Développements Immobilis inc. c. N.M. |
2018 QCRDL 3621 |
RÉGIE DU LOGEMENT |
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Bureau dE Montréal |
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No dossier : |
270777 31 20160406 G |
No demande : |
1971769 |
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Date : |
01 février 2018 |
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Régisseure : |
Marilyne Trudeau, juge administrative |
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Les Développements Immobilis Inc. |
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Locateur - Partie demanderesse |
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c. |
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N... M... |
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Locataire - Partie défenderesse |
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et |
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Véronique Dupras, Curateur public |
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Partie défenderesse
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D É C I S I O N
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[1] Par une demande produite le 6 avril 2016, le locateur demande la résiliation du bail, l'éviction du locataire et de tous les occupants du logement, l'exécution provisoire de la décision malgré l'appel et les frais judiciaires.
[2] Par un amendement produit le 16 octobre 2017, le locateur demande la résiliation du bail, le logement étant devenu impropre à l’habitation.
[3] Au soutien de sa demande, il indique que le locataire n’utilise pas son unité de logement avec diligence, néglige l’entretien causant, entre autres, la présence de vermine. Plusieurs plaintes de bruit ont également été reçues contre le locataire. Le locateur invoque subir un préjudice sérieux de la situation.
[4] Il s’agit d’un bail reconduit du 1er avril 2017 au 30 mars 2018 au loyer mensuel de 455 $.
[5] Le locataire occupe le logement depuis avril 2015.
[6] Le Curateur public, qui est solidaire au bail, est tuteur aux biens et à la personne du locataire depuis 2013.
Allégations des parties
[7] Le locateur explique que depuis 2015, il a reçu plus d’une vingtaine de plaintes d’autres locataires de l’immeuble selon lesquelles le locataire crie le jour comme la nuit, ce qui a nécessité plusieurs interventions policières.
[8] Une mise en demeure a été envoyée le 8 février 2016 au curateur public demandant son intervention puisque malgré deux entretiens téléphoniques avec la représentante du curateur public ainsi qu’avec les intervenants du CLSC, la situation perdure. Le locateur admet toutefois que la situation s’est améliorée légèrement depuis la fin d’octobre 2017.
[9] Le locataire invoque également le non-respect de ses obligations contractuelles en n’entretenant pas le logement de manière adéquate empêchant l’éradication de coquerelles dans l’immeuble, lui causant un préjudice sérieux.
[10] La mandataire du locateur explique s’être présentée au logement le ou vers le 15 avril 2016. Elle constate alors le délabrement de la cuisine et une malpropreté générale du logement. Une plainte est alors déposée par le locateur auprès de la ville de Montréal. Des avis sont envoyés au CLSC ainsi qu’au curateur public.
[11] Elle retourne dans le logement concerné le 12 octobre 2017 afin d’y d’effectuer un traitement d’extermination préventif. Elle constate que le logement est toujours dans un état de malpropreté important, mais procède tout de même au traitement. Une deuxième plainte est déposée par le locateur à la ville de Montréal le 13 octobre 2017.
[12] Le 24 et le 31 octobre 2017, elle retourne au logement concerné en compagnie du concierge de l’immeuble. Ils constatent que l’état de malpropreté persiste et aperçoivent des coquerelles sortir du four et se promener sur les murs.
[13] Le locataire déclare nettoyer lui-même son logement, mais admet que le CLSC est venu faire le ménage une fois. Il explique être de religion musulmane et faire la prière cinq fois par jour. Il explique recevoir la visite des gens du CLSC tous les jours pour la prise de ses médicaments et faire son possible afin d’entretenir son logement.
[14] L’intervenante du CLSC assignée au locataire réfute l’insalubrité du logement concerné. Elle mentionne avoir visité d’autres logements et considère que l’état de celui-ci est correct.
[15] Elle assiste le locataire depuis juillet 2017, mais explique faire partie de l’équipe d’intervenants laquelle s’occupe de lui depuis juillet 2014. Elle considère que celui-ci a fait d’énormes progrès.
[16] La médication du locataire a été ajustée récemment, soutient-elle et cet ajustement coïncide avec la fin des problèmes liés au bruit causé par ce dernier.
[17] Elle considère ce logement salubre, car il fut visité à deux reprises par la section d’environnement de la ville de Montréal, laquelle a fermé le dossier. Selon elle, le logement n’est pas encombré, il n’y a pas d’odeur de fumée de cigarette, il est donc relativement propre.
[18] À trois reprises cette année, le CLSC a aidé le locataire à nettoyer son logement, soit le 27 janvier 2016, le 31 août 2017 et le 24 octobre 2017.
[19] Il s’agit de l’essentiel de la preuve.
Analyse et décision
[20] Le locataire en raison de sa vulnérabilité est une personne qui suscite beaucoup d’empathie. Cependant, le rôle du Tribunal n’est pas d’agir comme un organisme caritatif, mais d’évaluer s’il y a matière à résilier le bail.
[21] Selon les articles 1855, 1860,1911 et 1912 du Code civil du Québec, le locataire est tenu, pendant toute la durée du bail, d’user du bien loué avec prudence et diligence ainsi qu’il doit maintenir le logement en bon état de propreté.
[22] Par ailleurs, l’article 25-1 du Règlement sur la salubrité, l’entretien et la sécurité des logements #03-096, lequel est chapeauté du titre salubrité, édicte ce qui suit :
« 25. Un bâtiment ou un logement ne doit pas porter atteinte à la sécurité des résidents ou du public en raison de l’utilisation qui en est faite ou de l’état dans lequel il se trouve
Sont notamment prohibés et doivent être supprimés :
La malpropreté, la détérioration ou l’encombrement d’un bâtiment principal, d’un logement ou d’un bâtiment accessoire ».
[23] L'article
[24] Dans la présente affaire, le fardeau de prouver la négligence du locataire et le préjudice sérieux qui en résulte revient au locateur.
[25] En vertu du Code
civil, le locateur doit délivrer le bien loué en bon état de réparation de
toute espèce (1854 al.
[26] Il est aussi tenu de garantir que le logement peut servir à l'usage pour lequel il est loué, et de l'entretenir à cette fin pendant toute la durée du bail (1854 al.2 C.c.Q.).
[28] Il doit aussi informer le locateur dès qu'il constate une anomalie et lui donner l'opportunité de remplir ses obligations (1866 C.c.Q.) en permettant l'accès au logement.
[29] L'article
[30] Après analyse et délibération, le Tribunal détermine que le locateur s’est déchargé du fardeau de preuve lui incombant à cet égard. Les photographies présentées démontrant l’état du logement à des dates différentes, sont éloquentes et démontrent que celui-ci est dans un état de malpropreté qui dépasse, ce qui est attribuable à un usage normal des lieux ou une vétusté. La seule explication à cette dégradation pointe vers le mode de vie du locataire et sa négligence quant à son entretien. L’état des lieux permet facilement de douter de l’état d’habitabilité du logement et fait craindre l’insalubrité.
[31] La malpropreté généralisée dans laquelle est maintenu le logement concerné représente un risque déraisonnable de contamination vers les autres logements des locataires de l’immeuble.
[32] Aussi, cette situation contrevient à la règlementation municipale de la ville de Montréal, plus particulièrement à l’article 25-1 du Règlement #03-096 portant sur la salubrité, l’entretien et la sécurité des logements.
[33] Après avoir analysé l’ensemble de la preuve testimoniale et documentaire, le Tribunal juge que le locataire, par son hygiène défaillante au logement cause un préjudice sérieux au locateur, ce dernier ne pouvant pas assurer à ses autres occupants de l’immeuble une pleine jouissance de leur logement.
[34] De plus, force est de constater que malgré les avis reçus depuis avril 2015, ni le CLSC ni le Curateur Public n’ont été en mesure d’agir de manière à ce que le locataire respecte ses obligations prévues au bail.
[35] Le Tribunal considère
bien fondée la demande du locateur et juge conformément à l’article
[37] Quant à la demande
d’exécution provisoire de la décision, le Tribunal juge que celle-ci n’est pas
justifiée conformément à l'article
POUR CES MOTIFS, LE TRIBUNAL :
[38] RÉSILIE le bail;
[39] ORDONNE l’éviction du locataire;
[40] CONDAMNE le locataire à payer au locateur les frais judiciaires de 91 $.
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Marilyne Trudeau |
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Présence(s) : |
la mandataire du locateur le locataire Me Nathalie Drouin, avocate du locataire |
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Date de l’audience : |
8 décembre 2017 |
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