Décision

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Décision

Hardy c. Charette

2015 QCRDL 30874

 

 

RÉGIE DU LOGEMENT

Bureau dE Saint-Jérôme

 

No dossier :

220768 28 20150603 G

No demande :

1761847

 

 

Date :

22 septembre 2015

Régisseure :

Sylvie Lambert, juge administrative

 

Denis Hardy

 

Locateur - Partie demanderesse

c.

EVELYNE CHARETTE

 

Locataire - Partie défenderesse

 

D É C I S I O N

 

 

[1]      Le locateur demande la résiliation du bail et l’expulsion de la locataire pour troubles de comportement, l’exécution provisoire de la décision, plus les frais.

[2]      Au soutien de sa demande, le locateur allègue les troubles de comportement suivants qui causent au locateur et aux autres locataires de l’immeuble un préjudice sérieux :

« -La locataire et très dérangeante et agressif. Elle menace les autres occupants de l’immeuble. Sonne à leurs portes pour les perturber.

-Mercredi le 27 mai 2015, Mme Evelyne Charette a aggressé une autre occupante de l’immeuble à coup de poing au visage. Cette agression à conduit à son arrestation. Vu la nature du comportement et la violence, ont demande d’être entendu d’urgence. » (Sic)

[3]      Le locateur fait entendre deux locataires, le concierge et la conjointe de celui-ci qui habitent l’immeuble.

Les faits

[4]      Les parties sont liées par un bail reconduit du 1er juillet 2015  au 30 juin 2016 au loyer mensuel de 571 $.

[5]      Le logement concerné est situé au deuxième étage d’un immeuble de 24 logements.

[6]      La locataire habite l’immeuble depuis avril 2011.

[7]      La preuve prépondérante révèle une série d'événements lors desquels la locataire a troublé la jouissance paisible des lieux aux autres locataires en commettant des gestes répréhensibles alors qu'elle était intoxiquée par l'alcool.

[8]      La preuve démontre que lorsque la locataire n’est pas intoxiquée par l’alcool elle est une personne raisonnable et a un comportement correct. Le problème c’est qu’elle est rarement sobre.

[9]      Les témoignages révèlent que la locataire est intoxiquée par l’alcool presque tous les jours et que ses comportements perturbent la jouissance paisible des lieux des autres locataires.

[10]   La locataire, notamment, au fil des ans et dans les derniers mois, a :

-Proféré des menaces aux locataires et au concierge;


-Poussé violemment la conjointe du concierge et une autre locataire;

-Vociféré des insultes aux locataires et au concierge, et ce, de façon répétée;

-Dérangé le concierge et les autres locataires en pleine nuit à plusieurs reprises en cognant à leur porte, et ce, dans l’unique but de les déranger;

-Déambulé en petite-tenue et nu-bas à plusieurs reprises dans les corridors de l’immeuble et à l’extérieur;

-Chuté à plusieurs reprises dans les corridors, intoxiquée par l’alcool; les locataires doivent la relever et l’aider à se rendre à son logement.

[11]   La preuve démontre également que les policiers sont intervenus le 27 mai 2015. La locataire a poussé une autre locataire et l’a empoignée par le collet. Elle en serait même venue à lui donner un coup de poing.

[12]   Tous ces faits ont été prouvés et corroborés par les témoins du locateur.

[13]   Le concierge témoigne que malgré les nombreux avertissements et la lettre de mise en demeure du 24 février 2014[1], les troubles de comportement de la locataire persistent.

[14]   Il reçoit régulièrement des plaintes des autres locataires et plusieurs lui ont manifesté leur désir de quitter leur logement si la locataire continuait d’habiter l’immeuble.

Analyse

[15]   Il apparaît évident au Tribunal que les inconvénients causés par le comportement de la locataire excèdent les limites de la tolérance au sens de l'article 976 du Code civil du Québec qui se lit :

     « 976.   Les voisins doivent accepter les inconvénients normaux du voisinage qui n’excèdent pas les limites de la tolérance qu’ils se doivent, suivant la nature ou la situation de leur fonds, ou suivant les usages locaux.»

[16]   Par ailleurs, l'article 1860 du Code civil du Québec se lit :

« 1860.      Le locataire est tenu de se conduire de manière à ne pas troubler la jouissance normale des autres locataires.

                 Il est tenu, envers le locateur et les autres locataires, de réparer le préjudice qui peut résulter de la violation de cette obliga­tion, que cette violation soit due à son fait ou au fait des personnes auxquelles il permet l'usage du bien ou l'accès à celui-ci.

                 Le locateur peut, au cas de violation de cette obligation, demander la résiliation du bail.»

[17]   Le Tribunal considère que les éléments mis en preuve démontrent que la locataire cause un préjudice sérieux au locateur et que la résiliation du bail est justifiée, conformément au premier alinéa de l'article 1863 du Code civil du Québec qui se lit :

«1863.       L'inexécution d'une obligation par l'une des parties confère à l'autre le droit de deman­der, outre des dommages-intérêts, l'exécution en nature, dans les cas qui le permettent.  Si l'inexécution lui cause à elle-même ou, s'agis­sant d'un bail immobilier, aux autres occupants, un préjudice sérieux, elle peut demander la résilia­tion du bail.

                 […].»

[18]   En matière de troubles de comportement, le juge administratif Gérald Bernard établissait un certain nombre de critères dans la décision Lacasse c. Picard [2] :

« Pour réussir à la présente cause, les locateurs doivent établir que les locataires (...) ont eu, au cours d'une certaine période, des comportements et des attitudes qui par leur répétition et insistance agace, excède ou importune gravement les autres locataires du même immeuble, troublant ainsi la jouissance normale des lieux à laquelle ils ont droit ».

[19]   En l'instance, il ne fait aucun doute que la locataire trouble la jouissance paisible des autres occupants de l'immeuble par ses comportements et que le locateur en subit un préjudice sérieux.

[20]   Le Tribunal conclut que le comportement de la locataire cause un préjudice sérieux au locateur et justifie le Tribunal d’ordonner la résiliation du bail et l’expulsion de la locataire.

[21]   En effet, le Tribunal ne pense pas que l'émission d'une ordonnance aurait pour effet que la locataire puisse s'assagir et adopter un comportement acceptable pour continuer de vivre dans cet immeuble.

[22]   Étant donné les comportements de la locataire, le Tribunal croit opportun d'ordonner l'exécution provisoire de la décision nonobstant appel.

[23]   En vertu du Tarif des frais exigibles par la Régie du logement (RLRQ, c. R-8.1, r.6), le locateur a droit au paiement des frais engagés de 72 $ pour la production de la demande et des frais de signification de 9 $.

POUR CES MOTIFS, LE TRIBUNAL :

[24]   RÉSILIE le bail et ORDONNE l'expulsion de la locataire et de tous les occupants du logement;

[25]   ORDONNE l'exécution provisoire, malgré l'appel, de l'ordonnance d’expulsion à compter du 11e jour de sa date; 

[26]   CONDAMNE la locataire à payer au locateur les frais judiciaires de 81 $;

[27]   RÉSERVE au locateur tous ses recours.

 

 

 

 

 

 

 

Sylvie Lambert

 

Présence(s) :

la mandataire du locateur

Marianne Dessureault, stagiaire en droit pour la locataire

Date de l’audience :  

18 août 2015

 

 

 


 



[1] Pièce p-5.

[2] 18-890911-014 G, r. Me Gérald Bernard.

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