ARBITRAGE EN VERTU DU RÈGLEMENT SUR LE PLAN DE GARANTIE DES BÂTIMENTS RÉSIDENTIELS NEUFS
(Décret 841-98 du 17 juin 1998)
(Loi sur le bâtiment, L.R.Q., c. B-1.1)
Organisme d’arbitrage autorisé par la Régie du bâtiment :
CENTRE CANADIEN D’ARBITRAGE COMMERCIAL (« CCAC »)
ENTRE : SYNDICAT DE COPROPRIÉTÉ LOFTS
CHEVRIER 4474390
(ci-après « le Bénéficiaire »)
ET : 9201-0776 Québec inc.
(ci-après « l’Entrepreneur »)
ET : La GARANTIE HABITATION DU QUÉBEC INC.
(ci-après « l’Administrateur »)
No dossier CCAC : S15-081401-NP
Arbitre : |
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Me Albert Zoltowski |
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Pour le Bénéficiaire : |
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Me Richard Lavoie |
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Pour l’Entrepreneur : |
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Me Christine Gosselin et Madame Marie- Pier Racine |
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Pour l’Administrateur : |
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Me François-Olivier Godin |
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Date de la sentence : |
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Le 19 août 2016 |
Identification complète des parties
Arbitre : |
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Me Albert Zoltowski 1010, de la Gauchetière Ouest Bureau 950 Montréal (Québec) H3B 2N2 |
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Bénéficiaire : |
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Syndicat de copropriété Lofts Chevrier 4474390 Mme Antonia Craciun […] Brossard (Québec) […]
À l’attention de Me Richard Lavoie, avocat 10, Notre-Dame est, 4e étage Montréal (Québec) H2Y 1B7 |
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Entrepreneur : |
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9201-0776 Québec inc. 1981, Bernard - Pilon Beloeil (Québec) J3G 4S5
À l’attention de Mme Marie - Pier Racine |
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Administrateur : |
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La Garantie Qualité Habitation 9200, boulevard Métropolitain Est Montréal (Québec) H1K 4L2
À l’attention de Me François-Olivier Godin, avocat |
HISTORIQUE DU DOSSIER :
5 août 2015 : Décision de l’Administrateur rendue par Monsieur Denis Robillard, conciliateur ;
14 août 2015 : Le centre canadien d’arbitrage commercial (ci-après le « CCAC ») reçoit la demande d’arbitrage du Bénéficiaire ;
2 octobre 2015 : L’Arbitre reçoit le cahier des pièces de l’Administrateur ;
15 octobre 2015 : Conférence préparatoire avec les parties ;
26 janvier 2016 : Audition ;
19 août 2016 : Sentence arbitrale ;
SENTENCE ARBITRALE
Introduction :
1. Dans ce dossier, il s’agit d’un bâtiment résidentiel détenu en copropriété comptant quelques 30 unités réparties sur 3 étages qui est situé au [...], à Brossard (ci-après « le bâtiment »).Les revêtements extérieurs du bâtiment sont de briques, d’aluminium et de crépi d’acrylique.
2. La problématique qui fait l’objet de cette sentence concerne le revêtement d’acrylique.
3. Le 5 août 2015, l’Administrateur, sous la plume de Monsieur Denis Robillard, T.P., a rendu une décision à l’effet que la dénonciation de problèmes affectant le revêtement d’acrylique, comprenant une demande de réparation de ce revêtement de la part du Bénéficiaire datée du 17 novembre 2014 n’este pas reconnue comme admissible au plan de garantie régi par le Règlement sur le plan de garantie des bâtiments résidentiels neufs (ci-après « le Règlement »).
4. Cette décision a été portée à l’arbitrage par le gestionnaire agissant pour le compte du Bénéficiaire auprès du Centre canadien d’arbitrage commercial (« CCAC »), qui désigna l’arbitre soussigné afin qu’il statue sur cette demande.
5. Après les étapes usuelles consistant en communications écrites et verbales entre l’arbitre soussigné (ci-après « le Tribunal arbitral » ou « le Tribunal ») et les parties ainsi que la tenue d’une conférence préparatoire, une audition d’une durée de 1 jour a été tenue le 26 janvier 2016.
6. Elle a été précédée d’une visite de l’arbitre soussigné au bâtiment. Étaient présents aussi lors de cette visite, les procureurs et les représentants des parties et leurs témoins.
7. Les témoins du Bénéficiaire étaient :
a) Monsieur Alexandre Weisthoff, G.C.A., gestionnaire principal du Bénéficiaire,
b) Monsieur André Grenier, inspecteur en bâtiment,
c) Monsieur André Pépin, et
d) Monsieur Patrick Gautreau,T.P., inspecteur en bâtiment et reconnu comme un expert par le Tribunal.
8. Le Bénéficiaire a déposé également en preuve les pièces cotées B-1 à B-5.
9. Les personnes suivantes ont témoigné pour l’Administrateur:
a) Madame Karine Pépin,inspectrice-conciliatrice et auteure d’une décision antérieure du 24 novembre 2011 de l’Administrateur; et
b) Monsieur Denis Robillard T.P.,inspecteur-conciliateur et auteur de la décision de l’Administrateur datée du 5 août 2015 qui constitue l’objet de cette arbitrage.
10. L’Administrateur a soumis avant l’audition son cahier contenant ses pièces cotées A-1 à A-8.
11. L’Entrepreneur, bien que présent lors de l’audience en la personne de Madame Marie-Pier Racine, n’a présenté aucun témoin ni preuve documentaire.
12. La valeur de la réclamation du Bénéficiaire excède 60 000$.
LE CONTEXTE FACTUEL :
13. Le premier rapport d’inspection des parties communes du bâtiment qui traite, parmi plusieurs éléments, du revêtement d’acrylique, est signé par Monsieur Patrick Gautreau, T.P. Il est daté du 31 mai 2011 (pièce A-7). Étant donné que la date de réception des parties communes est aussi le 31 mai 2011, il s’agit en toute probabilité du rapport d’inspection pré-réception prévu par les dispositions du Règlement.
14. Dans ce rapport, Monsieur Gautreau réfère au revêtement d’acrylique. Pour les fins de cette sentence, il serait utile de citer in extenso les constatations de l’inspecteur Gautreau :
« Revêtement d’acrylique :
Ce revêtement de type « a étanchéité unique » demande une plus grande attention relative à l’apparition de fissures ou de l’étanchéité du calfeutrage. Ces altérations peuvent causer plus de dommages par l’eau et dégrader prématurément le revêtement. Sa bonne condition devra d’avantage être surveillée.
Nous n’observons pas de rejet d’eau ou de larmier. Assurez-vous auprès de l’entrepreneur que les directives du fabricant ont été suivies. De plus, des retouches de calfeutrage devront être réalisées à la jonction de la brique et autour des fenêtres, là où il se détache.
D’autre part, une section du revêtement a été encochée dans le secteur avant droit et une retouche devra être effectuée.
Balcons aux étages :
Les balcons sont constitués d’une structure de bois recouverte d’un panneau en fibre de verre. On nous indique que les balcons s’écoulent sur les autres. Il faut noter que les rebords ne comportent pas de larmier de rejet d’eau. » (pièce A-7).
15. Ce rapport d’inspection était annexé à un écrit de dénonciation, en format courriel, du Bénéficiaire adressé à l’Entrepreneur et à l’Administrateur. Les points énumérés à ce rapport ont fait l’objet de la première décision de l’Administrateur datée du 24 novembre 2011 signée par Madame Karine Pépin, conciliatrice (pièce A-8).
16. Dans cette première décision, l’Administrateur (sous la plume de Madame Karine Pépin) ne mentionne pas les points notés au rapport d’inspection de M. Gautreau sous les titres « Revêtement d’acrylique » et « Balcons aux étages » cités ci-haut. Sous le titre « DÉCISION DE L’ADMINISTRATEUR » elle écrit seulement:
« Les éléments non-énumérés sont considérés dans le présent rapport comme étant faits ou abandonnés. »
17. Cette première décision de l’Administrateur n’a pas été l’objet d’une décision amendée de l’Administrateurn ou d’une demande d’arbitrage de la part du Bénéficiaire.
18. Pour les fins de cette description des faits, on se déplace maintenant en mode accéléré au mois de novembre 2014.
19. Le 12 novembre 2014, Monsieur Patrick Gautreau, procède à une nouvelle et 2e visite d’inspection du bâtiment. Elle vise seulement le revêtement en acrylique. Le lendemain, soit le 13 novembre il signe un 2e rapport d’inspection, dans lequel il constate les points suivants :
« Rejet d’eau au-dessus des portes et des fenêtres :
Il n’y a pas de rejet d’eau au-dessus des portes et fenêtres……
Il n’y a pas de contresolin (ou larmier) pour limiter l’introduction d’eau dans le revêtement en cas de fissuration ou de bris sous les fenêtres (seuil).
…….Aussi la tablette de fenêtre devrait avoir une pente qui favorise le drainage.
Base de revêtement
Il doit y avoir un solin ou une moulure au bas du mur pour rejeter l’eau. Dans le cas qui nous occupe, cette moulure n’a pas été posée. De plus, il n’y aucune cavité de drainage dans le bas (souligné par le Tribunal).
Cavité de drainage
Nous ne pouvons déterminer si le revêtement comporte une cavité de drainage. Cela devrait être validé pour convenir du type de correctifs à réaliser.
Jonction des balcons
…… où il y a une rencontre d’un élément horizontal tel un balcon, il faut qu’il y ait un rejet d’eau et un solin étanche. De plus, le revêtement doit être dégagé de la surface du palier des balcons
RECOMMANDATIONS :
S’il y a une cavité de drainage, il faudra alors refaire en partie le revêtement d’acrylique afin de corriger certaines jonctions et surtout favoriser le drainage de l’eau et l’assèchement de la cavité murale selon les règles de l’art et les exigences du fabricant.
Pour cela, il faudra procéder à la mise en place de membranes d’étanchéité et de solins métaliques en guise de rejet d’eau…
Pour ce faire, il faudra retirer une partie du revêtement et installer …
Par contre, s’il n’y a pas de cavité drainante et de protection contre l’humidité appropriée, il faudra alors refaire tous les revêtements d’acrylique selon les règles de l’art.
CONCLUSION :
Le revêtement d’enduit d’acrylique n’a pas été réalisé selon les règles de l’art ni en respect des exigences du Code du bâtiment. Ce dernier ne comporte aucun rejet d’eau afin de permettre potentiellement à la cavité derrière le revêtement de se drainer et de s’assécher. Cela pourrait causer des infiltrations d’eau et un endommagement à la structure de bois comme c’est survenu à un bâtiment voisin selon les informations obtenues.
Rappelons que l’expérience et les recherches des années passées ont démontré plusieurs irrégularités et cas problématiques sérieux liés au crépi d’acrylique. C’est pourquoi nous recommandons de corriger le revêtement selon les méthodes reconnues. »
(pièce A-4)
20. Ce 2e rapport du 13 novembre 2014 (pièce A-4) a été annexé à la lettre de dénonciation du Bénéficiaire datée du 17 novembre 2014. Elle a été transmise à l’Entrepreneur et à l’Administrateur. Les 2 premiers paragraphes de cette lettre se lisent comme suit :
« Le conseil d’administration du Syndicat de copropriété Lofts Chevrier ([...]) désire vous informer que le revêtement d’acrylique que vous avez fait installer à l’immeuble sis au [...] est inadéquat.
Les administrateurs ont fait produire une analyse du revêtement d’acrylique dont les conclusions sont accablantes. Il est démontré que votre revête (sic) et que des travaux de reconstruction sont nécessaires afin de préserver la pérénnité de l’immeuble. »(Note A faisant partie de la décision de l’Aministrateur, la pièce A-3)
21. Avant de rendre sa décision, le conciliateur, Monsieur Robillard a visité le bâtiment en présence de Monsieur André Grenier (représentant du Bénéficiaire) et de Madame MariePier Racine (représentante de l’Entrepreneur).
22. Dans sa décision du 5 août 2015, M. Robillard écrit ce qui suit :
« Considérant que l’expert fait mention de malfaçons apparentes au rapport du 31 mai 2011.
Considérant qu’aucune nouvelle problématique a été dénoncée à ce jour.
Considérant que les situations décrites doivent être réclamées par écrit à l’entrepreneur et à l’administrateur dans un délai raisonnaible, lequel ne peut excéder six (6) mois de l’inspection préréception;
N’ayant pas été réclamées par écrit à l’entrepreneur et à La Garantie Qualité-Habitation dans les 3 ans suivant l’inspection préréception;
(Au sens de l’article 2925 du Code civil du Québec : L’action qui tend à faire valoir un droit personnel ou un droit réel mobilier et dont le délai de prescription n’est pas autrement fixé se prescrit par trois ans)
Par conséquent, La Garantie Qualité Habitation ne peut reconnaître ce point dans le cadre de son mandat. »
23. À la date de cette visite, aucun trou dans le revêtement extérieur n’était encore percé.
24. Ce n’est que le 20 août 2015, soit quelques 2 semaines après la décision de l’Administrateur, que Monsieur Grenier, pour le compte du Bénéficiaire, a fait une ouverture en bas du revêtement d’acrylique. Il a mesuré le taux d’humidité du panneau rigide derrière le revêtement d’acrylique ainsi que d’une composante de la structure en bois. Ces mesures du taux d’humidité et ce qu’il a constaté derrière l’ouverture font l’objet de 8 photos faisant partie de son rapport du 20 août 2015 (pièce B-1).
25. Monsieur André Pépin de la compagnie Aléa Construction Inc. a déposé une soumission budgétaire datée le 14 ocobre 2015 (pièce B-2) pour effectuer des réparations fondées sur les problèmes dénoncés en novembre 2014, ainsi que sur la base du rapport de Monsieur Grenier du 20 août 2015 et d’un compte rendu d’une visite au bâtiment de Monsieur Grenier le 7 août 2015 qui n’a pas été déposé en preuve. Cette estimation préliminaire démontre que le coût des travaux consistant principalement en l’enlèvement et la réfection du revêtement d’acrylique selon les régles de l’art y applicables, la réparation (s’il y a lieu) des murs extérieurs afin de recevoir le nouveau système de murs d’acrylique et pour changer l’aluminium des soffites, couterait 173 500$. En y ajoutant les frais d’administration et une marge de profit de l’entreprise Aléa Construction Inc., le montant total s’élève à 199 525$, avant les taxes. Cette soumission n’inclut pas toutes les réparations qui pourraient être nécessaires une fois que tout le revêtement d’acrylique était enlevé. La réparation des parments intermédiaires, y compris la réparation de la structure de bois n’est pas comprise dans cette soumission. Monsieur Pépin a témoigné qu’il prévoyait que les travaux de réparation auraient une durée approximative de 1 mois ou 1 mois et demi et seraient effectués par 6 ouvriers.
26. Quelques semaines après la date de cette estimation préliminaire des coûts de réparation, soit en novembre 2015, l’expert Monsieur Gautreau a fait une nouvelle inspection détaillée du revêtement d’acrylique. Il a profité de l’ouverture faite par Monsieur Grenier en août 2015 pour faire des nouvelles observations et donner une opinion plus précise sur les problèmes de ce revêtement d’acrylique, notamment quant à la non-conformité de la membrane d’étanchéité et l’absence d’une cavité drainante entre la membrane existante (et inadéquate), et le panneau isolant rigide en mousse de polystyrène expansée. Ses observations et son opinion sont décrits dans son 3e rapport daté du 17 décembre 2015 (pièece B-4).
LES PRÉTENTIONS DES PARTIES :
Les prétentions du Bénéficiaire :
27. Selon le Bénéficiaire, la lettre de dénonciation de novembre 2014 qui était accompagnée du 2e rapport de Monsieur Gautreau daté du 13 novembre 2014 (pièce A-4) démontre l’existence de 2 vices nouveaux, soit l’absence d’une cavité drainante derrière le revêtement et l’absence d’une cavité de drainage en bas du revêtement. Il s’agit de vices majeurs dont la réparation est garantie selon le paragraphe 27(5) du Règlement.
28. Les dommages derrière le revêtement, quoiqu’invisibles en novembre 2014, pouvaient être anticipés à la lumière des problèmes d’infiltration d’eau dans les 2 bâtiments avoisinants ayant un revêtement d’acrylique et qui ont été aussi construits par l’Entrepreneur. Selon le Bénéficiaire, ces dommages peuvent être qualifiés de « pertes potentielles », lesquelles sont reconnues par la jurisprudence.
29. Les problèmes dénoncés par le Bénéficiaire à l’aide du rapport d’inspection pré-réception aussi sous la plume de Monsieur Gautreau daté du 31 mai 2011 (manque de rejet d’eau et de larmier et absence de solin) ont été considérés par l’Administrateur dans sa décision comme des vices apparents plutôt que des vices majeurs qui sont garantis aux termes du paragraphe 27(5) du Règlement.
Les prétentions de l’Administrateur :
30. La dénonciation écrite de novembre 2014, comprenant le 2e rapport de Monsieur Gautreau du 13 novembre 2014 (pièce A-4) n’établit pas clairement l’absence d’une cavité drainante derrière le revêtement. Monsieur Gautreau n’a pas constaté l’absence de cette cavité lors de sa visite avant la rédaction de son rapport. Dans ce rapport, il écrit seulement que le choix des mesures correctives dépendrait de l’absence ou de la présence d’une telle cavité.
31. Cette dénonciation écrite de novembre 2014 ne mentionne pas qu’il existe un danger sérieux susceptible d’entraîner la perte de l’ouvrage, selon la citation tirée d’une décision arbitrale[1] :
« Comme on l’a vu plus haut, la jurisprudence n’exige pas qu’un édifice s'écroule pour qu'il y ait perte de l’ouvrage au sens du Code civil du Québec. La simple présence d'un danger sérieux susceptible d’entraîner une perte de l'ouvrage suffit pour ouvrir droit à cette garantie. En somme, on dira qu’il y a perte de l’ouvrage lorsqu’est démontrée la présence d’un vice d’une gravité propre à en affecter la solidité. Autrement dit, pour qu’une déficience soit qualifiée de grave ou sérieuse, selon l'article 2118, elle doit présenter une gravité susceptible de mettre en péril la solidité ou la stabilité de l'immeuble. »
32. De plus, selon l’Administrateur, la preuve ne démontre pas un danger sérieux pouvant entraîner la perte de l’ouvrage.
C’est seulement en novembre 2015, précédant la rédaction de son dernier et 3e rapport du 17 décembre 2015 (pièce B-4) que Monsieur Gautreau pouvait être certain d’un dommage à l’immeuble.
33. L’Administrateur reconnait que la jurisprudence admet qu’un risque à la sécurité des occupants d’un immeuble peut être considéré comme une « perte » de l’ouvrage immobilier pour les fins de l’article 2118 du Code civil et du paragraphe 27(5) du Règlement.
34. En ce qui concerne l’absence d’une membrane d’étanchéité derrière le revêtement, elle n’a pas été et elle n’a pas pu être dénoncée en novembre 2014. Selon le témoignage de Monsieur Gautreau, il l’a découvert seulement lors de sa visite en novembre 2015.
35. Les problèmes identifiés initialement par Monsieur Gautreau dans son rapport pré-réception du 31 mai 2011 et dénoncés le 29 juin 2011(absence de rejet d’eau, et absence de solin), sur lesquels Madame Pépin n’a pas statué dans la 1ère décision de l’Administrateur du 24 novembre 2011, et qui sont par ailleurs détaillés et expliqués plus amplement dans le rapport d’inspection du 13 novembre 2014 (faisant partie de la nouvelle dénonciation) sont prescrits selon les termes de l’article 2925 du Code civil du Québec.
ARGUMENTS DE L’ENTREPRENEUR :
36 . L’Entrepreneur prétend que l’absence de larmier et des solins pourrait causer des dommages seulement au revêtement d’acrylique et pas à la structure du bâtiment. En 2011 lorsque la conciliatrice, Madame Karine Pépin, a visité le bâtiment avant de rendre sa première décision du 24 novembre 2011 (pièce A-8), elle n’a constaté aucune dégradation à l’acrylique, selon son témoignage.
37. Selon l’Entrepreneur, le Bénéficiaire doit assumer le risque de dégradation d’acrylique en omettant de faire des ouvertures dans ce revêtement en 2011 pour voir si des dégâts sont survenus ou pas.
ANALYSE ET DÉCISION :
38. La décision de l’Administrateur du 5 août 2015 est fondée sur la lettre de dénonciation du Bénéficiaire à l’Entrepreneur et à l’Administrateur datée du 17 novembre 2014. Elle est accompagnée du rapport de l’expert Gautreau daté du 13 novembre 2014 (pièce A-4).
39. Compte tenu des délais de garantie de réparation de différents vices et malfaçons mentionnés à l’article 27 du Règlement, c’est seulement la garantie de réparation de 5 ans couvrant des vices de conception, de construction ou de réalisation et des vices du sol, prévue au paragraphe 5 de cet article qui peut aider le Bénéficiaire. Ce paragraphe 5 de l’article 27 se lit comme suit :
«27. La garantie d'un plan dans le cas de manquement de l'entrepreneur à ses obligations légales ou contractuelles après la réception de la partie privative ou des parties communes doit couvrir:
5° la réparation des vices de conception, de construction ou de réalisation et des vices du sol, au sens de l'article 2118 du Code civil, qui apparaissent dans les 5 ans suivant la fin des travaux des parties communes ou, lorsqu'il n'y a pas de parties communes faisant partie du bâtiment, de la partie privative et dénoncés, par écrit, à l'entrepreneur et à l'administrateur dans un délai raisonnable de la découverte ou survenance du vice ou, en cas de vices ou de pertes graduelles, de leur première manifestation significative; »
40. Pour convaincre ce Tribunal que les problèmes affectant le revêtement d’acrylique qu’il a dénoncés en 2014 sont des vices couverts par ce paragraphe, le Bénéficiaire doit prouver, selon la balance des probabilités, ce qui suit :
1. Que les problèmes dénoncés constituent un ou des vices sérieux
2. Qu’il s’agit de vices qui peuvent entraîner la perte de l’ouvrage immobilier
3. Que ces vices soient apparus dans les 5 ans de la date de la fin des travaux des parties communes
4. Que la dénonciation écrite de novembre 2014 ait été faite dans un délai raisonnable qui ne peut pas excéder 6 mois de la découverte ou survenance du vice ou, en cas de vices ou pertes graduelles, de leur première manifestation.
La notion de « vice » :
41. Le paragraphe 27(5) du Règlement réfère expressément à la notion de « vice de conception, de construction ou de realisation…, au sens de l’article 2118 du Code civil ».
42. La démonstration de l’existence d’un « vice » relève essentiellement de l’expertise …. les tribunaux réfèrent donc aux règles de l’art, tel qu’établi par cette preuve d’expertise et vérifient si elles ont été effectivement suivies.[2]
43. De plus, tous les vices qui sont couverts par la garantie du paragraphe 27(5) du Règlement, doivent constituer des « défectuosités graves » tel que mentionné par la Cour d’appel dans la décision Installations GMR inc. citée ci-bas.
La notion de « perte » :
44. Ces vices prévus au paragraphe 27(5) du Règlement sont ceux « au sens de l’article 2118 du Code civil».
45. L’article 2118 du Code civil s’applique seulement aux vices qui sont susceptibles d’entrainer la perte de l’ouvrage immobilier.
46. Cette notion de « perte de l’ouvrage » a été souvent interprétée par les tribunaux. Dans le jugement Habitations des Cônes[3], le juge Alain Michaud de la Cour supérieure s’exprime ainsi quant à la signification de la « perte » prévue à l’article 2118 CCQ :
« [21] Les désordres assujettis au mécanisme de l'article 2118 C.c.Q. sont ceux qui peuvent entraîner la perte de l'ouvrage : sont ici visées les dégradations significatives du bâtiment, susceptibles de menacer son intégrité ou d'affecter sa pérennité.
[22] Il s'agit ici de dangers sérieux, même s'il est admis que la notion de « perte », au sens de l'article 2118 C.c.Q., doit recevoir une interprétation large. Le danger de ruine peut être imminent ou latent, et la perte éventuelle peut n'être que partielle. La juge Monast, dans une situation présentant des similitudes avec la nôtre, citait les auteurs Rodrigue et Edwards (32) pour tracer la ligne entre les déficiences graves ou sérieuses (sous 2118 C.c.Q.) et celles pouvant être qualifiées de mineures (sous 2120 C.c.Q) (33):
[151] Ainsi, pour que des déficiences soient qualifiées de «graves » ou «sérieuses» selon l'article 2118 C.c.Q. par opposition à des déficiences qui seraient qualifiées de «mineures» au sens de l'article 2120 C.c.Q., elles doivent avoir une certaine gravité et être susceptibles de mettre en péril la solidité ou la stabilité de l'immeuble:
«Pour se prévaloir de l'article 2118 C.c.Q., il n'est nécessaire d'établir ni le fait que l'ouvrage a péri ni le moment auquel il va s'écrouler. Il suffit de démontrer la présence des inconvénients ou d'un danger sérieux qui pourrait entraîner une perte de l'ouvrage, c'est-à-dire une perte potentielle.
[…]
La notion de «perte» au sens de l'article 2118 C.c.Q. doit donc, tout comme la notion analogue de ce terme au sens de l'article 1688 C.c.B.C. recevoir une interprétation large et s'étendre notamment à tout dommage sérieux subi par l'ouvrage immobilier.
Il est également possible que la simple perte de l'usage normal des lieux tombe sous le coup de cette disposition. De fait, certains tribunaux ont décidé, en vertu des règles de l'ancien Code, que la présence de troubles graves, nuisant à l'utilisation de l'immeuble, constituait une perte. La responsabilité quinquennale a notamment été retenue lorsque les vices empêchaient l'ouvrage de servir à sa destination normale ou limitaient, de manière importante, l'usage normal de l'ouvrage.
Une simple perte partielle est suffisante lorsqu'il y a menace d'effondrement ou de fléchissement de certaines parties de l'ouvrage ou encore de ses composantes essentielles.
En revanche, il est important de ne pas perdre de vue que le dommage subi, qu'il soit actuel ou à venir, doit être majeur afin d'être qualifié de perte. En particulier, la responsabilité prévue à l'article 2118 C.c.Q. ne trouve pas application à l'égard de simples malfaçons ou de vices de faible importance qui ne nuisent pas à la solidité ou à l'intégrité de l'ouvrage. […]» [nous soulignons] »
47. En septembre 2015, la Cour d’appel du Québec, dans le jugement Installations GMR inc. c. Pointe-Claire (Ville de)[4], a confirmé que la notion de « perte » englobe non seulement le fait où la solidité et la stabilité de l’ouvrage sont affectées mais aussi lorsque l’ouvrage est rendu impropre à l’usage auquel il est destiné :
« [9] Il est bien établi, et la Cour l’a rappelé en quelques occasions, qu’une défectuosité grave entraînant des inconvénients sérieux et rendant l’ouvrage impropre à son usage constitue une perte.(38) En l’espèce, la défectuosité dont était affecté l’ouvrage constituait un vice de conception grave, qui s’est manifesté dans les cinq ans de la fin des travaux, et elle entraîne l’application de l’article 2118 C.c.Q. et la responsabilité des défenderesses GMR et CIMA. Elles peuvent toutefois s’en dégager en faisant la preuve d’un moyen d’exonération prévu à l’article 2119 C.c.Q…. »
Les vices consistant en absence de rejet d’eau et de solins :
48. L’absence des rejets d’eau ou larmiers et de solins à différents endroits dans le revêtement ont été observés et décrits sommairement par Monsieur Gautreau dans son rapport d’inspection pré-réception qui a été dénoncé à l’Administrateur en 2011. De plus, ils ont été repris de façon plus détaillée dans son deuxième rapport du 13 novembre 2014, faisant partie de la dénonciation du Bénéficiaire.
49. Lors de son témoignage, l’expert Monsieur Patrick Gautreau, a déclaré que ces problèmes constituaient des vices de construction car elles n’étaient pas conformes aux règles de l’art de l’installation d’un revêtement d’acrylque ni aux principes prévus au Code du bâtiment pour la contruction d’un revêtement. Il a aussi déclaré que lors de son inspection pré-réception précédant la rédaction de son rapport du 31 mai 2011, il n’a constaté aucun dommage au revêtement. De plus, il a reconnu qu’en 2011 il ne pouvait pas prédire la probabilité de dommages à la structure du mur s’il y avait une membrane d’étanchéité adéquate et si une cavité drainante existait derrière le revêtement.
50. Selon un extrait de l’article de Rodrigue et Edwards, cité dans le jugement Habitations des Cônes noté ci-haut, pour qu’un vice puisse être considéré comme un vice qui cause la perte de l’ouvrage au sens de l’article 2118 du Code civil :
….il n’est nécessaire d’établir ni le fait que l’ouvrage a péri ni le moment auquel il va s’écrouler. Il suffit de démontrer la présence des inconvénients ou d’un danger sérieux qui pourrait entraîner une perte de l’ouvrage, c’est-à-dire une perte potentielle » .[5](souligné par le Tribunal arbitral)
51. Selon le témoignage de Monsieur Gautreau, ces vices qui ont été dénoncés en mai 2011 ne représentaient pas en 2011 une « perte potentielle ».
52. Selon le Tribunal, il s’ensuit que ces vices ne peuvent pas être considérés comme des vices de conception, de construction ou de réalisation au sens du paragraphe 27(5) du Règlement.
La tablette des fenêtres et le manque de dégagement entre la surface du palier des balcons et du revêtement :
53. Ces problèmes ont été dénoncés dans le rapport de Monsieur Gautreau du 13 novembre 2014 (pièce A-4). Ils n’ont pas fait l’objet d’une preuve spécifique lors de l’audition.
54. Conséquemment, au moins un des éléments de requis pour l’application du paragraphe 27(5), soit l’établissement d’un lien de causalité entre le vice et une perte ou une perte potentielle de l’ouvrage n’a pas été établi.
55. Faute d’une preuve suffisante, le Tribunal ne peut que conclure que la réparation de ces deux vices n’est pas prévue par le paragraphe 27(5) du Règlement.
L’absence d’une cavité drainante derrière le revêtement :
56. Tel que déjà mentionné ci-haut, un des éléments dont la preuve est requise pour l’application de la garantie prévue au paragraphe 27(5) du Règlement est que le vice « apparaisse dans les cinq ans de la date de la fin des travaux des parties communes ».
57. Selon le témoignage de Madame Karine Pépin, la date de la fin des travaux des parties communes du bâtiment selon les documents au dossier de l’Administrateur est le 18 février 2010. La date du 2 février 2010 inscrite à la première décision de l’Administrateur du 24 novembre 2011 qu’elle a rédigée, résulte d’une erreur cléricale.
58. Il s’en suit que dans cette cause, pour qu’un vice puisse rencontrer les exigences du paragraphe 27(5), il aurait dû apparaître le ou avant le 18 février 2015.
59. Malgré les recommandations de l’expert Gautreau quant aux mesures correctives requises advenant la présence d’une cavité drainante derrière le revêtement ou advenant son absence (selon son rapport du 13 novembre 2014, pièce A-4, page 3), ce rapport qui accompagnait la lettre de dénonciation, ne peut servir de preuve de la survenance, de l’apparence, ou de la manifestation de de ce vice. La présence ou l’absence de cette cavité drainante ont été formulées seulement à titre d’hypothèses pour les fins de recommandations des mesures correctives dans chacun de ces cas. Malgré le fait que cette problématique est incontestablement un vice de construction selon la preuve présentée par Monsieur Gautreau, néanmoins elle est apparue après la date butoire du 18 février 2015.
60. Ce vice n’a pu apparaître avant l’ouverture du revêtement par Monsieur Grenier le 20 août 2015, tel que décrit dans son rapport (coté pièce B-1) et expliqué lors de son témoignage.
61. Ce n’est qu’après avoir examiné les photos dans le rapport de Monsieur Grenier et procédé à une visite au bâtiment à deux reprises en novembre 2015, que Monsieur Gautreau a pu constater et décrire ce vice dans son 3e rapport du 17 décembre 2015 (pièce B-4).
62. Par conséquent, l’absence d’une cavité drainante derrière le revêtement d’acrylique du bâtiment, est un vice qui ne peut pas bénéficier de la garantie prévue au paragraphe 27(5) du Règlement.
L’absence d’une cavité drainante en bas du revêtement d’acrylique :
63. L’absence d’une cavité drainante dans le bas du revêtement d’acrylique a été constatée par l’expert Gautreau en novembre 2014 et décrit pour la première fois dans son rapport du 13 novembre 2014 (pièce A-4).
64. Il est clair que cette absence d’une cavité drainante est non-conforme aux règles de l’art qui régissent l’installation d’un revêtement d’acrylique.Ces règles de l’art ont été prouvées par Monsieur Gautreau au moyen de dessins techniques dont l’un est tiré du Guide de « Systèmes d’isolation des façades avec enduit »(2004) de la SCHL et l’autre d’un document d’installation générale de la compagnie Adex. Ces dessins sont reproduits s dans le rapport de M. Gautreau (pièce B-4 page 9).
65. Il s’ensuit que l’absence de cette cavité drainante en bas du revêtement d’acrylique du bâtiment constitue un vice de conception, de construction ou de réalization de ce revêtement.
66. Monsieur Gautreau a également établi le lien de causalité entre ce vice et une perte ou perte potentielle de l’ouvrage.
67. Au moment de la dénonciation de ce vice en novembre 2014, cette perte n’était que potentielle étant donné qu’aucun dommage n’a été encore constaté.Il ne pouvait pas être constaté avant l’ouverture du revêtement qui est survenu quelques mois plus tard.
68. Toutefois, dans son rapport du 13 novembre 2014 (pièce A-4 page 4), sous le titre « CONCLUSION » et comme déjà mentionné ci-haut, M. Gautreau écrit comme suit :
« Le revêtement d’enduit d’acrylique n’a pas été réalisé selon les règles de l’art ni en respect des exigences du Code du bâtiment. Ce dernier ne comporte aucun rejet d’eau afin de permettre potentiellement à la cavité derrière le revêtement de se drainer et de s’assécher. Cela pourrait causer des infiltrations d’eau et un endommagement à la structure de bois comme c’est survenu à un bâtiment voisin selon les informations obtenues. »
69. Les dégâts causés par de telles infiltrations d’eau et un endommagement à la structure de bois ont été constatés, et ce de façon éloquente, le 20 août 2015 lorsque Monsieur Grenier a fait une ouverture dans la façade extérieure du revêtement d’acrylique. Son rapport du 20 août 2015 (pièce B-1) contient une description sommaire de ses observations et plusieurs photos qui démontrent une apparence de moisissures sur le panneau de polystyrène expansé, une détérioration évidente du panneau rigide et des pièces de bois sur lesquelles ce panneau est installé, ainsi qu’un taux d’humidité variant entre 55,6 % et 63,9% du panneau et de ces pièces de bois.
70. L’expert Gautreau a expliqué lors de l’audition que les infiltrations d’eau et l’humidité derrière le revêtement d’acrylique qui n’ont pas pu être rejetés à l’extérieur de ce revêtement, ont causé des dégâts substantiels au revêtement intermédiaire et à une partie de la structure du bâtiment.Ces dégâts deviendront de plus en plus sérieux si ce vice n’est pas réparé.
71. L’évaluation des travaux de réparation qui provient de la compagnie Aléa Construction inc., malgré le fait que cette évaluation n’est que partielle, démontre un montant de 199 525,00 $, avant les taxes.
72. Cette estimation n’est que partielle car elle ne traite que des travaux de réfection du revêtement d’enduit d’acrylique. Elle ne traite pas de réparations et corrections de la dégradation des parements intermédiaires, de la structure en bois, de l’isolation.
73. Ces travaux correctifs additionnels ne pourront être évalués qu’une fois le revêtement d’acrylique aura été enlevé, selon Monsieur André Pépin, qui est l’auteur de cette évaluation. Il a aussi témoigné que les travaux décrits à sa soumission auront une durée de 1 mois ou 1 mois et demi et exigeront le travail de 6 ouvriers.
74. Le Tribunal note également qu’en considérant cette évaluation ainsi que la totalité des travaux correctifs qui seront requis, il faut garder à l’esprit qu’une partie de ces travaux aurait pu être causée ou agravée par des vices déjà mentionnés ci-haut mais que le Tribunal n’a pas reconnus comme couverts par le paragraphe 27(5) du Règlement.
75. Nonobstant ce commentaire, la preuve révèle que ce vice représente une défectuosité grave. Selon la jurisprudence citée ci-haut, il s’agit d’une qualification requise pour l’application de l’article 2118 du Code civil et pour qu’un vice puisse être qualifié de « vice de conception, de construction et de réalisation » au sens du paragraphe 27(5) du Règlement.
76. Ce vice qui cause une dégradation d’une partie de la structure derrière le revêtement qui, selon le témoignage de Monsieur Gautreau, se poursuivra si les travaux correctifs ne sont pas effectués, représente une perte partielle du bâtiment. L’ampleur et le coût des travaux correctifs représentent aussi des inconvénients sérieux pour les occupants du bçatiment.
77. Pour ces raisons, le Tribunal conclut que l’absence de la cavité drainante en bas du mur d’acrylique constitue un vice de conception, de construction et de réalisation au sens du paragraphe 27(5) du Règlement.
Membrane d’étanchéité inadéquate
78. En ce qui concerne la membrane d’étanchéité inadéquate, le Bénéficiaire a reconnu à l’étape de l’argumentation, que cette problématique a été découverte et dénoncée en 2015 mais après le 18 février 2015 et donc après l’écoulement de la période de 5 ans depuis la fin des travaux des parties communes. Par conséquent, le Tribunal n’a pas à analyser et statuer sur cette problématique.
LES FRAIS D’EXPERTISE :
79. Le Bénéficiaire demande au Tribunal d’ordonner que les frais d’expertise lui soient remboursés. Il soumet en preuve l’état de compte daté du 18 janvier 2016 (pièce B-5) qui est un état de compte qui résume 4 factures qui ont été émises pour les services rendus par l’entreprise NivoEx, Expert en bâtiment, pour laquelle travaille le témoin expert, Monsieur Patrick Gautreau.
80. Il s’agit de frais reliés à la préparation et à la rédaction de 2 rapports, soit celui du 13 novembre 2014 et celui du 13 décembre 2015, ainsi qu’à la présence et le témoignage à l’audience de Monsieur Gautreau. L’audience a duré une journée.
81. Le montant total ainsi réclamé est 2 259,50 $ , avant les taxes, ou 2 597,95 $ incluant la TPS et la TVQ.
82. L’article 124 du Règlement énonce que l’arbitre doit statuer, s’il y a lieu, quant au quantum des frais raisonnables d’expertises pertinentes, que l’administrateur doit rembourser au demandeur lorsque celui-ci a gain de cause total ou partiel.
83. Dans le cas présent, le Bénéficiaire a eu gain de cause partiel.
84. Selon le Tribunal, ces frais sont raisonnables et les 2 expertises de Monsieur Gautreau et son témoignage étaient pertinents pour permettre au Tribunal d’analyser la preuve et de rédiger cette sentence. Conséquemment, le Bénéficiaire aura droit au remboursement du montant total de ces frais d’expertise, y compris les taxes.
CONCLUSIONS SUPPLÉMENTAIRES :
85. Vu les conclusions du Tribunal décrites ci-haut, il n’a plus besoin d’analyser les autres prétentions des parties.
86. Tel que le mentionne l’article 120 du Règlement, la décision arbitrale, dès qu’elle est rendue, lie les parties intéressées et l’Administrateur et elle est finale et sans appel.
87. De plus, aux termes de l’article 123 du Règlement, lorsque le demandeur est le bénéficiaire, les coûts d’arbitrage sont à la charge de l’administrateur à moins que le bénéficiaire n’obtienne gain de cause sur aucun des aspects de sa réclamation, auquel cas l’arbitre départage ces coûts.
88. Dans le cas présent, le Bénéficiaire a obtenu gain de cause sur une partie de sa réclamation.
89. Un arbitre statut conformément aux règles de droit ; il fait aussi appel à l’équité lorsque les circonstances le justifient (article 116 du Règlement).
POUR CES MOTIFS, LE TRIBUNAL ARBITRAL :
ACCUEILLE EN PARTIE la demande du Bénéficiaire ;
DÉCLARE que l’absence d’une cavité drainante au bas du revêtement d’acrylique du bâtiment dont les parties communes sont sous la responsabilité du Bénéficiaire, est un vice de conception, de construction ou de réalisation, dont la réparation est prévue par l’article 27(5) du Règlement ;
ORDONNE à l’Entrepreneur d’effectuer les travaux correctifs requis le ou avant 15 novembre 2016, selon les normes et les principes prévus par le Code du bâtiment (2005) et les règles de l’art applicables et à défaut de l’Entrepreneur de compléter ces travaux correctifs dans ce délai, ORDONNE à l’Administrateur de les compléter le ou avant le 1er décembre 2016 ;
ORDONNE à l’Administrateur de rembourser au Bénéficiaire le montant de 2 259,56 $ pour les frais d’expertises qui lui ont été facturés par NivoEx, Expert en bâtiment, selon l’état de compte du 18 janvier 2016 (pièce B-5), plus 112,98 $ de TPS et 225,41 $ de TVQ, soit un montant total de 2 597,95 $;
DÉCLARE que les frais d’arbitrage sont à la charge de l’Administrateur ;
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Montréal, le 19 août 2016 |
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ALBERT ZOLTOWSKI / Arbitre CCAC |
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LISTE DE LA DOCTRINE ET JURISPRUDENCE CITÉE OU CONSULTÉE : Syndicat de la copropriété Les jardins du parc et La Garantie des bâtiments résidentiels neufs de l’APCHQ, Johanne Despatis, avocate et arbitre, 28 décembre 2010, Groupe d’arbitrage et de médiation sur mesure (GAMM), CanLII 36092 (QC OAGBRN). Habitations des Cônes c. Roy, Cour supérieure, Honorable Alain Michaud, J.C.S., 17 janvier 2013, 2013 QCCS 260 (CanLII). Farmer c. Devenco Contracting Inc., Cour supérieure, Honorable Marie-Anne Paquette, J.C.S., 8 août 2012, 2012 QCCS 3795 (CanLII). Raymond Sauvé c. Groupe Allogio Inc. et la Garantie Habitation du Québec inc., Me Roland-Yves Gagné, arbitre, Société pour la résolution des conflits (SORECONI), 5 octobre 2012. Installations GMR inc. c. Pointe-Claire (Ville de), Cour d’appel, 21 septembre 2015, 2015 QCCA 1521. SDC du 1884-1890 rue Poupart c. Jean-Pierre Légacé et al. et La Garantie des bâtiments résidentiels neufs de l’APCHQ, Me Roland-Yves Gagné, arbitre, 23 mai 2013, Société pour la résolution des conflits (SORECONI). 3093-2313 Québec inc. c. Alexandra Létourneau et al. et La Garantie des maisons neuves de l’APCHQ, Me Roland-Yves Gagné, arbitre, 2 novembre 2015, Centre canadien d’arbitrage commercial. La responsabilité légale pour la perte de l’ouvrage et la garantie légale contre les malfaçons, Me Sylvie Rodrigue et Me Jeffrey Edwards; La Construction au Québec, perspectives juridiques, sous la direction de Me Olivier F. Kott et Me Claudine Roy, Wilson & Lafleur Ltée, 1998. |
· [1]Syndicat de la copropriété Les jardins du parc c. Garantie des bâtiments résidentiels neufs de l’APCHQ, 2010 CanLII 36092 (QC OAGBRN), paragraphe 50.
[2]La responsabilité civile, 7e édition, Jean-Louis Baudouin et Patrice Deslauriers, Éditions Yvon Blais 2007, par. 2-280.
[3] Les Habitations des Cônes c. Jean-Paul Roy et al., 2013 QCCS 260 CanLII, paragraphes 21 et 22.
[4] Installations GMR inc. c. Pointe-Claire (Ville de), 2015 QCCA 1521 CanLII, paragraphe 9.
[5] Responsabilité légale pour la perte de l’ouvrage et la garantie légale contre les malfaçons, Me Sylvie Rodrigue et Me Jeffrey Edwards, dans le livre La Construction du Québec : perspectives juridiques; Wilson & Lafleur Ltée, Montréal, 1998, page 434.