ARBITRAGE EN VERTU DU RÈGLEMENT SUR LE PLAN DE
GARANTIE DES BÂTIMENTS RÉSIDENTIELS NEUFS |
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CANADA |
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PROVINCE DE QUÉBEC |
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Groupe d’arbitrage et de médiation sur mesure (GAMM) |
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Dossier no : |
GAMM : 2007-09-013 |
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APCHQ : 06-216-PM |
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ENTRE : LISA RAE ET MICHAEL NUTTER (ci-après les « bénéficiaires ») ET : LA GARANTIE DES BÂTIMENTS RÉSIDENTIELS NEUFS DE L’APCHQ (ci-après l’« administrateur ») ET : CONSTRUCTION RÉAL LANDRY INC. (ci-après l’« entrepreneur »)
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DEVANT L’ARBITRE : |
Me Johanne Despatis |
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Pour les bénéficiaires |
Me Catia Larose assistée de : Mme Lisa Rae M. Michael M. Nutter |
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Pour l’administrateur |
Me Patrick Marcoux assisté de : M. Rénald Cyr |
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Pour l’entrepreneur |
Me Jean-Guy Lacasse assisté de : M. Réal Landry |
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Date de l’audience |
17 septembre 2007 |
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Lieu de l’audience |
Longueuil |
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Date de la sentence |
20 septembre 2007 |
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SENTENCE ARBITRALE
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Adjudex inc.
0709-8278-GAMM
SA-8034
INTRODUCTION
[1] Monsieur Michael Nutter et madame Lisa Rae, les bénéficiaires, contestent en vertu de l’article 19 du Règlement sur le Plan de garantie des bâtiments résidentiels neufs, ci-après le Plan, plusieurs éléments de deux rapports respectivement datés du 26 avril et 4 décembre 2006 à la suite d’inspections réalisées par la Garantie des maisons neuves de l’APCHQ inc., l’administrateur. Celles-ci suivaient les réclamations présentées en vertu du Plan au sujet de problèmes affectant prétendument leur résidence située à Carignan et construite par Constructions Réal Landry inc., l’entrepreneur.
[2] Parallèlement, l’entrepreneur conteste de son côté, également en vertu de l’article 19 du Plan, certains éléments d’une décision rendue le 4 décembre 2006 par l’administrateur.
[3] Il fut convenu que ces recours seraient réunis et feraient l’objet d’une preuve commune.
[4] La présente sentence interlocutoire porte sur le moyen de tardivité opposé par les bénéficiaires à la demande présentée par l’entrepreneur au motif que celle-ci aurait été formulée en dehors du délai prévu à l’article 19 du Plan.
[5] Cette disposition se lit ainsi :
Le bénéficiaire ou l'entrepreneur, insatisfait d'une décision de l'administrateur, doit, pour que la garantie s'applique, soumettre le différend à l'arbitrage dans les 30 jours de la réception par poste recommandée de la décision de l'administrateur [...].
PREUVE
[6] Les bénéficiaires dénoncent à la fin février 2006 auprès de l’entrepreneur et de l’administrateur, une série de problèmes qu’ils affirment avoir constatés dans leur résidence neuve située à Carignan et dont ils ont pris possession le 28 janvier 2006. Ils estiment ces problèmes couverts par le Plan.
[7] Une inspection est éventuellement réalisée le 16 mars 2006 par monsieur Rénald Cyr, inspecteur-conciliateur au service de l’administrateur. Celui-ci en fait rapport (rapport no 1) le 26 avril suivant.
[8] Les extraits du rapport no 1 pertinents aux fins du moyen préliminaire se lisent ainsi :
Étant donné que le point 1 qui suit fut dénoncé par écrit au moment de la réception, nous devons nous assurer, pour que la garantie s’applique, que le critère suivant soit rencontré :
· Le point dénoncé constitue t’il une malfaçon au sens du Code civil du Québec?
Selon les constatations effectuées sur place lors de l’inspection, nous sommes d’avis que la situation décrite au point 1 rencontre ce critère puisque de toute évidence, les travaux furent mal exécutés.
Par conséquent, l’entrepreneur devra effectuer les travaux correctifs mentionnés ci-dessous.
1. Porte déformée entre le garage et le sous-sol
Travaux : L’entrepreneur devra apporter les correctifs requis, ou procéder au remplacement de la porte bombée depuis la réception du bâtiment, entre le garage et le sous-sol, tel que spécifié à l’étape 5 soumise au dossier.
Étant donné que les points 2 à 10 qui suivent furent dénoncés par écrit dans la première année de garantie, nous devons nous assurer, pour que la garantie s’applique, que les deux (2) critères suivants soient rencontrés :
· Les points dénoncés constituent-ils des malfaçons au sens du Code civil du Québec ?
· Si oui, les malfaçons étaient-elles cachées au moment de la réception ?
Selon les constatations effectuées sur place lors de l’inspection, nous sommes d’avis que les situations décrites aux points 2 à 10 rencontrent ces deux (2) critères. En effet, il est évident que les travaux furent mal exécutés, ce qui en soi constitue une malfaçon. D’autre part, il est clair que les malfaçons n’étaient pas apparentes au moment de la réception.
Par conséquent, l’entrepreneur devra effectuer les travaux mentionnés ci-dessous.
2. Infiltrations d’eau provenant du dessous de la dalle du sous-sol (salle mécanique)
Dénonciation :
Le bénéficiaire dénonce des infiltrations d’eau récurrentes, au plancher de la salle mécanique du sous-sol, par les microfissures et à la base des murs porteurs, de même qu’au conduit de la soupape.
Une démarche auprès de l’assureur du bénéficiaire a fait en sorte qu’une compensation monétaire d’environ 800 $ lui aurait été accordée, pour ragréer le gypse et voir à l’application d’un fongicide au périmètre de la pièce, incluant un dédommagement pour le mobilier endommagé dans la même pièce.
À ce jour, le bénéficiaire n’a pas réalisé les correctifs de ragréage des finis, alléguant que la cause de ces infiltrations d’eau n’avait été déterminée et relevait de la responsabilité de l’entrepreneur.
Reliées à ce point, le bénéficiaire dénonce les situations suivantes, pour lesquelles il demande réparation à l’entrepreneur, afin de régler de façon définitive le problème :
a) Vérifier par caméra, la condition du drain français et apporter les correctifs, si requis.
b) Abaisser le niveau de la flotte de la pompe submersible (système secondaire), placée dans le bassin de captation, un système d’évacuation par gravité agissant comme moyen primaire de drainage dudit bassin.
c) Modifier les pentes de drainage, au périmètre des fondations, lesquelles occasionnent l’accumulation d’eau aux abords de celles-ci.
d) Trouver une façon de réduire l’accumulation d’eau sous la dalle de la salle mécanique, en raison de la présence d’une semelle de fondation continue, laquelle fait obstruction à la répartition de la pression d’eau sous l’ensemble de la dalle du sous-sol.
Travaux :
Nos observations, au jour de l’inspection, et les informations soumises au dossier, permettent de conclure que la situation dénoncée comporte plusieurs items nécessitant améliorations, afin de régler le problème d’infiltration d’eau par les fissures de la dalle et au bas des murs porteurs de la salle mécanique.
Conséquemment, l’entrepreneur devra mettre en œuvre tous les moyens requis pour y parvenir, incluant le ragréage des finis endommagés, mis à part la portion couverte par l’assureur du bénéficiaire.
[9] L’entrepreneur n’a pas contesté le rapport no 1.
[10] Insatisfaits, notamment des réparations effectuées par l’entrepreneur à l’égard du point 2, et aussi en raison du défaut allégué de celui-ci de procéder aux travaux ordonnés à l’égard du point 1, les bénéficiaires présentent une demande d’arbitrage le 4 juin 2006.
[11] A la demande des parties, l’arbitrage est alors suspendu afin de permettre notamment à l’administrateur de procéder à une nouvelle inspection qui a lieu les 16 juin et 4 juillet 2006. L’administrateur décide aussi de mandater un hydrogéologue afin d’examiner la question des infiltrations d’eau déjà évoquées au point 2 du rapport no 1. L’hydrogéologue produit un rapport d’expertise le 13 novembre 2006.
[12] Suite à l’expertise, l’inspecteur-conciliateur Cyr rédige un second rapport (rapport no 2) le 4 décembre 2006, rapport dont les extraits pertinents à l’espèce sont les suivants :
1. Porte déformée entre le garage et le sous-sol
Travaux : L’entrepreneur n’a pas réalisé les correctifs requis relativement à ce point, soumettant plutôt un écrit, le 9 mai 2006, alléguant n’avoir aucune responsabilité en regard dudit point, considérant que des sommes d’argent lui auraient été retenues lors de la finalité du contrat avec son client, en référence à la lettre du bénéficiaire du 29 novembre 2005.
Après vérification de l’opinion de l’entrepreneur, la GMN en vient à la conclusion que le présent point fut inscrit en connaissance de cause sur le document de réception du bâtiment (étape 5), sans qu’aucune réserve ne soit faite quant aux prétendues sommes retenues.
L’entrepreneur a fourni le matériel et le bénéficiaire a procédé à la pose. La somme retenue alléguée affecte plutôt « la gestion » pour le bois de finition.
Par conséquent, la décision de l’administrateur contenue au rapport de décision du 26 avril 2006 est maintenue, faisant en sorte que l’entrepreneur devra apporter les correctifs requis.
À cet égard, un délai supplémentaire de quinze (15) jours suivant réception de la présente est accordé à l’entrepreneur pour exécution desdits travaux.
2. Infiltrations d’eau provenant du dessous de la dalle du sous-sol (salle mécanique)
Depuis l’émission du rapport de décision du 26 avril 2006, l’entrepreneur a effectué des travaux relativement à la situation dénoncée. Le bénéficiaire mentionne toutefois craindre que le problème n’ait été que partiellement réglé, référant aux items a), b), c) et d) relatés au rapport et les commentaires inscrits à sa lettre du 4 juin 2006.
En ce qui concerne l’item a), l’entrepreneur a procédé à une vérification partielle du drain français par caméra. Aucun correctif ne fut exécuté à l’endroit du drain comme tel.
Pour le point b), l’entrepreneur a revu le niveau de l’évacuation du système gravitaire à l’endroit du bassin de captation, et exécuté des perforations audit bassin pour drainer l’eau qui s’accumulerait sous la dalle à cet endroit.
Relativement au point c), l’entrepreneur, référant à ses obligations contractuelles, n’a apporté aucune modification aux pentes de drainage au périmètre des fondations. Le bénéficiaire a cependant revu le système de drainage enfoui des gouttières et régularisé le remblai autour du bâtiment.
Finalement, en ce qui concerne l’item d), l’entrepreneur a installé un second bassin de captation perforé, dans la salle mécanique, pourvu d’une seconde pompe d’assèchement, laquelle s’évacue vers le premier bassin à l’avant du sous-sol.
Forte de ces observations du 16 juin 2006, la GMN a mandaté un hydrogéologue pour s’assurer de la méthode préconisée par l’entrepreneur et des résultats qui en découleraient.
Ainsi donc, le 4 juillet 2006, une tranchée exploratoire vers le drain français fut effectuée, au coin arrière gauche du bâtiment, tout comme un visionnement par caméra du drain français.
Des relevés piézométriques furent effectués, sur une période d’observation de plusieurs semaines. À cet égard, un rapport d’expertise soumis en annexe fait état de correctifs supplémentaires requis pour éliminer tout risque d’infiltration d’eau.
L’expert conclut que les systèmes de drainage en place possèdent donc une efficacité marginale considérant que les observations n’ont pas été effectuées en période de crue.
Il associe de plus cette situation à un taux d’humidité excessif occasionnant la condensation autour des équipements mécaniques de la résidence. De photos démontrant le soulèvement du plancher flottant installé par le bénéficiaire ont également été soumises au dossier.
Afin de palier à ces situations, l’hydrogéologue suggère au moins deux méthodes correctives, à la page 7 de son rapport.
Le bénéficiaire a pour sa part démontré que la conduite placée près du plafond évacuant l’eau du second bassin de captation vers le premier, condensait et s’égouttait, malgré la présence d’un isolant, lequel n’est pas étanche.
Travaux :
Dans les quarante-cinq (45) jours suivant réception de la présente, l’entrepreneur devra apporter les correctifs requis pour éliminer les infiltrations d’eau, la condensation occasionnée par le taux d’humidité excessif affectant la dalle et le fini la recouvrant, en appliquant les méthodes correctives décrites au rapport de l’hydrogéologue, à la page 7.
Il va de soi qu’une fois les travaux complétés, les lieux devront être remis à leur état d’origine, incluant le plancher flottant.
[13] Deux recours sont entrepris à la suite de ce rapport.
[14] Le premier par les bénéficiaires qui suite à la réception du rapport no 2, et à nouveau insatisfaits, présentent le 5 janvier 2007, une demande d’arbitrage. Ils affirment d’une part contester le bien-fondé de certains éléments du rapport no 2 et, d’autre part, ils demandent que soit réactiver l’arbitrage entrepris à l’égard du rapport no 1.
[15] Le second recours est entrepris par l’entrepreneur. Sa demande d’arbitrage datée du 3 février 2007 dit vouloir en appeler du rapport no 2, du 4 décembre 2006, rapport qu’il reconnait lui avoir été transmis le 21 décembre 2006.
[16] Sa demande d’arbitrage du 3 février 2007 se lit ainsi :
Suite à la réception du document rendant compte de la décision de l’administrateur du 4 décembre 2006, nous ne sommes pas en accord avec la décision prise envers les points 1 et 2.
Tout d’abord, en ce qui concerne le point 1, tel que la lettre envoyée à M. Rénald Cyr le 9 mai 2006 (lettre conjointe au document). Je n’ai pas acheté le bois de finition, ni commandé, ni installé. J’ai simplement payé la facture pour que le bénéficiaire ait droit de recevoir mes escomptes de paiement rapide et mon prix favorable. Puisque la porte était déjà ronde à l’installation par le bénéficiaire, il n’aurait pas dû l’installer et la faire échangé par le fournisseur chez qui il l’avait acheté.
Le point 2 a été fait, tel que les recommandations verbales de M. Rénald Cyr avec son rapport de décision du 26 avril 2006, donc nous avons mis une deuxième « sump pump » dans la salle mécanique pour que l’eau ne revienne pas dans le sous-sol. J’ai effectué ses correctifs, même si j’évalue que je n’ai aucune responsabilité envers la nappe d’eau qui a sur le terrain qui a été acheté par le bénéficiaire. Le bénéficiaire n’a jamais inclus au contrat, qui été segmenté entre ses responsabilités et celle de Construction Réal Landry inc., de faire des tests de sol. Le bénéficiaire a lui-même fait le plan, la demande de permis à la ville et l’arpentage de la maison, je considère ne pas être responsable en ce qui concerne les problème de terrain, puisque Construction Réal Landry inc. n’en était pas propriétaire. De plus, le rapport de forage nous démontre que le sol naturel est à 97,47 et que mon excavation est à plus ou moins 97,37. La possibilité d’être plus haut est alors impossible sans compaction, la construction à cette hauteur a été engendrée par le fait que mon client ne voulait pas que ses coûts de construction soient astronomiques, puisqu’il payait toutes les factures pour la construction de sa maison. La quantité d’eau observée par nous et nos sous-traitants lors de l’excavation et de la mise en place de la base de fondation était minime. Vous pouvez voir les photos du 27 et 28 juin qui le démontre bien.
En tout état de cause, j’ai justifié les raisons qui m’amène à contester les points 1 et 2, vous trouverez par la suite les informations sur les bénéficiaires, l’entrepreneur, administrateur et l’arbitre déjà affecté à la cause qui a été contesté par le client après le premier rapport de décision de l’administrateur. [sic]
[17] Interrogé à l’audience sur ses raisons de n’avoir entrepris son recours que le 3 février, l’entrepreneur, monsieur Réal Landry répond qu’au moment où le rapport no 2 avait été transmis à son bureau le 21 décembre, il était absent en vacances en Floride n’était revenu que le 8 janvier pour partir immédiatement à la chasse dans le Grand Nord. Selon lui, c’est probablement son fils qui travaille pour lui qui aurait pris livraison de ce rapport.
[18] Monsieur Réal Landry affirme n’avoir lui-même pris connaissance du rapport no 2 qu’à son retour de voyage à la mi-janvier et avoir aussitôt décidé de le contester, ce qu’il a fait le 3 février 2007.
LES PLAIDOIRIES
Bénéficiaires
[19] Selon la procureure des bénéficiaires, le recours de l’entrepreneur est irrecevable en raison de l’article 19 du Plan qui donne à l’entrepreneur 30 jours de la date de réception du rapport dont il est insatisfait pour se pourvoir en arbitrage. Or, rappelle la procureure, l’entrepreneur a reçu le rapport no 2 le 21 décembre 2006 mais n’a présenté sa demande d’arbitrage que le 3 février suivant, soit bien au-delà des 30 jours stipulés.
[20] Tout en reconnaissant que le présent tribunal d’arbitrage a le pouvoir selon le Plan de proroger le délai en question, Me Larose soutient qu’aucune circonstance ne le justifierait en l’espèce.
[21]
Commentant
le jugement rendu par l’honorable juge Ginette Piché de la Cour supérieure dans
Takhmizdjian et Barkakjian c. Soreconi (Société pour la
résolution des conflits inc.),
AZ-50182806
ainsi que la sentence arbitrale rendue par l’arbitre Jeffrey Edward
dans Pitre et La Garantie des bâtiments résidentiels neufs de
l'A.P.C.H.Q. inc.,
AZ-50394613
, la procureure a soutenu que ces autorités
ne sauraient trouver application ici en raison des circonstances expliquant le
défaut de l’entrepreneur.
[22] Selon la procureure, en effet même si monsieur Landry était à l’extérieur, il reste que le rapport no 2 a initialement été reçu par une personne en charge de son entreprise pendant son absence et que la preuve n’explique pas pourquoi cette personne n’aurait pas été en mesure d’exercer dès lors le recours.
[23] En outre, ajoute la procureure, l’entrepreneur n’a nullement contesté le rapport no 1 du 26 avril 2006 qui concluait déjà, précisément au sujet des points que l’entrepreneur veut désormais contester, que ces problèmes constitueraient des malfaçons au sens du Plan et que l’entrepreneur avait l’obligation de les corriger. Or, soutient la procureure, si l’entrepreneur n’était pas satisfait de ces conclusions, il se devait de les contester en temps opportun soit dès après le rapport no 1 du 26 avril 2006, ce qu’il n’a pas fait. Selon la procureure, quelle que soit ma décision à l’égard de la tardivité alléguée du recours de l’entrepreneur, celui-ci est résolument forclos de contester les conclusions du rapport no 1 particulièrement les conclusions relatives à ces malfaçons.
Entrepreneur
[24] Son procureur soutient que l’entrepreneur a vécu des circonstances qui justifient la prolongation à son égard du délai de l’article 19 puisqu’il n’a pris connaissance du rapport no 2 qu’à la mi-janvier et a alors sans tarder entrepris de présenter une demande d’arbitrage.
[25] Au surplus, reconnait Me Lacasse, celui-ci n’entend pas contester le rapport no 1 du 26 avril mais bien seulement celui du 4 décembre 2006, le rapport no 2.
Administrateur
[26] Selon le procureur de l’administrateur, la clause 19 du Plan doit être interprétée de façon raisonnable et l’arbitre a le pouvoir de proroger le délai qui y est stipulé.
[27] Cela dit, Me Marcoux rappelle que le procureur de l’entrepreneur a rappelé que son client conteste le rapport no 2 et non le rapport no 1.
ANALYSE ET DÉCISION
[28] Selon la compréhension que j’en ai, le moyen préliminaire comporte en fait deux arguments. Un premier invoque effectivement la tardivité alléguée de la demande d’arbitrage alors qu’un second aurait trait davantage à son contenu en ce sens qu’il y aurait pour ainsi dire chose jugée à l’égard de cette demande.
[29] La demande d’arbitrage concernant le rapport no 2 daté du 4 décembre 2006 est-elle recevable ?
[30] L’article 19 du Plan dispose que l’entrepreneur insatisfait d'une décision de l'administrateur, doit, [...] soumettre le différend à l'arbitrage dans les 30 jours de la réception par poste recommandée de la décision de l'administrateur [...].
[31] En l’espèce, l’entrepreneur reçoit le rapport no 2 le 21 décembre 2006 et présente sa demande d’arbitrage le 3 février suivant, manifestement à l’extérieur du délai de 30 jours.
[32] L’affaire Takhmizdjian [précitée] nous enseigne que le délai de 30 jours stipulé à la clause 19 du Plan n’est pas un délai de déchéance mais plutôt un simple délai de procédure susceptible d’être prorogé par l’arbitre.
[33] Selon la jurisprudence, le délai en question peut en effet être prorogé dès lors que la partie fautive démontre que les circonstances de son défaut ne tiennent pas à un manque de diligence de sa part et que la partie poursuivie ne serait pas significativement préjudiciée s’il y avait prorogation, chaque cas étant ultimement un cas d’espèce.
[34] Or, avec égards, j’estime que les circonstances de l’espèce ne militent pas en faveur d’une prorogation de ce délai.
[35] En quittant volontairement en vacances en décembre et en ne s’assurant pas que quelqu’un en charge prenne connaissance de son courrier et s’en occupe ou à la limite lui en fasse part, l’entrepreneur a été imprudent. En rentrant de vacances pour repartir aussitôt à la chasse sans lui-même se pencher sur son courrier, l’entrepreneur a à nouveau manqué de diligence.
[37] De plus, rien n’explique pourquoi lorsqu’il a pris connaissance du rapport à la mi-janvier alors que le délai de 30 jours n’était pas écoulé, la date d’échéance étant le 22 janvier, il a quand même attendu jusqu’au 3 février suivant pour présenter sa demande d’arbitrage.
[38] À mes yeux, il serait déraisonnable pour l’arbitre de conclure en pareilles circonstances qu’une personne, qui ne peut quand même pas invoquer l’ignorance des faits ni du Plan, aurait agi avec diligence. Sans aucunement dire que l’entrepreneur aurait manqué de bonne foi, il reste qu’il n’a pas agi de manière à préserver ses droits et cela, sans justification raisonnable.
[39] De plus, quand on l’examine, l’essentiel de sa demande d’arbitrage est d’invoquer n’avoir aucune responsabilité à l’égard des points qu’il conteste dans le rapport no 2. Or, la responsabilité de l’entrepreneur à cet égard a été retenue dans le rapport no 1 d’avril 2006. L’entrepreneur en ne contestant pas ce premier rapport a fait son lit au plan juridique. Il est évident que le relever de son défaut dans ces circonstances causerait un préjudice aux bénéficiaires.
[40] La ligne est parfois ténue dans ces matières entre le droit d’une partie poursuivie à une défense pleine et entière et son droit de se pourvoir directement en arbitrage à l’encontre d’une décision. Malgré mon refus de le relever du défaut, l’entrepreneur a toujours le droit de se défendre et de contester le point de vue des bénéficiaires dans la mesure où ces derniers ont eux-mêmes engagé un recours à l’encontre des rapports nos 1 et 2. En revanche, l’entrepreneur ne pourra contester ce qui n’est pas l’objet du recours puisque lui-même n’a pas contesté les rapports nos 1 et 2 en temps utile.
[41] Pour toutes ces raisons, le moyen préliminaire est accueilli et la demande d’arbitrage de l’entrepreneur rejetée, sauf son droit d’opposer des moyens de défense à l’encontre des demandes entreprises.
Montréal, le 20 septembre 2007
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__________________________________ Johanne Despatis, avocate Arbitre
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Adjudex inc.
0709-8278-GAMM
SA-8034