ARBITRAGE EN VERTU DU RÈGLEMENT SUR LE PLAN DE
GARANTIE DES BÂTIMENTS RÉSIDENTIELS NEUFS |
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CANADA |
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PROVINCE DE QUÉBEC |
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Groupe d’arbitrage et de médiation sur mesure (GAMM) |
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Dossier no : |
GAMM : 2008-09-025 |
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ENTRE : 9182-6818 QUÉBEC INC. (ci-après l’« entrepreneur »)
ET : LA GARANTIE DES MAÎTRES BATÎSSEURS (ci-après l’« administrateur »)
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DEVANT L’ARBITRE : |
Me Johanne Despatis |
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Pour l’entrepreneur : |
Me Élaine Leroux, procureure, assistée de : Mme Sophie Dragon |
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Pour l’administrateur : |
Me Marc Baillargeon, procureur, assisté de : M. Jasmin Girard |
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Date d’audience : |
4 février 2009 |
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Date de la sentence : |
11 février 2009 |
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SENTENCE ARBITRALE
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Adjudex inc.
0811-8313-GAMM
SA-8055
INTRODUCTION
[1] 9182-6818 Québec inc., l’entrepreneur, conteste en vertu de l’article 106 du Règlement sur le Plan de garantie des bâtiments résidentiels neufs, ci-après le Règlement, la décision suivante rendue le 13 janvier 2009 par La Garantie des Maîtres Bâtisseurs inc., l’administrateur, rejetant sa demande d’accréditation:
La présente est pour vous aviser du refus de votre demande d’accréditation auprès de La Garantie Habitation des Maîtres Bâtisseurs inc.
Veuillez être assuré que toutes les vérifications nécessaires ont été effectuées afin de bien évaluer votre demande, mais nous en sommes venus à la conclusion que nos critères de sélection n’ont pas été rencontrés.
Notre décision a été basée sur les items suivants :
- La solvabilité de votre entreprise n’est pas suffisante;
- La solvabilité des actionnaires et des compagnies liées aux actionnaires de 9182-6818 Québec inc. ne démontrent pas une solvabilité suffisante;
- Certaines informations fournies dans la demande d’adhésion, signée par l’un des actionnaires, sont inexactes;
- Certaines entreprises dans lesquelles les actionnaires de 9182-6818 Québec inc. sont impliquées ne sont pas en règle avec le Registre des entreprises du Québec;
[...]
[2] A ma demande et afin de faciliter l’administration de la preuve, monsieur Jasmin Girard, président et directeur général de l’administrateur est venu expliquer les motifs pour lesquels on a refusé d’accréditer l’entrepreneur.
[3] Les dispositions pertinentes du Règlement sont les suivantes :
78. Pour adhérer à un plan de garantie et obtenir un certificat d'accréditation, une personne doit :
1. remplir une demande d’adhésion sur la formule fournie par l'administrateur et la remettre à l'administrateur;
2. satisfaire aux conditions et aux critères financiers prescrits par la présente section;
3. signer la convention d'adhésion fournie par l'administrateur et comportant les engagements énumérés à l'annexe II;
4. détenir un cautionnement de 20 000 $ contre la fraude, la malversation et le détournement de fonds;
5. soumettre des états financiers complets vérifiés ou accompagnés d'un rapport de mission d'examen, rédigés par un comptable. Ces états devront être datés et signés par une personne en autorité. De plus, les états financiers ne doivent pas être datés de plus de 4 mois suivant la fin de l'année financière de l'entreprise;
6. produire une attestation suivant laquelle les actionnaires dirigeants et répondants ont été libérés de toute faillite personnelle ou qu’ils n’ont pas été impliqués dans une faillite d’entreprise de construction depuis au moins 3 ans;
7. produire le bilan personnel dûment rempli, daté et signé de chacun des dirigeants, actionnaires, répondants et associés;
8. déclarer l'ensemble de ses engagements envers des tiers et des compagnies affiliées ou autres tels l'hypothèque légale et le cautionnement envers des tiers;
9. produire une copie certifiée conforme de l'acte constitutif de son entreprise;
10. verser les frais d'adhésion exigés par l'administrateur;
11. produire une attestation suivant laquelle elle a demandé une licence d'entrepreneur auprès de la Régie ;
12. si cette personne, l’un de ses actionnaires détenant 20% ou plus des actions avec droit de vote ou l’un de ses dirigeants a été accrédité au cours des 3 dernières années par un autre administrateur, produire une déclaration de cet administrateur indiquant si des sommes lui sont dues par l’Entreprise requérante, l’un de ses actionnaires détenant 20% ou plus des actions avec droit de vote ou l’un de ses dirigeants.
[...]
80. L'administrateur délivre un certificat d'accréditation si les conditions prescrites par le présent chapitre sont remplies.
[...]
I. Entreprise de type A (Entreprise travaillant partiellement ou exclusivement dans le domaine de la construction de bâtiments résidentiels depuis moins de quatre ans)
84. Cette entreprise doit :
1. détenir un cautionnement d'une valeur minimum de 35 000$ sous l'une ou l'autre des formes suivantes :
a) cautionnement personnel;
b) lettre de garantie bancaire;
c) garantie hypothécaire;
d) cautionnement d'une tierce personne;
2. respecter, lorsqu'il est possible de les calculer, les critères financiers suivants :
a) ratio du fonds de roulement : 1,15;
b) ratio d'endettement : 80%;
c) valeur nette (10% du chiffre d'affaires) : 10%;
d) bénéfice brut : 18%;
e) bénéfice net : 5%.
Tous ces critères financiers doivent être
calculés selon une moyenne des
3 dernières années.
Lorsqu'une entreprise possède des compagnies liées ou affiliées, l'administrateur peut exiger un bilan consolidé ou les états financiers de chacune des compagnies.
[...]
88. Lorsqu’une entreprise ne remplit pas les exigences visées aux articles 84 à 87 ou dans le cas où il est impossible de calculer les critères financiers visés au paragraphe 2 de l’article 84, l’administrateur peut exiger toute autre condition ayant pour effet d’atteindre les mêmes fins en prenant en compte la compétence technique de l’entreprise.
L’administrateur peut exiger un cautionnement d’une valeur supérieure à celle mentionnée au paragraphe 1 de l’article 84 et au paragraphe 1 de l’article 85 lorsqu’il a des raisons de croire que la solvabilité de l’entrepreneur le requiert.
[...]
89. Une adhésion est valide pour une période d’un an.
[...]
93. L’administrateur peut annuler une adhésion lorsque l’entrepreneur se trouve dans l’une des situations suivantes :
1. il ne remplit plus l’une des conditions requises par le présent règlement pour obtenir un certificat d’accréditation ;
2. en cas de réticence ou de fausse déclaration de sa part ;
3. il est en défaut de paiement des frais d’adhésion, de renouvellement de l’adhésion ou d’enregistrement ;
[...]
PREUVE
[4] Le 27 mai 2008, madame Sophie Dragon, vice-présidente de l’entrepreneur, complète et signe au nom de l’entrepreneur le formulaire de demande d'adhésion en vue de l’accréditation de son entreprise par l’administrateur. Le document est un formulaire élaboré et adopté par l’administrateur et qui comporte la déclaration suivante :
Le signataire des présentes autorise La Garantie des Maîtres Bâtisseurs inc., à vérifier les renseignements fournis et à obtenir toutes les informations jugées nécessaires par GMB afin de compléter l’étude du dossier. De plus, il est possible que d’autres informations et documents soient nécessaires pour compléter votre dossier.
Je (nous) soussigné(s) certifie(ions) que les renseignements donnés dans cette demande d’adhésion sont vrais, exacts et complets et qu’ils constituent des considérations essentielles à l’accréditation de mon entreprise. Toute fausse déclaration peut entrainer le refus ou l’expulsion du souscripteur par GMB et pourra entrainer des poursuites éventuelles par GMB.
[5] Le demandeur est une entreprise de construction qui compte deux actionnaires à parts égales soit madame Sophie Dragon et son conjoint, monsieur Jean-Sébastien Ouellet. À l’audience, seule madame Dragon, représentée par procureure, était présente.
[6] Sur réception du formulaire de demande d’adhésion, explique monsieur Girard, l’administrateur en a entrepris l’examen. L’usage est en effet de vérifier l’exactitude des renseignements fournis, en outre d’en faire l’analyse, en vue d’assurer que le demandeur réponde aux conditions d’accréditation prévues au Règlement.
[7] Dans le cas où la solvabilité d’un demandeur apparait insuffisante ou encore lorsque des informations s’avèrent erronées, le dossier est automatiquement confié à un comité d’accréditation appelé à l’analyser plus à fond. Selon monsieur Girard, c’est ce qui s’est produit en l’espèce et qui explique le délai de huit mois écoulé entre la demande d’accréditation et son refus.
[8] Reprenant un à un les éléments de la décision, monsieur Girard explique comment l’administrateur en est venu à rejeter la demande de l’entrepreneur.
[9] Une première raison tient au fait que plusieurs informations données par madame Dragon se sont avérées inexactes ou incomplètes.
[10] En substance, l’administrateur lui reproche à ce chapitre de ne pas avoir dénoncé le fait important qu’une compagnie dont elle est la seule actionnaire, présidente et administratrice appelée Drake gestion de projet inc., Drake, avait non seulement déjà été accréditée auprès d’un autre administrateur d’une garantie au sens du Règlement mais également que cette entreprise était l’objet d’une action en justice entreprise par l’un de ses fournisseurs.
[11] En effet, selon la preuve, Drake avait déjà été accréditée à la Garantie des bâtiments résidentiels neufs de l’APCHQ et s’était vu retirer son accréditation comme en fait foi une lettre que l’administrateur avait reçue de ce dernier le 26 janvier 2009 :
Pour faire suite à votre demande nous confirmons par la présente de la compagnie « Drake Gestion de projet inc. » a été accréditée à la Garantie des bâtiments résidentiels neufs de l’APCHQ à compter du 10 mars 2006 et ce, jusqu’au 14 novembre 2006. Date à laquelle cette entreprise a été désaccrédité dans le cadre de l’application du Règlement sur le plan de garantie.
[...] [sic]
[12] Cette lettre est produite de consentement, son auteur n’est pas venu témoigner.
[13] Monsieur Girard ajoute que l’enquête avait aussi révélé que la poursuite contre Drake n’était pas terminée au moment où madame Dragon avait signé le formulaire.
[14] S’agissant de l’inexactitude de réponses fournies, monsieur Girard observe que madame Dragon n’a tout simplement pas mentionné l’entreprise Drake dans la section du questionnaire intitulée Liste des entreprises affiliées ou apparentées à l’un des propriétaires qui ne mentionne qu’une seule entreprise, Terrassement Renaissance Inc., dont madame Dragon et monsieur Ouellet sont les actionnaires uniques.
[15] De plus, poursuit monsieur Girard, madame Dragon avait répondu par la négative aux questions suivantes de la section 4.7 du formulaire de Demande d’accréditation intitulée Historique des propriétaires, des administrateurs et des dirigeants de l’entreprise alors qu’elle aurait dû y répondre oui :
4.71 Est que l’une des personnes impliquées dans votre entreprise a déjà été accréditée à un Plan de garantie ?
4.7.4 Est-ce que l’une des personnes impliquées dans votre entreprise a déjà été refusée, annulée ou expulsée d’un Plan de garantie ?
4.7.5 Est-ce que l’une des personnes impliquées dans votre entreprise a des recours devant les tribunaux ?
[16] Aux dires de monsieur Girard, ces informations inexactes, à elles seules, étaient suffisantes pour justifier le rejet de la demande puisqu’elles affectent directement la confiance qui doit exister entre un entrepreneur et sa caution qu’est l’administrateur.
[17] Quoi qu’il en soit, poursuit monsieur Girard, à cela s’ajoute également le fait que l’étude du dossier révélait que l’entrepreneur et ses actionnaires et compagnies liées n’avaient de toute façon pas une solvabilité suffisante aux yeux de l’administrateur pour justifier son accréditation.
[18] En effet, selon les informations fournies, l’entrepreneur projetait la construction de trois unités, ce qui signifie, explique monsieur Girard, que l’administrateur était appelé à toutes fins pratiques à le cautionner à hauteur d’environ 780 000 $. Évidemment, poursuit monsieur Girard, ce n’est pas cette somme qui est demandée à l’entrepreneur à titre de caution, le Règlement prévoyant toutefois que la caution minimum exigée soit d’au moins 35 000 $.
[19] Or, selon monsieur Girard, la somme de 35 000 $ offerte à titre de caution par l’entrepreneur ne répondait pas aux critères de l’administrateur s’agissant en fait de la valeur de l’outillage que disait posséder l’entrepreneur, une valeur jugée difficilement récupérable par l’administrateur en cas de défaut de l’entrepreneur.
[20] De plus, monsieur Girard souligne que l’administrateur a en outre vérifié à savoir si les actionnaires ou leurs compagnies liées pouvaient eux fournir une caution suffisante. Or, après un examen détaillé et des calculs élaborés qu’explique en détail monsieur Girard, l’administrateur en a conclu qu’ils ne le pourraient pas. D’une part, l’entreprise Terrassement Renaissance inc., affichait une perte nette de 22 830 $ et, d’autre part, l’examen des bilans personnels et déclarations d’impôts fournis par les actionnaires révélait, après certains rajustements également décrits par monsieur Girard, une solvabilité moindre que celle avancée par ces derniers.
[21] En outre, l’administrateur avait obtenu des rapports de crédits sur les deux actionnaires qui, ajoutés au reste, l’ont amené à juger que le critère de la solvabilité n’était pas rencontré et que le risque d’accréditer cet entrepreneur était trop grand, d’où la décision de rejeter la demande d’accréditation.
[22] Madame Sophie Dragon déclare pour sa part n’avoir aucunement tenté de cacher des informations à l’administrateur, les omissions qu’on lui reproche ayant été faites de bonne foi et par mégarde. Elle explique ainsi ne pas avoir mentionné la compagnie Drake dans le formulaire parce que celle-ci était à l’époque en voie de fermeture. Au surplus, dit-elle, elle croyait ne devoir mentionner que les entreprises dans lesquelles son conjoint était aussi impliqué.
[23] Au sujet des relations entre sa compagnie Drake et la Garantie des bâtiments résidentiels neufs de l’APCHQ, madame Dragon nie que sa compagnie en ait été expulsée. Selon elle, elle n’a tout simplement pas renouvelé son accréditation en ne payant pas sa cotisation se disant insatisfaite de cet administrateur et préférant de toute façon être accréditée auprès du présent administrateur.
[24] Quant aux réponses aux questions de la section 4.7, elle affirme n’avoir tout simplement pas bien compris les questions. Concernant l’existence d’un recours contre Drake, madame Dragon affirme qu’elle croyait, à tort, que ce litige était réglé par ses parents qu’elle avait mandatés pour régler l’affaire de sorte qu’elle n’en avait plus entendu parler.
[25] Interrogée sur son bilan personnel, madame Dragon affirme y avoir inscrit uniquement les informations qu’elle estimait nécessaires à l’obtention de l’accréditation et c’est pour cette raison qu’elle n’a pas mentionné l’ensemble de ses actifs. Elle ajoute que depuis, sa situation financière ainsi que celle de son conjoint avaient changé pour le mieux.
[26] Madame Dragon affirme que si on le lui avait demandé elle aurait été en mesure de fournir des garanties supplémentaires à celles déclarées.
[27] Relativement à ses revenus déclarés pour l’année 2007 de l’ordre de 25 000 $, elle les explique en disant qu’elle était alors en congé de maternité alors que les années antérieures notamment de 1995 à 2003, elle travaillait à titre de directrice du Centre d’appel pour l’entreprise Microtec et gagnait environ 80 000 $ par année. Elle situe ses revenus de l’année 2008 tout comme ceux de son conjoint à environ 65 000 $.
[28] Elle explique que le déficit enregistré par la compagnie Terrassement Renaissance inc. était en somme normal pour une entreprise qui ne compte qu’une année d’opération et que la situation de celle-ci allait s’améliorer dans le futur. Cependant, madame Dragon dira plus tard qu’elle et son conjoint envisagent la fermeture de cette entreprise.
[29] Madame Dragon affirme en outre qu’elle et son conjoint sont solvables et que l’administrateur ne veut tout simplement pas l’accréditer en raison de la mauvaise réputation de son père. C’est d’ailleurs ce que lui auraient mentionné madame Danielle Blais et monsieur Jacques Laliberté, deux personnes au service de l’administrateur avec qui elle a communiqué au cours de l’été 2008.
[30] Madame Dragon déplore enfin le fait que personne ne lui ait signalé que son dossier présentait un problème au niveau de sa solvabilité alors, dit-elle, qu’on lui avait affirmé le contraire à l’été 2008.
[31] C’est là, pour nos fins, l’essentiel de la preuve.
PLAIDOIRIES
Entrepreneur
[32] Abordant d’abord les informations inexactes alléguées par l’administrateur, la procureure souligne que madame Dragon a amplement expliqué les raisons pour lesquelles elle n’avait pas mentionné la compagnie Drake. Pour la procureure, madame Dragon n’a pas essayé de cacher cette information s’agissant tout au plus d’une omission faite de bonne foi.
[33] Au surplus, dit-elle, la désaccréditation de Drake par la Garantie des bâtiments résidentiels neufs de l’APCHQ et la poursuite contre celle-ci par un fournisseur ne sont pas des informations pertinentes pour établir la solvabilité de l’entrepreneur et auraient dû ne pas peser dans la décision.
[34] Se tournant ensuite vers la question de solvabilité, la procureure soutient que les actionnaires de l’entrepreneur sont solvables et les réajustements et calculs faits par l’administrateur visaient simplement à se donner une excuse pour refuser de les accréditer. Au surplus, poursuit la procureure, sa cliente était en mesure de fournir les cautions exigées par le Règlement et que s’il le jugeait à-propos, l’administrateur aurait dû s’en remettre à l’article 88 et exiger un cautionnement supplémentaire; ce qu’il n’a pas fait.
[35] En conclusion, selon la procureure, l’entrepreneur rencontrait les critères d’adhésion prescrits au Règlement et la seule raison qui explique le refus de l’administrateur est la mauvaise réputation du père de madame Dragon.
Administrateur
[36] Selon le procureur, il est faux de prétendre que madame Dragon aurait été victime de la mauvaise réputation de son père. Pour le procureur, cet élément n’a rien à voir avec la décision de l’administrateur.
[37] Au contraire, poursuit le procureur, la décision de l’administrateur repose, d’une part, sur le fait que la demande de l’entrepreneur ne divulguait pas l’information pertinente le concernant, en outre d’avoir sciemment caché des informations essentielles.
[38] Bien que ces agissements soient suffisants selon lui pour justifier à eux seuls le refus, la preuve a démontré, selon le procureur, que l’entrepreneur et ses actionnaires ne possèdent pas une solvabilité suffisante pour justifier leur accréditation.
[39] Certes, reconnait le procureur, l’administrateur aurait pu peut-être demander qu’on lui fournisse un cautionnement supérieur mais dans les circonstances les fausses informations fournies avaient irrémédiablement entaché le lien de confiance nécessaire pour que la caution s’engage envers l’administrateur.
ANALYSE ET DÉCISION
[40] Il s’agit de décider si le refus de l’administrateur d’émettre un certificat d’accréditation à l’entrepreneur est conforme au Règlement.
[41] En l’espèce, l’entrepreneur reproche essentiellement à l’administrateur de ne pas lui avoir donné l'occasion de répondre à ses préoccupations de solvabilité en omettant de lui demander de fournir un cautionnement d’une valeur supérieure au sens de l’article 88 du Règlement. Selon l’entrepreneur, il s’agirait donc là d’un faux prétexte alors que la vraie raison serait la mauvaise réputation du père de madame Dragon.
[42] Il est vrai que l’article 88 prévoit que l’administrateur peut exiger un cautionnement d’une valeur supérieure à celle mentionnée au paragraphe 1 de l’article 84 et au paragraphe 1 de l’article 85 lorsqu’il a des raisons de croire que la solvabilité de l’entrepreneur le requiert.
[43] Avec égards, j’estime que la preuve n’a pas démontré que l’administrateur a irrégulièrement exercé ce pouvoir discrétionnaire lorsqu'il a dans les circonstances, notamment à la lumière des informations soumises et omises, jugé qu’il n’était pas à propos de demander un cautionnement supplémentaire au sens de l’article 88.
[44] En effet, cette disposition confère une discrétion à l’administrateur qui peut le faire sans devoir le faire. Or, en l’espèce, la décision de l’administrateur de ne pas juger bon de demander un cautionnement supérieur était essentiellement basé sur le fait que d’autres critères que celui-là n’étaient pas rencontrés, critères portant directement atteinte à la crédibilité de l’entrepreneur. A cet égard, j’estime que les explications fournies par monsieur Girard sont rigoureuses, raisonnables et suffisantes pour justifier le refus de l’administrateur.
[45] L’administrateur à qui le législateur a confié le mandat d’émettre des certificats d’accréditation aux entrepreneurs doit certainement avant de le faire vérifier les informations fournies par ce dernier et ce n’est qu’après analyse qu’il peut juger si un entrepreneur rencontre les conditions prescrites par le Règlement.
[46] Ainsi, l’administrateur doit certes agir de bonne foi mais il ne lui incombe pas de parfaire la demande notamment lorsqu’il découvre que l’entrepreneur lui a caché ou a omis de lui signaler des informations sensibles concernant sa situation.
[47] En l’espèce, j’estime au-delà de la solvabilité et sans décider si les calculs à ce sujet effectués par l’administrateur étaient fondés ou non, que les informations inexactes, pour ne pas dire trompeuses, fournies par madame Dragon dans la demande justifiaient amplement le refus.
[48] L’alinéa 78 (1) du Règlement précise clairement que pour adhérer à un plan une personne doit notamment remplir la demande d’adhésion sur la formule fournie par l’administrateur et la lui remettre. Or, sur cette formule, madame Dragon a déclaré que les renseignements donnés dans cette demande d’adhésion sont vrais, exacts et complets et qu’ils constituent des considérations essentielles à l’accréditation de mon entreprise. Sur cette formule, il est également clairement spécifié que toute fausse déclaration peut entrainer le refus ou l’expulsion par l’administrateur.
[49] Il s’avère que la réponse par la négative notamment à la question de savoir si l’une des personnes impliquées dans l’entreprise demandant l’accréditation avait déjà soumis une demande d’adhésion à un administrateur est fausse puisque la preuve a démontré que madame Dragon était en fait la seule actionnaire, présidente et administratrice d’une entreprise qui avait déjà été accréditée auprès d’un autre administrateur puis désaccréditée. Avec égards, les explications fournies par madame Dragon pour expliquer sa réponse à cette question sont peu crédibles et ne changent rien au fait que sa déclaration à ce sujet était fausse.
[50] L’alinéa 78 (12) du Règlement prévoit que le personne qui demande d’être accréditée doit produire, notamment si l’un de ses actionnaires a été accrédité au cours des trois dernières années par un autre administrateur, une déclaration de cet administrateur indiquant si des sommes lui sont dues par l’entrepreneur. En l’espèce, on l’a vu, aucune telle déclaration n'avait été produite. Au contraire, madame Dragon n’a pas mentionné l’existence de cette accréditation sur le formulaire alors qu’une question précise à cet effet était posée.
[51] Cette dernière affirmation n’est pas la seule information inexacte fournie par madame Dragon et ses explications ne tiennent pas la route. Ainsi au sujet de la compagnie Drake, elle affirme dans un premier temps ne pas avoir bien compris les questions posées dans le formulaire alors que dans un second, elle dira avoir cru que l’entreprise Drake n’avait pas à être mentionnée parce qu’elle en était la seule actionnaire et que celle-ci était en voie de fermeture.
[52] Finalement, des fausses déclarations comme celles mises en preuve, justifient, à mes yeux, le refus de l’administrateur d’octroyer l’accréditation. En effet, l’article 93 du Règlement stipule qu’un administrateur peut annuler une adhésion en cas de fausse déclaration de la part d’un entrepreneur. Or, avec égards, si le fait de faire de fausse déclaration est suffisant pour amener l’annulation d’une adhésion accordée, à plus forte raison, il est raisonnable d’en déduire qu’une fausse déclaration faite au moment d’une demande d’accréditation peut en justifier le refus par l’administrateur.
[53] Pour toutes ces raisons, je rejette le recours de l’entrepreneur.
[54] J’ordonne que le coût du présent arbitrage soit défrayé à parts égales par l’administrateur et l’entrepreneur et ce conformément à l’article 123 du Règlement.
Montréal, le 11 février 2009
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__________________________________ Johanne Despatis, avocate Arbitre
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Adjudex inc.
0811-8313-GAMM
SA-8055