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ARBITRAGE EN VERTU DU RÈGLEMENT SUR LE PLAN DE GARANTIE
DES BÂTIMENTS RÉSIDENTIELS NEUFS
Organisme d'arbitrage autorisé par la Régie du bâtiment :
CENTRE CANADIEN D'ARBITRAGE COMMERCIAL (CCAC)
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ENTRE : SYNDICAT DES COPROPRIÉTAIRES DU 8065 AU 8071, RUE J.-A.-VINCENT, TROIS-RIVIÈRES
(ci-après désigné « les Bénéficiaires »)
GESTION IMMOBILIÈRE NORMANDVILLE INC.
(ci-après désignée « l’Entrepreneur»)
RAYMOND CHABOT ADMINISTRATEUR PROVISOIRE INC. ès qualités d’administrateur provisoire du plan de garantie LA GARANTIE DES BÂTIMENTS RÉSI-DENTIELS NEUFS DE L’APCHQ INC.
(ci-après désignée « l'Administrateur »)
No dossier CCAC : S15-081201-NP
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DÉCISION ARBITRALE
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Arbitre : Me Luc Chamberland
Pour les Bénéficiaires : Me François Daigle
Pour l'Entrepreneur : Me Manon Cloutier
Pour l'Administrateur : Me Nancy Nantel
Date de l'audition au fond : Les 23 et 24 mars 2017
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Date de la décision : Le 22 juin 2017
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Identification complète des parties
Arbitre : Me Luc
Chamberland
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Bénéficiaires : SDC 8065 à 8071, rue J.-A.-Vincent 8071, rue J.-A.-Vincent Trois-Rivières (Québec) G8Y 7J9 Et son avocat : Me François Daigle
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Entrepreneur : Gestion immobilière Normanville inc. Case postale 26002 CSP du Boisé Trois-Rivières (Québec) G8Y 7M1 Et son avocate : Me Manon Cloutier
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Administrateur : Raymond Chabot, administrateur provisoire inc. ès qualités d’administrateur provisoire du plan de garantie de la Garantie des bâtiments résidentiels neufs de l’APCHQ inc. 7333, Place des Roseraies, bureau 300 Montréal (Québec) H1M 2X6 Et son avocate : Me Nancy Nantel
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DÉCISION ARBITRALE
[1] Selon la preuve au dossier, le 25 mars 2014 (A-4), les Bénéficiaires auraient dénoncé un problème de fissures au revêtement extérieur du côté du 8071, rue J.-A.-Vincent. Cette dénonciation a entraîné deux décisions de l’Administrateur. La première décision portait sur deux points, mais, sur le point encore en litige, l’Administrateur devait procéder à une inspection supplémentaire en raison des conditions climatiques.
[2] Le 13 juillet 2015, l’Administrateur rendait sa décision finale (A-8) concernant les fissures sur la façade latérale droite. Il a rejeté la réclamation des Bénéficiaires en se fondant sur le motif d’exclusion de la garantie énoncé à l’art. 23 par. 3 du Règlement sur le plan de garantie des bâtiments résidentiels neufs, RLRQ c. B-1.1, r. 8 (ci-après « le Règlement »). Cette disposition prévoit que si les réparations sont rendues nécessaires par la faute des bénéficiaires, la garantie n’est plus applicable. Je reproduis ci-dessous les extraits plus pertinents :
Au cours du mois de février 2014, soit en quatrième année de garantie, le syndicat a constaté une fissure dans la maçonnerie de la façade latérale droite du bâtiment.
De plus, du côté intérieur, dans l’unité 8071, le gypse est également fissuré sur le même mur, ainsi qu’aux coins supérieurs de la porte fenêtre, laquelle est située sur le mur arrière.
L’entrepreneur a mentionné que le bâtiment semble avoir bougé sous l’effet du gel et qu’il est possible que ce soit dû à l’aménagement du pavé uni qu’a fait faire la copropriétaire de l’unité 8071 au cours de l’été 2011.
Lors de l’inspection, l’administrateur a été en mesure de constater qu’un pavé uni a été installé sur la terrasse de béton qui est ancrée au bâtiment. Au surplus, l’administrateur a été en mesure de constater une fissure horizontale à la fondation de la façade latérale droite.
L’administrateur est d’avis que les dommages constatés sont le résultat de l’aménagement de la terrasse de pavé uni. En effet, dans un premier temps, le poids des tuiles exercent (sic) une contrainte sur la dalle de la terrasse qui est ancrée au bâtiment et dans un deuxième temps, les tuiles, au cours des cycles de gel et dégel, exercent une poussée sur la fondation.
[p. 2]
[3] Le 12 août 2015, les Bénéficiaires formulaient une demande d’arbitrage (A-9). Le 24 février 2017, le Centre canadien d’arbitrage commercial (CCAC) nommait le soussigné, à titre d’arbitre, en remplacement de Me Errol Payne. L’audition de la preuve ayant duré deux jours, l’arbitre exposera les principaux éléments de la preuve présentée par les parties.
La preuve des Bénéficiaires
[4] M. Jacques Gagné, ingénieur, a témoigné à titre d’expert à l’aide de son rapport (P-6). Il indique au tribunal être ingénieur depuis plus de 30 années, à titre de spécialiste au bâtiment, il a procédé à plus de 500 expertises et a témoigné devant divers tribunaux à plus de 70 reprises. M. Gagné est le seul expert entendu devant le tribunal qui a procédé à une visite d’inspection, réalisé des travaux de sondage, procédé à des tests granulométriques et pris des photos lors des excavations.
[5] Les passages les plus pertinents de son rapport se lisent comme suit :
Nous ne partageons pas l'opinion de l'administrateur pour les raisons suivantes :
- Il est évident que le poids des tuiles de pavé uni ne peut pas être en cause parce que la dalle de la terrasse se soulève à son extrémité (voir photo 9). Dans la perspective où le poids des tuiles serait en cause il y aurait eu affaissement et non un soulèvement de la dalle de la terrasse.
Le soulèvement du mur de fondation par rapport à la semelle de fondation indique clairement qu'il n'y a pas eu d'affaissement mais un soulèvement qui s'est opéré à partir du mur de fondation (photo 13-14 et dans une moindre mesure photos 17-18). La morphologie des désordres ne conduit pas une interprétation à l'effet qu'il y aurait eu un affaissement au contraire dans le cas il est question d'un soulèvement.
Il n'y a pas de démonstration à l'effet que l'ajout de poids aurait eu comme conséquence de dépasser la valeur de la capacité portante des sols et que l'affaissement attendu se soit matérialisé.
Dans la perspective où l'ajout de poids serait en cause il n'y aurait eu aucune incidence si l'entrepreneur avait construit la dalle de la terrasse de façon indépendante au bâtiment comme spécifié à la coupe transversale feuillet A-5/5.
Nous avons procédé à un sondage au site du logement #8065 et nous avons remarqué une fissure importante de 3/8" (10 mm) de largeur dont la morphologie indique un soulèvement et pourtant il n'y a pas eu de travaux de pose de tuile de pavé uni à cet endroit.
- Les tuiles de pavé uni ne peuvent pas exercer une poussée vers le haut sur la fondation au cours des cycles de gel et dégel étant donné qu'elles s'appuient sur la dalle de la terrasse qui elle s'appuie sur le mur de fondation.
Les tuiles de pavé uni n'ont pas été ancrées sur la dalle de la terrasse mais seulement déposées (voir photos 9-10 et 15). Donc ces dernières suivaient le mouvement. Elles ne sont pas à l'origine du mouvement.
Dans la perspective où elles seraient à l'origine du mouvement elles ne peuvent pas avoir soulevé le mur de fondation (photos 13-14) étant donné qu'elles n'étaient pas ancrées sur la dalle de la terrasse cette dernière n'étant pas ancré (sic) sur le mur de fondation.
[p. 12,13]
[…]
5. CONCLUSION
Les désordres affectant la copropriété SDC 8065 à 8071, rue J.-A.-Vincent à Trois-Rivières résultent du phénomène d'adhérence. À ce titre nous présentons un extrait numérisé du Manuel canadien d'ingénierie des fondations (1994) publié par la Société canadienne de géotechnique (annexe 3).
15.5.1 Adhérence
Le sol en contact avec une fondation superficielle peut geler et développer une liaison d'adhérence importante avec celle-ci. Le sol de remblai éventuellement susceptible au gel peut se soulever et transmettre à la fondation des efforts vers le haut. Les semelles ont généralement suffisamment de résistance à l'arrachement, mobilisée (sic) sur leur base élargie, pour résister au soulèvement mais la conception structurelle des raccords mur-semelle doit permettre la transmission de toute force appliquée par l'intermédiaire de l'adhérence. Les contraintes d'adhérence moyennes déterminées par essais en place vont
L'examen des photos 13 et 14 et dans une moindre mesure les photos 17 et 18 montre que le mur de fondation a été soulevé par le gel. À l'endroit de la dalle de la terrasse du #8071 cette dernière a été entraînée vers le haut étant donné qu'elle s'appuyait sur le dessus du mur de fondation. La dalle de la terrasse est encastrée dans l'immeuble et lorsqu'elle est soulevée par le mur de fondation le mouvement occasionne des contraintes à la structure de l'immeuble qui se traduisent par de la fissuration sur les revêtements intérieurs et extérieurs.
Le phénomène d'adhérence résulte du gel des sols au pourtour du mur de fondation. Nous avons prélevé un échantillon de sols au-dessus de la semelle de fondation et les résultats granulométriques sont présentés à l'annexe 6. Les résultats obtenues (sic) montrent que le sol est classé SM selon la classification unifiée c'est-à-dire susceptible de gonfler en présence de gel surtout lorsque saturé d'eau. Lors de nos travaux d'excavation les sols étaient saturés d'eau à partir de 30 po (75 cm) comme en témoigne (sic) les photos 11-13-14-17-18. Dans le cas présent l'architecte avait spécifié l'installation d'un drain au périmètre de l'immeuble ce qui n'a pas été réalisé par l'entrepreneur. La présence d'un drain aurait permis de rabattre la nappe d'eau pour empêcher la saturation des sols.
Nous reproduisons ci-dessous un second extrait numérisé tiré du Manuel canadien d'ingénierie des fondations (1994) traitant du phénomène de l'adhérence.
1988). Une bonne pratique est de remblayer les fondations avec un sol non susceptibles (sic) au gel. On doit permettre le drainage autour du périmètre de la fondation sous la profondeur maximale de pénétration du gel. Le remblai granulaire doit être surmonté d'un sol moins perméable et il faut prévoir un revêtement de surface pour détourner l'écoulement avant qu'il ne pénètre dans le remblai.
Il ressort que le remblayage au pourtour de l'immeuble est important comme le drainage. Lors de nos excavations pour la réalisation des sondages les sols étaient saturés d'eau et il n'y avait pas de drain de fondation. L'examen du rapport pré-réception indiquait que le terrain présentait une pente descendante qui éloigne l'eau du bâtiment et qu'il y avait des gouttières.
L'entrepreneur Gestion Immobilière Normandville inc. n'a pas respecté les plans qu'il avait soumis à la ville de Trois-Rivières sans en informer cette dernière.
- Le drain de fondation n'a pas été construit alors que le Code National (sic) du Bâtiment 1995 le spécifiait à l'article 9.14.2.1 (annexe 5) ainsi que la bonne pratique à l'égard du risque du phénomène d'adhérence :
- Les murs de fondation latéraux ont été allongés sans avoir consulté un ingénieur;
- Les dalles des terrasses ont été encastrées dans l'immeuble alors que les plans soumis à la Ville montraient clairement que les dalles devaient être juxtaposés (sic) (dalle flottante) à l'immeuble;
Nous sommes d'avis que si l'entrepreneur avait respecté les plans soumis et qu'il aurait remblayé avec un remblai granulaire non-gélif (sic) de type CG-14 (anciennement matériau granulaire CI A) les problèmes ne seraient pas survenus.
Des travaux doivent être entrepris sinon le bâtiment va se détériorer rapidement jusqu'à un point tel que les ouvertures (portes et fenêtres) permettant l'évacuation pourrait (sic) s'obstruer pendant l'hiver ce qui aurait un impact sur la sécurité des occupants. La structure de l'immeuble va se détériorer rapidement. Cela a déjà débuté.
[p. 14,15]
[6] Jacques Gagné a déclaré que ce secteur était connu pour avoir un sol susceptible de gonflement. Il a observé des trous d’hommes (manholes) surélevés près des résidences des Bénéficiaires. Concernant les travaux correctifs, il écrit :
Les travaux correctifs que nous recommandons sont simples :
- Mettre en application ce qui était prévu aux plans soumis à la Ville pour la demande de permis en incluant le remblayage du pourtour des murs de fondation avec un emprunt granulaire CG-14;
- Il est entendu que les fissures sur les parements intérieurs et extérieurs devront être réparés (sic) ainsi que les fissures sur les murs de fondation;
- Refaire le pavé uni de la terrasse arrière du #8071;
La liste des travaux présentés n’est pas exhaustive, d’autres travaux connexes sont à prévoir comme la démolition, la remise en état des lieux etc. Tous les travaux devront être réalisés conformément aux codes et règlements en vigueur. Nous vous recommandons de faire évaluer le coût des travaux et de retenir, le cas échéant, les services d’un entrepreneur spécialisé enregistré à la Régie du Bâtiment (sic) spécialisé dans le domaine.
[p. 16]
[7] Il précise que le drain de fondation doit être installé sur l’ensemble de l’immeuble parce que les mêmes problèmes pourraient survenir à nouveau au 8065. La dalle de la terrasse devrait être sciée plutôt que cassée.
[8] En contre-interrogatoire, le témoin déclare ne pas avoir observé de pente négative à l’arrière du terrain. Au sujet des gouttières et du stationnement, il maintient que la gestion des eaux de surface n’a eu aucun impact sur les problèmes du bâtiment. C’est la nappe d’eau libre dans le sol gonflant qui peut causer des dommages à la structure.
[9] Mme Danielle Lamy a témoigné qu’elle demeure au 8071, rue J.-A.-Vincent. Le 25 mars 2014, elle adressait un courriel à l’Entrepreneur dénonçant un problème de fissure au 8071. Le 21 juillet 2014, elle adressait une lettre à l’Entrepreneur par courrier recommandé, avec copie au syndicat et à l’APCHQ (A-5). Elle se plaint, notamment, des fissures à son logement. Elle a communiqué par téléphone, à plusieurs reprises, avec Mme Maria Rizzo, agente administrative à l’emploi de l’Administrateur. Elle raconte que celle-ci a ouvert deux dossiers, un pour la partie privative et un autre pour les parties communes. Un chèque de 100 $ aurait été exigé pour chacun des dossiers. Par la suite, elle nous explique qu’un seul dossier a été ouvert, soit celui concernant les parties communes, et que l’autre chèque lui a été retourné.
[10] Le tribunal constate que dans les avis de 15 jours (A-6) transmis par l’Administrateur, l’avis adressé à Mme Lamy est précédé de la mention suivante : « SDC 8065-8071, rue J.-A.-Vincent ». Quant à l’avis adressé à l’Entrepreneur, on y mentionne : « Bénéficiaire(s) : SDC 8065 à 8071, rue J.-A.-Vincent ». Des mentions semblables se retrouvent aux deux décisions de l’Administrateur (A-7, A-8).
[11] En commentant les photos, elle nous dit que les fissures se sont élargies depuis.
[12] Lors du contre-interrogatoire, elle reconnaît ne pas avoir signé les documents A-2 et A-3.
[13] Mme Carole Loranger a témoigné devant le tribunal. Elle demeure au 8067, rue J.-A.-Vincent. En février 2014, elle ne constate pas de fissure pour son unité. Elle considère que les fissures qu’elle a constatées plus tard sur le bâtiment dénaturent l’investissement qu’elle a fait pour un bâtiment neuf.
[14] En contre-interrogatoire, elle déclare ne pas avoir vu les plans ni avoir eu connaissance de l’existence d’un drain de fondation sur les plans.
La preuve de l’Entrepreneur
[15] M. Sébastien Thivierge, ingénieur, a témoigné à titre d’expert à l’aide de son rapport (E-2). Il est membre de son ordre professionnel depuis cinq années. Il est professeur au Cégep de Trois-Rivières depuis 2012. Il est difficile pour le tribunal d’être plus précis, car le C.V. de M. Thivierge contient plusieurs périodes qui se chevauchent tant comme technicien que comme ingénieur civil. Il en est de même pour ses emplois. Il aurait fait 20 inspections en matière de bâtiment et il aurait témoigné une ou deux fois à titre d’expert.
[16] Le rapport de M. Thivierge comporte seulement trois pages. Il semble porter que sur les correctifs à apporter au bâtiment plutôt que sur les causes des fissures. À la page 1, on peut lire :
Monsieur,
suite à votre demande, voici mes recommandations pour la réparation de la dalle-terrasse de l’unité situé au 8071 rue J.-A.-Vincent à Trois-Rivières.
Limitation
Les travaux correctifs recommandés sont basés sur le rapport d’expertise de l’expert Jacques Gagné daté de novembre 2015. Les recommandations proposées s’appuient sur les règles de pratique ainsi que sur les différentes normes et codes applicables. Aucun calcul n’a été nécessaire pour établir ces recommandations. Ces recommandations sont exclusives à l’unité 8071 faisant l’objet du rapport de M. Gagné.
[17] À la page 2, il est écrit :
Observations
Suite aux observations mentionnées dans le rapport de M. Jacques Gagné, il paraît clair que les dommages causés à la propriété sont dus au soulèvement différentiel des fondations et de la dalle de la terrasse. Le fait que cette dalle soit solidaire des équerres et qu'elle soit encastrée sous le mur extérieur du bâtiment a sans aucun doute occasionné des dommages à la structure (voir photo 15 du rapport de M. Gagné). Comme on le remarque dans le rapport de M. Gagné, les dommages observés aux fondations ne sont pas de même importance entre le sondage effectué au 8071 et celui au 8065. Ce point démontre que l'effet du gel semble beaucoup plus important du côté du 8071 en raison de la proximité du stationnement, qui une fois déneigé, augmente l'effet du gel sur les fondations. De plus, lorsqu'on observe la fissuration on remarque que les semelles ne sont pas fissurées. Ce point démontre que le soulèvement provient d'une adhérence entre le mur et le sol.
Bien qu'il n'est pas pratique courante d'installer des tuiles sur une dalle de béton, je suis aussi d'avis que, comme le stipule M. Gagné dans son analyse, le poids des tuiles n'a aucunement affecté les dommages observés sur le bâtiment. Le poids des tuiles aurait plutôt créé un affaissement à la structure plutôt qu'un soulèvement.
Pour ce qui est de la mention qu'aucun drain de fondation n'a été mis en place. Outre que celui-ci figurait aux plans, le code du bâtiment mentionne à l'article 9.14.2.1 : « Sauf s'il peut être démontré que cela n'est pas nécessaire, le pied des murs de fondation extérieurs doit être drainé au moyen de tuyaux... ». Selon des informations recueillies auprès de la ville de Trois-Rivières, en référence à la section 9.14 et 9.16 du CNB 1995, cette mesure n'est pas nécessaire puisque le bâtiment est muni d'une dalle sur sol supérieure au niveau du sol fini et il ne comporte pas de vide sanitaire au niveau de ses fondations.
Le soulèvement observé sur la partie de la dalle extérieure peut être expliqué par les matériaux de remblai, classés de type SM selon l'analyse granulométrique. Ce type de sol est sujet à un gonflement pouvant aller de faible à grand. Cependant, le manuel canadien d'ingénierie des fondations 2013 mentionne à l'article 13.5.1 que les semelles filantes possèdent généralement une capacité à l'arrachement suffisante pour résister aux forces de soulèvement. Par contre, les charges appliquées sur l'équerre étant moins élevées que celle des murs de fondation sous la charpente du bâtiment pourraient faire en sorte que cette partie a pu être soulevée par le gel, cisaillant le mur et ainsi causer des dommages.
Il paraît évident que les dommages occasionnés à la structure du bâtiment mentionné dans le rapport de M. Gagné doivent être corrigés et que des modifications doivent être réalisées pour éviter que ces dommages apparaissent à nouveau dans un avenir rapproché.
[nos soulignés]
[18] Contrairement à ce que l’Administrateur a écrit, M. Thivierge est d’accord avec l’expert Jacques Gagné que les tuiles n’ont pas pu causer les fissures, mais que celles-ci sont causées par un soulèvement.
[19] Il mentionne comme facteur ayant pu contribuer à la cause des problèmes, le gel de la criblure, le sol compacté et la proximité du stationnement en asphalte.
[20] À la page 3, au sujet des correctifs à apporter, il s’exprime comme suit :
Recommandations
- Démanteler les tuiles et les entreposer de façon à les réutiliser.
- Couper et démolir la dalle arrière le plus près possible du mur de fondation et disposer de tous les débris.
- Rendre étanche le joint entre la dalle et le mur de fondation.
- Démolir l'équerre jusqu'à la semelle et disposer des débris.
- Excaver le remblai sur le mur de côté et le mur arrière
- Réparation du coin de mur à la jonction de l'équerre pour rendre la surface plane et régulière.
- Sceller les fissures à l'aide d'un produit approprié de marque sika ou équivalent. (L'installation d'une membrane de type blueskin peut s'avérer nécessaire pour assurer l'étanchéité du mur vis-à-vis les fissures)
- Installer une membrane de type Platon de Armtec ou produit équivalent sur le mur de côté et arrière pour créer un plan de glissement entre le remblai et le mur en cas de gel allant jusqu'aux semelles.
- Installer un isolant rigide de 2 po à plat le long du mur de fondation de côté sur minimum de 2 pi de largeur positionné à 12 po sous le niveau du sol fini.
- Remblayer et réparer le pavage localement aux endroits où il a été nécessaire de le retirer pour effectuer les travaux.
- Reconstruction de la terrasse en tuile sur sol granulaire selon les exigences du fabricant. Je recommande que cette dalle soit reconstruite sur remblai sur sa surface totale pour empêcher les tassements différentiels entre la partie sur sol et la partie sur dalle qui étaient visibles lors des inspections.
- Gérer le drainage en s'assurant que l'eau provenant des gouttières s'éloigne le plus possible des fondations en s'évacuant sur le pavage plutôt que sous la terrasse. De plus il sera primordial que le terrassement permette de diriger l'eau de ruissellement le plus loin possible avec des pentes qui favorisent l'évacuation.
- Une fois ces travaux réalisés, réparer les dommages causés à l'esthétique du bâtiment.
[21] À l’audition, il précise qu’il recommande l’installation d’une membrane de type Platon, parce que la Ville n’a pas prévu de branchement pluvial pour le drain de fondation.
[22] M. Jean-François Corbeil témoigne à titre de représentant de l’Entrepreneur, il est seul actionnaire et administrateur de son entreprise. Il mentionne qu’il a construit de nombreuses résidences de divers types, comme du multilogement, des condominiums, des immeubles en rangées, etc.
[23] M. Corbeil explique en détail l’historique du projet. Nous reproduisons l’exposé de l’avocate de l’Entrepreneur, lequel reflète bien la preuve qui a été présentée à l’arbitre.
- La Ville est bien au fait qu’il n’y a pas de drain français au périmètre des bâtiments avec dalle sur le sol, (sic) construits par l’Entrepreneur et n’a jamais exigé de ce dernier que des modifications soient effectuées au plan;
- L’Entrepreneur a participé à la conception du plan directeur des infrastructures de la Ville, lequel inclut le plan de construction de l’Entrepreneur;
- Les infrastructures de la Ville, telles que conçues, ne permettent pas le raccordement de drain français à l’égout pluvial, dans les secteurs où des bâtiments avec dalle sur le sol (sans sous-sol) ont été construits;
- En aucun temps, la Ville a requis de l’Entrepreneur que des modifications soient apportées à ces bâtiments et aucun avis d’infraction n’a été émis à cet égard.[1]
[24] Il ajoute qu’avec ou sans sous-sol, il y a des drains de fondation sur les plans, lesquels font partie d’un « kit de plan de Dessins Drummond ». Il nous dit que c’est la première fois qu’il est aux prises avec un problème semblable.
[25] En contre-interrogatoire, il reconnaît ne pas avoir demandé à la Ville une approbation pour la modification au plan, soit l’absence de drain de fondation. Il explique que l’autorisation est implicite, parce que la Ville n’a pas demandé l’installation d’égout pluvial permettant d’y brancher le drain de fondation.
La preuve de l’Administrateur
[26] Mme Anne Delage, technologue en architecture, a témoigné relativement aux décisions qu’elle a rendues dans le présent dossier. Elle justifie le bien-fondé de sa décision de rejeter la réclamation des Bénéficiaires sur la base de plusieurs motifs, dont l’aménagement effectué par ces derniers et les gouttières sans rallonge.
[27] En contre-interrogatoire, elle reconnaît qu’elle ne savait pas s’il existait un drain de fondation sur les plans. Elle n’a pas non plus pesé les tuiles ou effectué des calculs sur la poussée de celles-ci.
Le droit
Les dispositions pertinentes du Règlement énoncent :
27. La garantie d’un plan dans le cas de manquement de l’entrepreneur à ses obligations légales ou contractuelles après la réception de la partie privative ou des parties communes doit couvrir:
[...]
5° la réparation des vices de conception, de construction ou de réalisation et des vices du sol, au sens de l’article 2118 du Code civil, qui apparaissent dans les 5 ans suivant la fin des travaux des parties communes ou, lorsqu’il n’y a pas de parties communes faisant partie du bâtiment, de la partie privative et dénoncés, par écrit, à l’entrepreneur et à l’administrateur dans un délai raisonnable de la découverte ou survenance du vice ou, en cas de vices ou de pertes graduelles, de leur première manifestation significative;
[...]
29. Sont exclus de la garantie:
[...]
3° les réparations rendues nécessaires par une faute du bénéficiaire tels l’entretien inadéquat, la mauvaise utilisation du bâtiment ainsi que celles qui résultent de suppressions, modifications ou ajouts réalisés par le bénéficiaire;
Analyse et motifs
[28] Plusieurs questions ont été soumises au tribunal.
Les questions
1 - La réclamation des Bénéficiaires est-elle visée par l’art. 27 par. 5 du Règlement?
2 - L’absence de drain de fondation constitue-t-elle la cause du vice?
3 - La dénonciation des Bénéficiaires a-t-elle été faite dans les délais?
4 - La demande d’arbitrage portant sur la condamnation en dommages est-elle bien fondée?
5 - Quels sont les correctifs appropriés?
1. La réclamation des Bénéficiaires est-elle visée par l’art. 27 par. 5 du Règlement?
[29] Les auteurs Jean-Louis Baudoin, Patrice Deslauriers et Benoît Moore s’expriment sur la notion de perte :
2-283 - Vice - La notion de perte est intimement liée à celle de vice, en ce que le défaut reproché doit être un défaut sérieux qui compromette la solidité de l’ouvrage et entraîne le risque de le voir s’écrouler, s’affaisser, s’effondrer ou tomber en tout ou en partie. Il n’est pas nécessaire que l’immeuble se soit effectivement complètement écroulé. Est suffisante une menace sérieuse et réelle d’effondrement, par exemple, lorsqu’il y a apparition de fissures ou de lézardes importantes, d’infiltrations d’eau, etc. Les tribunaux ont d’ailleurs parfois du mal à séparer ce type de vice, de celui, moins grave, indicateur de simples malfaçons, même si celles-ci peuvent entraîner un trouble de jouissance très sérieux pour le propriétaire.
2-284 - Extension - La jurisprudence a donné une interprétation large à la notion de perte en l’appréciant par rapport à la destination et à l’utilisation prospective de l’ouvrage. Constitue donc une perte, toute défectuosité grave qui entraîne un inconvénient sérieux et rend l’ouvrage impropre à sa destination. En d’autres termes, le défaut qui, en raison de sa gravité, limite substantiellement l’ouvrage entraîne une perte qui autorise la mise en œuvre du régime. D’après une décision rendue par la Cour supérieure, on ne doit pas confondre le concept de limitation ou perte d’usage envisagé dans le contexte de la responsabilité légale des constructeurs avec celui de perte de jouissance utilisé dans le domaine des assurances. Il y a donc une distinction à faire entre la perte du bien lui-même, telle qu’envisagée (sic) par le régime légal et la simple perte de jouissance de ce dernier. Ainsi, en sera-t-il de celui qui, ayant causé la perte de l’ouvrage, fait en sorte que ce dernier doive être reconstruit.
2-285 - Perte partielle - En cas de perte partielle, la jurisprudence, en pratique, se montre relativement sévère. Elle exige que celle-ci soit grave et sérieuse et refuse de considérer comme rentrant dans cette catégorie de simples dégradations mineures qui ne compromettent ni la solidité globale de l’ouvrage, ni la solidité d’une partie importance de celui-ci, ni son utilisation normale ou sa destination. Ainsi, une toiture qui coule et endommage sérieusement l’immeuble a été considérée comme provoquant une perte partielle. La charge de la preuve à laquelle le propriétaire doit faire face est donc plus importante.
2-286 - Moment d’appréciation - Enfin, le propriétaire n’est naturellement pas obligé d’attendre que la perte se produise effectivement pour intenter son recours. Il lui suffit, en effet, de démontrer que l’état de l’ouvrage permet de croire que celle-ci se produira dans l’avenir, si aucun remède n’est apporté.[2]
[nos soulignés]
[30] Dans l’affaire Habitations des Cônes c. Roy, 2013 QCCS 260, le juge Alain Michaud écrit :
1.1 La perte de l'ouvrage sous 2118 C.c.Q.
[21] Les désordres assujettis au mécanisme de l'article 2118 C.c.Q. sont ceux qui peuvent entraîner la perte de l'ouvrage : sont ici visées les dégradations significatives du bâtiment, susceptibles de menacer son intégrité ou d'affecter sa pérennité.
[22] Il s'agit ici de dangers sérieux, même s'il est admis que la notion de « perte », au sens de l'article 2118 C.c.Q., doit recevoir une interprétation large. Le danger de ruine peut être imminent ou latent, et la perte éventuelle peut n'être que partielle. La juge Monast, dans une situation présentant des similitudes avec la nôtre, citait les auteurs Rodrigue et Edward pour tracer la ligne entre les déficiences graves ou sérieuses (sous 2118 C.c.Q.) et celles pouvant être qualifiées de mineures (sous 2120 C.c.Q):
[151] Ainsi, pour que des déficiences soient qualifiées de «graves » ou «sérieuses» selon l'article 2118 C.c.Q. par opposition à des déficiences qui seraient qualifiées de «mineures» au sens de l'article 2120 C.c.Q., elles doivent avoir une certaine gravité et être susceptibles de mettre en péril la solidité ou la stabilité de l'immeuble:
«Pour se prévaloir de l'article 2118 C,c.Q., il n'est nécessaire d'établir ni le fait que l'ouvrage a péri ni le moment auquel il va s'écrouler. Il suffit de démontrer la présence des inconvénients ou d'un danger sérieux qui pourrait entraîner une perte de l'ouvrage, c'est-à-dire une perte potentielle. […]
La notion de «perte» au sens de l'article 2118 C.c.Q. doit donc, tout comme la notion analogue de ce terme au sens de l'article 1688 C.c.B.C. recevoir une interprétation large et s'étendre notamment à tout dommage sérieux subi par l'ouvrage immobilier.
Il est également possible que la simple perte de l'usage normal des lieux tombe sous le coup de cette disposition. De fait, certains tribunaux ont décidé, en vertu des règles de l'ancien Code, que la présence de troubles graves, nuisant à l'utilisation de l'immeuble, constituait une perte. La responsabilité quinquennale a notamment été retenue lorsque les vices empêchaient l'ouvrage de servir à sa destination normale ou limitaient, de manière importante, l'usage normal de l'ouvrage.
Une simple perte partielle est suffisante lorsqu'il y a menace d'effondrement ou de fléchissement de certaines parties de l'ouvrage ou encore de ses composantes essentielles.
En revanche, il est important de ne pas perdre de vue que le dommage subi, qu'il soit actuel ou à venir, doit être majeur afin d'être qualifié de perte. En particulier, la responsabilité prévue à l'article 2118 C.c.Q. ne trouve pas application à l'égard de simples malfaçons ou de vices de faible importance qui ne nuisent pas à la solidité ou à l'intégrité de l'ouvrage. […]»
[les soulignés sont de l’auteur]
[31] À la lumière des faits établis devant moi, je suis d’avis que le soulèvement du mur de fondation de près d’un pouce au-dessus de la semelle de fondation (photo 13 et 14 du rapport P-6), la présence d’infiltration d’eau importante à cet endroit, laquelle est susceptible de détériorer davantage la structure, et la présence de plusieurs fissures dans les murs de fondation (photos 11, 12, 17 et 18 du rapport P-6) me convainquent qu’un vice grave risque d’entraîner la perte partielle de l’immeuble ou son affaissement. Des fissures apparaissent aussi sur le revêtement de briques extérieur (photos 6, 7 et 8 du rapport P-6), de même qu’à l’intérieur (photos 2, 3, 4 et 5 du rapport P-6) jusqu’au plafond du premier étage. L’arbitre est d’opinion que tous ces éléments démontrent qu’il est probable que la structure du bâtiment soit sérieusement affectée.
[32] En somme, la probabilité de la perte partielle du bâtiment en empêchera l’usage sécuritaire pour ceux qui l’habitent. Il ne s’agit pas de simples malfaçons.
[33] Le tribunal partage l’avis de l’expert Jacques Gagné, ingénieur, le seul expert entendu devant moi qui a visité les lieux et procédé à des excavations et à des tests granulométriques, lequel s’exprime ainsi :
Des travaux doivent être entrepris sinon le bâtiment va se détériorer rapidement jusqu’à un point tel que les ouvertures (portes et fenêtres) permettant l’évacuation pourrait (sic) s’obstruer pendant l’hiver ce qui aurait un impact sur la sécurité des occupants. La structure de l’immeuble va se détériorer rapidement. Cela a déjà débuté.
[p-6, p. 15]
[34] Même si l’expert de l’Entrepreneur ne se prononce pas clairement sur les causes des fissures dans son rapport, il écrit :
Observations
Suite aux observations mentionnées dans le rapport de M. Jacques Gagné, il paraît clair que les dommages causés à la propriété sont dus au soulèvement différentiel des fondations et de la dalle de la terrasse. Le fait que cette dalle soit solidaire des équerres et qu’elle soit encastrée sous le mur extérieur du bâtiment a sans doute occasionné des dommages à la structure (voir photo 15 du rapport de M. Gagné).
[...]
Il paraît évident que les dommages occasionnés à la structure du bâtiment mentionné dans le rapport de M. Gagné doivent être corrigés et que des modifications doivent être réalisées pour éviter que ces dommages apparaissent à nouveau dans un avenir rapproché.[3]
[nos soulignés]
[35] La présente décision arbitrale doit être distinguée de celle rendue dans l’affaire SDC 1274 Gilford, Montréal c. 15 3642 Canada inc., 14 mars 2008, où seule l’enveloppe extérieure du bâtiment était en cause. Je crois qu’une preuve d’infiltration d’eau à l’intérieur de la partie habitée n’est pas essentielle pour démontrer un vice affectant sérieusement la structure du bâtiment. Les autres décisions arbitrales soumises au tribunal ne portent pas véritablement sur la structure de fondation du bâtiment.
2. L’absence de drain de fondation constitue-t-elle la cause du vice?
[36] L’arbitre juge que la preuve prépondérante démontre que l’absence de drain de fondation est la cause du soulèvement des murs de fondation et des fissures à l’immeuble. La présence importante d’eau en raison d’un matériel de remblai susceptible de se gonfler en présence de gel, lorsque saturé d’eau, a soulevé le mur de fondation d’une hauteur d’un pouce.[4]
[37] Le rapport d’expert de l’Entrepreneur ne contredit généralement pas celui de l’expert Gagné parce qu’il a pour objet principal d’émettre des recommandations quant aux correctifs à apporter.
[38] L’expert Thivierge comme les avocates de l’Entrepreneur et de l’Administrateur se fondent sur le passage suivant pour soutenir leurs prétentions :
Pour ce qui est de la mention qu’aucun drain de fondation n’a été mis en place. Outre que celui-ci figurait aux plans, le code du bâtiment mentionne à l’article 9.14.2.1 : « Sauf s’il peut être démontré que cela n’est pas nécessaire, le pied des murs de fondation extérieurs doit être drainé au moyen de tuyaux… ». Selon des informations recueillies auprès de la ville de Trois-Rivières, en référence à la section 9.14 et 9.16 du CNB 1995, cette mesure n’est pas nécessaire puisque le bâtiment est muni d’une dalle sur sol supérieure au niveau du sol fini et il ne comporte pas de vide sanitaire au niveau de ses fondations.[5]
[39] En premier lieu, je tiens à souligner que l’exception énoncée à l’art. 9.14.2.1 du Code de bâtiment 1995 est souligné par l’expert. Cette disposition indique clairement que des drains de fondation doivent être installés au pied des murs de fondation « sauf s’il peut être démontré que cela n’est pas nécessaire ».
[40] Il appartient donc à l’Entrepreneur en construction de décider si un drain de fondation est nécessaire au site d’emplacement du bâtiment. Le Règlement, d’ordre public, prévoit à son article 7 :
7. Un plan de garantie doit garantir l’exécution des obligations légales et contractuelles d’un entrepreneur dans la mesure et de la manière prévues par la présente section.
[41] Comme on l’a vu, l’art. 27 par. 5 couvre les vices de conception, de construction ou de réalisation. L’art. 29 prévoit des exclusions de la garantie, lesquelles ne contiennent pas les fautes commises par des représentants des municipalités ou des sous-traitants. Pourtant, une exclusion est prévue à l’art. 10 par. 3 pour la faute d’un bénéficiaire.
[42] Devant le tribunal d’arbitrage, l’Entrepreneur ne peut donc pas se soustraire aux responsabilités prévues au Règlement en soulevant la responsabilité de la Ville de Trois-Rivières. Si des recours peuvent être exercés par l’Entrepreneur, le cas échéant, ce sur quoi l’arbitre ne se prononce pas, ce ne sera pas devant l’arbitre. Les recours en garantie ne sont pas prévus au Règlement et son économie générale ne permet pas de tels recours, sans mettre en péril les objectifs d’efficacité, de diligence et de simplicité recherchés pour la protection des acheteurs.
[43] Rappelons que selon les résultats des tests granulométriques réalisés par un laboratoire indépendant, Exp., le sol est classé SM; susceptible de gonfler en présence de gel surtout lorsque saturé d’eau.[6]
[44] L’arbitre ayant déterminé la cause principale des fissures, l’Entrepreneur et l’Administrateur ont soulevé que les fautes des Bénéficiaires avaient contribué aux dommages. Ces derniers avaient le fardeau de la preuve de démontrer la faute des Bénéficiaires et l’exclusion qui s’y rattache (art. 2803 al. 2 C.c.Q.). Ils n’ont pu relever leur fardeau de la preuve à cet égard. La preuve est véritablement contradictoire concernant la présence ou non de prolongement de gouttière pour la gestion des eaux de surface. Il en est de même des pentes du terrain qui éloigneraient, ou non, les eaux de surface des fondations. Le dossier ne contient aucune mesure précise d’inclinaison des pentes, à l’aide d’appareil spécialisé ou même de façon empirique.
[45] L’expert Thivierge mentionne que la proximité du stationnement peut augmenter l’effet de gel sur les fondations sans plus de justification.
[46] Lors de l’audition, l’expert Thivierge a soulevé que la criblure sous les tuiles et la compaction du sol auraient pu contribuer au soulèvement des murs de fondation. L’arbitre souligne que cet expert n’a jamais visité les lieux. La photo 10 à la page 6, rapport P-6, démontre plutôt que les tuiles ne sont pas solidaires entre elles et suivent plutôt le mouvement du sol.
3. La dénonciation des Bénéficiaires a-t-elle été faite dans les délais?
[47] L’avis de fin des travaux des parties communes (A-2) est daté du 18 mai 2010. Le courriel de Danielle Lamy à l’Entrepreneur, dénonçant le problème des fissures, porte la date du 25 mars 2014 (A-4). La dénonciation a donc été faite à l’intérieur du délai de cinq années suivant la fin des travaux prévus à l’art. 27 par. 5 du Règlement.
[48] L’Entrepreneur, appuyé de l’Administrateur, plaide que la dénonciation n’est applicable que pour le 8071, soit l’unité appartenant à Mme Lamy. Dans sa plaidoirie écrite, on peut lire aux pages 14 et 15 :
Tel qu’indiqué au tout début de la présente, tant la dénonciation effectuée par le SDC et par Lamy, que les décisions rendues par Delage, ne font référence qu’à une problématique de fissures en lien avec l’unité 8071;
En aucun moment, le SDC ou le copropriétaire de l’unité 8065, ne dénonce une problématique relativement à cette unité.
L’Entrepreneur et l’Administrateur sont avisés, pour la première fois, d’une problématique relativement à l’unité 8065, par le dépôt du rapport de l’expert Gagné, en novembre 2015. Conséquemment, la découverte du vice affectant l’unité 8065 se situe à l’extérieur de la période de garantie de 5 ans, qui se terminait le 18 mai 2015, soit 5 ans suivant la fin des travaux des parties communes (pièce A-2).
[49] On doit garder à l’esprit que le bâtiment est une copropriété divise et que les murs de fondation, comme les murs extérieurs, sont des parties communes. L’art. 25 du Règlement se lit comme suit :
25. Pour l’application de la présente sous-section, à moins que le contexte n’indique un sens différent, on entend par:
[…]
«parties communes»: celles faisant partie du bâtiment et énumérées à l’acte constitutif de copropriété ou, en l’absence de dispositions spécifiques dans cet acte, celles énumérées à l’article 1044 du Code civil.
[50] Même si l’acte constitutif de copropriété n’est pas au dossier, l’art. 9 par. 2 de l’acte de vente (A-1) énonce :
2.2 PARTIES COMMUNES
ARTICLE 9. Sont parties communes toutes les parties qui ne sont pas parties privatives et notamment, sans limiter la généralité de ce qui précède et de ce qui suit, sont parties communes :
[…]
2o les fondations; la toiture; les murs extérieurs; les escaliers; le gros œuvre; les portes conduisant à l’extérieur d’une partie privative; les fenêtres, etc.;
[nos soulignés]
[51] L’art. 1044 du C.c.Q. parle également de « gros œuvre ». Quoi qu’il en soit, cet aspect précis n’est pas vraiment contesté par les parties.
[52] L’arbitre juge que l’on ne doit pas confondre l’objet de la dénonciation, les fissures au 8071 et l’ampleur, ou la portée des dommages. Les Bénéficiaires n’ont pas l’obligation d’informer l’Entrepreneur de la propagation totale du problème, alors que seul un expert procédant à deux excavations a été en mesure de connaître l’ampleur des fissures.
[53] Au surplus, soit quelques mois après sa lettre du 25 mars 2014 (A-4), le 21 juillet 2014, Mme Lamy informait l’Entrepreneur de « multiples fissures » (A-5, p. 1).
[54] Mme Lamy a témoigné avec précision devant le tribunal et elle a indiqué clairement que Mme Maria Rizzo, agente administrative à l’emploi de l’Administrateur, avait d’abord ouvert deux dossiers, un pour la partie privative et un pour les parties communes. Je reprendrai le passage suivant, reproduit dans la présente décision :
Un chèque de 100 $ aurait été exigé pour chacun des dossiers. Par la suite, elle nous explique qu’un seul dossier a été ouvert, soit celui concernant les parties communes, et que l’autre chèque lui a été retourné. Le tribunal constate que dans les avis de 15 jours (A-6) transmis par l’Administrateur, l’avis adressé à Mme Lamy est précédé de la mention suivante : « SDC 8065-8071, rue J.-A. Vincent ». Quant à l’avis adressé à l’Entrepreneur, on y mentionne : « Bénéficiaire(s) : SDC 8065 à 8071, rue J.-A. Vincent ». Des mentions semblables se retrouvent aux deux décisions de l’Administrateur (A-7, A-8).
[55] Mme Maria Rizzo n’est jamais venue devant le tribunal pour contredire les propos de Mme Lamy.
4. La demande d’arbitrage portant sur la condamnation en dommages est-elle bien fondée?
[56] Comme beaucoup d’autres arbitres avant moi, je crois que le Règlement ne me confère pas compétence pour accorder des dommages-intérêts. L’art. 7 prévoit que le plan de garantie doit garantir les obligations légales et contractuelles de l’Entrepreneur « dans la mesure et de la manière prévues par la présente section ». Pour les copropriétés divises, la garantie légale et contractuelle couvre le parachèvement des travaux, la réparation des malfaçons et des vices (art. 27). Elle ne comprend pas les dommages-intérêts. L’art. 29 par. 6 exclut expressément la responsabilité civile extracontractuelle. En conséquence, le Règlement est exhaustif au plan de la responsabilité contractuelle, légale et extracontractuelle. À la section III (art. 106 ss) du Règlement portant sur l’arbitrage, aucune disposition n’habilite l’arbitre à accorder des dommages.
[57] Dans la décision Alexis Waddel c. Les Constructions Jacques Laporte inc., on peut lire :
[53] Le Règlement sur le plan de garantie des bâtiments résidentiels neufs a été adopté pour assurer aux personnes qui conviennent de faire construire un bâtiment résidentiel neuf, une protection qui est prévue à sa section II, contenue de la garantie;
[54] Les articles 8 à 24 du règlement détaillent la couverture de la garantie pour les bâtiments résidentiels neufs non détenus en copropriété divise;
[55] Comme il appert des articles reproduits ci-avant, le règlement restreint la couverture de la garantie aux manquements de l'Entrepreneur à ses obligations légales ou contractuelles spécifiques à l'usage du bâtiment;
[56] L'esprit du règlement est d'assurer les bénéficiaires que leur résidence peut servir à les abriter et est construite selon des standards précis. Le règlement protège le parachèvement des travaux, les réparations des vices de constructions, malfaçons, vices cachés et vices de conception qui surviennent à des époques précises et déterminées;
[57] Rien dans le texte du règlement ou dans le contrat ne permet d'exercer un droit relatif à une réclamation pour dommages et intérêts de nature contractuelle ou extra contractuelle contre l'Entrepreneur;
[58] Cela s'explique par le fait que l'Administrateur du plan de garantie agit comme caution des obligations de l'Entrepreneur et qui assurent les bénéficiaires d'un bâtiment construit selon des standards établis et exempts de déficiences apparaissant dans des délais reconnus;
[59] Ainsi, en cas de réclamation monétaire pour une somme payée en trop pour une faute contractuelle ou extra contractuelle, les bénéficiaires doivent s'adresser aux tribunaux de droit commun de juridiction civile;[7]
[58] Une autre décision arbitrale nous apparaît pertinente :
Lors de l'audition, le tribunal a clairement établi le domaine d'application de la garantie, lequel exclus (sic) les questions de dépassement du coût des travaux, ce qui de surcroît n'a pas été contesté. Les demandeurs prétendent toutefois avoir droit à la réparation pécuniaire des dommages subis, cela en vertu de l'interprétation a contrario qu'ils font de l'article 6.7.6 du Plan, lequel est semblable à l'article 12 6° du Règlement. Le tribunal ne peut reconnaître ce droit puisqu'il est contraire tant à la lettre et à l'esprit du Plan et du Règlement qu'aux principes d'interprétation admis. La couverture de la garantie est précisée et limitée aux articles 6.4 et 6.6 du Plan. Les énumérations que contiennent ces articles doivent être interprétées limitativement et on ne saurait étendre le domaine de la garantie en interprétant librement et a contrario une autre énumération, celle des exclusions de la garantie données à l'article 6.7 du Plan. De plus, l'admission d'une réparation pécuniaire des dommages subis est contraire à l'esprit du Plan et du Règlement dont l'objet est, quant aux réparations, restreint aux réparations matérielles de vices de construction ou de malfaçons c'est-à-dire à l'exécution de travaux visant à corriger ces vices ou ces malfaçons. Obliger l'administrateur à des réparations pécuniaires serait lui imposer un fardeau difficilement quantifiable qui pourrait mettre en péril la solvabilité de l'administrateur, pourtant chère au législateur tel que nous l'avons précédemment rappelé. Dès lors, la réparation pécuniaire des dommages, si elle doit être prononcée, relève de la compétence du tribunal de droit commun et non pas du tribunal arbitral.[8]
[59] À titre subsidiaire, le tribunal juge que le présent dossier ne démontre pas d’abus dans la procédure ou dans le processus d’arbitrage de la part de l’Administrateur ou de l’Entrepreneur.
5. Quels sont les correctifs appropriés?
[60] Les experts divergent d’opinion concernant les correctifs à apporter. D’une part, les correctifs recommandés par l’expert Gagné, tant dans son témoignage que dans son rapport, sont très généraux. D’autre part, ceux de l’expert Thivierge sont plus précis, mais ils ne portent pas sur l’ensemble des quatre faces du bâtiment.
[61] L’arbitre privilégie les correctifs suggérés par l’expert Gagné, principalement, parce que la preuve révèle clairement que le type de sol est susceptible de gonflement par l’eau, pouvant former des lentilles de glace, lesquelles créent une pression vers le haut sur les murs de fondation.
[62] Je ne peux présumer que ce type de sol se retrouve seulement sur les côtés et à l’arrière du bâtiment. D’ailleurs, comme on l’a vu, le Code national du bâtiment ne recommande pas l’installation d’un drain de fondation sur certains côtés du bâtiment, mais sur l’ensemble de son pourtour. L’expert Gagné a confirmé, verbalement, que si le drain ne couvre pas tout le périmètre, le bâtiment pourrait bouger. Il a aussi recommandé le remplacement du remblai non gélif.
[63] L’arbitre est d’accord avec l’expert Thivierge quant à sa recommandation de démolir les « équerres » ou le prolongement des murs de fondation qui n’étaient pas dans les plans du bâtiment. En présence de lentilles de glace, celles-ci sont susceptibles de soulever les murs de fondation.
[64] Le présent dossier soulève un autre problème : le branchement d’un drain de fondation au réseau municipal n’est pas possible parce que la Ville n’a pas prévu ces infrastructures, en raison du type d’habitations qui ont été construites. L’expert Gagné recommande que l’eau des fondations soit acheminée à un bassin avec une pompe submersible. Aucune preuve n’a été présentée au tribunal quant à la conformité de cette solution aux règlements de la Ville de Trois-Rivières. L’arbitre n’est pas en mesure d’ordonner une liste exhaustive de correctifs précis. Il ordonnera quelques correctifs fondamentaux afin de diminuer le risque de litige futur. Pour le reste, il partage l’opinion des arbitres à l’effet que le choix des moyens d’exécution appartient, en principe, à l’entrepreneur.
[65] Dans l’affaire Carole Tremblay et al. c. Maison Laprise inc., l’arbitre écrit :
[42] L’article 2099 C.c.Q. prévoit :
« 2099 L’entrepreneur ou le prestataire de services a le libre choix des moyens d’exécution du contrat et il n’existe entre lui et le client aucun lien de subordination quant à son exécution. »
[43] Puisque l’Entrepreneur a le libre choix de ses moyens d’exécution, le Tribunal d’arbitrage considère que ce libre choix s’applique également lors des travaux de réparation.
[44] Il faut se rappeler que l’Entrepreneur a vis-à-vis son client une obligation de résultat. Cela signifie notamment qu’il doit livrer à son client un immeuble exempt de vices cachés ou de malfaçons. Dans la mesure où les réparations qu’il choisit de faire ne contreviennent d’aucune façon aux normes ou aux règles de l’art, l’Entrepreneur était justifié de corriger les dénivellations ou les différences de niveau à l’aide de ses travaux de finition.[9]
[66] Dans l’hypothèse où les Bénéficiaires seraient d’avis que les travaux de réparation ne seraient pas conformes aux règles de l’art, ils pourraient dénoncer la situation à l’Entrepreneur et à l’Administrateur afin qu’une nouvelle décision soit rendue.
[67] Enfin, en raison de la complexité du dossier, la contestation du compte d’honoraires de l’expert Gagné, par l’Entrepreneur, ne me convainc pas qu’il est exagéré.
POUR CES MOTIFS, LE TRIBUNAL D’ARBITRAGE :
[68] ACCUEILLE la demande d’arbitrage des Bénéficiaires;
[69] INFIRME la décision de l’Administrateur du 13 juillet 2015;
[70] ORDONNE à l’Entrepreneur d’exécuter tous les travaux nécessaires à la correction des fissures au mur de fondation selon les règles de l’art et, en particulier, en installant un drain de fondation au pourtour complet du bâtiment et en remplaçant le remblai par du matériel non gélif; à titre de subsidiaire, si cette conclusion ne pouvait être exécutoire en raison des règlements de la Ville de Trois-Rivières, exécuter tous les travaux nécessaires, selon les règles de l’art, pour corriger les problèmes de fissures au mur de fondation des Bénéficiaires;
[71] ORDONNE la démolition de l’équerre ou du prolongement des murs de fondation non mentionnés aux plans;
[72] ORDONNE la réparation des autres fissures intérieures et extérieures;
[73] COMDAME l’Administrateur à rembourser aux Bénéficiaires ses frais d’experts;
[74] RÉSERVE à Raymond Chabot administrateur provisoire inc. ès qualités d’administrateur provisoire du plan de garantie de la Garantie Abritat inc. ses droits à être indemnisée par l’Entrepreneur, pour tous les travaux, toute(s) action(s) et toute somme versée incluant les coûts exigibles pour l’arbitrage (par. 19 de l’annexe II du Règlement) en ses lieu et place, et ce, conformément à la Convention d’adhésion prévue à l’article 78 du Règlement;
[75] LE TOUT, avec les frais de l’arbitrage à la charge de Raymond Chabot administrateur provisoire inc. ès qualités d’administrateur provisoire du plan de garantie de la Garantie Abritat inc. conformément au Règlement sur le plan de garantie des bâtiments résidentiels neufs, avec les intérêts au taux légal, majorés de l’indemnité additionnelle prévue à l’article 1619 du Code civil du Québec à compter de la date de la facture émise par l’organisme d’arbitrage, après un délai de grâce de 30 jours.
Québec, le 22 juin 2017
____________________________________
Luc Chamberland, avocat
Arbitre / Centre canadien d'arbitrage commercial (CCAC)
[1]. Plaidoirie écrite de l’Entrepreneur, p. 8.
[2]. Jean-Louis Beadoin, Patrice Deslauriers et Benoît Moore, La responsabilité civile, 8e édition, Éditions Yvon Blais, p. 317 ss.
[3]. Rapport E-2, p. 2.
[4]. Rapport d’expert, Jacques Gagné, P.6, p. 14 ss.
[5]. Rapport d’expert, E-2, p. 2.
[6]. Rapport d’expert, P-6, p. 14 et annexe 6. Cette opinion semble aussi partagée par l’expert Thivierge (E-2, p. 3).
[7]. Alexis Waddel et al. c. Les Constructions Jacques Lapoint inc. et al., Jean Morissettte, 5 novembre 2009.
[8]. Isabelle Galibois et al. c. Gignac Construction inc., Jean Morin, 25 avril 2000. (Voir aussi Claudie St-Léger c. Les Constructions Marc Beaulieu inc., Reynald Poulin, 4 septembre 2013, André Lévesque c. Les Constructions du Sous-Bois inc., Claude Dupuis, 3 juin 2011, Gladys Escobedo et al. c. Habitations Beaux Lieux inc. et al., Roland-Yves Gagné, 18 novembre 2011).
[9]. Carol Tremblay et al. c. Monsieur Laprise inc., Jean Dallaire, 15 septembre 2011. Voir aussi Syndicat du 1902 Frontenac c. 9175-6924 inc. et al., Michel A. Jeanniot, 2 septembre 2009.