ARBITRAGE EN VERTU DU RÈGLEMENT SUR LE PLAN DE GARANTIE DES BÂTIMENTS RÉSIDENTIELS NEUFS
(Décret 841-98)
CANADA
PROVINCE DE QUÉBEC
Groupe d’arbitrage et de médiation sur mesure (GAMM)
Dossier no : GAMM : 2012-16-007
APCHQ : 1283573-1
ENTRE:
COPROPRIÉTÉ DU 120 DU SANCTUAIRE
(ci-après
la « bénéficiaire »)
ET :
LA GARANTIE DES BÂTIMENTS RÉSIDENTIELS NEUFS DE L’APCHQ
(ci-après l’« administrateur »)
ET:
SOMMET SUR LE GOLF INC.
(ci-après l’« entrepreneur »)
DEVANT L’ARBITRE : Me Jean Doyle
Pour la bénéficiaire Monsieur Claude Bourget
Pour l’administrateur Me Luc Séguin
Pour l’entrepreneur M. Normand Pitre (absent)
Date d’audience 25 février 2013
Date de la sentence 20 mars 2013
SENTENCE ARBITRALE
JDY-1500-001-GAMM
MANDAT
Le Tribunal est saisi du dossier par nomination du soussigné le 29 septembre 2012.
L’audition de la cause s’est déroulée le 25 février 2013, au 1550, rue Metcalfe, bureau 900, Montréal.
Il n’y a aucune objection quant à la compétence du tribunal et la juridiction de l’arbitre est, par conséquent, confirmée.
Le cahier de pièces de l’administrateur est admis par les parties;
L’entrepreneur n’a pas pu être rejoint avant le début de l’audience.
LE RECOURS
La copropriété 120, du Sanctuaire, la bénéficiaire, représentée à l’audience par monsieur Claude Bourget, conteste en vertu de l’article 19 du Règlement sur le Plan de garantie des bâtiments résidentiels neufs, ci-après appelé le Règlement, le seul élément de décision rendu le 1er octobre 2012 par la Garantie des bâtiments résidentiels neufs de l’APCHQ Inc., l’administrateur, signé par l’inspecteur François Lalancette et qui apparaît à l’onglet numéro 6 du cahier des pièces de l’administrateur.
L’élément contesté de la décision ci-haut mentionnée se lit comme suit :
FAITS, ANALYSE ET DÉCISION
1. PLATELAGE DU BALCON DE L’UNITÉ 120-3 RECOUVERT DE FIBRE DE VERRE
Les faits
Le copropriétaire de l’unité concernée explique avoir constaté en juillet 2010, soit à l’intérieur de la deuxième année de garantie, qu’une petite superficie de la grosseur d’une pièce de monnaie manquait de rigidité.
Il dit avoir tenté de faire une demande de réparation verbale auprès de l’entrepreneur, sans succès cependant.
Il a également transmis un courriel à l’entrepreneur en date du 24 août 2011, duquel nous avons accusé réception le 18 juillet 2012 et dans lequel il demande que soit effectuée une réparation puisque la fibre de verre n’offre plus de rigidité et que la surface affectée est maintenant d’environ 1 pied.
Il mentionne également avoir entrepris des démarches auprès du sous-traitant de l’entrepreneur, soit la compagnie Cordy, à qui il a transmis une lettre datée du 25 octobre 2011, dans laquelle il décrit un problème de rigidité de la surface du balcon sur une superficie approximative de 30 pouces.
Le sous-traitant lui aurait mentionné, lors d’une discussion téléphonique ayant suivi la réception de l’envoi, qu’il n’avait aucun lien contractuel avec le syndicat et que par conséquent, il ne donnerait pas suite à leur demande.
Lors de notre visite, nous avons été en mesure de constater qu’une superficie d’environ 60 centimètres par 60 centimètres à proximité du coin arrière gauche du bâtiment, vue de la rue du Golf, est endommagée par une infiltration d’eau à l’intérieur du platelage recouvert de fibre de verre du balcon, affectant ainsi la solidité du plancher dudit balcon.
Toutefois, selon les témoignages recueillis ainsi qu’à la lecture des documents soumis à l’administrateur par le syndicat, nous constatons qu’une période de plus de vingt-trois (23) mois s’est écoulée entre la constatation de la problématique et la réception par l’administrateur de la dénonciation écrite.
ANALYSE ET DÉCISION (point 1 ) :
Comme il fut mentionné au début du présent rapport, ce point fut dénoncé par écrit à l’administrateur en date du 18 juillet 2012. On constate donc qu’il s’est écoulé plus de six (6) mois entre la découverte du point en question par le syndicat et le moment où ce dernier l’a dénoncé par écrit à l’administrateur.
En ce qui a trait au délai de dénonciation, le contrat de garantie stipule que les malfaçons, les vices cachés ou les vices majeurs, selon le cas, doivent être dénoncés par écrit à l’entrepreneur et à l’administrateur dans un délai raisonnable, lequel ne peut excéder six (6) mois de leur découverte ou survenance ou, en cas de vices ou de pertes graduels, de leur première manifestation.
Par conséquent, puisque le délai de dénonciation dans ce cas-ci excède le délai raisonnable qui a été établi par le législateur, l’administrateur doit rejeter la demande de réclamation du syndicat à l’égard du point 1.
LES FAITS
A l’audience, la bénéficiaire a déposé sous la cote B-1 un mémo représentant sa chronologie des événements et qui se lit comme suit :
· 14 avril 2009 réception des parties communes
· Juillet 2010 M Cartier remarque que le balcon a une perte de rigidité lorsqu’il passe à un endroit donné (grandeur pièce de monnaie), à ce moment il laisse des messages sur la boîte vocale de Mme Diaz du SAV Cholette et les avisent qu’il a remarqué un problème sur son balcon, M Cartier après quelques appels attend toujours une réponse. Il attend jusqu’au 24 août 2011 pour demander conseil au syndicat.
· Lors de la visite de réception du condo en 2008 avec M Luc Turgeon (partenaire du projet) il nous mentionnait que si nous avions un problème avec le condo juste à passer à sa roulotte pour l’aviser où téléphoner au SAV groupe Cholette mais pas trop souvent.
· C’est ce que M Cartier a mis en application pour son problème de balcon en téléphonant au SAV Cholette (à ce moment M Turgeon est dissocié de Cholette) sans en aviser le syndicat de copropriété car il a mis en application ce qu’il lui avait été mentionné.
· Dans ce dossier M Cartier a agi de bonne foi après la découverte du problème même s’il en a avisé son syndicat qu’en août 2011 pour avoir un conseil sur quoi il devrait faire avec son problème de balcon vu qu’il n’avait toujours pas de retour d’appel du SAV.
· A compter du mois d’août 2011 nous avons entrepris des procédures pour faire réparer le balcon, en espérant le faire à l’amiable et de bonne foi. Pour nous le dernier recours était la garantie APCHQ c’est ce qui explique les longs délais de notre tentative de règlement.
· Pour ces raisons nous demandons que la date de dénonciation soit juillet 2010 lorsque M Cartier tente de rejoindre le SAV du Groupe Cholette via le service de boîte vocale.
· Depuis juillet 2010 au 20 septembre 2012 le problème structural est passé de la grandeur d’une pièce de monnaie a environ 60cm x 60cm.
· 14 avril 2009 réception des parties communes
· Juillet 2010 M Cartier remarque que le balcon a une perte de rigidité lorsqu’il passe a un endroit donné, à ce moment il laisse des messages sur la boite vocale de Mme Diaz du SAV Cholette et les avisent qu’il a remarqué un problème sur son balcon.
· 24 août 2011 après n’avoir reçu aucune nouvelle du Groupe Cholette, M Cartier demande à moi et André Gauthier (prés 120) de venir constater les faits car le problème s’agrandit.
· 24 août 2011 M Gauthier envoi un courriel à notre administrateur (G Plourde) et l’avise du problème au balcon.
· 31 août 2011 M Plourde transfert un courriel au SAV Cholette
· 13 Sept 2011 M Cartier reçoit un courriel du SAV Cholette avec une lettre de refus.
1. Personne du groupe Cholette n’est venu sur place pour prendre connaissance visuellement du problème.
2. On nous réfère aux entreprises Cordy fabricant du balcon de fibre de verre.
· 3 Octobre 2011 M Gauthier (prés) communique par téléphone avec les entreprises Cordy.
1. Le responsable est très occupée et son assistante prend les informations et doit nous rappeler.
· 17 octobre 2011 pas de nouvelles de Cordy
· 25 octobre 2011 envoi d’une lettre aux Entreprises Cordy
· 2 mai 2012 toujours pas de nouvelles, envoi d’une lettre recommandée aux Entreprises Cordy.
· 6 mai 2012 M Mario Gosselin de Cordy téléphone M Gauthier (prés)
1. Refuse notre demande car nous ne sommes pas leur client
2. Si nous avions acheté d’eux la garantie serait valide.
3. D’après lui la réparation peut se faire au coût de = ou - 500$
· 14 juillet 2012 envoi d’une lettre au Groupe Cholette que nous déposons une demande auprès APCHQ.
· 18 juillet 2012 demande de réclamation auprès APCHQ c‘est notre dernière étape des procédures.
La bénéficiaire n’a amené aucun autre élément de fait que ceux énumérés dans le mémo B-1 et a, par ailleurs, admis que les délais prévus au Règlement n’avaient pas été respectés.
D’autre part, dans son témoignage à l’audience, monsieur Claude Bourget, s’exprime comme suit :
« La présente demande se veut être une révision du délai raisonnable ».
Les parties communes de l’immeuble ont été reçues le 14 avril 2009, date à laquelle monsieur Luc Turgeon, alors impliqué chez l’entrepreneur, a mentionné de l’aviser au bureau situé dans une roulotte de chantier, s’il y avait quelque défaut que ce soit.
En juillet 2010, le propriétaire du 120-3 du Sanctuaire, monsieur Cartier, remarque qu’il y a un trou dans le recouvrement de fibre de verre du platelage du balcon arrière de son unité.
Aucune dénonciation, sous quelque forme que ce soit, n’a été faite de la part de monsieur Cartier avant le 24 août 2011.
Il est à noter, qu’entretemps, monsieur Cartier a communiqué avec divers intervenants, dont le Groupe Cholette et le fabricant Cordy, mais que le temps s’est écoulé sans qu’une décision favorable ne soit prise par ces derniers.
Le syndicat a alors entrepris diverses démarches, tel qu’il appert au mémo B-1, considérant qu’une demande auprès de l’APCHQ représentait le dernier recours.
La bénéficiaire et ses membres ont, selon le représentant, suivi la procédure que les copropriétaires croyaient, de bonne foi, être la bonne, c’est-à-dire : Dénoncer le défaut à l’entrepreneur, prendre contact avec le fabricant de l’élément défectueux, soit la fibre de verre recouvrant le platelage du balcon du 120-3 du Sanctuaire, puis, en dernier recours, présenter une réclamation à la Garantie des maisons neuves de l’APCHQ.
La bénéficiaire admet que la réclamation auprès de l’APCHQ est hors délai, selon le libellé du Règlement.
Le contre-interrogatoire du représentant de la bénéficiaire fait ressortir que cette dernière confiait une partie des tâches administratives de la copropriété à un dénommé Plourde qui ne paraît cependant pas avoir été consulté pour assister la bénéficiaire dans la gestion du problème faisant l’objet de la présente demande d’arbitrage.
Cinq (5) photographies ont été produites par l’administrateur, en liasse. Ces photos situent le balcon du 120-3 du Sanctuaire, ainsi que l’endroit où la finition de fibre de verre du platelage du balcon est déficiente.
Par ailleurs, l’inspecteur de l’administrateur, monsieur François Lalancette, sur les faits, témoigne comme suit :
« L’administrateur ne nie pas la problématique représentée par la déficience au niveau du platelage du balcon, qui crée une infiltration d’eau et affecte le contreplaqué sous la fibre de verre.
Cependant, l’administrateur nie la couverture de la garantie, parce que la dénonciation à l’administrateur du vice fut faite en dehors du délai raisonnable et a même dépassé le délai de 6 mois prévu au Règlement et, plus particulièrement, quant à la section sur les vices cachés qui se lit comme suit à l’article 27, paragraphe 4 relatif aux vices cachés se lit comme suit :
Article 27
La garantie d’un plan dans le cas de manquement de l’entrepreneur à ses obligations légales ou contractuelles après la réception de la partie privative ou des parties communes doit couvrir :
1. . . .
2. . . .
3. . . .
4. «La réparation des vices cachés au sens de l’article 1726 ou de l’article 2103 du Code Civil qui sont découverts dans les trois (3) ans suivant la réception et, dénoncés par écrit, à l’entrepreneur et à l’administrateur dans un délai raisonnable, lequel ne peut excéder six (6) mois de la découverte des vices cachés au sens de l’article 179 du Code Civil ».
Le procureur de l’administrateur reconnaît le vice caché affectant l’immeuble mais rappelle au tribunal que même si l’entrepreneur devait être tenu responsable dudit vice affectant le bâtiment, en vertu des dispositions du code civil, les dispositions du Règlement sont claires relativement au délai de rigueur de six (6) mois, tel qu’il appert à l’article 27 du règlement aux alinéas 3, 4 et 5 et le délai écoulé, entre le moment de la découverte et la réception de l’avis de dénonciation, est fatal.
Par ailleurs, aucun élément de preuve ne permet au soussigné de considérer une impossibilité pour la bénéficiaire de dénoncer le vice dans le délai de rigueur de six mois, d’autant plus qu’elle avait accès à un administrateur en qui elle avait remis une partie des tâches administratives et auprès de qui elle aurait pu se référer.
Le procureur de la bénéficiaire a remis à l’arbitre trois décisions se référant à l’application constante de la jurisprudence en matière de délai prévu à l’article 27 du Règlement que l’on peut citer dans l’ordre chronologique suivant :
Dans Niki Apollonatos & George Karounis c. Habitations Luxim Inc. et La Garantie des Maisons neuves de l’APCHQ[1]
Me Jean Phillipe Ewart, après avoir rappelé les faits pertinents à ce litige et précisé qu’au paragraphe 48 « le délai maximum de six mois prévu aux aliénas 3e, 4e et 5e » respectivement de l’article 10 du Règlement « est de rigueur et de déchéance et ne peut conséquemment être sujet à extension », conclut au paragraphe 54 de sa décision comme suit:
« En résumé, la dénonciation prévue à l’article 10 du Règlement se doit d’être par écrit, est impérative et essentielle, le délai de six mois prévu au même article emporte et est un délai de déchéance, et si ce délai n’est pas respecté le droit des Bénéficiaires à la couverture du plan de garantie visé et au droit à l’arbitrage qui peut en découler sont respectivement éteints, forclos et ne peuvent être exercés. »
Dans une décision du 24 juillet 2008, Patrice Rivet et Manon St-Jean c. Constructions Réjean D’Astous Inc. et La Garantie des Bâtiments Résidentiels neufs de l’APCHQ Inc.[2] l’arbitre Me Pierre Boulanger concluait, dans des circonstances semblables, de la façon suivante :
« Une jurisprudence constante reconnaît le caractère impératif de l’obligation du bénéficiaire de dénoncer à l’administrateur les malfaçons et vices dont il se plaint dans un délai de six (6) mois de leur découverte ».
En dernier lieu, dans une cause entre Paul et Brigit Nagy c. 6061711 Canada Inc. et La Garantie des maisons neuves de l’APCHQ[3], l’arbitre Me Michel A. Jeanniot, le 27 juillet 2010, statuait, quant au délai de six mois prévu au Règlement de la façon suivante au paragraphe 25 de sa décision :
« La dénonciation écrite à l’administrateur de la Garantie ayant été faite plus de six mois en l’occurrence ou la réoccurrence des problèmes leur est fatal. La dénonciation prévue à l’article 10 du Règlement se doit d’être par écrit, est impérative et essentielle, le délai de six mois prévu au même article est un délai qui fut décidé, en est un de déchéance et si ce délai n’est pas respecté le droit des bénéficiaires à la couverture du plan de garantie visé et le droit à l’arbitrage qui peut en découler sont respectivement éteints ».
DÉCISION
CONSIDÉRANT que la connaissance du vice affectant la propriété située au 120-3 du Sanctuaire, date de juillet 2010;
CONSIDÉRANT que la dénonciation, datée du 24 août 2011, n’a été reçue par l’administrateur que le 18 juillet 2012;
CONSIDÉRANT la preuve entendue, relativement aux dates du déroulement des événements;
CONSIDÉRANT le délai de rigueur de six mois prévu à l’article 27 du Règlement sur le Plan de garantie des bâtiments résidentiels neufs;
POUR CES MOTIFS, LE TRIBUNAL
- REJETTE la réclamation des bénéficiaires;
- MAINTIENT la décision de l’administrateur datée du 1er octobre 2012;
- VU les articles 116 et 123 du Règlement, CONDAMNE la Bénéficiaire au paiement des frais à être départagés à raison de 50$ par la Bénéficiaire et le reliquat par l’Administrateur.
MONTRÉAL, le 20 mars 2013
___________________________________
Jean Doyle, avocat
Arbitre
JDY-1500-001-GAMM
[1] Niki Apollonatos & George Karounis c. Habitations Luxim Inc. et La Garantie des Maisons neuves de l’APCHQ
[2] Patrice Rivet et Manon St-Jean c. Constructions Réjean D’Astous Inc. et La Garantie des Bâtiments Résidentiels neufs de l’APCHQ Inc.
[3] Paul et Brigit Nagy c. 6061711 Canada Inc. et La Garantie des maisons neuves de l’APCHQ