Organisme d’arbitrage autorisé par la Régie du bâtiment:

CENTRE CANADIEN D’ARBITRAGE COMMERCIAL

 

 

ENTRE:                                                          DARLENE JALBERT

                                                                       

                                                                        -et-

 

                                                                        AROLD EXPÉRIENCE

 

(ci-après «les Bénéficiaires»)

 

ET:                                                                  CONSTRUCTION TRILIKON INC.

 

(ci-après «l'Entrepreneur»)

 

ET:                                                                  LA GARANTIE DES BÂTIMENTS

                                                                        RÉSIDENTIELS NEUFS DE L'APCHQ INC.

 

(ci-après «l’Administrateur»)

 

No dossier CCAC: S12-041101-NP

 

 

                                    SENTENCE ARBITRALE                                  

 

 

Arbitre:                                                                       Me Lydia Milazzo

 

Pour les Bénéficiaires:                                             Monsieur Arold Expérience

                                                                                    Madame Darlene Jalbert

           

Pour l'Entrepreneur:                                                  Monsieur Nick Trinci

                                                                                               

Pour l’Administrateur:                                               Me François Laplante

Madame Anne Delage,

Inspecteur-conciliateur

 

Date de l’audition:                                                   12 juillet 2012 (lors de l’audience, il fut convenu que le délai pour rendre une décision serait prorogé par une période de deux semaines, tenant en considération les vacances estivales)

 

Date de la sentence:                                                14 août, 2012

 

 

 

 

Identification complète des parties

 

 

 

Bénéficiaires:                                                Monsieur Arold Expérience

                                                                        Madame Darlene Jalbert

10219 rue Thomas-Paine 

Montréal (Québec) H1C 0B6

 

Entrepreneur:                                                Construction Trilikon Inc.

                                                                        Monsieur Nick Trinci

8760, rue Aimé-Geoffrion

Montréal (Québec) H1E 6W3

 

Administrateur:                                              La Garantie des bâtiments résidentiels neufs de l'APCHQ Inc.

5930,  boulevard Louis-H. Lafontaine

Anjou (Québec)  H1M 1S7

Madame Anne Delage,

Inspecteur-conciliateur

 

Procureur: Me François Laplante

 

 

Mandat

 

L’arbitre a reçu son mandat du CCAC le 30 avril 2012.

 

 

                                    Historique du dossier

 

 

16 juillet 2009:                       Rapport d'inspection préachat;

 

10 août 2011                         Lettre des Bénéficiaires à l'Entrepreneur; reçu par l’Administrateur le 12 août, 2011;

 

30 septembre 2011 :    Lettre des Bénéficiaires à l'Entrepreneur, reçu par l’Administrateur le 4 octobre, 2012; 

 

31 octobre 2011:                  Demande de réclamation des Bénéficiaires auprès de l'Administrateur; reçu par l’Administrateur le 18 novembre 2011;

 

9 janvier 2012:                       Avis de 15 jours de l'Administrateur à l'Entrepreneur;

 

2 février 2012:                       Inspection de l’Administrateur;

 

5 mars 2012:                         Décision de l’Administrateur;

 

11 avril 2012:                         Réception par le CCAC de la demande d’arbitrage des Bénéficiaires datée du 28 juillet 2011;

 

30 avril, 2012                         Réception du cahier de pièces de la part de l’Administrateur;

 

24 mai 2012:                         Audience préliminaire par conférence téléphonique;

 

25 mai 2012:                         Réception des rapports de la compagnie Steamatic transmis par les Bénéficiaires par courriel;

 

11 juin 2012:                          Réception d’un courriel de la part du procureur de l’Administrateur confirmant son consentement au dépôt desdits rapports pour valoir témoignage de leur auteur, sans admettre le contenu;

 

12 juillet 2012:                       Audience à la salle 2.05 du Palais de justice de Laval.

 

 

Juridiction

 

1.            Aucune objection quant à la compétence du Tribunal n’a été soulevée par les parties. Le tribunal déclare que juridiction lui est acquise.

 

 

La Décision de l’Administrateur

 

2.          Les Bénéficiaires ont interjeté appel de la décision de l’Administrateur du 5 mars 2012, laquelle a statué sur les 3 points suivants:

 

Point #1 : Fuite d’eau en provenance du tuyau d’alimentation de la toilette;

Point #2 : Fuite d’eau en provenance du tuyau de renvoi de la cuisine;

Point#3 : Tâche brunâtre au plafond de la pièce située au-dessus du garage.

 

3.          L’Administrateur s’est dit incapable de faire un lien entre les situations dénoncées aux points 1 et 2 et les travaux réalisés par l’entrepreneur et n’était pas en mesure de statuer sur la responsabilité de celui-ci.  L’Administrateur n’a donc pas donné suite à la demande des Bénéficiaires relativement à ces deux points.

 

4.          Quant au point 3, l’Administrateur a conclu que le délai de dénonciation excédait  le délai raisonnable prescrit par la loi et en conséquence, n’a pas donner suite à la demande de réclamation sur ce point.

 

Le Déroulement de l’Audience

 

5.         À l’audience les Bénéficiaires ont produit les pièces suivantes :

B-1 : Estimation de la compagnie Steamatic Métropolitain, préparé pour les fins d‘assurance dont le numéro de sinistre est le 42297960;

B-2 Estimation de Steamatic Métropolitain préparé pour les fins d‘assurance dont le numéro de sinistre est le 42297952;

 

6.         L’Administrateur a produit les pièces A1 à A11, telles que contenues dans son cahier de pièces;

 

7.         Le tribunal a entendu les témoignages de Monsieur Arold Expérience et Madame Darlene Jalbert pour les Bénéficiaires, Madame Anne Delage pour l’Administrateur et M. Trinci pour l’Entrepreneur.

 

 

La preuve et la position des parties

 

8.         Le 16 juillet 2009, les Bénéficiaire ont acheté, un immeuble sis au 10 219, rue Thomas-Paine à Montréal (ci-après « le Bâtiment »), après avoir signé un formulaire d’inspection pré-réception le même jour. 

 

Point #1 : Fuite d’eau en provenance du tuyau d’alimentation de la toilette :

 

9.         Le matin du 2 août 2011, les Bénéficiaires ont découvert un dégât d’eau dans la salle d’eau du rez-de-chaussée, qui semblait sortir du plafond de celui-ci.  Dans le but de trouver la source de cet écoulement, Monsieur Expérience est montée à la salle de bain, située à l’étage directement au-dessus de la salle d’eau, où il a découvert de l’eau accumulé sous la cuvette de la toilette.  Les Bénéficiaires ont témoigné que le plancher adjacent au mur de la toilette du 2ième niveau était surélevé suite à ce problème. Monsieur Expérience dit avoir fermer l’alimentation d’eau de la salle de bain du deuxième étage, ce qui aurait permis l’arrêt de l’écoulement d’eau au plafond de la salle d’eau du rez-de-chaussée, ainsi qu’aux murs et au plancher de la salle de bain à l’étage.  Madame Jalbert a témoigné que ledit plancher est redescendu lorsque l’eau a séché.  Les Bénéficiaires ont contacté l’Administrateur, lequel leur a dit de communiquer avec l’Entrepreneur.

 

10.       Le ou vers le 8 août, M. Mike Trotta, un représentant de l’Entrepreneur, est venu vérifier la situation et aurait constaté que l’eau coulait du tuyau flexible en métal alimentant la toilette. Selon le témoignage de M. Trinci, représentant de l’Entrepreneur, celui-ci aurait par la suite contacté le plombier principal, Monsieur Butteliegri, lequel, après avoir vu le tuyau, aurait conclu que ledit tuyau avait reçu un coup et s’était brisé en conséquence, ce qui est nié par les Bénéficiaires.  Ni M. Trotta, ni M. Butteglieri était présent à la cour et les Bénéficiaires n’ont pas conservé l’ancien tuyau à l’origine de l’écoulement.

 

11.       Les parties s’entendent, par contre, sur le fait que le tuyau a été simplement remplacé et le problème n’est jamais plus survenu. M. Expérience a aussi confirmé que ce problème ne s’était jamais manifesté avant le 2 août 2011.

 

12.       Pour ce qui est de l’Administrateur, l’inspecteur-conciliateur n’a pas pu constater la cause de l’écoulement lors de l’inspection du 2 février, 2012, car les réparations avaient déjà été faite à ce moment-là et les Bénéficiaires n’étaient pas en mesure de lui fournir l’ancien tuyau. Elle n'a pu constater que les dommages, soit les dégâts d’eau aux murs et plancher.

 

 

13.       Les Bénéficiaires réclament la réparation complète de ces dégâts.  L’Entrepreneur nie responsabilité car le système de plomberie fonctionnait lors de la réception du bâtiment et aucun problème n’a été porté a sa connaissance pour une période de deux ans, soit jusqu’au moment de l’écoulement décrit au point numéro un, lequel, selon lui, résulte d’un coup qu’aurait subi le tuyau flexible de la toilette de la salle de bain située à l’étage. Selon l’Administrateur, il n’y aurait pas d’autre explication logique pour que le tuyau en question commence à couler soudainement, deux ans après son installation.  L’Administrateur soulève le fait que le Bâtiment est habité par les Bénéficiaires et leurs quatre enfants âgées de 2 ans à 8 ans.

 

14.       La représentante de l’Administrateur témoigne que selon son expérience, un vice de plomberie se manifeste dans les premiers jours d’habitation du bâtiment.  Les Bénéficiaires insistent que les problèmes reliés à la plomberie ne sont pas « normales » pour une si courte période et se réfèrent aux points numéros 1,2 et 3 de leur réclamation, ainsi qu’à deux autres incidents reliés à la plomberie, survenus dans les deux premières années, lesquelles ils admettent ne pas avoir dénoncés à l’Entrepreneur.  Il s’agit de la douche, dont l’eau ne sortait plus avec la même puissance.  Ce problème aurait était corrigé par le père de Mme. Jalbert. Il y aurait aussi eu un problème avec le robinet du bain, lequel aurait été corrigé par Madame Jalbert.  Selon les Bénéficiaires, les deux situations ont été relativement facile à corriger, mais que le nombre de problèmes relié à la plomberie dans les deux premières années d’usage normal est excessif  et indicatif d’un vice au niveau de la plomberie.  L’avocat de l’Administrateur plaide que le tribunal ne doit pas prendre compte de ces deux autres incidents, car ils n’ont jamais été dénoncés et ne font partie de la réclamation devant le tribunal.

 

 

Point #2 : Fuite d’eau en provenance du tuyau de renvoi de la cuisine :

 

 

15.       À la fin du mois d’août, 2011, Madame Jalbert a découvert que de l’eau coulait en dessous du lavabo de la cuisine.  Elle témoigne avoir mis un bol en dessous du lavabo lequel s’est rempli d’eau dans l’espace d’une semaine.   Un représentant d’American Standards, fabricant original dudit lavabo, est venu constater le problème et l’a corrigé en serrant une valve et ajustant une « couronne » sur le tuyau d’alimentation (voir photo Pièce A-9,  au bas de l’avant dernière page).  Selon les Bénéficiaires, cet écoulement aurait causé d’importants dégâts au plafond du sous-sol.  Référence a été faite à la photo en haut de la dernière page de la pièce A-9, laquelle montre une tâche brune/noire sur le gypse au plafond.  Les Bénéficiaires se sont fait dire par le représentant de Steamatic, qu’il s’agissait de traces de moisissure.  Malgré cela, au moment de l’audience, les Bénéficiaires n’avaient pas faite faire aucune réparation, ni ouvert le plafond à l’endroit affecté pour vérifier d’avantage la situation. Ils disent avoir interdit aux enfants de jouer à cet endroit.

 

16.       L’Entrepreneur témoigne qu’il s’agissait d’un simple entretien que les Bénéficiaires se devaient de faire et pour lequel l’Entrepreneur ne peut être tenu responsable. En contre-interrogatoire, les Bénéficiaires ont avoués que les simples gestes de serrement ne constituaient pas vraiment « une réparation » et qu’ils ont eu comme résultat de régler de façon définitive le problème. Par contre, le dégât au plafond du sous-sol demeure et devrait, selon eux, être réparé par l’Entrepreneur.

 

17.       Selon l’Administrateur, et tel qu’écrit dans sa décision du 5 mars 2012, lors de ‘inspection du 2 février 2012, les Bénéficiaires lui ont fait part d’un écoulement au niveau du tuyau de renvoi (et non pas du tuyau d’alimentation), situé sous le lavabo de la cuisine.  Selon Mme Delage, cela expliquait la couleur grisâtre de la tâche au plafond du sous-sol, car il s’agirait d’eau usée. Elle dit ne pas avoir été avisé des réparations au tuyau d’alimentation lors de son inspection et que ce n’est qu’à l’audience qu’elle a appris le tout. Par contre, ce nouvel élément ne changea rien de la décision de l’Administrateur, car s’il s’agissait d’un vice de plomberie, les problèmes d’écoulement se seraient manifestés dans les premiers jours et non pas seulement deux ans après l’installation.  Elle ne pouvait donc toujours pas conclure que l’Entrepreneur était responsable. 

 

18.       En réponse aux questions posées par l’Arbitre soussigné, Mme Delage a avoué qu’elle ne pouvait pas expliquer la tâche au plafond du sous-sol, car il aurait fallu que l’écoulement dure très longtemps pour arriver à tâcher le plafond (décrivant un cheminement de 14 pouces entre les étage) et que de toute façon, la tâche était de couleur grisâtre, suggérant l’écoulement d’eau usée.  L’Entrepreneur pour sa part a souligné qu’il manquait une « clampe » sur le tuyau du lave-vaisselle, en se référant à la photo au bas de l’avant-dernière page de la Pièce P-9.

 

Point#3 : Tâche brunâtre au plafond de la pièce située au-dessus du garage.

 

19.       Monsieur Expérience a témoigné à l’effet que cette tâche au plafond de la pièce située au-dessus du garage aurait été découverte en septembre 2009.  Il prétend qu’elle aurait  grossi et qu’il aurait peinturée par dessus pour la couvrir, mais que celle-ci est réapparût quelques mois après.

 

20.       La dénonciation a été faite le 30 septembre, 2011, soit deux ans après la découverte initiale. 

 

21.       Lors de l’inspection, l’inspecteur-conciliateur aurait été informé par les Bénéficiaires que la tâche est demeuré inchangée.  Selon Mme Delage, il n’y a pas de système de plomberie qui passe à cet endroit et aucune fuite d’eau n’a été retrouvée.

 

Questions en litige:

 

22.       Est-ce que les points #s 1 et 2 de la réclamation des Bénéficiaires répondent aux critères de vices cachés selon la Loi?

 

23.       Est-ce que la dénonciation de la situation décrite au point # 3 de la réclamation des Bénéficiaires a été faite dans les délais requis par la loi, si oui, est-ce qu’elle répond aux critères de vice caché selon la Loi?

 

 

 

Analyse et décision

 

Point #1 : Fuite d’eau en provenance du tuyau d’alimentation de la toilette;  Point #2 : Fuite d’eau en provenance du tuyau d’alimentation de la cuisine :

 

24.       Les Bénéficiaires demandent la réparation complète des dommages causés par les écoulements d’eau décrits aux points numéros 1 et 2 de leur réclamation, incluant la remise en état des lieux affectés à l’état d’origine, y compris la peinture, le tout au frais de l’Entrepreneur.  Pour qu’ils aient droit à ces réparations, il faut que les causes à l’origine de ces dommages soient couvertes par la Garantie des bâtiments résidentiels neufs de l'APCHQ Inc. (ci-après « la Garantie »).

 

25.       Considérant que les problèmes de plomberie décrit au points #s 1 et 2 de la réclamation des Bénéficiaires ont été découvertes en août 2011, soit dans la deuxième année de la Garantie, lesdits  points, tel que dénoncés, doivent répondre aux critères de vice cachés en vertu du paragraphe 10 (4) du Règlement sur le plan de garantie des bâtiments résidentiels neufs (le Règlement), lequel se réfère à l’article 1726 du Code Civil du Québec, à savoir:

·        Le vice doit être inconnu du Bénéficiaire au moment de la réception du Bâtiment;

·        Le vice doit être caché;

·        Le vice doit être antérieur à la vente;

·        Le vice doit être grave au point de rendre le bien impropre à l’usage auquel il est destiné ou diminuer tellement son utilité que le Bénéficiaire ne l’aurait pas acquis ou n’aurait pas donner si haut prix s’il l’avait connu. La gravité du vice doit d’abord et avant tout s’évaluer en fonction du déficit d’usage, autrement dit des limitations qu’ils posent aux occupants des lieux.

 

26.       Dans l’affaire ABB Inc. c. Domtar Inc.,[1] la Cour Suprême du Canada s’est exprimée comme suit au sujet du vice caché:

 

« ( 52 ) La simple présence d’un déficit d’usage ne suffit pas en elle-même pour justifier la qualification de vice caché. Encore faut-il que ce déficit d’usage soit grave, c’est-à-dire qu’il rende le bien impropre à l’usage auquel il est destiné ou en diminue tellement l’utilité que son acheteur ne l’aurait pas acheté à ce prix. Ce deuxième critère, celui de la gravité du vice, découle du texte de l’article 1522 CCBC. Cela dit, il n’est pas nécessaire que le vice empêche toute utilisation du bien mais simplement qu’il en réduise l’utilité de façon importante, en regard des attentes légitimes d’un acheteur prudent et diligent.

 

27.       Le fardeau de la preuve repose sur les Bénéficiaires. Le tribunal estime que les Bénéficiaires n’ont pas réussi à décharger ce fardeau.  Ils n’ont pas démontré par prépondérance de la preuve que les situations dénoncées aux points #s 1 et 2 de leur réclamation constituent des vices cachés au sens de la loi, que celles-ci étaient antérieures à la vente et que celles-ci aient la gravité requise par la Loi.   Les deux incidents  se sont produits qu’une seule fois, et ce seulement deux ans après l’installation du système.  Dans le cas du premier point, la preuve à l’effet que le tuyau flexible de la toilette de la salle de bain à l’étage s’était brisé après avoir reçu un coup repose uniquement sur le témoignage de l’Entrepreneur, car le plombier qui l’aurait remplacé par un nouveau tuyau n’a pas été assigné et les Bénéficiaires n’ont pas conserver l’ancien tuyau. Par contre, la prépondérance de la preuve oblige le Tribunal à conclure qu’il ne s’agissait pas d’une déficience ou vice au niveau du système de plomberie, car le problème s’est réglé en remplaçant tout simplement le tuyau en question. Les correctifs apportés par rapport au deuxième point étaient encore plus simple et ont aussi arrêter les écoulements de façon définitive, tel que confirmé par les Bénéficiaires.  Dans les deux cas particuliers du présent dossier, le tribunal partage l’avis de l’Administrateur que s’il s’agissait d’un véritable vice de plomberie, il y aurait eu manifestation de problèmes bien avant deux ans. Le tribunal conclu que les Bénéficiaires n’ont pas réussi à démontrer selon leur fardeau de la preuve qu’il s’agit de vices antérieurs à la vente.  Finalement, le tribunal estime que vu ce qui précède, il ne peut s’agir de vices graves selon la loi, malgré les inconvénients malheureusement subis par les Bénéficiaires.

 

28.       Lors de l’argumentation, le procureur de l’Administrateur a plaidé que le tribunal ne devrait pas prendre en considération les autres problèmes reliés à la plomberie soulevés par les Bénéficiaires lors de leur témoignage, parce que ceux-ci n’ont jamais été dénoncés.  Le tribunal ne partage pas cet avis, car il s’agit tout de même d’une preuve admissible quant à la nature et l’étendu des problèmes de plomberie éprouvés par les Bénéficiaires, laquelle preuve peut être pertinente dans le cadre de l’analyse des points soumis à l’Arbitrage.  Mais encore là, la preuve soumise par les Bénéficiaires-mêmes est à l’effet qu’il s’agissait de problèmes relativement mineurs et relativement facile à corrigés, sans recours à un plombier. Le nombre d’incidents reliés à la plomberie ne mène pas non plus le Tribunal à conclure à l’existence de vice-cachés au niveau du système de plomberie.  À la limite, il pourrait s’agir de malfaçons, mais le tribunal n’a pas à décider sur ce point, car les dénonciations ont été faite dans la deuxième année de la garantie, et donc il fallait faire la preuve d’un vice-caché, ce qui n’a pas été accompli.

 

29.       Le tribunal en arrive à la conclusion que les Bénéficiaires n'ont pas démontré, selon la prépondérance de la preuve, qu'il y a vice caché au sens de l’article 10 (4) du Règlement et 1726 du Code civil du Québec.

 

30.       Le tribunal se doit d’ajouter les remarques suivantes quant à la tâche brune située au plafond du sous-sol. Évidemment, le tribunal ne peut ordonner la réparation de ce dégât si celui-ci résulte de l’écoulement du tuyau d’alimentation, lequel n’a requis que de simples ajustements pour arrêter de couler.  Par contre, selon l’Administrateur, il est peu probable que cette tâche résulte de cet écoulement, pour les raisons mentionnées au paragraphe 17 ci-haut. Il s’agit donc d’une « tâche mystère », pour reprendre les mots du procureur de l’Administrateur, dont la source n’a pas encore été déterminée.

 

 

Point#3 : Tâche brunâtre au plafond de la pièce située au-dessus du garage:

 

31.       Le tribunal doit déterminer si la dénonciation de ce point par les Bénéficiaires a été faite dans les délais prescrits par le Règlement;

 

32.       Selon l’article 10 (4) du Règlement, ce délai ne peut excéder 6 mois de la découverte des vices cachés au sens de l’article 1739 du Code Civil du Québec;

 

33.       L’Article 1739 du Code Civil du Québec prévoit que ce délai commence à courir, lorsque le vice apparait graduellement, du jour où l’acheteur a pu en soupçonner la gravité et l’étendue;   

 

34.    La décision récente dans l’affaire Colloccia[2] résume bien le droit applicable quand il s’agit de déterminer le point de départ de la découverte d’un vice ou d’une malfaçon:

 

POINT DE DÉPART DU DÉLAI

 

[33] On se doit de déterminer un point de départ du délai. Ce délai relève, selon le Tribunal, d’un point de départ de prescription, et dans les cas d’une prescription dite «extinctive», soit un moyen qui permet à une partie de se libérer par l'écoulement du temps et aux conditions déterminées par la loi (art. 2875 C.c.Q), le point de départ de la prescription est le jour où le droit d'action a pris naissance (art. 2880 al 2 C.c.Q).

 

Notion de «découverte»

[34] Le point de départ du délai est fondé sur la connaissance du vice par l’acheteur.

Tenant compte des textes législatifs cités ci-haut, dans le cadre de la présente demande alléguant des vices cachés, c’est le terme «découverte» qu’il faut cerner d’à propos.

[35] Cette détermination repose sur le comportement des parties ainsi que sur la nature du vice visé.

[…]

 

35.    Selon la preuve soumise, le point de départ serait la date de la découverte initial, soit septembre 2009, ou au plus tard, quelques mois après, lorsque les Bénéficiaires ont peinturé l’endroit affecté et la tâche est réapparût. Les Bénéficiaires n’ont présenté aucune autre alternative à ces deux scénarios; de plus, la preuve est à l’effet que cette tache est demeurée inchangée depuis.  De toute évidence, dans les deux cas, la dénonciation aurait été faite hors délai.

 

36.       Le tribunal maintient la décision de l'Administrateur sur ce point.

 

Conclusion

 

37.    Suivant mon appréciation des faits, de la preuve versée au dossier et présentée à l’audition, des témoignages entendus et du droit applicable, je suis d’avis que la réclamation des Bénéficiaires doit être rejetée et la décision de l’Administrateur maintenue.

 

 

 

Les frais d’arbitrage

 

38.       Considérant que les Bénéficiaires n'ont obtenu gain de cause sur aucun des aspects de leur réclamation, l'Administrateur et les Bénéficiaires doivent partager les frais du présent arbitrage conformément à l'article 37 du Règlement.

 

 

POUR CES MOTIFS, LE TRIBUNAL D’ARBITRAGE:

 

           

REJETTE l’appel des Bénéficiaires;

 

            CONDAMNE les Bénéficiaires au paiement des frais du présent arbitrage, limités au montant de 50.00$ et l’Administrateur au paiement de la balance de ces frais.

 

Montréal, le 14 août, 2012

 

 

_________________________

ME LYDIA MILAZZO

 



[1] ABB Inc. c.Domtar Inc., (2007) CSC 50.

[2] Coloccia -Borregine c. Trilikon Construction Inc. et La Garantie des Bâtiments Résidentiels Neufs de l’APCHQ Inc. (CCAC # S09-231001-NP, 30 juillet 2010, Me Jean-Philippe Ewart, arbitre).