cm de terre de remblai perméable à l'air;
g.1) le gravier ou la pierre concassée prévu aux paragraphes d, e, f et g peut être remplacé par des chambres d'infiltration recouvertes de 60 cm de terre de remblai perméable à l'air;
g.2) lorsque des chambres d'infiltration sont utilisées, elles doivent être conçues de manière à résister au poids des terres et prévenir la migration des particules fines du sol environnant;
g.3) la longueur d'une ligne de chambre d'infiltration construite sans tuyaux d'alimentation doit être d'au plus 6 m mesurée à partir du point d'alimentation des eaux;
g.4) malgré le paragraphe b, lorsque les chambres d'infiltration ont une largeur différente de 60 cm, la longueur totale des tranchées d'absorption doit être corrigée en fonction de la largeur d'infiltration réelle des chambres afin d'obtenir la même superficie d'absorption;
h) les tuyaux perforés doivent être d'un diamètre d'au moins 7,5 cm et être conformes à la norme NQ 3624-050;
h.1) les tuyaux étanches doivent être d'un diamètre d'au moins 7,5 cm et être conformes à la norme NQ 3624-130;
i) le fond de la tranchée doit se trouver à une distance minimale de 90 cm de la couche de roc, de sol imperméable ou peu perméable ou des eaux souterraines lorsque l'effluent provient d'un système de traitement primaire et à une distance minimale de 60 cm lorsque l'effluent provient d'un système de traitement secondaire.
L'élément épurateur classique construit avec un système de distribution sous faible pression doit être construit conformément aux paragraphes b, c, d, e, f, g, g.1, g.2, g.4 et i du premier alinéa et aux normes de construction suivantes:
a) le système de distribution sous faible pression doit permettre une alimentation uniforme de la charge hydraulique sur la surface d'absorption;
b) la hauteur de charge aux orifices doit être comprise entre 0,9 m et 2 m.
…
24. Recouvrement: Le terrain récepteur d'un élément épurateur classique doit être recouvert d'une couche de sol perméable à l'air et être stabilisé avec de la végétation herbacée. Une pente doit lui être donnée pour faciliter l'écoulement des eaux de ruissellement.
[53.2] Le Règlement sur le plan de garantie des bâtiments résidentiels neufs se lit ainsi :
1. Dans le présent règlement, à moins que le contexte n'indique un sens différent, on entend par:
…
«bâtiment»: le bâtiment lui-même, y compris les installations et les équipements nécessaires à son utilisation soit le puits artésien, les raccordements aux services municipaux ou gouvernementaux, la fosse septique et son champ d'épuration et le drain français.
…
10. La garantie d'un plan dans le cas de manquement de l'entrepreneur à ses obligations légales ou contractuelles après la réception du bâtiment doit couvrir:
…
3° la réparation des malfaçons existantes et non apparentes au moment de la réception et découvertes dans l'année qui suit la réception, visées aux articles 2113 et 2120 du Code civil et dénoncées, par écrit, à l'entrepreneur et à l'administrateur dans un délai raisonnable, lequel ne peut excéder 6 mois de la découverte des malfaçons;
4° la réparation des vices cachés au sens de l'article 1726 ou de l'article 2103 du Code civil qui sont découverts dans les 3 ans suivant la réception du bâtiment et dénoncés, par écrit, à l'entrepreneur et à l'administrateur dans un délai raisonnable, lequel ne peut excéder 6 mois de la découverte des vices cachés au sens de l'article 1739 du Code civil;
5° la réparation des vices de conception, de construction ou de réalisation et des vices du sol, au sens de l'article 2118 du Code civil, qui apparaissent dans les 5 ans suivant la fin des travaux et dénoncés, par écrit, à l'entrepreneur et à l'administrateur dans un délai raisonnable, lequel ne peut excéder 6 mois de la découverte ou survenance du vice ou, en cas de vices ou de pertes graduelles, de leur première manifestation.
(nos soulignés)
Exclusions de la garantie
12. Sont exclus de la garantie:
…
3° les réparations rendues nécessaires par une faute du bénéficiaire tels l'entretien inadéquat, la mauvaise utilisation du bâtiment ainsi que celles qui résultent de suppressions, modifications ou ajouts réalisés par le bénéficiaire;
…
9° les espaces de stationnement et les locaux d'entreposage situés à l'extérieur du bâtiment où se trouvent les unités résidentielles et tout ouvragé situé à l'extérieur du bâtiment tels les piscines extérieures, le terrassement, les trottoirs, les allées et le système de drainage des eaux de surface du terrain;
…
Toutefois, les exclusions visées aux paragraphes 2 et 5 ne s'appliquent pas si l'entrepreneur a fait défaut de se conformer aux règles de l'art ou à une norme en vigueur applicable au bâtiment.
ANNEXE II
(a. 78)
LISTE DES ENGAGEMENTS DE L'ENTREPRENEUR
L'entrepreneur s'engage:
1° à respecter les critères d'adhésion requis par l'administrateur conformément aux exigences prévues dans un règlement de la Régie du bâtiment du Québec portant sur le plan de garantie des bâtiments résidentiels neufs;
2° à dénoncer à l'administrateur le dépôt d'un avis d'intention ou d'une proposition à l'égard d'une personne insolvable, fait en vertu de l'article 65.1 de la Loi sur la faillite et insolvabilité (L.R.C., (c. 1985) c. B-3);
3° à respecter les règles de l'art et les normes en vigueur applicables au bâtiment;
[54] Le 27 janvier 2009, l’Administrateur justifie sa décision de rejeter la réclamation des Bénéficiaires au motif que seul un avis de non-conformité émis par la municipalité en regard de l’installation sanitaire lui permettrait d’intervenir auprès de l’Entrepreneur. Au moment de la décision, cet avis n’avait pas été émis.
[55] Les témoignages entendus et la preuve présentée démontrent, sous plusieurs aspects, que l’installation sanitaire contrevient aux exigences du Règlement sur l'évacuation et le traitement des eaux usées des résidences isolées Q-2 r.8, à savoir :
[55.1] D’abord les tests de coloration effectués par la municipalité et la visite des lieux ont permis de constater qu’il y résurgence de liquides à la base du lit de filtration, ce qui contrevient à l’article 3 du règlement à l’effet que « nul ne peut rejeter ni permettre le rejet dans l'environnement des eaux provenant du cabinet d'aisances d'une résidence isolée ou des eaux usées ou ménagères d'une résidence isolée. »
[55.2] Les photographies et les données recueillies sur les lieux, démontrent aussi que la grosseur du gravier ou de la pierre concassée, qui doit être comprise entre 1,5 et 6 cm, n’avait pas la dimension exigée à l’article 21 du règlement et n’avait pas été débarrassée de ses particules fines,
[55.3] Il a été mis en preuve que les travaux relatifs à l’installation sanitaire n’avaient pas été complétés par l’Entrepreneur lors de la livraison du bâtiment en novembre 2007. Il n’a pas été établi, par contre, qu’il revenait contractuellement aux Bénéficiaires de terminer les travaux de recouvrement du champ d’épuration pour le stabiliser. Ainsi, l’article 24 du règlement spécifiant que l’installation sanitaire «doit être recouverte d'une couche de sol perméable à l'air et être stabilisé avec de la végétation herbacée », n’a pas été respecté par l’Entrepreneur.
[56] Sans être nécessairement la seule cause des problèmes de fonctionnement du champ d’épuration, il y a lieu d’examiner si les travaux de « terrassement » exigés par le règlement Q-2, r.8 sont exclus de la garantie comme l’allègue l’Administrateur dans sa décision du 5 septembre 2008.
[57] Le Règlement sur le plan du garantie des bâtiments résidentiels neufs, exclut à l’article 13.9° certains travaux :
les espaces de stationnement et les locaux d'entreposage situés à l'extérieur du bâtiment où se trouvent les unités résidentielles et tout ouvragé situé à l'extérieur du bâtiment tels les piscines extérieures, le terrassement, les trottoirs, les allées et le système de drainage des eaux de surface du terrain.
[58] Pour établir la portée de la garantie, il faut se référer aux définitions de l’article 1 du règlement qui se lit ainsi :
«bâtiment»: le bâtiment lui-même, y compris les installations et les équipements nécessaires à son utilisation soit le puits artésien, les raccordements aux services municipaux ou gouvernementaux, la fosse septique et son champ d'épuration et le drain français.
[59] Le législateur a établi spécifiquement par cette définition que le champ d’épuration fait partie du bâtiment .
[60] En conséquence, les travaux de recouvrement de l’installation septique, stabilisé avec de la végétation herbacée. ne peuvent être considérés comme étant un ouvrage situé à l’extérieur du bâtiment et, de ce fait, assimilé à du terrassement faisant partie des exclusions prévues à l’article 13.9°.
[61] L.Entrepreneur est donc tenu de réaliser les travaux selon les normes en vigueur à titre d’entrepreneur accrédité par un plan de garantie tel qu’il s’engage à le faire dans le règlement :
ANNEXE II
LISTE DES ENGAGEMENTS DE L'ENTREPRENEUR
L'entrepreneur s'engage:
…
3° à respecter les règles de l'art et les normes en vigueur applicables au bâtiment;
[62] L’Administrateur a argumenté avoir été dégagé de son obligation de garantir les travaux car les Bénéficiaires ont empêché l’Entrepreneur de compléter les travaux de réparation du champ d’épuration en novembre 2008, ce qui constitue une exclusion de la garantie prévue à l’article 12.30 du Règlement sur le plan du garantie des bâtiments résidentiels neufs :
Sont exclus de la garantie:
3° les réparations rendues nécessaires par une faute du bénéficiaire tels l'entretien inadéquat, la mauvaise utilisation du bâtiment ainsi que celles qui résultent de suppressions, modifications ou ajouts réalisés par le bénéficiaire.
[63] Avec respect, il y a lieu de rappeler que les travaux de l’installation septique ont été réalisés à l’automne 2006 et que c’est seulement deux ans plus tard, suite à la directive de l’Administrateur que l’Entrepreneur a voulu procéder aux travaux de recouvrement du lit de filtration. À ce moment, les Bénéficiaires avaient déjà dénoncé, depuis plusieurs mois, les problèmes affectant l’équipement en cause.
[64] Selon la preuve entendue, la réalisation des travaux de recouvrement du lit d’épuration dès la première année, conformément au règlement Q-2, r.8, aurait possiblement diminué les risques de détérioration de l’installation. Cependant l’arbitre est d’avis qu’il était déjà trop tard en novembre 2008 et souscrit à l’argumentation des Bénéficiaires à l’effet que la réalisation de ces travaux auraient eu pour principal résultat d’enterrer leur preuve.
DÉCISION :
[65] L’arbitre doit statuer «conformément aux règles de droit; il fait aussi appel à l’équité lorsque les circonstances le justifient».
[66] À titre d’arbitre désigné, le soussigné est autorisé par la Régie du bâtiment du Québec à trancher tout différend découlant des plans de garantie. La décision doit prendre appui sur le texte du Règlement sur le plan de garantie des bâtiments résidentiels neufs.
[67] Suivant mon appréciation des faits, de la preuve versée au dossier et présentée à l’audition et du droit applicable, les conclusions suivantes s’imposent :
- le recouvrement de l’installation septique d'une couche de sol perméable à l'air, stabilisée avec de la végétation herbacée ne fait pas partie des exclusions de la garantie;
- l’Entrepreneur a livré une l’installation septique non-conforme aux normes en vigueur;
- l’écoulement des eaux usées dans l’environnement contrevient au règlement Q-2, r-8 ;
- la lettre de la municipalité ordonnant aux Bénéficiaires de refaire leur champ d’épuration constitue un avis formel de non-conformité.
[68] Quant au problème d’étanchéité de la porte extérieure, mur ouest, l’arbitre est d’avis que celle-ci est affectée d’une malfaçon dénoncée moins d’un an après la réception non officielle du bâtiment et que rien ne laisse croire que le mauvais fonctionnement des coupe-froid magnétiques soit le résultat de la faute des Bénéficiaires suite à une mauvaise utilisation ou l’entretien inadéquat de la porte.
[69] En vertu de l’article 123 du Règlement sur le plan de garantie des bâtiments résidentiels neufs et vu que le Bénéficiaire a obtenu gain de cause, les frais d’arbitrage sont à la charge de l’Administrateur;
123. Les coûts de l'arbitrage sont partagés à parts égales entre l'administrateur et l'entrepreneur lorsque ce dernier est le demandeur.
Lorsque le demandeur est le bénéficiaire, ces coûts sont à la charge de l'administrateur à moins que le bénéficiaire n'obtienne gain de cause sur aucun des aspects de sa réclamation, auquel cas l'arbitre départage ces coûts.
POUR CES MOTIFS LE TRIBUNAL D’ARBITRAGE
[70] ANNULE la décision de l’Administrateur du 27 janvier 2009 sur les points 2 et 3 soumis à l’arbitrage;
[71] RETOURNE à l’administrateur, la plainte des Bénéficiaires pour qu’elle soit traitée de la façon prescrite par le règlement;
[72] CONDAMNE l’Administrateur à payer les frais d’arbitrage.
Guy Pelletier
Architecte et arbitre
Laval, ce 3 juillet 2009