Décision

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Miucci-Vachon c. Weinstein

2025 QCTAL 1812

 

 

TRIBUNAL ADMINISTRATIF DU LOGEMENT

Bureau dE Montréal

 

No dossier :

819023 31 20240902 G

No demande :

4457951

 

 

Date :

21 janvier 2025

Devant la juge administrative :

Isabelle Hébert

 

Johanne Miucci-Vachon

 

Locatrice - Partie demanderesse

c.

Scott Weinstein

 

Locataire - Partie défenderesse

 

D É C I S I O N

 

 

  1.          La locatrice réclame des loyers impayés (131,46 $) ainsi que les loyers dus au moment de l’audience, avec les intérêts, l’indemnité additionnelle[1] et le paiement des frais.
  2.          Elle demande aussi l’exécution provisoire de la décision malgré l’appel.

CONTEXTE

  1.          Les parties sont liées par un bail reconduit du 1er juillet 2024 au 30 juin 2025.
  2.          Elles ne s’entendent pas sur le montant du loyer qui était de 945 $ en date du 30 juin 2024.
  3.          Pour la période débutant le 1er juillet 2024, un avis d’augmentation a été transmis au locataire, demandant une augmentation mensuelle de 43,82 $ soit 34 $ plus 9,82 $ correspondant au montant mensuel de la taxe d’eau.
  4.          Selon la locatrice, le nouveau loyer devant être de 988,82 $ et le locataire lui payant toujours un loyer de 945 $, des loyers sont impayés. Ainsi, au jour de l’audition, elle réclame la somme de 175,28 $[2].
  5.          Monsieur Weinstein admet avoir reçu l’avis d’augmentation. Cependant, il a refusé les nouvelles conditions du bail, affirme-t-il. Sa correspondance, postée le 29 mars 2024, a été reçue par la locatrice le 5 avril suivant.
  6.          Selon madame MiucciVachon, le refus du locataire est hors délai, l’avis de modification des conditions du bail lui ayant été transmis le 28 février.
  7.          Monsieur Philippe Vachon, mandataire de la locatrice, est celui qui a remis ledit avis au locataire, en mains propres.
  8.      Monsieur Vachon témoigne avoir remis les avis de modifications à tous les locataires à la même date.

  1.      Cela est impossible, déclare le locataire, qui mentionne qu’à cette date, il était aux ÉtatsUnis, où il travaille comme infirmier.
  2.      Pour appuyer ses dires, il présente en preuve son horaire ainsi que le relevé de sa carte de crédit, qui démontrent qu’il se était bien aux États-Unis durant cette période durant laquelle il a effectué des dépenses alors qu’il se trouvait près de Washington.
  3.      Interrogé à savoir s’il était possible qu’il soit retourné à l’immeuble à une date postérieure au 28 février en raison de l’absence du locataire à cette date et qu’il lui ait remis le document un autre jour sans modifier la date de réception y figurant, monsieur Vachon hésite.
  4.      Par ailleurs, ajoute la locatrice, durant la période durant laquelle le locataire affirme avoir séjourné aux ÉtatsUnis, il aurait pu effectuer un allerretour en avion, soit un vol d’environ une heure, et ainsi être à Montréal le 28 février 2024, avancetelle.
  5.      Répliquant à la locatrice, le locataire nie fermement être rentré à Montréal durant cette période.
  6.      Quoi qu’il en soit, avisée du refus de l’augmentation par le locataire, la locatrice tente de communiquer avec lui pour discuter, révèlent des courriels.
  7.      Aucune discussion n’aura lieu et aucune demande de fixation n’est déposée. Malgré cela, madame MiucciVachon allègue que le loyer a été augmenté, faute d’avoir été refusé dans le délai prescrit.

QUESTION EN LITIGE

  1.      Le loyer atil été augmenté à 988,82 $ pour le terme 2024-25?

ANALYSE

  1.      Conformément au Code civil du Québec, un locateur qui souhaite modifier les conditions d’un bail de logement peut le faire conformément aux règles édictées en cette matière :

« 1942. Le locateur peut, lors de la reconduction du bail, modifier les conditions de celui-ci, notamment la durée ou le loyer; il ne peut cependant le faire que s'il donne un avis de modification au locataire, au moins trois mois, mais pas plus de six mois, avant l'arrivée du terme. Si la durée du bail est de moins de 12 mois, l'avis doit être donné, au moins un mois, mais pas plus de deux mois, avant le terme.

Lorsque le bail est à durée indéterminée, le locateur ne peut le modifier, à moins de donner au locataire un avis d'au moins un mois, mais d'au plus deux mois.

Ces délais sont respectivement réduits à 10 jours et 20 jours s'il s'agit du bail d'une chambre. »

« 1945. Le locataire qui refuse la modification proposée par le locateur est tenu, dans le mois de la réception de l'avis de modification du bail, d'aviser le locateur de son refus ou de l'aviser qu'il quitte le logement; s'il omet de le faire, il est réputé avoir accepté la reconduction du bail aux conditions proposées par le locateur.

Toutefois, lorsque le bail porte sur un logement visé à l'article 1955, le locataire qui refuse la modification proposée doit quitter le logement à la fin du bail. »

« 1947. Le locateur peut, lorsque le locataire refuse la modification proposée, s’adresser au tribunal dans le mois de la réception de l’avis de refus pour faire fixer le loyer ou, suivant le cas, faire statuer sur toute autre modification du bail. Il peut également, lorsque le locataire qui a sous-loué son logement pendant plus de 12 mois refuse de quitter les lieux, s’adresser au tribunal pour mettre fin au bail.

S’il omet de présenter sa demande dans le mois suivant le refus, le bail est reconduit de plein droit aux conditions antérieures.

Si le tribunal rejette la demande visant à mettre fin au bail, mais que sa décision est rendue après l’expiration du délai pour donner un avis de modification du bail, celui-ci est reconduit, mais le locateur peut alors s’adresser au tribunal pour faire fixer un nouveau loyer, dans le mois de la décision finale. »

[Soulignements ajoutés]

  1.      Ainsi, pour avoir droit à une augmentation, un locateur doit d’abord transmettre un avis à cet effet, dans le délai prescrit par la loi, soit au minimum 3 mois avant la fin du bail.
  2.      Dans le présent dossier, il n’est pas contesté que l’avis de modification des conditions du bail ait été transmis au locataire dans le délai applicable.

  1.      Toutefois, la date de la transmission de cet avis demeure ambiguë.
  2.      De l’avis du Tribunal, la preuve est prépondérante[3] à l’effet que la date de transmission ne peut être le 28 février 2024.
  3.      Le témoignage du locataire, appuyé de documents, est suffisamment probant pour démontrer qu’il se trouvait à l’extérieur de Montréal à cette date et donc que l’avis n’a pu lui être transmis en personne à ce moment.
  4.      Il apparaît plus vraisemblable que le mandataire Vachon lui ait remis le document peu après cette date, sans avoir corrigé la date de réception qu’il avait inscrite préalablement.
  5.      Par ailleurs, n’eut été de cette erreur quant à la date de transmission, la locatrice aurait certainement déposé une demande de fixation au Tribunal, à la suite du refus du locataire.
  6.      Dans ces circonstances, le Tribunal est d’avis qu’il y a lieu d’autoriser la locatrice à déposer une demande de fixation de loyer, ce qui équivaut à placer les parties dans la même situation qu’elles auraient dû l’être suivant le refus du locataire.
  7.      Certes, le mandataire a peutêtre manqué de diligence dans la transmission d’un document important. Cependant, croyant que cela ne justifie pas de priver la locatrice de son droit à une augmentation, le Tribunal l’autorisera à déposer une demande de fixation.

POUR CES MOTIFS, LE TRIBUNAL :

  1.      PERMET à la locatrice de déposer une demande de fixation du loyer dans un délai d'un mois suivant la date de la présente décision;
  2.      REJETTE la demande quant aux autres conclusions.

 

 

 

 

 

 

 

 

Isabelle Hébert

 

Présence(s) :

la locatrice

le locataire

Date de l’audience : 

30 octobre 2024

 

 

 


[1] Art. 1619 C.c.Q.

[2] Soit 43,82 $ X 4 (juillet, août, septembre et octobre).

[3] Art. 2803, 2804 et 2805 C.c.Q.

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