Décision

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Meloche c. Gestion MHWI inc.

2024 QCTAL 25484

 

 

TRIBUNAL ADMINISTRATIF DU LOGEMENT

Bureau dE Laval

 

No dossier :

772874 36 20240312 G

No demande :

4235038

 

 

Date :

05 août 2024

Devant le juge administratif :

Ross Robins

 

Marc-Olivier Meloche

 

Thaiane Araujo

 

Locataires - Partie demanderesse

c.

gestion MHWI Inc.

 

Locateur - Partie défenderesse

 

D É C I S I O N

 

 

[1]         Dans leur requête du 12 mars 2024, les locataires demandent au Tribunal de résilier le bail en leur faveur.

[2]         Ils demandent également que leur loyer soit réduit de 500 $ par mois à compter du 1er novembre 2023.

[3]         Les frais judiciaires sont demandés, mais aucune mention n'est faite des intérêts ou de l'indemnité prévue à l'article 1619 C.c.Q.

[4]         Au soutien des conclusions qui précèdent, les locataires décrivent les déficiences suivantes :

- Un balcon qui n'a pas été entièrement construit;

- Une porte patio difficile à ouvrir;

- Une prise électrique et un luminaire qui n'ont jamais été installés;

- Une place de stationnement inaccessible;

- Un ascenseur dysfonctionnel;

- L'impossibilité d'accéder à leur boîte aux lettres;

- L'absence d'une sonnette qui leur aurait permis de donner accès à l'immeuble aux visiteurs et aux livreurs;

- L'absence de moustiquaires aux fenêtres;


- L'absence de télécommande pour l'unité de climatisation;

- Des poubelles et des bacs de recyclage jetés à la sauvette dans la rue et jamais remis à leur place à côté de l'immeuble;

- Pas d'accès à l'entrepôt.

[5]         Voici ce que révèlent les preuves non contestées :

[6]         Les locataires étaient initialement liés à un locateur connu sous le nom de Gestion MHWI inc. (ciaprès « Gestion »).

[7]         Les parties ont signé un bail pour un logement situé au troisième étage de l'immeuble de trois étages de Gestion à Laval.

[8]         Le bail a débuté le 1er novembre 2023 et doit se terminer le 31 octobre 2024.

[9]         Les locataires se sont engagés à payer un loyer de 2 225 $ par mois.

[10]     Le 29 février 2024, Gestion a vendu l'immeuble au locateur actuel des locataires, la Maison Clef D'or (ci-après « Maison »).

[11]     Or, les locataires n'ont jamais cru bon d'amender leur requête en vue de mettre en cause Maison, que ce soit à titre de codéfendeur de Gestion ou à titre de partie intéressée.

[12]     Ainsi, seule Gestion sera condamnée à payer les sommes que le Tribunal pourrait accorder aux locataires.

[13]     C'est peu de temps après avoir pris possession du logement que les locataires ont découvert, à leur grand dam, que Gestion n'était pas à la hauteur de son nom.

[14]     L'auvent qui devait couvrir leur balcon n'avait pas été installé et l'exposait à la pluie.

[15]     Les fenêtres n'étaient pas équipées de moustiquaires et la porte-fenêtre coulissante était excessivement difficile à ouvrir.

[16]     Gestion n'a pas non plus daigné leur fournir une télécommande pour le climatiseur.

[17]     Et comme si cela ne suffisait pas, l'unique ascenseur de l'immeuble était hors service jusqu'à ce que leur nouveau propriétaire (Maison) le fasse réparer au début du mois de mars 2024.

[18]     Pour des raisons qu'elle seule connaît, Gestion n'a jamais fourni à Postes Canada un passepartout pour la boîte aux lettres de l'immeuble. Par conséquent, les locataires n'ont eu d'autre choix que de faire 10 minutes de route jusqu'au bureau de poste le plus proche pour récupérer leur courrier.

[19]     De plus, la sonnette qui aurait dû permettre aux locataires de donner accès à l'immeuble aux visiteurs et aux services de livraison ne fonctionnait pas.

[20]     De même, la télécommande qui aurait permis aux locataires d'accéder au stationnement intérieur était absente. Pour couronner le tout, une porte qui aurait pu permettre aux locataires d'accéder au garage par une volée de marches était bloquée par un grand morceau de contreplaqué.

[21]     Conformément à l'article 1866 C.c.Q., les locataires ont avisé le locateur des déficiences susmentionnées en temps opportun, mais en vain.

[22]     En fait, ce n'est que lorsque Maison a acquis la propriété que les choses ont commencé à changer pour le mieux. L'ascenseur est devenu fonctionnel le 13 mars 2024, tout comme la porte du garage. La sonnerie a été réparée ou remplacée le 22 avril 2024 et mirabile dictu, Postes Canada a pu distribuer le courrier dès le 17 mars 2024.

[23]     En leur qualité de demandeurs, il incombait aux locataires de faire la preuve prépondérante de leurs allégations.

« 2803. Celui qui veut faire valoir un droit doit prouver les faits qui soutiennent sa prétention.

Celui qui prétend qu'un droit est nul, a été modifié ou est éteint doit prouver les faits sur lesquels sa prétention est fondée. »

« 2804. La preuve qui rend l'existence d'un fait plus probable que son inexistence est suffisante, à moins que la loi n'exige une preuve plus convaincante. »


[24]     Grâce, en grande partie, à la force de leur témoignage et aux photographies produites à l'audience, les locataires ont prouvé, par prépondérance, que le locateur a fait défaut de livrer le logement en bon état à tous égards (article 1854 C.c.Q.), de leur procurer la jouissance paisible du logement et de ses accessoires (article 1854 C.c.Q.) et, en contravention de l'article 1864 C.c.Q., d'effectuer les réparations nécessaires au logement.

« 1854. Le locateur est tenu de délivrer au locataire le bien loué en bon état de réparation de toute espèce et de lui en procurer la jouissance paisible pendant toute la durée du bail.

Il est aussi tenu de garantir au locataire que le bien peut servir à l'usage pour lequel il est loué, et de l'entretenir à cette fin pendant toute la durée du bail. »

« 1864. Le locateur est tenu, au cours du bail, de faire toutes les réparations nécessaires au bien loué, à l'exception des menues réparations d'entretien; celles-ci sont à la charge du locataire, à moins qu'elles ne résultent de la vétusté du bien ou d'une force majeure. »

[25]     La jouissance paisible se définit comme l'ensemble (i) de la sécurité à laquelle tout locataire a droit et (ii) du confort et de l'utilité auxquels le locataire peut raisonnablement s'attendre.

[26]     Lorsque, comme en l'espèce, le locataire manque à ses obligations de résultat, le locataire peut se prévaloir d'un ou de plusieurs des recours prévus à l'article 1863 C.c.Q.

« 1863. L'inexécution d'une obligation par l'une des parties confère à l'autre le droit de demander, outre des dommages-intérêts, l'exécution en nature, dans les cas qui le permettent. Si l'inexécution lui cause à elle-même ou, s'agissant d'un bail immobilier, aux autres occupants, un préjudice sérieux, elle peut demander la résiliation du bail.

L'inexécution confère, en outre, au locataire le droit de demander une diminution de loyer; lorsque le tribunal accorde une telle diminution de loyer, le locateur qui remédie au défaut a néanmoins le droit au rétablissement du loyer pour l'avenir. »

[27]     Le recours en réduction de loyer est une action quanti-minoris qui est ouverte aux locataires qui peuvent prouver, de façon prépondérante, que le loyer qu'ils ont payé n'était pas proportionnel aux services qu'ils ont reçus.

[28]     La demande de réduction de 500 $ par mois des locataires représente un pourcentage de 22 % par mois. Le Tribunal estime qu'une réduction de 20 % est plus appropriée et accordera aux locataires une réduction forfaitaire de 1 780 $ (20 % x 2 225 = 445 x 4 mois, c'est-à-dire novembre et décembre 2023, janvier et février 2024 = 1 780).

[29]     La demande des locataires de faire résilier le bail en leur faveur n'est pas recevable. Le nouveau locateur semble être intervenu avec la célérité et l'efficacité requises. De plus, le logement ne peut, selon toute norme raisonnable, être considéré comme impropre à l'habitation en vertu de l'article 1913 du Code civil.

« 1913. Le locateur ne peut offrir en location ni délivrer un logement impropre à l'habitation.

Est impropre à l'habitation le logement dont l'état constitue une menace sérieuse pour la santé ou la sécurité des occupants ou du public, ou celui qui a été déclaré tel par le tribunal ou par l'autorité compétente. »

POUR CES MOTIFS, LE TRIBUNAL :

[30]     ACCUEILLE la demande en partie;

[31]     CONDAMNE le locateur, Gestion MHWI inc. à payer aux locataires la somme de 1 780 $;

[32]     CONDAMNE le locateur, Gestion MHWI inc. à payer aux locataires les frais judiciaires au montant de 110 $;


[33]     REJETTE les autres conclusions.

 

 

 

 

 

 

 

 

Ross Robins

 

Présence(s) :

les locataires

Date de l’audience : 

6 mai 2024

 

 

 


 

AVIS :
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