Gabarit OA

 

 

 

 

ARBITRAGE

En vertu du Règlement sur le plan de garantie
des bâtiments résidentiels neufs

(Décret 841-98 du 17 juin 1998)

 

CANADA

PROVINCE DE QUÉBEC

 

Groupe d’arbitrage et de médiation sur mesure (GAMM)

Dossier no :

 

GAMM

2012-13-001

APCHQ

60415-4147

 

Date :

5 août 2013

______________________________________________________________________

 

DEVANT L’ARBITRE :

JEAN MORISSETTE

______________________________________________________________________

 

KHARDIATA DIALLO

Bénéficiaire

c.

4176855 CANADA INC.

Entrepreneur

Et

LA GARANTIE DES HABITATION DU QUÉBEC INC.

Administrateur

 

______________________________________________________________________

 

SENTENCE ARBITRALE

______________________________________________________________________

 

 

 

[1]       Il s’agit d’une demande d’arbitrage du 9 février 2012 concernant la décision rendue par l’Administrateur du Plan de garantie des bâtiments résidentiels neufs. Cette affaire a fait l’objet de quatre (4) conférences de gestion et de la remise d’une première séance d’audition;

PRÉLIMINAIRES

[2]       Les parties ont admis et convenu de ma nomination et juridiction à rendre une décision sur les questions soulevées par la Bénéficiaire. Elles ont aussi accepté que ma décision soit rendue plus de 30 jours suivant la fin de l’audience si cela s’avérait le cas;

[3]       Aucune requête préliminaire n’a été présentée. Le cahier de pièces émis par l’Administrateur et communiqué aux parties est déposé de consentement, (pièces A-1 à A-5) sujet de la preuve contradictoire qui sera présentée;

[4]       Les témoins ont été assermentés avant d’être entendus;

[5]       Les points 2, 3 et 4 de la décision du 8 décembre 2011 rendue par monsieur Michel Labelle, en cause dans le présent arbitrage, sont décrits de la façon suivante :

[a]       Point 2 : sous-sol, infiltration d’eau survenue le 24 juin 2011;

[b]       Point 3 : salle de bain à l’étage;

[c]        Point 4 : chambre principale : porte

 

CONSTATATIONS

[6]       Les constatations que les parties m’ont invité à effectuer lors de ma visite du […], Gatineau se décrivent ainsi :

[a]       Les pentes des terrains avoisinants et des lieux dirigent l’eau vers la maison;

[b]       Terrain très humide à plusieurs endroits, sur une bonne superficie;

[c]        Il existe deux (2) ouvertures dans le solage;

[d]       Le niveau du sol est à la mi-hauteur des fenêtres;

[e]       Présence de margelles à chacune des fenêtres;

[f]         Le niveau des terrains voisins est plus élevé;

[g]       Les gouttières de la maison voisine sont dirigées vers le terrain de la Bénéficiaire et s’y écoulent;

[h]        La ligne du crépi se trouve à quelques centimètres au-dessus du sol;

[i]         La gouttière arrière dirige l’eau de la toiture vers l’arrière-fond du terrain, alors que le niveau du terrain accuse une pente vers la maison;

[j]         La porte de chambre des maîtres est serrée dans son cadre et ne se ferme plus;

[k]        Les cassures dans les carreaux de tuile derrière la toilette et les marques d’eau/humidité sur le mur à quelques pouces du plancher;

[l]         Le taux d’humidité à l’étage est de 61 % et la température est de 27.5oC;

[m]      Lors de l’infiltration d’eau du 24 juin 2011, l’eau se trouvait sur le plancher au sous-sol, vers l’arrière;

[n]         La fissure dans le solage dans le mur arrière, a été réparée, par l’intérieur, à   l’aide de colle à l’époxy;

[o]       À l’intérieur, aucune marque d’eau autour des fenêtres;

 

LA PREUVE

[7]       Suivant une discussion sur les moyens de preuve et leurs présentations, le rapport d’événement météorologique significatif des 23 et 24 juin 2011 en Outaouais d’Environnement Canada, communiqué par le procureur de l’Administrateur par courriel du 20 juin 2013 aux autres parties, est produit et déposé de consentement, pièce A-6;

[8]       Le rapport de Groupe Conseil EXIGE Inc. du 11 janvier 2013 préparé par l’ingénieur Michel Saumure, communiqué aux autres parties, est produit et déposé sous la cote B-1;

[9]       Monsieur Michel Saumure est reconnu comme ingénieur-expert pour les fins de l’audition;

 

LES TÉMOIGNAGES

 

[10]    La Bénéficiaire a pris possession de sa résidence le 20 août 2009;

[11]    Le courriel du 28 juin 2010 de madame Diallo à l’Entrepreneur fait état du niveau du terrain, pièce B-2. Le point 1 de ce courriel se lit ainsi :

‘’Point 1 : Je suis au […] et mon terrain se trouve à un niveau très bas par rapport à celui de mon voisin de gauche (ouest) et d’en arrière (sud). Je m’inquiète de cette situation, car s’il y a des déversements d’eau ou autre chose, tout va descendre sur mon terrain. J’aimerais savoir ce que Boulet compte faire pour pallier à cette situation, s’il prévoit faire un muret ou autre chose.

…’’ (les soulignés du soussigné)

Ce courriel n’est pas transmis à l’Administrateur;

[12]    Les travaux de construction des maisons voisines de la sienne se poursuivaient. Elle a cru que l’Entrepreneur s’occuperait de la situation des niveaux de terrains plus élevés sans avoir à faire connaître spécifiquement à l’Administrateur, ce qu’elle soulève dans son courriel;

[13]    Il n’y a pas eu de réponse au courriel du 28 juin 2010 et malgré l’absence de réponse, elle n’y a pas donné de suite car l’Entrepreneur exécutait des travaux dans le quartier;

[14]    La dénonciation à l’Administrateur sera reçue le 8 août 2011, pièce A-3. La lettre du 4 juillet 2011 adressée par courrier recommandé à l’Entrepreneur, reçue le 8 août 2011 selon le cachet apposé sur la copie de la lettre par l’Administrateur, dénonce un désordre de la façon suivante :

                        ‘’ Monsieur,

                         À la suite des pluies abondantes du 24 juin dernier, j’ai eu une infiltration d’eau au sous-sol de ma résidence située au […], à Gatineau (Québec). Cela a occasionné une inondation et des dégâts, et la cause reste toujours inconnue.

                        …’’ (le souligné du soussigné)

 

[15]    La Bénéficiaire soutient qu’elle a mentionné à monsieur Labelle la situation et possibles problèmes relatifs au niveau des terrains lors de son inspection du 10 novembre 2011. Elle a aussi mentionné l’existence du regroupement du voisinage des rues […] et […] dont le fondement relève d’une difficulté et carence de drainage du quartier;

[16]    Madame Diallo reconnaît ne pas avoir dénoncé à l’Administrateur les désordres en regard des points de la salle de bain (point 3) et de la porte de chambre des maîtres (point 4). Elle croyait que la dénonciation aux services après-vente de l’Entrepreneur serait suffisante;

[17]    Elle reconnaît les pluies diluviennes survenues les 23 et 24 juin 2011 au moment de l’infiltration d’eau dans le sous-sol de sa maison;

[18]    Elle n’a fait aucuns travaux de terrassement et a fait effectuer la pose des gouttières;

[19]    Auparavant, il y avait un déshumidificateur dans la maison qui n’a pas été remplacé après son bris;

[20]    Les cassures des carreaux ont été constatées après la fuite d’eau provenant de la toilette;

[21]    En contre-interrogatoire, madame Diallo admettra que l’avis de dénonciation du 4 juillet 2011 mentionne spécifiquement que la cause de l’inondation est inconnue et que les pluies des 23 et 24 juin 2011 étaient exceptionnelles;

 

 

 

 

[22]    Le mandat de l’expert-ingénieur, Michel Saumure, est de déterminer les causes possibles de l’infiltration d’eau du 24 juin 2011. Il décrit ce mandat de la façon suivante dans les premières lignes de ses conclusions :

‘’Nous avons été mandatés pour examiner le problème d’écoulement d’eau de surface du […] à Gatineau. … ‘’

[23]    L’ingénieur-expert confirme aussi les pluies diluviennes des 23 et 24 juin 2011. Il mentionne que plusieurs sous-sols de maison, dont le sien, ont été sujets d’inondation à ces dates sur la région de l’Outaouais;

[24]    Malgré cet évènement fortuit, il est d’opinion que le désordre constaté est couvert par le plan de garantie en vertu du 5ème paragraphe de l’article 10 du Règlement sur le plan de garantie des bâtiments résidentiels neufs (L.R.Q. c. B-1.1, r. 8), ci-après appelé : ‘’le Règlement’’.  Au paragraphe 5 de l’article 10 du Règlement, il y est fait référence à l’article 2118 du Code civil du Québec.  Il maintient que l’article 979 du Code civil du Québec s’applique en instance. Le texte de ces articles est ici reproduit:

« 979. Les fonds inférieurs sont assujettis, envers ceux qui sont plus élevés, à recevoir les eaux qui en découlent naturellement.

 

Le propriétaire du fonds inférieur ne peut élever aucun ouvrage qui empêche cet écoulement. Celui du fonds supérieur ne peut aggraver la situation du fonds inférieur; il n'est pas présumé le faire s'il effectue des travaux pour conduire plus commodément les eaux à leur pente naturelle ou si, son fonds étant voué à l'agriculture, il exécute des travaux de drainage. 

 

2118. À moins qu'ils ne puissent se dégager de leur responsabilité, l'entrepreneur, l'architecte et l'ingénieur qui ont, selon le cas, dirigé ou surveillé les travaux, et le sous-entrepreneur pour les travaux qu'il a exécutés, sont solidairement tenus de la perte de l'ouvrage qui survient dans les cinq ans qui suivent la fin des travaux, que la perte résulte d'un vice de conception, de construction ou de réalisation de l'ouvrage, ou, encore, d'un vice du sol.»

 

[25]    Les conclusions de son rapport sont à l’effet que l’aménagement effectué par l’Entrepreneur contrevient aux articles 9.14.6.1 du Code de la construction du Québec et 9.14.6.1 du Code national du bâtiment du Canada, car rien n’évite l’accumulation d’eau à proximité de la maison;

[26]    Selon cet expert, l’Entrepreneur qui a construit tout le secteur n’a pas conçu de travaux qui corrigent l’aggravation de l’écoulement naturel des eaux de surface;

[27]    La question de savoir si l’inondation est causée par les pentes de terrains ou les pluies diluviennes, ne fait pas partie de son mandat. La présence d’une fissure dans le solage n’est pas considérée dans son rapport comme source de la présence d’eau au sous-sol;

[28]    Son mandat était de vérifier la topographie du secteur et il explique son analyse en vertu des critères de l’article 979 du Code civil du Québec;

[29]    Selon lui, le problème découle d’une carence dans la gestion des eaux de surface des propriétés avoisinantes. Cet expert nous mentionne que 40 % des eaux  percolent alors que 60 % restent en surface. Ces eaux de surface doivent être gérées par l’Entrepreneur qui agit selon les règles de l’art;

[30]    On ne parle pas d’un système de drainage, mais de pente de terrain qui amène l’eau à un endroit plutôt que guider l’eau vers un point autre que la maison de la Bénéficiaire. Le drainage des terrains est déficient et des travaux doivent être effectués pour éloigner l’eau de la maison et du terrain en cause;

[31]    Ses recommandations consistent à exécuter des ouvrages pour éloigner l’eau de surface de la maison et gérer les eaux provenant des terrains de niveau supérieur de manière à libérer le terrain du […] de ces eaux;

[32]    L’expert conclura son témoignage en mentionnant que selon lui, une personne qui n’a pas de connaissance en construction ne verrait pas comme un problème apparent la topographie des lieux;

[33]    L’Entrepreneur ne fait pas de preuve;

[34]    Monsieur Michel Labelle mentionne qu’il n’a aucun souvenir que la Bénéficiaire lui ait fait part de son courriel du 28 juin 2010, pièce B-2, lors de son inspection du 10 novembre 2011. Sa visite ne concernait que la cause de l’inondation des 23 et 24 juin 2011 comme dénoncée dans l’avis de dénonciation reçu le 8 août 2011, pièce A-3;

[35]    Selon lui, les descentes pluviales font partie du système de drainage des eaux qui ne sont pas de la responsabilité de l’Entrepreneur puisque ces gouttières sont installées par la Bénéficiaire;

[36]    Il souligne aussi que les descentes pluviales de la maison voisine sont dirigées vers le terrain de la Bénéficiaire.  Ses vérifications et l’absence d’infiltration depuis juin 2010 montrent bien qu’il n’y a pas de désordre;

[37]    Son enquête et sa connaissance du développement résidentiel dans lequel se trouve la maison sujette de l’arbitrage, lui permet de témoigner du fait que la conception du drainage requise par la Ville de Gatineau est conforme aux plans, et qu’aucun avis de non-conformité n’est émis;

[38]    Selon lui, l’eau est sûrement entrée par l’une des  fenêtres du sous-sol, car il n’y a aucun problème d’étanchéité au solage étant entendu qu’il n’y a eu aucune présence d’eau depuis l’inondation du 24 juin 2011;

[39]    Les autres points n’ayant pas été dénoncés en temps opportun, il ne peut pas les reconnaître conformément aux dispositions du Règlement;

[40]    Il ajoute tout de même que le taux de 60 % d’humidité trouvé lors de la visite explique sûrement l’effet d’enflure de la porte de la chambre des maîtres et de la difficulté de la fermer;

[41]    Monsieur Labelle souligne qu’il a traité le point de la fissure dans le solage inscrit dans sa décision après que les parties aient accepté qu’il le fasse malgré l’absence de dénonciation spécifique sur ce désordre;

[42]    L’inspecteur mandaté par l’Administrateur reconnaît que madame lui a parlé des pentes de terrains comme étant déficientes lors de sa visite du 10 novembre 2011. Par contre, il a ramené la discussion sur le point qui lui était dénoncé, soit la cause de l’inondation du 24 juin 2011;

[43]    Monsieur Labelle conclut que l’eau est fort probablement entrée par l’une des fenêtres. La présence des gouttières qui dirigent l’eau vers la maison, la quantité d’eau au sol par cet évènement météo significatif et l’efficacité de l’étanchéité du solage l’amènent à conclure à un évènement fortuit;

[44]    Quatre (4) printemps depuis la prise de possession, des pluies abondantes dans les derniers mois et l’absence d’autre infiltration sont des facteurs qui prouvent selon lui, l’absence de vice;

 

POSITION DES PARTIES

[45]    La Bénéficiaire croyait que ses dénonciations à l’Entrepreneur étaient suffisantes. Elle souhaite que l’Entrepreneur prenne ses responsabilités et corrige le problème des niveaux de son terrain par rapport à ceux du voisinage et de l’accumulation d’eau;

[46]    Selon elle, l’Entrepreneur est responsable du drainage des eaux de surface de l’ensemble de son développement immobilier. Il doit corriger le désordre qu’elle décrit comme la présence récurrente d’eau sur son terrain;

[47]    La Bénéficiaire ne comprend pas le Plan de Garantie. Elle exprime qu’elle doit être entendue pendant toute la période de 5 ans, sans faire de distinction sur la gravité du problème visé par les dispositions du Règlement. Elle ne fait pas de distinction entre les divers degrés des désordres couverts par le plan de garantie du Règlement;

[48]    Pour l’Entrepreneur, la présence d’eau au sous-sol des lieux est causée par une pluie diluvienne et il n’y a pas de désordre;

[49]    Le taux d’humidité élevé est la cause du renflement de la porte de la chambre des maîtres et de la responsabilité des occupants. Il n’y a aucune preuve que les fissures dans la tuile et marque d’humidité dans la salle de bain ont été causées par l’écoulement d’eau provenant de la toilette;

 

 

[50]    L’Administrateur, par son procureur, souligne qu’il n’y a pas de problème de drainage, puisqu’il n’y a pas de dommage autre que l’inondation du 24 juin 2011. Cette seule infiltration importante du 24 juin 2011 est causée par une force majeure (article 12(5) du règlement) et n’est pas sous garantie;

[51]    L’absence de dénonciation des niveaux des terrains avoisinants inscrit au  courriel transmis à l’Entrepreneur en juin 2010 rend caduque la demande de la bénéficiaire à ce titre car plus de six mois se sont écoulés depuis la connaissance de ce vice;

[52]    La consommatrice devait prendre connaissance de son contrat qui prévoit la dénonciation à l’Administrateur, ce qui n’a pas été fait et confirme la décision de monsieur Labelle dans tous ses aspects;

ANALYSE

[53]    Ma visite des lieux, le matin de l’audition, m’a permis de constater que la topographie du voisinage est bien celle apparaissant au rapport de l’expert-ingénieur Michel Saumure et que sur une bonne superficie, le terrain est gorgé d’eau.  Comme les mesures de terrain inscrites au rapport le démontrent, le niveau des sols des terrains voisins et celui du terrain sujet de l’arbitrage dirige les eaux de surface vers la maison de la Bénéficiaire;

[54]    Le signataire de la décision sous examen a choisi de ne pas traiter ce fait, alors que cet argument est soulevé au moment de son inspection. La dénonciation, pièce A-3, n’en faisant pas état, est-ce que le conciliateur signataire de la décision devait tout de même examiner ce fait?

[55]    Le travail d’enquête du signataire d’une décision d’un administrateur d’un plan de garantie est celui d’un expert en construction de maison résidentielle neuve. Le Règlement a été adopté pour assurer aux consommateurs que leurs bâtiments résidentiels neufs sont conformes aux lois, règlements en vigueur et aux règles de l’art;

[56]    La mise en œuvre de la garantie décrite aux articles 17 et suivants du Règlement édicte à l’Administrateur de procéder sur place à une inspection (art 18 (4)).  À mon avis, l’inspection dont il est question comprend de vérifier, contrôler, tester, examiner, fouiller, scruter, visiter et regarder sous sa loupe tout fait qui pourrait permettre  à cet inspecteur de conclure à un désordre.  Par la suite, si vice il y a, le décideur vérifiera de sa couverture en regard du plan de garantie.  La définition prise dans le Petit Larousse Illustré au mot ‘’inspection n.f. 1. Action de surveiller, de contrôler’’ nous permet de comprendre que l’inspecteur est choisi pour ses connaissances du milieu de la construction, de ses us et coutumes, des règles de l’art et lois et règlements. Ce représentant de l’Administrateur ne peut se refuser d’analyser une probabilité soulevée lors de son inspection parce que la Bénéficiaire n’en a pas fait mention dans sa dénonciation.  Au contraire, il doit être à l’affut de tout item qui pourrait l’amener à conclure à un défaut de construction;

[57]    C’est ce qu’a fait monsieur Labelle lorsqu’il découvre la fissure au solage.  Son test d’eau au pourtour des fondations lui a permis de trouver une fissure au mur arrière de la fondation.  À mon avis, même sans le consentement des parties, il se devait d’en ordonner la réparation;

[58]    Bien entendu et comme dans le cas sous examen pour les points 3 et 4, si dans le cours de son enquête, il apprend qu’un désordre n’a pas été dénoncé en temps opportun, il n’aura pas à poursuivre son inspection car son mandat est de statuer en fonction du contrat de garantie qui reprend les termes du Règlement;

[59]    Examinons maintenant le désordre dénoncé par la Bénéficiaire dans sa lettre du 4 juillet 2011, soit : ‘’…une inondation et des dégâts, et la cause reste toujours inconnue’’, (pièce A-3), tout en considérant les pentes avoisinantes des terrains et le contenu du rapport de l’ingénieur Saumure. Je souligne que monsieur Labelle n’avait pas ce rapport en main lors de son inspection et la rédaction de sa décision;

[60]    Le contrat préliminaire de vente (pièce A-4) et le formulaire d’inspection pré réception (pièce A-5) m’apprennent qu’il s’agit d’un contrat de type clé en main incluant le terrassement extérieur, le crépi et l’asphaltage.

[61]    Comme il est cité dans le rapport Saumure, l’article 9.14.6.1 du code de construction du Québec et du Code national du Bâtiment du Canada indique : «Si, en raison de l’emplacement d’un bâtiment, les eaux de surface peuvent s’accumuler à proximité, il faut aménager le terrain en pente pour éviter cette accumulation». L’entrepreneur devait respecter cette règle minimale. L’aménagement dont il avait la responsabilité d’exécuter se devait d’éloigner les eaux de surface de la maison. La preuve me convainc du contraire;

[62]    Le constat de la ligne de crépi qui est au-dessus du sol m’indique d’un tassement au pourtour du solage. Le relevé de la topographie du terrain sous examen et des terrains contigus, non contesté, m’indique :

·        la maison est plus basse que les terrains voisins;

·        l’aménagement du terrain amène l’eau vers la maison;

·        les pentes favorisent l’écoulement d’eau vers la maison;

[63]    La construction du mur de soutènement par l’Entrepreneur dans la cour arrière n’a que remédié partiellement au problème d’écoulement d’eau de surface dont il est fait preuve par la bénéficiaire.  Ce que la Bénéficiaire décrit comme inquiétant dans son courriel du 20 juin 2010 (pièce B-2), exprime comme une probabilité à monsieur Labelle lors de son inspection le 10 novembre 2011, n’est pas contredit lors de l’audition. Les pentes de terrains avoisinants et celles du terrain en cause amènent effectivement les eaux de surface vers la maison de la bénéficiaire;

[64]    Cette maison a été reçue par la Bénéficiaire le 20 août 2009.  Je considère que l’aménagement déficient du terrain par rapport à la situation topographique est un manquement de l’Entrepreneur à ses obligations pouvant être défini comme un vice caché au sens du 4ième paragraphe de l’article 10 du Règlement.  Le délai pour sa dénonciation se compte du jour où la Bénéficiaire a pu en soupçonner sa gravité.  Voici les textes du Règlement et du Code civil du Québec pertinents :

‘’art.10.  La garantie d'un plan dans le cas de manquement de l'entrepreneur à ses obligations légales ou contractuelles après la réception du bâtiment doit couvrir:

 

  1°    …

  2°    …

  3°    …

  4°    la réparation des vices cachés au sens de l'article 1726 ou de l'article 2103 du Code civil qui sont découverts dans les 3 ans suivant la réception du bâtiment et dénoncés, par écrit, à l'entrepreneur et à l'administrateur dans un délai raisonnable, lequel ne peut excéder 6 mois de la découverte des vices cachés au sens de l'article 1739 du Code civil;

  5°   …’’

 

 

‘’ art.1739 C.c.Q. L'acheteur qui constate que le bien est atteint d'un vice doit, par écrit, le dénoncer au vendeur dans un délai raisonnable depuis sa découverte. Ce délai commence à courir, lorsque le vice apparaît graduellement, du jour où l'acheteur a pu en soupçonner la gravité et l'étendue.

 

Le vendeur ne peut se prévaloir d'une dénonciation tardive de l'acheteur s'il connaissait ou ne pouvait ignorer le vice.’’

 

[65]    La preuve de l’expert-ingénieur n’est pas contredite à l’effet que pour une personne non-initiée au domaine de la construction, les pentes de terrain n’apparaissent pas une question importante.  J’ajoute que l’inquiétude exprimée par madame Diallo dans son courriel du 28 juin 2010, pièce B-2, n’est pas la preuve qu’elle en connaissait la gravité et l’étendue.  Selon la preuve, ce n’est qu’au moment des pluies torrentielles de juin 2011 qu’elle réalise l’étendue du problème. C’est à partir de ce moment que ce vice qui apparaît graduellement ne peut plus être caché; 

[66]    La date de l’inondation du 24 juin 2011 est le point de départ d’une connaissance de la gravité et l’étendue du vice qu’entraine l’aménagement déficient.  La dénonciation du 4 juillet 2011 est reçue par l’Administrateur le 8 aout 2011, pièce A-3. Cette dénonciation effectuée dans les six (6) mois de l’évènement qui permettait à la Bénéficiaire d’en soupçonner toute la gravité et l’étendue est valide;

[67]    La seule preuve qui m’a été faite sur cet aménagement du sol pour éloigner les eaux de surface est celle de l’ingénieur-expert Michel Saumure qui, en contre-interrogatoire, témoignera qu’à son avis, il n’est pas question ici d’un système de drainage. Le système de drainage dont il est question aux exclusions de l’article 12 (9) du Règlement visant plutôt un système d’appareils, d’équipements mécaniques ou non;

[68]    À mon sens, l’aménagement du sol pour éloigner les eaux de surface du bâtiment est une installation nécessaire à son usage et en fait partie intégrante.  La présence récurrente d’eau sur la propriété de la bénéficiaire est suffisamment grave pour constituer un déficit d’usage important et protégé par le Règlement.  L’affaissement du sol au pourtour du solage constaté par cette ligne de crépi qui est au-dessus de la ligne de sol étant une marque de tassement de terrain pouvant être aussi associé à la gravité du vice;

[69]    Je suis aussi d’avis que même dirigée ailleurs, à cause des pentes du terrain, que l’eau des gouttières de la maison voisine finirait par trouver le point bas qui est le terrain de la maison sujette de l’arbitrage;

[70]    Le témoignage de monsieur Labelle sur l’absence d’avis de la Ville pour considérer que l’Entrepreneur a agi conformément aux plans de conception du drainage du quartier ne corrige pas le fait d’avoir écarté cette possibilité dans son rapport d’inspection dont ses conclusions sont ici sous examen;

[71]     Comme auparavant mentionnés et admis par la Bénéficiaire, les points concernant les tuiles fissurées à la salle de bain à l’étage et de la porte de la chambre principale n’ont pas été dénoncés dans le délai requis par le règlement et seront rejetés puisque cachés au moment de la réception et découverts dans l’année qui suit cette réception.  Le texte de l’article 10 (3) du Règlement se lisant ainsi :   

‘’10.  La garantie d'un plan dans le cas de manquement de l'entrepreneur à ses obligations légales ou contractuelles après la réception du bâtiment doit couvrir:

 

  1°  … 

  2°  … 

  3°    la réparation des malfaçons existantes et non apparentes au moment de la réception et découvertes dans l'année qui suit la réception, visées aux articles 2113 et 2120 du Code civil et dénoncées, par écrit, à l'entrepreneur et à l'administrateur dans un délai raisonnable, lequel ne peut excéder 6 mois de la découverte des malfaçons;

  4°    …

  5°   … ‘’

 

 


POUR CES MOTIFS,  LE TRIBUNAL :

 

ACCUEILLE en partie la demande d’arbitrage de la Bénéficiaire;

 

ACCUEILLE la demande d’arbitrage du point 2 de la décision du 8 décembre 2011 de l’Administrateur et ORDONNE à l’Entrepreneur de faire les travaux correctifs à l’aménagement des lieux en regard de sa situation topographique de manière à éloigner l’eau de surface du bâtiment, lesdits travaux devant être effectués au plus tard le 30 septembre 2013;

 

REJETTE la demande d’arbitrage et confirme les conclusions des points 3 et 4 de la décision de l’Administrateur du 8 décembre 2011;

 

Conformément à l’article 124 du Règlement, CONDAMNE l’Administrateur à rembourser à la Bénéficiaire les coûts de préparation du rapport d’expertise de l’expert Ingénieur Michel Saumure et des frais de sa présence à l’audition, étant entendu que son rapport et son témoignage a aidé le tribunal à rendre une décision éclairée;

 

Le tout au frais de l’Administrateur, conformément à l’article 123 du Règlement.

 

 

 

 

 

 

JEAN MORISSETTE, arbitre

 

KHARDIATA DIALLO

Bénéficiaire

 

ANDRÉ BISSONNETTE

Entrepreneur

 

Me FRANÇOIS-OLIVIER GODIN

Procureur de l’administrateur

 

Date d’audience :

27 juin 2013

 

 

 

 

 

 

MADAME KHARDIATA DIALLO

[…] Gatineau (Qc) […]

             Bénéficiaire

et

MONSIEUR ANDRÉ BISSONNETTE

4176855 Canada Inc

Boulet Construction

239, Maurice St-Louis

Gatineau, (QC)  J9J 2X2           

               l’Entrepreneur

Et

ME FRANÇOIS-OLIVIER GODIN pour

LA GARANTIE HABITATION DU QUÉBEC INC.

9200, boul. Métropolitain Est

Anjou, (QC),

H1K 4L2

             Pour L’Administrateur