Décision

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Décision

Dagenais c. Champagne

2017 QCRDL 30871

 

 

RÉGIE DU LOGEMENT

Bureau dE Saint-Jean

 

No dossier :

306901 25 20161122 G

No demande :

2127804

 

 

Date :

23 septembre 2017

Régisseur :

André Monty, juge administratif

 

Alexandre Dagenais

 

Patricia Dupuis-Rondou

 

Locataires - Partie demanderesse

c.

JULIE CHAMPAGNE

 

MURIELLE BELLERIVE

 

Locatrices - Partie défenderesse

 

D É C I S I O N

 

 

[1]      Le 22 novembre 2016, les locataires déposent à la Régie du logement une demande de diminution de loyer de 150 $ par mois, rétroactive au 1er novembre 2016, de dommages au montant de 600 $ et de remboursement des frais.

[2]      Les parties étaient liées par un bail du 1er juillet 2016 au 30 juin 2017, le loyer mensuel était de 700 $. Le logement a été reloué à une tierce personne à la mi-juin 2017.

[3]      Les locataires témoignent lors de l’audience. Ils font également entendre deux témoins. Les deux locatrices témoignent également. Elles ne font toutefois entendre aucun témoin.

LOCATAIRES

[4]      Les locataires soutiennent qu’ils n’ont pas eu la pleine jouissance de leur logement à cause des locataires du logement numéro 4. Ils déclarent qu’ils ont subi des bruits forts et de la musique très fréquemment. Ils soumettent que la musique faisait vibrer des choses dans leur logement. Un registre des événements est produit. Les témoins des locataires déclarent qu’ils étaient présents lors de quelques événements dérangeants.

[5]      Les locataires déclarent qu’ils ont informé les locatrices à plusieurs reprises. Deux mises en demeure ont été expédiées, sans succès.


[6]      Les locataires réclament une diminution du loyer mensuelle de 150 $ du 1er novembre 2016 jusqu'à la mi-juin 2017. Questionnés quant au montant de dommages réclamés de 600 $, le locataire soumet que ce montant représente les mois de juillet à octobre 2016 alors que la locataire déclare qu’elle réclame ce montant parce que le bruit était tellement dérangeant qu’elle a été contrainte de quitter les lieux à deux reprises.

LOCATRICES

[7]      La locatrice Champagne déclare qu’elle n’a jamais constaté de problème avec le locataire du logement numéro 4 lorsqu’elle se présentait au logement. Elle soumet que dans ces circonstances, elle n’a jamais expédié de mise en demeure à ce locataire. Elle soutient que les policiers sont intervenus une fois et qu’ils n’ont rien constaté. Elle déclare ne pas avoir reçu de plaintes des autres voisins.

[8]      La locatrice Bellerive déclare qu’elle occupe un loft dans l’immeuble et qu’elle n’a jamais constaté de problème de bruits. Questionnée, elle déclare que celui-ci se trouve au sous-sol, du côté opposé au logement numéro 4 qui lui se trouve à l’étage supérieur.

[9]      Les locataires, avec la conclusion du bail, ont bénéficié d’un mois de loyer gratuit.

DÉCISION

[10]   L'article 1863 du Code civil du Québec stipule qu'il est possible pour un locataire d'obtenir une diminution du loyer en cas d'inexécution d'une obligation par le locateur. L'article 1854 du Code civil du Québec précise qu'un locateur a l'obligation de procurer au locataire la jouissance paisible du logement pendant toute la durée du bail.

[11]   Les articles 1859 et 1861 du Code civil du Québec s'appliquent également à la situation sous étude : 

« 1859.      Le locateur n'est pas tenu de réparer le préjudice qui résulte du trouble de fait qu'un tiers apporte à la jouissance du bien; il peut l'être lorsque le tiers est aussi locataire de ce bien ou est une personne à laquelle le locataire permet l'usage ou l'accès à celui-ci.

                 Toutefois, si la jouissance du bien en est diminuée, le locataire conserve ses autres re­cours contre le locateur. »

« 1861.      Le locataire, troublé par un autre loca­taire ou par les personnes auxquelles ce dernier permet l'usage du bien ou l'accès à celui-ci, peut obtenir, suivant les circons­tances, une diminution de loyer ou la rési­liation du bail, s'il a dénoncé au locateur commun le trouble et que celui-ci persiste.

                 Il peut aussi obtenir des dommages-intérêts du locateur commun, à moins que celui-ci ne prouve qu'il a agi avec prudence et diligence; le locateur peut s'adresser au locataire fautif, afin d'être indemnisé pour le préjudice qu'il a subi. »

[12]   Les locataires demandent une diminution du loyer de 150 $ par mois, rétroactivement au 1er novembre 2016 ainsi que 600 $ à titre de dommages-intérêts.

[13]   Les locataires devaient prouver d'une manière prépondérante que les bruits et les tracasseries allégués sont réels, excessifs, déraisonnables et persistants. Ils devaient également démontrer que le problème avait été dénoncé aux locatrices et que ces dernières refusaient ou négligeaient d'intervenir et d'y remédier dans un délai raisonnable.

[14]   Après l'audition des témoignages et l'analyse de la preuve, le Tribunal considère que la preuve qui devait lui être faite par les locataires l'a été. Les locataires subissaient des bruits et de la musique forte qui excèdent les inconvénients normaux résultant du voisinage. Des témoins ont corroboré les dires des locataires alors que les locatrices n’ont fait entendre personne.

[15]   Les locatrices n'ont pas respecté les obligations que la loi leur impose de procurer la jouissance paisible du logement à leurs locataires. Les locataires ont pourtant payé la totalité du loyer. Par conséquent, les locataires ont payé un montant supérieur à la valeur des services reçus. Ils ont droit à une diminution de loyer.

[16]   Le Tribunal considère qu’une diminution globale du loyer de 400 $ est de nature à rétablir l'équilibre des prestations respectives des parties pour toute la période concernée. Le Tribunal tient compte, dans l’établissement du montant de la diminution, de la fin du bail à la mi-juin 2017. La gratuité d’un mois de loyer n’affecte en rien la diminution accordée parce qu’elle ne concerne pas, de toute manière, un mois couvert par la diminution.


[17]   Les locatrices ont l'obligation de procurer la jouissance paisible du logement aux locataires. Elles doivent réagir très rapidement lorsqu’un locataire se plaint parce qu’il leur appartient de garantir la jouissance paisible à tous les locataires. La preuve démontre que les locatrices n'ont rien fait pour y parvenir, ni pour minimiser ces dommages. Les troubles ont persisté. Les locatrices devaient mettre en demeure le locataire fautif et prendre action devant le Tribunal si les troubles ou les plaintes persistaient. Elles ont préféré ne pas croire les locataires et ne rien faire. La preuve soumise démontre qu’elles avaient tort.

[18]   Les locatrices sont responsables des dommages subis par les locataires en conformité avec l'article 1861 du Code civil du Québec. Le Tribunal arbitre à 200 $ le montant attribuable aux locataires à titre de dommages. Le Tribunal aimerait souligner qu’aucun montant n’est accordé pour les inconvénients antérieurs aux mises en demeure. Le Tribunal retient toutefois que la locataire a été contrainte de quitter les lieux à deux reprises.

POUR CES MOTIFS, LE TRIBUNAL :

[19]   ACCUEILLE partiellement la demande des locataires;

[20]   DIMINUE globalement le loyer d'une somme de 400 $ pour toute la période concernée et CONDAMNE les locatrices à payer cette somme aux locataires;

[21]   CONDAMNE les locatrices à payer aux locataires une somme de 200 $ à titre de dommages, plus les intérêts au taux légal et l'indemnité additionnelle prévue à l'article 1619 du Code civil du Québec, à compter de la date des présentes, plus les frais judiciaires et de signification de 92 $;

[22]   REJETTE la demande quant au surplus.

 

 

 

 

 

 

 

 

André Monty

 

Présence(s) :

les locataires

les locatrices

Date de l’audience :  

10 août 2017

 

 

 


 

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