Décision

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Décision

Gaudette c. Raymond

2013 QCRDL 29094

 

 

RÉGIE DU LOGEMENT

Bureau dE Longueuil

 

No dossier:

37-121107-003 37 20121107 T

No demande:

71724

 

 

Date :

30 août 2013

Régisseure :

Danielle Deland, juge administratif

 

MICHEL GAUDETTE ESQ FID. DE FIDUCIE OVACYCLE

 

Locateur - Partie demanderesse

c.

CHANTAL RAYMOND

 

Locataire - Partie défenderesse

et

GUY HAMEL

 

Partie intéressée

 

 

D É C I S I O N

 

 

[1]      Le tribunal est saisi d’une demande par la locatrice de rétractation d’une décision du juge administratif Marc Lavigne rendue le 6 février 2013 et de la relevé des conséquences du défaut de respecté le délai de production de sa demande.

[2]      La locataire et la locatrice sont liées par un premier bail du 1er mai 2011 au 30 juin 2011 pour le logement situé au […] à Candiac, un 3 ½ pièces à un loyer mensuel de 560 $ que Monsieur Guy Hamel a signé comme endosseur.

[3]      La locataire et la locatrice ont signé un deuxième bail pour un logement de 4 ½ pièces dans un immeuble voisin, pour la période du 1er juillet 2011 au 30 juin 2012 pour un loyer de 680 $ par mois.

[4]      Aux termes d’une décision rendue par la juge administrative Gabrielle Choinière le 19 décembre 2012, la locataire Chantal Raymond et la caution Guy Hamel ont été solidairement condamnés au paiement d’une somme de 2 350 $ d’arrérages de loyer jusqu’en décembre 2012 inclusivement.

[5]      Aux termes d’une décision rendue par le juge administratif Marc Lavigne le 6 février 2013, la décision du juge administratif Choinière a été rétractée et statuant à nouveau , le juge administratif Lavigne en est arrivé à la conclusion que la caution n’avait endossé la locataire que pour les mois de mai et juin 2011 et que les loyers réclamés ne couvraient pas cette période. Il a donc rejeté la demande de la locatrice.

[6]      Le fiduciaire de la fiducie locatrice, Me Michel Gaudette demande au tribunal de la relever des conséquences d’une demande de rétractation tardive.


[7]      Il explique qu’il a été gravement malade et qu’il croyait qu’à l’audience du 29 janvier 2013, il ne serait débattu que de la rétractation. Il ne pouvait se faire représenter, car il était le seul à connaître les faits.

[8]      Me Gaudette ajoute qu’à la réception de la décision, il croyait que le juge administratif Lavigne avait rejeté la demande de rétractation. Me Gaudette explique qu’il s’en est suivi une période de confusion suite à des informations contradictoires obtenues de 2 préposés et de la maître des rôles de la Régie du Logement.

[9]      Me Gaudette a alors appris que le juge administratif Lavigne n’avait pas rejeté la demande de rétractation de la caution, mais qu’il l’avait plutôt accueillie et que statuant sur le fond, il avait rejeté la demande de la locataire quant à la caution.

[10]   En matière de rétractation de jugement, il faut trouver un juste équilibre entre deux principes qui s’affrontent : la stabilité des jugements et la règle fondamentale audi alteram partem qui veut que toute personne ait le droit de se faire entendre devant les tribunaux.

[11]   Dans le cas sous étude, il serait contraire à la justice naturelle de privé la locatrice de son droit de faire sa preuve quant à l’étendue du cautionnement.

[12]   CONSIDÉRANT l’ensemble de la preuve;

[13]   CONSIDÉRANT l’article 89 de la Loi sur la Régie du Logement;

POUR CES MOTIFS, LE TRIBUNAL :

[14]   ACCORDE la demande de rétractation de la locatrice;

[15]   RÉTRACTE la décision rendue par le juge administratif Marc Lavigne le 6 février 2013.

ET STATUANT DE NOUVEAU SUR LA DEMANDE DE RÉTRACTATION PAR LA CAUTION DE LA DÉCISION DE LA JUGE ADMINISTRATIVE G. CHOINIÈRE DATÉE DU 19 DÉCEMBRE 2013 :

[16]   Me Gaudette et la caution, Guy Hamel, déposent tous deux des photocopies du 1er bail signé par la locatrice et la locataire, bail du 1er mai 2011 au 30 juin 2011 pour le 3 ½ pièces situé au […], à un loyer mensuel de 560 $.

[17]   Aucune des parties ne dépose d’original.

[18]   La caution explique que la locataire Chantal Raymond est une amie de sa conjointe qui vivant une situation difficile. Il ne la connait qu’à peine.

[19]   Pour faire plaisir à sa conjointe, il a accepté de cautionner Madame Raymond, parce qu’il ne s’agissait que d’un bail de deux mois à un loyer de 560 $ et que sa responsabilité se limitait en cas de défaut de la locataire, à la somme de 1 120 $.

[20]   Monsieur Hamel témoigne qu’il n’aurait jamais signé la clause qui apparaît à la photocopie du bail produite par le locateur :

« Pour la durée du bail ainsi que pour tous transferts et renouvellement futurs » (sic).

[21]   Me Gaudette affirme quant à lui que lorsque le document lui a été remis, cette mention apparaissait au-dessus de la signature de M. Hamel.

[22]   Sur l’exemplaire déposé par le locataire, toutes les signatures sont photocopiées sauf celle de Joanne Charpentier qui a signé au nom de la locatrice.

[23]   La signature de Madame Charpentier est bleue et a donc été apposée au document après que la photocopie de la signature de la caution ait été faite.

[24]   Monsieur Hamel est apparu très crédible au tribunal.


[25]   La mention a-t-elle été ajoutée après la signature de M. Hamel, par la locataire, avant qu’elle ne remette le bail à la locatrice ?

[26]   Le tribunal s’est retrouvé avec trois photocopies de la dernière page de ce premier bail, dont une ne portait pas la mention. La mention avait-elle été effacée à la photocopie?

[27]   La règle veut qu’à moins de mention expresse, le cautionnement ne s’étend qu’au bail initial.

[28]   Le locateur avait donc le fardeau de prouver que le cautionnement s’étendait au-delà du bail initial.

[29]   Selon les dispositions de l'article 2803 du Code civil du Québec, il revient à la partie demanderesse de faire la preuve des faits allégués dans sa demande :

« 2803.      Celui qui veut faire valoir un droit doit prouver les faits qui soutiennent sa prétention.

                Celui qui prétend qu'un droit est nul, a été modifié ou est éteint doit prouver les faits sur lesquels sa prétention est fondée».

[30]   La locataire a le fardeau de démontrer, par prépondérance de preuve, que les faits qu'elle présente sont probables, conformément à l'article 2804 du Code civil du Québec :

« 2804.      La preuve qui rend l’existence d’un fait plus probable que son inexistence  est suffisante, à moins que la loi n’exige une preuve plus convaincante».

[31]   Quant à l'appréciation du témoignage, elle est laissée à l'appréciation du tribunal :

« 2845.      La force probante du témoignage est laissée à l'appréciation du tribunal. »

[32]   Dans le cas présent,  la locatrice n’a pas démontré de manière suffisante le bien-fondé de sa réclamation en justice.

[33]   Les auteurs Nadeau et Ducharme ont analysé les conséquences de l’absence de preuve ou de son insuffisance[1] :

« Celui sur qui repose l’obligation de convaincre le juge supporte le risque de l’absence de preuve, c’est-à-dire qu’il perdra son procès si la preuve qu’il a offerte n’est pas suffisamment convaincante ou encore si la preuve offerte de part et d’autre est contradictoire et que le juge se trouve dans l’impossibilité de déterminer où se trouve la vérité. »

[34]   Le tribunal tient de plus à ajouter que même s’il en était arrivé à la conclusion que le cautionnement s’était étendu aux renouvellements du bail, il n’aurait pas statué à l’effet que le cautionnement se serait étendu à un transfert de bail.

POUR CES MOTIFS, LE TRIBUNAL :

[35]   ACCUEILLE la demande de rétractation de la caution;

[36]   RÉTRACTE la décision rendue le 19 décembre 2012 contre la caution.

 

 

 

 

 

 

 

 

Danielle Deland

 

Présence(s) :

le locateur

partie intéressée

Date de l’audience :  

20 août 2013

 


 



[1] Nadeau André et Ducharme Léo, Traité de droit civil du Québec, vol. 9, 1965, Montréal, Wilson &  Lafleur, page 99.

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