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ARBITRAGE EN VERTU DE LA GARANTIE DES MAISONS NEUVES DE L'APCHQ
Organisme d'arbitrage autorisé par la Régie du bâtiment : Le Groupe d'arbitrage et de médiation sur mesure (GAMM)
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ENTRE : |
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Gilles Chabot, ès qualité d'administrateur du syndicat de la copropriété du 339, 341, 343, rue Damien-Benoît à Mont-Saint-Hilaire |
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(ci-après le « bénéficiaire »)
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ET : |
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Placibel inc. |
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(ci-après l'« entrepreneur »)
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ET : |
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La Garantie des maisons neuves de l'APCHQ |
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(ci-après l'« administrateur »)
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Nos dossiers de La Garantie des maisons neuves de l'APCHQ : B-20485c, plainte 1 et B-20485c, plainte 2
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SENTENCE ARBITRALE
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Arbitre : |
M. Claude Dupuis, ing. |
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Pour le bénéficiaire : |
Me Jean-Rémi Thibault |
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Pour l'administrateur : |
Me Luc Séguin |
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Dates d’audience : |
26 et 27 janvier 2005 |
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Lieu d'audience : |
Mont-Saint-Hilaire |
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Date de la sentence : |
21 mars 2005 |
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[1] À la demande de l'arbitre, l'audience s'est tenue à la résidence de l'administrateur du syndicat de la copropriété, soit au 339, rue Damien-Benoît, à Mont - Saint‑Hilaire.
[2] L'entrepreneur, Placibel inc., n'était pas représenté lors de l'audience, cette corporation étant maintenant dissoute et radiée d'office depuis le 10 mai 2002.
[3] La déclaration de copropriété des trois unités de logement a été signée le 6 avril 1999. Toutefois, ces trois unités ont depuis été revendues (deux unités en 2002 et l'autre en 2003) à d'autres acquéreurs, soit les propriétaires actuels.
[4] Dans la présente affaire, les parties veulent traiter de deux plaintes émises par le syndicat, sous la désignation de plainte 1 et plainte 2.
[5] À la suite d'une demande de réclamation du bénéficiaire, l'administrateur, en date du 9 février 2004, a déposé un rapport d'inspection supplémentaire relativement à ce point.
[6] À la page 4 de ce rapport, l'administrateur conclut :
Dans le cas présent, nous sommes à même de constater que la date de publication de la déclaration de copropriété divise correspond au 8 avril 1999 alors que les infiltrations d'eau affectant l'unité 339 se seraient manifestées pour la première fois le 20 novembre 2003, soit après l'échéance de la garantie portant sur les malfaçons cachées. En conséquence, nous devons statuer sur la présente demande de réclamation dans le cadre de la garantie pour vices de construction (article 2.1.5 du certificat de garantie).
Or, nous sommes d'avis que cette nouvelle situation ne peut être considérée comme un vice de construction tel que défini au certificat de garantie. Par conséquent, La Garantie des immeubles résidentiels de l'APCHQ ne peut la considérer dans le cadre dudit certificat.
Étanchéité de l'enveloppe à l'arrière des panneaux électriques - unités 339 et 341
Détérioration de la fibre de verre des paliers, marches et balcons à l'arrière du bâtiment (champ)
[7] À la suite d'une demande de réclamation du bénéficiaire, l'administrateur a déposé un rapport de conciliation en date du 25 octobre 2004.
[8] Les réclamations à l'égard de certains points faisant au départ l'objet de la demande d'arbitrage ont été abandonnées par le bénéficiaire en cours d'enquête.
[9] Seules les décisions de ce rapport ayant trait aux trois points mentionnés en titre sont maintenant contestées.
[10] Il est à noter qu'en cours d'audience, la réclamation relative à la toiture a plutôt été traitée dans le cadre de la plainte 1 par les parties; c'est donc dans ce contexte que le tribunal rendra sa décision.
[11] En cours d'enquête, les parties ont déposé 34 pièces et ont fait entendre les témoins suivants :
B M. Gilles Chabot, administrateur du syndicat de la copropriété
B M. Rhéal Galarneau, inspecteur agréé en bâtiment
B M. Jocelyn Dubuc, conciliateur et directeur adjoint, Service d'inspection de l'APCHQ
B M. Rénald Cyr, conciliateur, APCHQ
[12] En 1999, il y a eu une première infiltration d'eau dans l'unité 343 (3e étage).
[13] À cette époque, l'administrateur a constaté que le revêtement de gypse du plafond de la cuisine avait été endommagé par l'eau; son représentant, après être monté sur le toit, a conclu que l'infiltration d'eau n'était pas attribuable à l'état de ce dernier; il a sommé l'entrepreneur d'effectuer les travaux correctifs qui s'imposaient.
[14] Ce dernier n'est intervenu qu'au printemps 2000; par la suite, l'administrateur n'a plus reçu aucune plainte de la part de la propriétaire de l'unité 343 à l'époque.
[15] La deuxième infiltration d'eau est apparue en octobre 2003, soit après l'acquisition par les nouveaux propriétaires.
[16] Cette infiltration, que l'on peut qualifier de majeure, persiste encore aujourd'hui, et ce, au niveau du mur latéral droit où se trouve la cheminée; elle affecte particulièrement les unités 339 et 341 (1er et 2e étages).
[17] En octobre 2003 donc, le syndicat fait part de cette nouvelle infiltration à l'administrateur et lui transmet par la même occasion un rapport d'inspection préparé par la firme Groupe Équipro, daté du 28 octobre 2000.
[18] L'administrateur procède à une inspection en janvier 2004, examine l'entretoit et conclut qu'il n'y a aucun lien entre la condition de ce dernier (1re infiltration en 1999) et l'infiltration actuelle. Il constate les dégâts causés par celle-ci et discute des mesures de conservation avec le bénéficiaire.
[19] Lors de cette inspection en janvier 2004, l'administrateur ne décèle aucune trace d'infiltration d'eau au 2e étage, ni au 3e étage.
[20] Selon M. Cyr, expert de l'administrateur, cette infiltration est causée par des solins (cheminée) non appropriés et par la porosité normale de la brique; il ajoute que l'étanchéité est garantie par le revêtement de papier (enveloppe) et non par le parement de maçonnerie. Ainsi, l'eau s'est infiltrée par les solins (cheminée) et a perforé le papier (enveloppe); ces perforations laissent maintenant pénétrer l'eau dans le mur intérieur.
[21] M. Cyr, considérant la date de la fin des travaux relatifs à la première infiltration et considérant l'article 2.1.7 du contrat de garantie, est d'avis qu'il s'agit d'une malfaçon pour laquelle la garantie a expiré en avril 2002.
[22] Toujours selon ce témoin, si la recommandation du rapport de l'expert (octobre 2000) mandaté par le bénéficiaire à l'époque avait été observée, la situation actuelle n'existerait pas.
[23] M. Cyr est aussi monté sur le toit en 2004 et a constaté que même si la pose du bardeau n'est pas conforme aux règles de l'art, cette malfaçon n'est pas cause d'infiltration d'eau. Toutefois, il est d'avis que le délai de dénonciation pour ce point est déraisonnable, cette situation étant soulignée dans le rapport d'Équipro en 2000.
[24] Interrogé à savoir quelle solution il préconise pour remédier à l'infiltration d'eau actuelle, M. Cyr recommande d'intervenir localement, près de la cheminée, soit retirer le parement de maçonnerie, remplacer l'« aspenite », l'enveloppe ainsi que les solins de manière à les rendre conformes aux normes, remplacer les colombages aux endroits requis, remplacer ou décontaminer les poutrelles noircies, réinstaller le tout tel qu'à l'origine (du 3e plancher ou du 2e plancher jusqu'en bas, selon le cas).
[25] Il estime le coût des travaux à 10 000 $ pour les murs et 1 500 $ pour la toiture.
[26] M. Gilles Chabot, actuel administrateur de la copropriété, nous informe qu'il n'y a pas eu d'inspection pré-achat avant le changement d'administration et que son prédécesseur ne l'a pas informé de l'existence du rapport d'expertise d'Équipro daté du 28 octobre 2000.
[27] Ce n'est que lors du transfert de documents en juin 2003 (il était propriétaire de son unité depuis juin 2002) qu'il a pris connaissance d'un chèque libellé à l'ordre d'Équipro, mais le rapport d'expertise était manquant, tout comme le certificat de garantie. M. Chabot a obtenu copie du rapport d'Équipro en septembre 2003.
[28] Suite à l'infiltration d'eau à l'automne 2003, les assureurs de la copropriété ont apporté les mesures de conservation nécessaires; ils ont fourni ventilateurs, déshumidificateurs et produits chimiques contre les bactéries.
[29] Les assureurs ont promis à M. Chabot de prendre charge des réparations intérieures à condition que la source d'infiltration soit éliminée.
[30] M. Chabot, selon son expression, a passé l'hiver 2003-2004 « sur la charpente », d'où utilisation de chaufferette d'appoint, grippe, grelottement, dommages, usure prématurée, etc.
[31] Le témoin est d'avis qu'il est incapable de vendre son unité dans un tel état.
[32] M. Rhéal Galarneau est l'auteur du rapport de la firme Équipro remis aux anciens propriétaires en 2000.
[33] Il a été appelé par le syndicat actuel à se prononcer à nouveau sur l'infiltration d'eau survenue à l'automne 2003.
[34] Il a inspecté les lieux et, après avoir pratiqué des ouvertures à l'intérieur, il a procédé à des tests d'eau en juin 2004.
[35] Il en conclut que l'infiltration s'effectue par les solins (cheminée) ainsi que l'ensemble des joints de mortier qui sont effrités et laissent passer l'eau. Dû au fait qu'elle est en contact avec le mortier, l'enveloppe est perforée et laisse pénétrer l'air et l'eau, causant ainsi des dommages à l'isolant et à l'ossature en bois, tels la moisissure. Vu l'état de pourriture avancé, il en déduit que l'infiltration perdure depuis un certain temps.
[36] D'ailleurs, dans son rapport de 2000, M. Galarneau avait noté ce qui suit :
4.5 Cheminée. ( voir photos # 70 & 71 )
- Les solins qui ont été ajoutés aux déflections de la cheminée près du 1ier et 2ième étage, leur mise en oeuvre est inadéquate et problématique en permettant de l'accumulation d'eau, de l'humudité constante et une imperméabilisation inadéquate car elle ne remplissent pas la fonction de rejet d'eau tel que requis. La longeur de vie du parement de brique sera fort probablement écourtée de plus de 50%.
[sic]
[37] M. Galarneau est d'avis qu'il y a aussi infiltration d'eau par la toiture; suite à sa visite des lieux, il a constaté que le toit comporte des anomalies. D'ailleurs, son rapport d'octobre 2000 indiquait que les bardeaux d'asphalte étaient fortement endommagés pour une propriété récente.
[38] Le témoin soumet toutefois que son rapport de 2000 ne constitue pas un rapport de déficiences de construction, mais plutôt de déficiences possibles ou probables. À cette époque, il n'y avait aucune manifestation d'infiltration d'eau.
[39] En résumé, l'expert du bénéficiaire attribue l'infiltration d'eau aux solins (cheminée), au mortier et à la toiture.
[40] Compte tenu de l'état actuel, M. Galarneau recommande de remplacer la brique de tout le bâtiment, de réparer la toiture selon les règles de l'art aux endroits où se trouvent les noues et de reprendre les solins autour des cheminées.
[41] Son estimation du coût des travaux est la suivante : entre 25 000 $ et 32 000 $ pour la pose de la brique, environ 2 500 $ pour la réparation de la toiture et environ 20 000 $ pour la réparation intérieure des trois étages.
[42] Lors de la visite des lieux le 27 janvier 2005, la boîte métallique de l'entrée électrique de l'unité 339, située à l'intérieur près du mur arrière, était très froide au toucher.
[43] Selon l'expert du bénéficiaire, il y a infiltration d'air en ces endroits pouvant favoriser la formation de glace ainsi que de condensation et causer des problèmes aux disjoncteurs; à son avis, il s'agit d'une situation non sécuritaire.
[44] La solution consisterait à colmater et repeindre, travaux estimés à environ 300 $.
[45] Techniquement parlant, l'expert de l'administrateur est sensiblement du même avis; toutefois, il fait remarquer que ce problème est apparu après l'échéance de la garantie, dont la durée est de cinq ans.
[46] La visite des lieux a permis de constater que les éléments de l'escalier arrière, à savoir les paliers, marches et balcons, comportaient des fissures importantes et disproportionnées par rapport à l'âge du bâtiment.
[47] En 2000, l'expert des bénéficiaires avait noté que la pente de ces éléments ne permettait pas d'évacuer l'eau de pluie.
[48] L'état des fissures n'a toutefois été constaté qu'en 2003; cette situation est à son avis potentiellement dangereuse à moyen terme.
[49] M. Galarneau ne peut déterminer si c'est une déficience au niveau de la fibre de verre (enveloppe) ou si c'est un taux trop élevé d'humidité dans le bois lors de la fabrication qui est à l'origine du problème.
[50] Selon le témoin, la garantie contre les défauts de fabrication de ces produits serait de l'ordre de cinq à dix ans, tandis que la durée de vie normale serait de l'ordre de quinze à vingt ans.
[51] M. Galarneau, qui a soulevé cette malfaçon dans son rapport du 7 juin 2004, affirme qu'il en avait discuté avec l'expert de l'administrateur en janvier 2004.
[52] L'expert de l'administrateur témoigne à l'effet qu'il ne peut accepter la réclamation à l'égard de ce point, la malfaçon ayant été dénoncée après l'expiration de la garantie (cinq ans); il précise toutefois que le remplacement total de l'escalier n'est pas nécessaire et qu'il suffit de remplacer les marches et paliers défectueux, pour un coût d'environ 5 000 $.
[53] Selon le témoin, il ne s'agit pas d'un vice de construction et, en septembre 2004, cet escalier ne présentait aucun indice de danger.
[54] D'entrée de jeu, le procureur cite l'article 2.1.5 du certificat de garantie :
2.1.5 L'APCHQ réparera au regard des parties communes, tout vice de construction visé par l'article 2118 du Code civil du Québec, apparu au cours des cinq (5) années suivant la date de publication de la déclaration de copropriété divise.
[55] Dans le présent dossier, la garantie se terminait le 8 avril 2004.
[56] La prétention du bénéficiaire relativement à l'infiltration d'eau est qu'il s'agit d'un vice de construction qui est apparu avant le 8 avril 2004 et qui a été dénoncé à l'administrateur par le procureur du bénéficiaire dans une lettre datée du 11 décembre 2003.
[57] Se référant à nouveau à l'article 2.1.5 du certificat, le procureur insiste sur les termes « apparu au cours des cinq (5) années... ».
[58] Citant l'article 2118 du Code civil du Québec, le procureur souligne que l'expression « perte de l'ouvrage » a été interprétée de façon large par les tribunaux, de sorte qu'il n'est point nécessaire que la bâtisse s'écroule.
[59] Dans le présent dossier, en ce qui concerne les unités portant les numéros 339 et 341, on constate aisément la diminution de l'utilité et les inconvénients, à savoir chaudière installée en permanence pour recueillir l'eau, infiltration d'eau continue, ossature affectée, pourriture et moisissure.
[60] Ces logements ne servent pas à l'usage normal auquel ils sont destinés; il ne s'agit sûrement pas d'une simple malfaçon comme le prétend l'administrateur, mais plutôt d'un vice de construction.
[61] L'expert de l'administrateur, M. Cyr, a d'ailleurs confirmé que cette construction ne rencontre pas les règles de l'art.
[62] L'infiltration d'eau continue va mener au dépérissement de l'immeuble.
[63] L'administrateur prétend que certains de ces éléments apparaissaient dans le rapport préparé par la firme Équipro en 2000; or, ce rapport ne comportait que des indications ou des mentions sur les déficiences, et les résultats n'étaient pas encore apparus selon le terme de l'article 2.1.5 du certificat.
[64] En 2000, on ne voit pas la perforation de l'enveloppe, on ne sait rien sur la perméabilité de la façade de brique; ceci n'apparaît qu'en 2004, lorsque l'on pratique des ouvertures dans les murs à l'intérieur.
[65] De fait, les inconvénients sont apparus en novembre 2003, et la dénonciation à l'administrateur a été faite le 11 décembre 2003, ce qui, dans les circonstances, constitue un délai raisonnable.
[66] Selon le procureur, l'article 4.1 g) du certificat (obligations de l'acheteur) ne s'applique pas aux parties communes; manifestement, les anciens administrateurs de la copropriété ont retenu le rapport d'Équipro d'octobre 2000.
[67] Relativement aux panneaux électriques, le procureur est d'avis que la situation constatée comporte un danger potentiel qui relève de la notion de vice de construction.
[68] En ce qui concerne l'escalier arrière, l'administrateur prétend que le bénéficiaire a fait sa dénonciation en juin 2004, alors que la garantie expirait en avril 2004. Or, il a été mis en preuve que cette situation avait été discutée avec M. Cyr, expert de l'administrateur, en janvier 2004.
[69] Comme il avait été convenu de procéder de façon différée en un seul document, le tout a été présenté dans un rapport d'Équipro en juin 2004, ce que l'on considérait comme une extension au délai.
[70] Le procureur demande à l'arbitre d'accueillir la réclamation du syndicat et d'ordonner que les réparations soient effectuées selon les recommandations de M. Galarneau.
[71] À l'appui de son argumentation, le procureur a déposé ce qui suit :
B Boudreau c. L'Association provinciale des constructeurs d'habitation du Québec, REJB 1999-14868 (C.Q.).
B Silo Supérieur (1993) inc. c. Ferme Kaech & Fils inc., REJB 2004-66409 (C.A.).
B André Coursol inc. c. De Gregorio et als, REJB 2002-27633 (C.A.).
B Gestion G.M. inc. et al. c. Construction Daniel Dumont & Fils inc. et als, REJB 1997‑00644 (C.A.).
B Ain & Zakuta Ltd. c. Immobilière Montagnaise Ltée, AZ-92012102 , 1992-10-30 (C.A.).
[72] Relativement au changement d'administration au niveau du syndicat de la copropriété, le procureur est d'avis que l'administrateur de la garantie ne peut être tenu responsable des omissions survenues.
[73] Le syndicat est une personne morale qui agit indépendamment de ses membres.
[74] Le procureur cite l'article 2.1.5 du certificat et indique que l'on n'y retrouve point l'expression « manifestation de dommages ».
[75] En ce qui a trait à l'infiltration, les dommages constatés en 2003 avaient été découverts en 2000.
[76] Le procureur est d'avis que cette situation constitue plutôt une malfaçon qu'un vice de construction, puisqu'elle ne porte pas atteinte à la solidité et qu'il n'y a pas perte de l'ouvrage; d'ailleurs, M. Cyr parle de réparation partielle isolée.
[77] Certes, il est ici question de préjudices et d'inconvénients, mais non pas de défauts suffisamment graves pour constituer un vice de construction.
[78] M. Galarneau recommande de réparer la toiture, de remplacer la brique au complet et d'intervenir dans l'entretoit; or, la réparation effectuée en 2000 a été jusqu'à date satisfaisante.
[79] Dans son rapport d'octobre 2000, M. Galarneau avait clairement identifié les problèmes de toiture et de maçonnerie et avait formulé des recommandations; pourtant, le syndicat n'y a pas donné suite.
[80] Il n'existe aucune preuve d'infiltration d'eau par la toiture; certes, il y a une malfaçon, mais elle ne cause pas d'infiltration.
[81] Dans le présent dossier, la garantie couvre les malfaçons cachées pour une période de deux ans.
[82] Si le tribunal en venait à la conclusion qu'il s'agit d'un vice de construction, il devra tenir compte que le syndicat connaissait ce vice depuis 2000 et qu'il ne l'a dénoncé qu'en octobre 2003, un délai qui n'est point raisonnable.
[83] L'entreprise Placibel inc. a été dissoute en mai 2002; si le syndicat avait agi dans un délai raisonnable, l'entrepreneur aurait pu à l'époque exécuter les travaux qui s'imposaient.
[84] En ce qui a trait aux panneaux électriques, il s'agit simplement d'une malfaçon n'affectant pas la solidité du bâtiment; or, le délai de dénonciation de deux ans est écoulé.
[85] Relativement aux composantes de l'escalier arrière, il s'agit ici d'une malfaçon cachée au sens de l'article 1.g) du certificat et non pas d'un vice de construction; par ailleurs, il n'existe aucune preuve que M. Cyr ait constaté quelque problème que ce soit concernant les marches en janvier 2004.
[86] À l'appui de son argumentation, le procureur a déposé ce qui suit :
B Jean-Louis BAUDOUIN et Patrice DESLAURIERS, La responsabilité civile, 5e éd., Cowansville, Les Éditions Yvon Blais inc., 1998, p. 963-965.
B Bosa-Chatigny c. Roberge (Soucy c. Bosa-Chatigny; Giguère c. Soucy), juges Bernier, Nichols et Fish, C.A. Québec 200-09-000466-879, 200-09-000446-879 et 200‑09-000445-871, 1990-03-22, AZ-90011503 , J.E. 90-680 , [1990] R.L. 1 .
B St-Jacques et Boffey c. Calisto et Feio et als, juge Paul Reeves, C.S. Longueuil 505‑05-000994-928, 1997-06-02.
[87] En accord avec le procureur de l'administrateur de la garantie, le soussigné est d'avis que ce dernier ne peut être pénalisé en raison du fait que des documents, en l'occurrence le rapport d'expertise de la firme Équipro daté du 28 octobre 2000, n'ont pas été transmis à l'actuel administrateur du syndicat de la copropriété par son prédécesseur.
[88] Ce syndicat est une personne morale qui agit en continuité et qui assume ses responsabilités de façon ininterrompue.
[89] Même si le certificat de garantie est muet au sujet du lien d'obligation entre les administrateurs successifs du syndicat de copropriété, les articles 1726 et suivants du Code civil du Québec trouvent application.
[90] À la suite de la visite des lieux et à la lumière de la preuve recueillie, le tribunal est d'avis que l'état actuel du bâtiment (tout particulièrement des unités 339 et 341) et les inconvénients qui en découlent, notamment infiltration d'eau continue, chaudière de récupération en plein salon, enveloppe perforée, moisissure, pourriture, ossature affectée (colombages et poutres), ne sont pas le résultat d'une malfaçon mais plutôt d'un vice de construction au sens du certificat de garantie et de l'article 2118 du Code civil du Québec.
[91] Il a été démontré de façon satisfaisante que cette situation peut à la longue entraîner une perte de l'ouvrage ou à tout le moins constituer une menace.
[92] La visite des lieux a permis de constater que ces inconvénients diminuent considérablement l'utilité de l'immeuble, de telle sorte que la notion même d'habitabilité est compromise.
[93] Le tribunal considère que dans un tel état, ces unités d'habitation ne peuvent trouver acheteur.
[94] Je cite les auteurs Baudouin et Deslauriers[1] :
1579 - Régime particulier - [...] Deux niveaux de responsabilité existent alors. Ou bien le défaut de construction est sérieux et risque de mettre en péril l'existence même de l'immeuble et ce sont alors les règles des articles 2118 et s. C.c. qui s'appliquent; ou bien l'inexécution des obligations du constructeur est peu grave, même si elle cause préjudice au maître de l'ouvrage, en compromettant la bonne et libre jouissance de son bien, mais non sa solidité. C'est alors le régime de la responsabilité pour malfaçons qui règle la contestation.
[95] La visite des lieux ainsi que la preuve recueillie ont convaincu le tribunal que le défaut de construction est sérieux et comporte des risques de détérioration de la structure de l'immeuble.
[96] La visite a aussi démontré que dans l'ensemble de l'habitation, le constructeur n'a pas exécuté ses obligations conformément aux règles de l'art; que l'on songe à cette infiltration d'eau, à l'état de la toiture, des composantes de l'escalier arrière, de l'entrée électrique, etc.
[97] En résumé, il s'agit ici d'un vice de construction grave, car les inconvénients qui en résultent peuvent entraîner une détérioration progressive.
[98] Voici un extrait d'un jugement de la Cour d'appel dans l'affaire Ain & Zakuta Ltd. c. Immobilière Montagnaise Ltée[2] :
La portée de l'article 1688 C.c.B.C. a évolué et la jurisprudence la plus récente de la Cour est à l'effet que si le vice de construction porte sur un élément important du bâtiment au point d'en affecter la solidité ou l'utilité, il y a ruine partielle (Viking Fire Protection Ltd. c. Zurich Compagnie d'assurance et Construction J.R.L. (1977) Ltée, 200-09-000284-866, 29 avril 1991). Or, c'est exactement ce que le jugement entrepris affirme:(14)
Ces infiltrations périodiques d'eau par la toiture, plus abondamment en novembre et février, avaient pour effet de mettre en péril, du moins partiellement l'immeuble;
Le Tribunal estime qu'un état de fait qui empêche l'usage normal d'un ou de partie d'un immeuble, qui tend à ruiner un plafond, à le faire se désagréger, qui rend l'isolation inefficace, constitue une détérioration progressive d'un immeuble pouvant mener à sa ruine partielle aux termes de l'article 1688 C.C;
[...]
14 M.a., p. 90.
[99] Je reproduis à nouveau l'article 2.1.5 du certificat de garantie :
2.1.5 L'APCHQ réparera au regard des parties communes, tout vice de construction visé par l'article 2118 du Code civil du Québec, apparu au cours des cinq (5) années suivant la date de publication de la déclaration de copropriété divise.
[100] Je m'attarderai ci-après sur le terme « apparu ».
[101] Le procureur de l'administrateur de la garantie soutient que les dommages causés en 2003 ont été découverts par le syndicat en 2000 par le biais du rapport d'expertise du 28 octobre 2000 de la firme Équipro.
[102] En tout respect pour cette opinion, le tribunal estime que les recommandations du rapport d'Équipro en 2000 ne constituent pas la preuve de l'apparition du vice de construction au sens de l'article 2.1.5.
[103] Selon le dictionnaire Larousse, « apparaître » signifie « se montrer, devenir visible »; or, ce vice de construction n'a été visible qu'en octobre 2003.
[104] En accord avec le procureur du bénéficiaire, le soussigné est d'avis que le rapport d'Équipro de 2000 renferme plutôt des indications ou des mentions; il peut être considéré comme une preuve de probabilité, bien qu'un autre expert aurait pu arriver à des conclusions opposées.
[105] La preuve en est que M. Galarneau de la firme Équipro était et est d'avis que l'état de la toiture constituait en 2000 une source d'infiltration d'eau; or, l'expert de l'administrateur, M. Cyr, est d'avis contraire, et, à ce jour, il faut lui donner raison.
[106] Or, les dommages survenus en 2003 ne peuvent être contestés. Comme ils sont apparus en octobre 2003 et qu'ils ont été dénoncés le 11 décembre 2003, le tribunal considère que la dénonciation a été faite dans un délai raisonnable.
[107] Puisque la garantie du certificat expirait le 8 avril 2004, elle était donc encore en vigueur à cette époque.
[108] Dans l'hypothèse contraire où le vice serait souligné par l'entremise du rapport d'Équipro du 28 octobre 2000, notons que l'article 2.1.5 du certificat ci-devant cité ne prévoit aucun délai de dénonciation, laissant ainsi croire à l'acheteur qu'il pourra procéder à la dénonciation au moment où il verra les manifestations.
[109] Vu qu'il s'agit ici d'un vice de construction, la période de garantie se termine en 2004, alors que le vice est apparu ou que la dénonciation a été faite en 2003.
[110] Les opinions quant à la nature et l'ampleur des remèdes à apporter pour contrer l'infiltration d'eau diffèrent beaucoup d'un expert à l'autre.
[111] M. Cyr, expert de l'administrateur, préconise une intervention locale au niveau du mur extérieur, incluant les solins; sa méthodologie a été précédemment décrite.
[112] M. Galarneau, expert du bénéficiaire, préconise pour sa part une intervention globale, soit le remplacement de toutes les briques, le remplacement des solins et la réparation de la toiture.
[113] Il n'a pas été prouvé au tribunal de façon convaincante que la toiture constituait une des sources de l'infiltration d'eau. Les réparations fructueuses faites au 3e étage au cours de l'année 2000 me portent à conclure que le toit n'est pas en cause.
[114] Toutefois, il a été mis en preuve que le toit comporte des défectuosités qui, même si elles ne sont point une cause d'infiltration d'eau, constituent à mon avis une malfaçon. Or, cette malfaçon a clairement été indiquée dans le rapport de la firme Équipro préparé en octobre 2000; ces anomalies étaient donc visibles à cette époque, et les administrateurs du syndicat, qui ont reçu ce rapport d'expertise, étaient au fait de la situation.
[115] Le délai de dénonciation (28 octobre 2000 - octobre 2003) de la malfaçon à la toiture est manifestement déraisonnable.
[116] La responsabilité de l'exécution des travaux selon les règles de l'art appartient à l'entrepreneur; conséquemment, la méthodologie d'exécution lui appartient également.
[117] Dans le présent dossier, compte tenu que la corporation de l'entrepreneur a été dissoute, cette responsabilité est transférée à l'administrateur.
[118] Pour les motifs ci-devant énoncés, le tribunal ordonne donc à l'administrateur d'effectuer les travaux nécessaires afin d'éliminer l'infiltration d'eau dans le bâtiment, selon les règles de l'art et selon la méthodologie qu'il préconise, et de remettre les murs dans leur état d'origine.
[119] Pour le moment, la réclamation relative à la toiture est refusée; cependant, si lors des travaux ou ultérieurement (à l'intérieur des paramètres de la garantie), il s'avérait que la toiture est une cause d'infiltration d'eau, la présente ordonnance s'appliquera aussi à cet élément.
[120] Ces travaux devront être complétés d'ici la fin du mois d'août 2005.
Toiture
[121] La réclamation relative à la toiture a été traitée dans la décision du tribunal concernant la plainte 1 ci-devant.
[122] À la suite de la visite des lieux, le tribunal considère qu'il s'agit d'une malfaçon cachée n'affectant pas la solidité du bâtiment.
[123] À mon avis, ce problème d'étanchéité n'affectera pas à la longue les disjoncteurs, pas plus qu'il ne les a affectés au cours des cinq dernières années et demie.
[124] Or, la garantie relative aux malfaçons cachées originant des parties communes a pris fin en avril 2001 (article 2.1.4 du certificat de garantie).
[125] Pour ces motifs, la réclamation ayant trait à ce point est rejetée.
[126] Le tribunal rappelle que les experts des deux parties s'entendent à l'effet que la réparation de cette malfaçon ne requiert qu'une intervention mineure, dont les coûts sont de l'ordre de 300 $.
[127] Le soussigné a constaté l'état actuel des paliers, marches et balcons; la fibre de verre enveloppant le bois de ces éléments présente d'importantes fissures et l'aspect est dégueulasse.
[128] Toutefois, il s'agit d'une malfaçon cachée découlant d'un défaut de fabrication, qui n'est point de nature à affecter la solidité de l'édifice au sens de l'article 2118 du Code civil du Québec.
[129] Non seulement la structure de l'édifice n'est pas affectée, celle de l'escalier ne l'est pas davantage.
[130] Le tribunal rappelle qu'il ne faut pas confondre la garantie du manufacturier (cinq ans) et la garantie des maisons neuves de l'APCHQ relativement aux malfaçons cachées (deux ans).
[131] Pour ces motifs, la réclamation ayant trait à ce point est rejetée.
[132] En ce qui concerne la plainte 1, pour les motifs ci-devant énoncés, le tribunal
ACCUEILLE favorablement la réclamation du bénéficiaire relativement à l'infiltration d'eau; la méthodologie d'intervention sera celle préconisée par l'administrateur de la garantie.
[133] Pour ce qui est de la plainte 2, pour les motifs ci-devant énoncés, le tribunal
REJETTE sous réserve la réclamation concernant la toiture en vertu de son ordonnance relativement à l'infiltration d'eau (plainte 1); et
REJETTE la réclamation relative à l'étanchéité de l'enveloppe à l'arrière des panneaux électriques - unités 339 et 341; et
REJETTE la réclamation ayant trait à la détérioration de la fibre de verre des paliers, marches et balcons à l'arrière du bâtiment (champ).
[134] En cours d'enquête, il a été convenu que les coûts du présent arbitrage seraient à la charge de l'administrateur de la garantie.
BELOEIL, le 21 mars 2005.
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__________________________________ Claude Dupuis, ing., arbitre [CaQ] |