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ARBITRAGE EN VERTU DU RÈGLEMENT SUR LE PLAN DE

GARANTIE DES IMMEUBLES RÉSIDENTIELS

DE L’ASSOCIATION PROVINCIALE DES CONSTRUCTEURS EN HABITATION DU QUÉBEC

 

Tenu sous l'égide du

Centre Canadien d'Arbitrage Commercial

Dossier S05-0511-NP

 

M. Victor Pariente

et

Mme Lili Muller-Pariente

(demandeurs)

 

c,

 

 

LA GARANTIE QUALITÉ HABITATION

(Défenderesse)

 

et

 

HABITATIONS RAYMOND & ASSOCIÉS INC.

(Co-défenderesse)

 

devant l'arbitre mandaté par le CCAC

ROBERT FORCIONE, INGÉNIEUR

 

 

DÉCISION ARBITRALE

 

Préambule :

 

1.       Après avoir pris connaissance des documents soumis par les parties; avoir entendu les témoignages et délibéré, le tribunal en vient aux conclusions suivantes :

 

Les faits selon les témoignages non-contredits et les documents :

 

2.       Le 10 novembre 2004, devant le notaire Me Claude Chamberland, les Demandeurs, M. Victor Pariente et Mme Lili Muller-Pariente, et la Co-défenderesse, Habitations Raymond & Associés inc., un entrepreneur en construction dûment enregistré auprès de I'APCHQ, signaient un "Contrat" par lequel la seconde vendait à la première un immeuble neuf portant le numéro civique 223, rue du Bosquet à Pincourt, Québec.

 

3.       L'immeuble en cause était couvert par le plan de Garantie Qualité Habitation du Québec inc. (Contrat de garantie 04 21986 - # référence 0032387}

 

4.       Selon toute vraisemblance, l’immeuble en cause était encore en construction puisque le "Certificat de Fin des travaux - Réception du bâtiment" fut signé par les parties le 29 novembre 2004, avec une note qui se lit comme suit :

"Le client n'est pas d'accord avec les motifs de la mélamine d'armoires.

Le constructeur après vérification auprès du sous-contractant a eu l'assurance que la couleur est conforme à l’échantillon.

Le client peut demander intervention au plan de garantie, si le client n'est pas en accord.

Les armoires de cuisine ne sont représentative de l'échantillon qu’on a fournit au client (L433)" (sic)

 

5.       En fait, pendant la construction, la Défenderesse a demandé aux Demandeurs de se rendre chez le sous-traitant qui lui fournissait les différents comptoirs et les différentes armoires nécessaires


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à la réalisation des travaux, afin que ces derniers choisissent les matériaux de finition pour ces éléments, soit, entre autres, la mélamine des armoires de cuisine.

 

6.       Les Demandeurs se sont effectivement rendus à la salle de montre du sous traitant, Dupuis Sénécal, où une représentante, Mlle Manon Boileau., leur a fait choisir la mélamine devant servir à la confection des façades et des portes de leurs armoires de cuisine. À cette occasion, Mlle Boileau a remis aux Demandeurs un écahntillon mesurant environ deux (2) pouces sur trois (3) du produit L433, fini mat, de la compagnie Tafisa, que les Demandeurs avaient choisi. Elle a également fait signer par un des Demandeurs, M. Pariente, un croquis des armoires de cuisine sur lequel était indiqué : "Mélamine : L433 MAT", sans toutefois remettre une copie du croquis en cause aux Demandeurs.

 

7.       L'échantillon choisi montre des lignes parallèles qui, pour la Défenderesse et la Co-défenderesse représentent des nervures de bois, alors que, pour les Demandeurs, ces rayures ne sont qu'un dessin quelconque non représentatif de quelque matériau que ce soit.

 

8.       Quelque temps après, lors d'une visite fortuite sur les lieux de la construction les Demandeurs ont constaté que les armoires de cuisine étaient installées mais, selon eux, la mélamine utilisée pour leur confection n'était pas celle qu'ils avaient choisie ou, du moins, elle n'était pas conforme à l'échantillon qui leur avait été remis en ce que certaines nervures représentant des noeuds de bois s'étaient ajoutées aux nervures parallèles de l'échantillon.

 

9.       Les Demandeurs rejoignent alors M. Sénécal, le représentant de la Co-défenderesse, pour lui indiquer leur refus des armoires en cause et demander leur remplacement par un produit identique à l'échantillon de mélamine qu'ils avaient choisi.

 

10.   Immédiatement, la Co-défenderesse dépêche un de ses employés sur les lieux avec un échantillon grand format, douze (12) pouces sur trente-six (36), de la mélamine L433 de Tafisa, soit celle choisie par les Demandeurs, afin de rencontrer ces derniers et de faire la comparaison des armoires livrées avec l'échantillon grand format.

 

11.   C'est au moment de cette rencontre que les Demandeurs constatent que l'échantillon grand format qu'ils voient pour la première fois, comporte effectivement des nervures représentant des noeuds de bois et que les devants de leurs armoires et les portes de celles-ci sont bel et bien confectionnées avec la mélamine L433 de Tafisa.

 

12.   Toujours convaincus qu'ils ont été trompés du fait que l'échantillon qui leur avait été remis originalement ne montrait aucune nervure semblable à des noeuds de bois, les Demandeurs avisent la Co-défenderesse qu'ils maintiennent leur refus des armoires de cuisine qui ont été installées et demandent leur remplacement.

 

13.   À son tour; la Co-défenderesse maintient son refus de remplacer les armoires de cuisine convaincue que la mélamine utilisée pour leur revêtement est bien celle choisi par les Demandeurs.

 

14.   Les Demandeurs font alors appel à la Défenderesse, la Garantie Qualité Habitation, afin que celle-ci procède à une conciliation selon les termes du contrat de garantie.

 

15.   Après certains retards dus à une absence des Demandeurs retenus à l'extérieur du pays, un conciliateur de la Défenderesse, M. Sylvain Beausoleil procède à une inspection des lieux le 23 mars 2005, en présence des Demandeurs et des représentants de la Co-défenderesse.

 

16.   Une décision écrite est alors rendue par l'Administrateur de la Défenderesse qui déclare, le 29 mars 2005, qu'après avoir "vérifié les échantillons (de mélanine) soumit (sic), le bordereau de commande initialé par le bénéficiaire (un des Demandeurs), le dépliant du produit» (les termes entre parenthèses sont ajoutés par nous), il constate que "le tout est conforme au modèle choisi par le bénéficiaire" (les Demandeurs) et que "Quant au fini desdites armoires, … il est conforme au bordereau de commande et cela ne peut être considéré comme une malfaçon», ce qui équivaut à un rejet de la requête de remplacement faite par les Demandeurs.

 


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17.   Dans le rapport émis, la Défenderesse avise les Demandeurs et la Co-défenderesse que, si l'un d'eux est "insatisfait d'une décision de l'administrateur, (il) doit, pour que la garantie s'applique, soumettre le différend à l'arbitrage dans les 15 jours de la réception par la poste recommandée de la présente décision, à l'un des organismes" accrédités pour trancher le litige.

 

18.   Les Demandeurs font alors appel au CCAC qui a constitué le présent tribunal.

 

La position des parties :

 

19.   Les Demandeurs ont maintenu devant le tribunal qu'ils ont étrompés dans leur choix de la mélamine devant servir au revêtement des façades et des portes de leurs armoires de cuisine du fait que l'échantillon qui leur a été présenté lorsqu'ils ont effectué ledit choix était trop petit et qu'il n'était pas représentatif de l'ensemble de la surface du matériau. Ils ont soutenu que l'échantillon original ne permettait pas de voir qu'il s'agissait de nervures de bois et encore moins que le matériau contenait des nervures semblables à des noeuds, sans quoi ils n'auraient jamais choisi une telle finition. Ils ont également soutenu que la représentante du fournisseur d'armoires aurait dû leur mentionner qu'il s'agissait de nervures de bois et leur présenter un échantillon qui montrait de telles nervures, y compris les noeuds.

 

20.   Les Demandeurs exigent donc que les armoires en cause. soient remplacées.

 

21.   À noter que les Demandeurs n'en sont pas à leur premier achat de maison. De leur propre aveu, ils en ont possédé cinq (5) auparavant, ils connaissent donc la façon dont s'effectue le choix des matériaux.

 

22.   Quant à la Défenderesse et à la Co-défenderesse, elles considèrent avoir rempli leurs obligations en remettant un échantillon du produit et en fournissant des armoires de cuisine recouvertes de la mélamine correspondant à l'échantillon choisi par les Demandeurs. Ils soutiennent d'ailleurs que la remise d'un échantillon du format de celui remis aux Demandeurs rencontre la coutume courante du métier.

 

23.   Elles recherchent donc le rejet de la demande dans sa totalité.

 

L'opinion du tribunal :

 

24.   Pour le tribunal, l'échantillon original sur lequel les Demandeurs ont basé leur choix montre bien des nervures qui sont représentatives d'une pièce de bois.

 

25.   De ce fait, il était possible et même prévisible que le matériau puisse comporter des motifs semblables à des noeuds.

 

26.   Un échantillon, de par sa définition même, n'est qu'une faible partie d'un tout et ne peut jamais montrer tous les détails qui se retrouvent sur l'ensemble d'un matériau. Personne ne doit ni ne peut s'attendre à ce qu'un échantillon montre toutes les caractéristiques de l'ensemble.

 

27.   De plus, le vendeur ne peut nullement connaître les désirs et les restrictions de ses clients si ces derniers ne les expriment pas clairement et il n'a pas à scruter les reins et les coeurs pour connaître ceux-ci s'ils ne lui sont pas présentés. C'est aux clients à faire connaître les restrictions qu'ils ont, s'il en est. Selon le tribunal, c'est également aux clients à s'enquérir des particularités d'un produit s'ils ont des doutes quant à certaines de celles-ci et c'est à eux de poser les questions appropriées s'ils veulent plus de renseignements sur le produit qu'ils choisissent.

 

28.   Or, en réponse à une question posée par le tribunal, à savoir s'ils ont exprimé à la représentante du fournisseur d'armoires une restriction quant à un fini qui aurait l'allure du bois, lors de la présentation par cette dernière des échantillons de finition des surfaces, les Demandeurs ont catégoriquement affirmé que non.

 


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29.   Pour le tribunal, les Co-défendeurs ont bel et bien rempli leurs obligations en fournissant aux Demandeurs des armoires de cuisine recouvertes de la même mélamine que celle de l'échantillon original qui leur a été remis lors de l'établissement de leur choix.

 

La décision :

 

30.   Le tribunal n'a donc d'autre alternative que de rejeter totalement la demande des Demandeurs.

 

31.   Quant aux frais de l'arbitrage débourses par la Défenderesse, le tribunal précise qu'ils devront lui être remboursés par les Demandeurs et que tout autre coût devra être supporté par les Demandeurs, le tout tel que le requiert l'article 6.12.4 du certificat de garantie.

 

 

 

 

Décision rendue à Montréal,

ce 23 juin 2005,

par l'arbitre dûment mandaté par le CCAC

 

 

 

 

 

 

Robert Forcione, ingénieur