R. c. Bruno |
2019 QCCS 65 |
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JD 2885 |
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Canada |
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PROVINCE DE QUÉBEC |
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DISTRICT DE MONTRÉAL |
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Chambre criminelle et pénale |
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N° : |
500-36-009147-185 500-73-003792-120 (C.Q.) |
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500-73-004096-141 (C.Q.) |
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DATE : |
Le 16 janvier 2019 |
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SOUS LA PRÉSIDENCE DE L’HONORABLE ÉRIC DOWNS, J.C.S. |
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SA MAJESTÉ LA REINE |
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Requérante-poursuivante |
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c. |
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FRANCESCO BRUNO |
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Intimé-accusé
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L’HONORABLE LORI RENÉE WEITZMAN, J.C.Q. Mise en cause ______________________________________________________________________ |
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JUGEMENT SUR LA REQUÊTE EN REJET SOMMAIRE DE LA REQUÊTE DEMANDANT L’ÉMISSION D’UN BREF DE CERTIORARI
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[1] Le Tribunal détient un pouvoir exceptionnel de rejeter sommairement[1] une requête n’ayant aucune chance raisonnable de succès. La présente affaire en constitue une illustration et envoie un message de mettre fin aux recours extraordinaires voués à l’échec.
[2] L’intimé-accusé, Francesco Bruno (« Bruno ») requiert de la Cour supérieure l’émission d’un bref de Certiorari (« Certiorari ») afin d’infirmer un jugement rendu par la juge Lori Renée Weitzman de la Cour du Québec, désignée à titre de juge responsable de la gestion d’instance en vertu de l’article 551.1 du Code criminel (la « juge d’instance »).
[3] Bruno et d’autres coaccusés font l’objet de deux séries d’accusations en lien avec un projet d’enquête de la Gendarmerie royale du Canada (GRC) baptisé Projet Coche visant entre autres une enquête de corruption au sein de l’Agence du revenu du Canada (ARC).
[4] Présentement, la juge d’instance traite conjointement les deux dossiers pour les fins des requêtes préliminaires au procès. Dans une première décision (ci-après « Décision sur la demande d’ajournement no 1 »)[2], la juge d’instance a refusé une demande de Bruno et des autres coaccusés[3] d’ajourner l’audition des requêtes préliminaires dont certaines de type Jarvis, afin d’attendre la décision de la Cour d’appel du Québec dans le dossier BT Céramiques inc c. R[4].
[5] Dans une seconde décision (ci-après « Décision sur la demande d’ajournement nº 2 ») [5], la juge d’instance a de nouveau rejeté une demande d’ajournement de Bruno et des autres coaccusés[6].
[6] Alors qu’il n’a pas contesté la décision sur la première demande d’ajournement, Bruno demande à la Cour supérieure d’émettre un bref de Certiorari[7] relativement à la décision de la juge d’instance concernant la deuxième demande d’ajournement.
[7] Dans sa requête en Certiorari à laquelle les autres coaccusés ne sont pas requérants, Bruno allègue que la juge d’instance, en n’accordant pas l’ajournement demandé, n’a pas suffisamment donné de poids à trois facteurs constituant des changements importants de circonstances à la suite de la décision relative à la première demande d’ajournement.
[8] Essentiellement, Bruno prétend que la juge d’instance a favorisé l’intérêt public et la saine administration de la justice au détriment de son droit à une défense pleine et entière. Ce faisant, il allègue que la juge d’instance aurait transgressé les principes de justice naturelle en refusant d’accorder l’ajournement. Bruno reproche plus particulièrement à la juge d’instance, d’avoir erronément exercé son pouvoir discrétionnaire. Selon lui, la juge d’instance n’a pas « analysé ni pris en considération l’économie des ressources judiciaires, l’intérêt à éviter des jugements contradictoires et la multiplicité des procédures »[8].
[9] La signification d’une demande de recours extraordinaire, notamment par voie de Certiorari devant la Cour supérieure, opère automatiquement un sursis des procédures en première instance, et ce, selon l’article 25 des Règles de procédures de la Cour supérieure, Chambre criminelle.[9]
[10] Présentement, en raison de ce recours en Certiorari, intenté uniquement par Bruno, les procédures en première instance sont donc suspendues pour l’ensemble des autres coaccusés dans les différents volets distincts du Projet Coche.
[11] Cependant, le Tribunal peut en tout temps ordonner la continuation à la demande d’une partie. En l’espèce, la requérante-poursuivante (la « poursuite ») présente au Tribunal une requête pour ordonner la continuation des procédures nonobstant la signification de la requête en Certiorari.
[12] La poursuite présente également une requête afin que le Tribunal rejette sommairement la requête en Certiorari au motif que celle-ci n’a aucune chance raisonnable de succès et qu’elle n’est pas fondée sur des motifs valables.
[13] Le Tribunal, après avoir entendu les représentations des parties relativement aux deux requêtes de la poursuite, de même qu’après avoir examiné en détail la requête en Certiorari, rend jugement relativement à la requête en rejet sommaire de cette dernière procédure.
[14] Au final, le Tribunal considère que la requête en Certiorari n’a pas de chance raisonnable de succès et s’avère vouée à l’échec.
[15] En résumé, pour les motifs ci-après exposés et à la lumière des enseignements récents de la Cour suprême dans les arrêts Cody[10] et Awashish[11], le Tribunal conclut qu’il y a lieu d’accorder la requête en rejet sommaire, de sorte que le Tribunal exerçant son pouvoir exceptionnel rejette sommairement la demande pour l’émission d’un bref de Certiorari et renvoie dès maintenant les dossiers à la Cour du Québec pour la suite des procédures[12].
[16] À l’ère post-Jordan/Cody, il incombe au Tribunal et à toutes les personnes associées au système de justice criminel, d’adopter une approche permettant d’éviter la fragmentation des procédures et de prévenir des délais inutiles.[13]
[17] En l’espèce, le Tribunal considère qu’il doit « jouer son rôle de gardien de l’administration de la justice en contrôlant les procédures et en éradiquant les délais inutiles »[14].
[18] Les parties, dans leurs requêtes respectives produites dans le présent dossier, dressent l’historique, à ce jour, des procédures dans les différents dossiers.
[19] Dans sa requête pour ordonner la continuation des procédures nonobstant la signification d’une requête pour l’émission d’un bref de Certiorari (article 25 des Règles de procédures de la Cour du Québec, Chambre criminelle), la poursuite résume sommairement le long cheminement des dossiers.
[20] Le Tribunal, afin de bien dresser la toile de fond de ces affaires particulièrement complexes, estime à propos de citer au long les paragraphes que l’on retrouve dans cette procédure sous la rubrique « Historique judiciaire ». Par ailleurs, ces éléments ne sont pas contestés par Bruno.[15]
6. Bruno est accusé dans deux volets distincts du Projet Coche, une enquête d’envergure de la Gendarmerie Royale du Canada (« GRC ») portant sur la corruption à l’Agence du Revenu du Canada (« l’ARC »).
7. En août 2012, Bruno est accusé avec trois autres individus, de fraude, de fabrication de faux, d’abus de confiance d’un fonctionnaire public et de complot dans le cadre du dossier portant le numéro 500-73-003792-120, soit le volet « Plan of Action ».
8. En février 2014, Bruno est accusé avec quatre autres individus, de fraude, d’abus de confiance d’un fonctionnaire public, de corruption et de complot dans le cadre du dossier portant le numéro 500-73-004096-141, soit le volet « Delvex ».
9. En novembre 2017, l’Honorable Lori Renée Weitzman j.c.q, est désignée responsable de la gestion de l’instance selon l’article 551.1 C.cr., dans les volets « Plan of Action » (500-73-003792-120) et « Delvex » (500-73-004096-141), ainsi que dans un troisième volet du Projet Coche qui ne vise pas Bruno, soit le volet « Infiltration » (500-73-003991-136).
10. Le 10 novembre 2017, Bruno produit une requête dans les volets « Plan of Action » (500-73-003792-120) et « Delvex » (500-73-004096-141) qui allègue une violation par l’ARC des principes de l’arrêt Jarvis dans le cadre d’une vérification fiscale le visant qui s’est déroulée en 2007-2008.
11. Le 18 décembre 2017, Antonio Accurso (« Accurso »), qui est coaccusé avec Bruno dans le volet « Plan of Action » (500-73-003792-120), produit également une requête de type Jarvis qui conteste la légalité de la même vérification fiscale dont il est question dans la requête de Bruno.
12. Le 19 janvier 2018, Francesco Fiorino (« Fiorino »), qui est coaccusé avec Bruno dans le volet « Plan of Action » (500-73-003792-120) et qui est également accusé dans le volet « Infiltration » (500-73-003991-136), produit aussi une requête de type Jarvis qui conteste notamment la légalité de la même vérification fiscale dont il est question dans la requête de Bruno.
13. Le 19 janvier 2018, Nicola Iammarrone (« Iammarrone »), qui est accusé dans le volet « Infiltration » (500-73-003991-136), produit une requête en exclusion de la preuve et en arrêt des procédures qui allègue des violations multiples à ses droits et à ceux d’autres accusés du Projet Coche.
14. Il a été convenu entre toutes les parties que l’ensemble de ces requêtes seront tranchées dans le cadre d’une audition conjointe en vertu de l’article 551.7(1) C.cr.
15. Par ailleurs, il a été également convenu que les faits constatés judiciairement par la juge Dominique Larochelle, j.c.q. dans le dossier ARQ c. BT (note de bas de page no 11 : ARQ c. BT, 2015 QCCQ 14534 (ANNEXE 5).) sont admis, et que seuls des faits nouveaux seront présentés lors de l’audition conjointe[16].
16. Il est à noter que Bruno a également admis le même cadre factuel constaté dans ARQ c. BT pour les fins de l’appel devant le juge Daniel W. Payette, j.c.s[17].
17. Il convient de préciser que l’avocat de Bruno a insisté à plusieurs reprises sur le caractère distinct de la requête Jarvis présentée dans les volets « Plan of Action » (500-73-003792-120) et « Delvex » (500-73-004096-141) par opposition à celle dans ARQ c. BT, qui fait l’objet d’une contestation devant la Cour d’appel:
Le 3 novembre 2017
Maintenant, moi, ce que je prétends, c’est que je vais déposer un Jarvis qui même si…même si la Cour d’appel rejette la requête en permission d’appeler, il y a eu des nouveaux éléments qui n’ont jamais été présentés à madame la juge Larochelle qui vont devoir être présentés devant un juge. Et que nous, on prétend que ces nouveaux éléments-là vont avoir un impact différent sur l’issue de ça. Bien, on va représenter une requête de type Jarvis[18].
Le 23 janvier 2018
[…] ce que je vais vous inviter à juger, c’est dire est-ce qu’effectivement la GRC, dans cette histoire-là a été de mauvaise foi, est-ce qu’il y a eu des gens qui avaient connaissance, il y a tu eu des directives, il y a tu eu des commandes[19].
[…]
Évidemment, moi je…Madame la juge, c’est sûr que j’allègue une violation constitutionnelle qui a aucun espèce de rapport avec qu’est-ce qui a été décidé devant Madame la juge Larochelle[20].
18. Dans son jugement rejetant les requêtes de type Jordan/Cody dans les volets « Plan of Action » (500-73-003792-120) et « Delvex » (500-73-004096-141), la juge Weitzman a également souligné que Bruno avait l’intention de présenter des « faits nouveaux » dans le cadre de sa requête Jarvis[21].
19. Le 28 février 2018, huit jours[22] d’audition sont fixés pour la tenue de l’audition conjointe des requêtes de type Jarvis, soit les 26 au 29 juin 2018 et les 3 au 6 juin 2018.
20. Le 13 avril 2018, la Cour d’appel a accordé la permission d’en appeler de Bruno dans le dossier BT Céramiques inc c. R[23].
21. Le 7 juin 2018, les dates d’audition prévues en juin et juillet 2018 sont annulées étant donné que l’audition et le traitement des requêtes en divulgation de la preuve présentées par Bruno, Iammarrone et Fiorino, ne sont pas terminés.
22. Le 29 juin 2017, les parties conviennent de nouvelles dates d’audition sont fixées du 5 novembre au 21 décembre 2018[24], pour une durée de 7 semaines. La défense requiert le témoignage de 21 témoins de l’État dans le cadre de cette audition.
23. Entre la fin du mois de juin et le début du mois de juillet 2018, Americo Comparelli (« Comparelli »), qui est coaccusé avec Bruno dans le volet « Delvex », annonce son intention de présenter une requête de type Jarvis qui conteste la légalité de la même vérification fiscale dont il est question dans la requête de Bruno. Cette requête sera éventuellement produite le 14 novembre 2018.
24. Les 2 août 2018 et 6 septembre 2018, tous les accusés, à l’exception d’Accurso, demandent de reporter l’audition prévue en novembre et décembre 2018, jusqu’à la fin des procédures en appel dans le dossier BT Céramiques inc c. R.
25. Le 6 septembre 2018, la juge Weitzman refuse cette demande d’ajournement oralement. Un jugement écrit est ensuite déposé au dossier de la Cour le 9 octobre 2018 et est rectifié le 6 décembre 2018 (« décision sur la demande d’ajournement no 1 »)[25].
26. Le 26 octobre 2018, tous les accusés demandent à la juge Weitzman d’annuler les dates fixées en novembre et en décembre 2018 au motif qu’ils ne seront pas prêts à procéder et demandent à la juge de fixer les requêtes, pour la forme, au 5 décembre 2018.
27. À la suite de commentaires de la juge Weitzman laissant sous-entendre qu’elle n’avait pas l’intention d’accorder une aussi longue remise, les accusés modifient ensuite la demande pour limiter la durée de la remise à un mois et précisent qu’ils seront prêts à débuter l’audition des témoins le 5 décembre 2018.
28. La demande d’ajournement du 5 novembre au 5 décembre 2018 est accordée. Les dates du 5 au 21 décembre 2018 sont conservées. De plus, des dates d’audition supplémentaires sont fixées du 4 au 8 février et du 11 au 15 février 2019 du consentement des parties.
29. Le 13 novembre 2018, Iammarrone produit une requête amendée qui conteste désormais la légalité de la même vérification fiscale dont il est question dans la requête de Bruno.
30. De plus, le 13 novembre 2018, Fiorino produit également une requête amendée dans laquelle il demande désormais l’arrêt des procédures en raison de la violation de type Jarvis et un partage d’information illégal entre l’ARC et la GRC.
31. Le 30 novembre 2018, l’avocat de Bruno annonce au tribunal qu’il n’a plus les moyens financiers de poursuivre sa requête Jarvis dans les volets « Plan of Action » (500-73-003792-120) et « Delvex » (500-73-004096-141).
32. L’avocat de Bruno indique ne rien demander à la juge Weitzman à ce stade, puisqu’il n’a pas encore les instructions de son client. Il soulève toutefois deux possibilités, soit la présentation d’une requête Rowbotham ou le fait de se limiter dans sa requête Jarvis aux faits constatés par la juge Larochelle dans ARQ c. BT.
33. Le 5 décembre 2018, l’avocat de Bruno annonce qu’il souhaite dorénavant limiter les faits de sa requête Jarvis aux faits constatés par la juge Larochelle dans ARQ c. BT et suspendre l’audition devant la juge Weitzman jusqu’à la fin des procédures en appel dans ARQ c. BT.
34. L’avocat de Bruno refuse toutefois de confirmer que l’issue du dossier en appel va sceller de façon définitive le sort de sa requête Jarvis devant la juge Weitzman[26].
35. Tous les autres accusés se joignent à Bruno pour demander cet ajournement et acceptent par le fait même de renoncer aux délais indéfinis qu’une telle remise peut engendrer.
36. Le 6 décembre 2018, la juge rend son jugement qui refuse la demande d’ajournement et qui fait l’objet de la présente contestation devant la Cour supérieure (« décision sur la demande d’ajournement no 2 »)[27].
37. Le 7 décembre 2018, l’avocat de Bruno annonce au tribunal que son seul mandat est de contester la décision sur la demande d’ajournement no 2 par voie de certiorari. Il s’objecte toutefois à ce que l’audition des requêtes de type Jarvis des autres accusés débute en son absence.
38. Le 12 décembre 2018, étant donné que l’audition des requêtes n’était pas encore commencée, la juge Weitzman fixe malgré tout 6 journées d’audition supplémentaires, soit les 18 au 22 et 25 février 2019, afin de permettre l’audition des témoins demandés.
39. Le 13 décembre 2018, Bruno produit sa requête pour l’émission d’un bref en certiorari sous le numéro 500-36-009147-185.
40. Compte tenu du dépôt de la requête, la juge Weitzman suspend toutes les procédures à l’égard de tous les accusés ayant présenté des requêtes, à savoir : Bruno, Accurso, Fiorino, Iammarrone et Comparelli.
41. À ce jour, l’audition conjointe des requêtes de type Jarvis n’est pas commencée. Les dates qui sont présentement fixées pour cette audition sont les suivantes : 4 au 8 février 2019, 11 au 15 février 2019, 18 au 22 février 2019 et 25 février 2019.
42. De plus, le procès au fond dans le volet « Plan of Action » n’est pas encore fixé. À ce jour, il s’est écoulé plus de 76 mois depuis le dépôt des accusations. En mars 2018, la juge Weitzman a refusé la requête Jordan/Cody de Bruno dans ce dossier[28].
43. Le procès au fond dans le volet « Delvex » n’est pas encore fixé. À ce jour, il s’est écoulé plus de 58 mois depuis le dépôt des accusations. En mars 2018, la juge Weitzman a refusé la requête Jordan/Cody de Bruno et du coaccusé Comparelli[29] dans ce dossier.
44. Les procès séparés au fond de Fiorino et Iammarrone[30] dans le volet « Infiltration » ne sont pas encore fixés. À ce jour, il s’est écoulé plus de 66 mois depuis le dépôt des accusations en mai 2013. Fiorino et Iammarrone n’ont pas déposé de requête Jordan/Cody dans ce dossier.
45. Le procès au fond d’Iammarrone dans le volet « Infiltration » est présentement fixé à partir du 25 mars 2019, pour une durée de 23 jours.
46. Cependant, il est déjà envisagé d’annuler ces dates et de reporter le procès à une date ultérieure à la demande de l’avocate de M. Iammarrone en raison du délai de préparation insuffisant entre la fin anticipée de l’audition des requêtes de type Jarvis le 25 février 2019 et le début du procès le 25 mars 2019.
[21] Le 5 décembre 2018, la juge d’instance entend la demande d’ajournement de Bruno et des cinq autres coaccusés alors que l’audition de plusieurs requêtes est fixée au 10 décembre 2018 pour une durée de sept semaines.
[22] Bruno et les autres coaccusés demandent alors pour une deuxième fois à la juge d’instance de reporter l’audition des requêtes, et ce, pour attendre une décision de la Cour d’appel susceptible de traiter des mêmes questions.
[23] Le 9 octobre 2018, dans une première décision, la juge d’instance avait pourtant déjà refusé une demande d’ajournement de Bruno et des trois autres coaccusés[31].
[24] Le 16 décembre 2018, dans sa seconde décision, la juge d’instance refuse la demande d’ajournement de Bruno et des cinq autres accusés[32].
[25] Dans ses deux décisions rejetant les demandes d’ajournement, la juge d’instance, après avoir énoncé la position des parties, analyse savamment l’ensemble des facteurs pertinents et motive fort adéquatement ses décisions.
[26] Il convient de reproduire au long les sections « Analyse » des deux décisions de la juge d’instance vu leur interrelation, et ce, même si seulement la deuxième décision est attaquée dans la requête en Certiorari.
Décision sur une demande d’ajournement (« Décision sur la demande d’ajournement no 1 »)[33]
[15] Le pouvoir d’accorder ou de refuser une remise relève de la discrétion du juge qui doit prendre en considération tous les éléments pertinents à la demande [note de bas de page no 8 : R. c. Beauregard, 2015 QCCA 77, paragr. 6].
[16] En l’espèce, il est indéniable que la Cour d’appel devra se pencher non seulement sur les mêmes questions de droit soulevées dans les présentes requêtes, mais également sur l’application des principes de l’arrêt Jarvis alors que la base factuelle est presque identique. À première vue, la position des requérants semble bien fondée. Néanmoins, les considérants suivants ont amené le Tribunal à refuser cette demande de remise :
i) L’intérêt de la justice de procéder le plus rapidement possible :
[17] Contrairement aux exemples cités par les requérants dans des instances civiles, il ne faut pas perdre de vue l’importance de procéder le plus rapidement possible en matière criminelle afin de préserver la confiance générale du public envers l'administration de la justice. Comme l'a dit la juge McLachlin dans Morin [note de bas de page no 9 : R. c. Morin, 1992 1 R.C.S. 771, paragr. 86] « [n]on seulement [les] délais ont des conséquences pour l'accusé, mais ils peuvent également avoir un effet sur l'intérêt du public dans l'administration rapide et équitable de la justice ».
[18] Même si les requérants renoncent à invoquer leurs droits constitutionnels prévus à l’al. 11(b) de la Charte, ces droits s'étendent au-delà de ceux des inculpés. La Cour suprême dans l’arrêt Jordan souligne que « les procès instruits en temps utile ont des répercussions sur les autres personnes qui interviennent dans les procès criminels et qui sont touchées par eux, de même que sur la confiance du public envers l'administration de la justice » [note de bas de page no 10 : R. c. Jordan, 2016 CSC 27, paragr. 22].
[19] Veiller à la réduction des délais est la responsabilité de tous. La Cour suprême dans Cody [note de bas de page no 11 : R. c. Cody, 2017 CSC 31, paragr. 37] enjoint aux juges de première instance d’utiliser leurs pouvoirs de gestion des instances pour réduire les délais au minimum.
ii) Au moins un des accusés ne renonce pas aux délais :
[20] Puisque M. Accurso ne présente pas une demande d’ajournement, mais demande plutôt un procès dans les meilleurs délais, il serait difficile, voire impossible de satisfaire les attentes de l’arrêt Jordan en reportant ces requêtes pour attendre l’issue du pourvoi devant la Cour d’appel.
iii) Les longs délais qui seraient engendrés par cette remise :
[21] À ce jour, les mémoires ne sont pas encore produits devant la Cour d’appel dans le dossier BT Céramiques. Par ailleurs, un nouveau procureur de la poursuite devra prendre la relève pour la suite du dossier en appel et ce dernier n’est pas encore désigné. La possibilité de procéder par voie accélérée n’est pas envisageable avant que le dossier au complet soit en état pour l’audience. Même si la Cour d’appel plaçait éventuellement ce dossier sur le rôle par préférence, on ne pourrait espérer une audience avant l’hiver 2019. Il faut aussi considérer un certain temps pour le délibéré. Sans pouvoir estimer la durée totale, il est entièrement raisonnable de parler en termes de mois, et non de semaines. Par la suite, il faut ajouter un délai pour permettre la préparation d’une demande de permission d’appeler devant la Cour suprême et éventuellement la réponse de celle-ci. Force est de constater que l’audition de ces requêtes devant la Cour du Québec approcherait l’année 2020.
iv) L’intérêt de la justice de ne pas surseoir indéfiniment les procès :
[22] Non seulement s’agit-il ici d’un très long délai, mais au surplus, il est impossible de prévoir précisément une date de reprise.
v) Le fait que le jugement de la Cour d’appel ne tranchera pas le présent litige :
[23] Dans l’optique où la décision de la Cour d’appel trancherait les questions soulevées par les présentes requêtes de façon définitive, une remise pourrait être envisageable malgré les longs délais déjà notés. Or, les requérants affirment catégoriquement qu’à moins que leur pourvoi soit accueilli par la Cour d’appel, les présentes requêtes devront procéder devant la Cour du Québec. Selon eux, des arguments additionnels et un fondement factuel différent que ceux présentés devant la juge Larochelle nécessiteront une nouvelle audience [note de bas de page no 12 : Ajoutons que même si la Cour d’appel infirmait la décision du juge Payette, cette conclusion mettrait fin aux accusations contre M. Bruno, mais pas nécessairement contre les autres accusés pour qui le « standing » ou l’intérêt pour soulever les violations de type Jarvis demeure litigieux.].
[24] Pour ces raisons, le Tribunal refuse la demande d’ajournement.
Décision sur une demande d’ajournement (« Décision sur la demande d’ajournement no 2 »)[34]
[12] Les nouveaux éléments soulevés au soutien de cette demande d’ajournement constituent-ils « des changements importants de circonstances » qui permettent au tribunal de modifier la décision déjà rendue refusant l’ajournement [note de bas de page no 8 : R. c. Adams, [1995] 4 RCS 707, paragr. 30]. Est-il maintenant opportun de surseoir à l’audition de ces requêtes pendant que la Cour d’appel se penche sur les mêmes questions de droit soulevées dans un cadre factuel identique?
[13] Pour les motifs qui suivent, le Tribunal répond par la négative.
1. La renonciation aux délais de tous les accusés
[14] Il est vrai qu’un des motifs refusant la première demande d’ajournement était l’effet qu’aurait eu cette remise sur un des coaccusés qui ne se joignait pas à la demande et qui ne renonçait pas à réclamer son droit à un procès dans un délai raisonnable. Cependant, bien que tous les requérants renoncent à invoquer leurs droits constitutionnels prévus à l’al. 11(b) de la Charte, l’intérêt de procéder avec célérité s'étend au-delà de celui des inculpés. La Cour suprême dans l’arrêt Jordan souligne que « les procès instruits en temps utile ont des répercussions sur les autres personnes qui interviennent dans les procès criminels et qui sont touchées par eux, de même que sur la confiance du public envers l'administration de la justice » [note de bas de page no 9 : R. c. Jordan, 2016 CSC 27, paragr. 22].
[15] Tel que souligné dans la première décision sur la demande d’ajournement, il faut considérer que « [n]on seulement [les] délais ont des conséquences pour l'accusé, mais ils peuvent également avoir un effet sur l'intérêt du public dans l'administration rapide et équitable de la justice » [note de bas de page no 10 : R. c. Morin, [1992] 1 R.C.S. 771, paragr. 86].
[16] Le juge Vauclair dans R. c. Rice souligne l’intérêt collectif des procès dans un délai raisonnable [note de bas de page no 11 : . c. Morin, [1992] 1 R.C.S. 771, paragr. 164] et il énonce que les affaires criminelles sont suspendues « au détriment du système de justice qui tire en grande partie sa légitimité de la célérité avec laquelle le délinquant est jugé puis, le cas échéant, puni » [note de bas de page no 12 : R. c. Rice, 2018 QCCA 198, paragr. 28].
[17] Veiller à la réduction des délais est la responsabilité de tous. La Cour suprême dans Cody [note de bas de page no 12 : R. c. Cody, 2017 CSC 31, paragr. 37] enjoint aux juges de première instance d’utiliser leurs pouvoirs de gestion des instances pour réduire les délais au minimum.
[18] À ce jour, les mémoires ne sont pas encore produits devant la Cour d’appel dans le dossier BT Céramiques inc. c. R., bien que M. Bruno annonce que le sien sera produit incessamment. Même si la Cour d’appel plaçait éventuellement ce dossier sur le rôle par préférence, on ne pourrait espérer une audience avant la mi-hiver 2019. Il faut aussi considérer un certain temps pour le délibéré. Sans pouvoir estimer la durée totale, il est entièrement raisonnable de parler en termes de mois, et non de semaines. Par la suite, il faut ajouter un délai pour permettre la préparation d’une demande de permission d’en appeler devant la Cour suprême et éventuellement la réponse de celle-ci. Force est de constater que ces procès ne pourraient commencer avant au moins un an, sinon plus. Rappelons que les accusations sont portées en septembre 2012 et que les dossiers ont déjà fait l’objet de requête « Jordan » [note de bas de page no 14 : Une requête en arrêt des procédures pour délais déraisonnables par Comparelli et Bruno a été rejetée en mars 2018 : Comparelli c. R., 2018 QCCQ 1767 et R. c. Bruno, 2018 QCCQ 1759]. Non seulement s’agit-il ici d’un très long délai, mais au surplus, il est impossible de prévoir précisément une date de reprise.
2. Les constatations factuelles de la juge Larochelle constitueront dorénavant la seule base factuelle pour les allégations de violations des principes de l’arrêt Jarvis
[19] Même en acceptant de se limiter à la base factuelle établie dans le jugement de la juge Larochelle, l’arrêt de la Cour d’appel ne pourra pas sceller le sort des requêtes qui dépassent le cadre des violations de type Jarvis, et qui demandent un remède fondé sur l’al. 24 (1) de la Charte.
[20] Par ailleurs, si la Cour d’appel infirmait la décision du juge Payette, cette conclusion mettrait fin aux accusations contre M. Bruno, puisque la preuve obtenue en vertu de ces mandats serait ainsi exclue. Mais ce n’est pas nécessairement le cas des autres accusés pour qui le « standing » ou l’intérêt pour soulever les violations de type Jarvis, tout comme le remède demandé demeurent litigieux. De plus, si la Cour d’appel confirme la décision et conclut à l’absence d’une violation des principes de l’arrêt Jarvis, cela n’empêche pas la présentation des requêtes qui ne se limitent pas à de telles violations.
[21] Les avocats de MM. Iammarrone et Fiorino confirment que peu importe la décision de la Cour d’appel, leur requête demeurera d’actualité et une preuve testimoniale sera recueillie pour en parfaire le fondement. Il faut donc également considérer l’impact de reporter l’audition de ces requêtes sur les témoins déjà assignés et l’intérêt de la justice de ne pas ajouter au délai déjà encouru pour consigner ces témoignages au dossier.
3. Les difficultés financières de M. Bruno
[22] Bien qu’il s’agisse d’un fait nouveau survenu depuis la dernière décision, ce n’est pas un considérant déterminant à la décision d’ajourner les requêtes. Les difficultés financières d’un accusé ne suffisent pas en soi, à surseoir à l’audition de sa requête, et certainement pas lorsque cet ajournement irait à l’encontre de l’intérêt public.
[23] Par ailleurs, concernant spécifiquement le cas de M. Bruno, puisqu’il procède sur la base factuelle déterminée par la juge Larochelle, sa requête en exclusion de la preuve fondée sur la violation des principes de l’arrêt Jarvis est identique à celle présentée dans ARQ c. BT, et refusée par le juge Payette en appel [note de bas de page no 15 : R. c. BT Céramiques inc., 2017 QCCS 4262]. Tant que cette décision n’est pas révisée par la Cour d’appel, ce Tribunal est lié, par le principe du stare decisis, et doit appliquer la décision de la Cour supérieure. C’est pourquoi, dans le cas de M. Bruno, le Tribunal rejettera sommairement sa requête.
[24] Le Tribunal conclut qu’il n’y a aucun changement matériel permettant de revoir la décision rendue le 9 octobre 2018. Bien que cette demande s’inscrive dans un but légitime de conserver les ressources, tant judiciaires que personnelles, l’intérêt public et la saine administration de la justice font obstacle à l’ajournement souhaité.
[25] Pour ces raisons, la demande d’ajournement no 2 est REFUSÉE.
[27] À la lumière de ces longs extraits, il appert que dans l’exercice de sa discrétion, la juge d’instance a pris en considération l’ensemble des éléments pertinents pour rejeter les deux demandes d’ajournement de Bruno et des autres coaccusés.
[28] La décision d’accorder ou non un ajournement relève du pouvoir discrétionnaire du juge d’instance[35].
[29] Dans R. c. Beauregard[36], la juge Manon Savard de la Cour d’appel du Québec signale toutefois que ce pouvoir discrétionnaire peut être revu en appel si cette discrétion n’est pas exercée judiciairement. Elle écrit :
[6] Le pouvoir d’accorder ou de refuser une remise est discrétionnaire; l’exercice de ce pouvoir pourra être revu en appel si cette discrétion n’a pas été exercée judiciairement. Dans R. c. M.V., le juge Dalphond écrit : « The test for appellate review is whether the trial judge has given sufficient weight to all relevant considerations. Of course, if the judgment is based on reasons that are not well founded in law, a court of appeal may intervene »[37].
[30] Une Cour d’appel pourrait donc intervenir si la juge d’instance a commis des erreurs manifestes dans l’appréciation des facteurs pertinents et tirer des conclusions non fondées en droit.[38]
[31] Cependant, le recours en Certiorari n’est pas un appel. Les parties dans une instance criminelle ne peuvent recourir au Certiorari qu’en présence d’une erreur de compétence d’un juge de la Cour provinciale[39].
[32] Récemment, la Cour suprême dans l’arrêt Awashish[40], par la voix du juge Rowe a précisé les cas où l’on peut recourir au Certiorari. Il y a lieu de citer certains extraits.
[10] Les appels permis en matière criminelle sont prévus par la loi; sauf exceptions limitées, il n’y a pas d’appel interlocutoire (Code criminel,art. 674; Mills c. La Reine, 1986 CanLII 17 (CSC), [1986] 1 R.C.S. 863, p. 959; R. c. Meltzer, [1989] 1 R.C.R. 1764, p. 1774; Dagenais c. Société Radio-Canada, 1994 CanLII 39 (CSC), [1994] 3 S.C.R. 835, p. 857). La loi prévoit peu d’exceptions et les recours extraordinaires, notamment le certiorari, permettent d’obtenir réparation en certaines circonstances particulières. D’après la règle générale, « les instances pénales ne doivent pas être fragmentées par des procédures interlocutoires qui deviennent des instances distinctes » (R. c. DeSousa, 1992 CanLII 80 (CSC), [1992] 2 R.C.S. 944, p. 954). La fragmentation des instances criminelles résultant des appels interlocutoires risque de mener au règlement de questions en l’absence d’un dossier de preuve complet, ce qui constitue une source importante de retards et une utilisation inefficace des ressources des tribunaux (R. c. Johnson (1991), 1991 CanLII 7174 (ON CA), 3 O.R. (3d) 49 (C.A.), p. 54).
[11] L’accès aux recours extraordinaires est balisé par des considérations du même ordre (Procureur général du Québec c. Cohen, 1979 CanLII 223 (CSC), [1979] 2 R.C.S. 305, p. 310). Le Code criminel et la common law limitent donc strictement l’utilisation du certiorari pour empêcher qu’il serve à contourner la règle interdisant les appels interlocutoires (R. c. Robertson (1988), 1988 ABCA 87 (CanLII), 41 C.C.C. (3d) 478 (C.A. Alb.), p. 480). Par exemple, lors d’une enquête préliminaire, il faut démontrer l’existence d’une erreur de compétence pour avoir droit au certiorari. Cela se produit entre autres lorsque le juge présidant l’enquête préliminaire renvoie l’accusé à procès en l’absence de toute preuve concernant un élément essentiel de l’infraction (Skogman c. La Reine, 1984 CanLII 22 (CSC), [1984] 2 R.C.S. 93, p. 104) ou enfreint les règles de justice naturelle (Patterson c. La Reine, 1970 CanLII 180 (CSC), [1970] R.C.S. 409, p. 414, le juge Hall; Forsythe c. La Reine, 1980 CanLII 15 (CSC), [1980] 2 R.C.S. 268, p. 272; Dubois c. La Reine, 1986 CanLII 60 (CSC), [1986] 1 R.C.S. 366, p. 377; R. c. Deschamplain, 2004 CSC 76 (CanLII), [2004] 3 R.C.S. 601, par. 17).
[…]
[17] Si l’on permet aux parties d’obtenir, par voie de certiorari, le contrôle d’une erreur de droit — même une erreur qui « dispose d’un droit sur-le-champ et de manière définitive » — cela risque de fragmenter des procès criminels et d’entraîner par le fait même une inefficacité, des retards et le règlement de questions sur la base d’un dossier incomplet. Une telle règle serait en opposition directe avec la méthode énoncée dans R. c. Jordan, 2016 CSC 27 (CanLII), [2016] 1 R.C.S. 631, pour rendre justice promptement en matière criminelle. Pour ces motifs, je ne ferais pas mienne l’interprétation plus large retenue par la Cour d’appel du Québec au par. 29, où elle a laissé entendre que les parties pourraient recourir au certiorari pour faire corriger des erreurs de droit manifestes à la lecture du dossier (voir ci-dessus au par. 14).
[…]
[20] Donc, pour résumer, les parties à une instance criminelle ne peuvent recourir au certiorari que s’il y a erreur de compétence d’un juge de la cour provinciale (voir ci-dessus au par. 11). Quant aux tiers, ils peuvent s’en prévaloir pour faire contrôler des erreurs de compétence ainsi que des erreurs manifestes à la lecture du dossier concernant une décision qui a un caractère définitif et contraignant à leur égard (voir ci-dessus au par. 12).
[33] En l’espèce, Bruno invoque, dans son recours en Certiorari, des erreurs dans l’appréciation des différents facteurs pertinents à l’octroi d’un ajournement, ce qui à sa face même est insuffisant pour justifier un recours extraordinaire.
[34] Par ailleurs, il importe de souligner que la juge d’instance a rendu un jugement écrit bien articulé, référant notamment à un premier jugement rendu également par écrit portant sur une demande très semblable, tout en soupesant chacun des arguments allant dans un sens ou dans l’autre, notamment l’intérêt de la justice pour chacun des accusés et de la société.
[35] La juge d’instance a même indiqué dans sa deuxième décision qu’elle se devait de considérer la présence de faits nouveaux de manière à s’assurer qu’elle pourrait rendre une décision différente de la première[41].
[36] Le Tribunal considère qu’il ne peut intervenir et qu’il doit faire preuve de déférence face à la décision rendue par la juge d’instance dans le cadre de la gestion.
[37] Dans son recours en Certiorari et dans son plan d’argumentation relatif à la requête en rejet sommaire et à la demande de continuation des procédures, Bruno tente d’isoler des facteurs en les drapant à titre d’accrocs aux principes de justices naturelles. Cependant la juge d’instance dans l’exercice de sa discrétion judiciaire a considéré, analysé et mesuré soigneusement les différents facteurs.
[38] Le Tribunal souligne qu’il doit appuyer les efforts de la juge d’instance dans l’exercice de sa compétence tout en faisant preuve de déférence à l’égard des choix qui ont été faits et de toutes les décisions qui ont été rendues en fonction de ces choix[42].
[39] Le Tribunal souligne que la décision de la juge d’instance est motivée et justifiée et qu’elle s’inscrit dans un continuum procédural et tient compte du contexte particulier de l’affaire[43].
[40] La Cour suprême dans l’arrêt Cody a spécifiquement mentionné qu’un tribunal « peut refuser une demande d’ajournement pour le motif qu’il en résulterait un délai intolérablement long, et ce, même si cette période pouvait par ailleurs être déduite en tant que délai imputable à la défense »[44].
[41] Par ailleurs, le Tribunal estime que c’est à bon droit que la juge d’instance a déterminé que les délais seraient intolérablement longs si elle accordait la remise.
[42] Cependant, il demeure que la décision interlocutoire attaquée pourrait faire l’objet d’un appel et c’est cette option qui doit être privilégiée à celle du recours en Certiorari. Il convient de reproduire les propos de la Cour d’appel dans l’arrêt Belleau[45].
[6] Le recours en certiorari porte ici sur une décision interlocutoire qui, d’une part, peut être revue par le juge pendant le procès s’il y a changement dans les circonstances, et, d’autre part, ne peut être l’objet d’un appel immédiat : Banville c. R., 2014 QCCA 1905 (CanLII), autorisation d’appel en Cour suprême du Canada refusée. Or, le recours, tel qu’il est formulé, constitue en réalité un appel. Les quelques mentions où l’appelant reproche la violation de la règle audi alteram partem ou encore invoque un déni de justice ne changent rien à la substance de ce recours.
[7] Il n’y a ici ni excès de compétence ni erreur de droit manifeste eu égard au dossier ou à la lecture du dossier (an error of law on the face of the record, selon l’expression utilisée par la Cour suprême dans R. c. Cunningham, 2010 CSC 10 (CanLII), [2010] 1 RCS 331, paragr. 57). La décision peut être le fondement d’un appel ultérieur et c’est l’avenue qui doit être privilégiée.
[43] La Cour d’appel a signalé que les recours en Certiorari « sont à proscrire lorsqu’ils portent sur des jugements interlocutoires rendus en matière criminelle et pénale ». Dans Hurens c. R.[46], la Cour affirme :
[2] Il est reconnu que les recours en révision judiciaire, qu'ils soient de la nature d'un certiorari ou de la prohibition, sont à proscrire lorsqu'ils portent sur des jugements interlocutoires rendus en matière criminelle et pénale : Forest c. La Reine, 2010 QCCA 861 (CanLII); Chun et al c. La Reine, 2009 QCCA 612 (CanLII). En effet, ces décisions sont susceptibles d'être éventuellement reformées en appel, de sorte qu'il existe un autre moyen efficace de les contester : P.G. Canada c. Gagné, 2009 QCCS 1614 (CanLII), et la fragmentation des procédures en matière criminelle doit être évitée en raison de tous les désavantages qui lui sont associés : La Reine c. Magnotta, 2013 QCCS 4395 (CanLII); R. v. Duvivier, (1991), 1991 CanLII 7174 (ON CA), 64 C.C.C. (3d) 20 (C.A. Ont); R. c. Mills, 1986 CanLII 17 (CSC), [1986] 1 R.C.S. 863.
[3] Ainsi, la Cour supérieure devrait généralement refuser d'exercer sa compétence en la matière, comme le rappelle le juge Rosenberg dans R. v. Arcand, 2004 CanLII 46648 (ON CA), 73 O.R. (3d) 758 (Ont. C.A.) :
[13] At common law, certiorari and prohibition are discretionary remedies and the superior court should generally decline to grant the remedy where there is an adequate appellate remedy. […]
[44] Dans l’arrêt Awashish, la Cour suprême a rappelé la règle à l’effet qu’on doit éviter de fragmenter l’instance et de créer une instance distincte[47].
[45] Aussi, dans l’arrêt Awashish, la Cour suprême a réaffirmé l’application de la règle interdisant les appels interlocutoires et la nécessité de limiter strictement l’utilisation du recours en Certiorari afin qu’il ne puisse servir à contourner cette règle.[48] La Cour a également signalé que les recours en Certiorari visant à porter en appel des décisions interlocutoires sont source de retards considérables et constituent « une utilisation inefficace des ressources des tribunaux »[49].
[46] Dans l’arrêt Cody[50], la Cour suprême relève l’important pouvoir des juges d’instance de rejeter sommairement des requêtes non fondées en ces termes :
[38] En outre, les juges de première instance devraient utiliser leurs pouvoirs de gestion des instances pour réduire les délais au minimum. Par exemple, avant de permettre qu’une demande soit entendue, le juge de première instance devrait se demander si elle présente des chances raisonnables de succès. À cette fin, il peut notamment demander à l’avocat de la défense de résumer la preuve qu’il prévoit présenter lors du voir dire, puis rejeter celle-ci sommairement si ce résumé ne révèle aucun motif qui indiquerait que la demande a des chances d’être accueillie (R. c. Kutynec (1992), 1992 CanLII 7751 (ON CA), 7 O.R. (3d) 277 (C.A.), p. 287-289; R. c. Vukelich (1996), 1996 CanLII 1005 (BC CA), 108 C.C.C. (3d) 193 (C.A. C.-B.)). De plus, même s’il permet que la demande soit entendue, le juge de première instance continue d’exercer sa fonction de filtrage : les juges de première instance ne devraient pas hésiter à rejeter sommairement des « demandes dès qu’il apparaît évident qu’elles sont frivoles » (Jordan, par. 63). Cette fonction de filtrage s’applique également aux demandes présentées par le ministère public. En guise de pratique exemplaire, tous les avocats — autant les avocats du ministère public que les avocats de la défense — devraient, dans les cas indiqués, demander aux juges de première instance d’exercer ce pouvoir discrétionnaire.
[47] Ainsi, l’arrêt Cody rappelle que les juges doivent gérer l’instance de manière à réduire les délais et favoriser une saine gestion de l’administration de la justice. Cette fonction de filtrage s’avère nécessaire aux diverses étapes des procédures. La Cour suprême invite ainsi les juges d’instance à se demander si une demande présente des chances raisonnables de succès avant qu’elle ne soit entendue.
[48] Cependant, cette démarche ne se limite pas qu’aux juges d’instance. Les juges de la Cour supérieure, dans l’exercice de leur rôle de tribunal droit commun, siégeant en révision judiciaire disposent de ce pouvoir de rejeter sommairement une requête manifestement mal fondée.
[49] Dans l’arrêt Lacoste-Méthot c. DPCP[51], la Cour d’appel a confirmé la décision d’un juge de la Cour supérieure ayant rejeté sommairement un recours en Certiorari et a mentionné ceci :
[8] Peut-on reprocher à la Cour supérieure d’avoir statué ainsi dans le cadre de la requête en rejet sommaire présentée par l’intimée? Il faut répondre à cette question par la négative. Considérant les motifs invoqués au soutien de la demande de certiorari, considérant que seuls l’absence ou l’excès de compétence ou l’erreur de droit apparente sont en cause, considérant enfin le contexte factuel, la démarche convenait aux circonstances, n’a pas empêché l’appelant de faire valoir tous ses moyens et ne lui a pas causé préjudice, l’affaire ayant été plaidée comme elle l’aurait été sur le fond.
[9] Cette démarche s’inscrit enfin dans la foulée du message général de diligence que la Cour suprême, notamment dans R. c. Cody, adresse aux juges d’instance, qu’elle invite à rejeter sommairement les procédures, demandes ou requêtes frivoles ou manifestement mal fondées, ce qui était ici le cas. Certes, le juge de la Cour supérieure n’était pas ici le juge du procès ni le juge gestionnaire de l’instance, mais le message vaut tout autant.
[Soulignement du Tribunal.]
[50] Plus récemment, il y a eu plusieurs cas où des juges de la Cour supérieure ont rejeté sommairement des requêtes pour recours extraordinaires qui n’offraient aucune chance raisonnable de succès[52]. À ce titre, on peut référer à la décision rendue dans E.D. c. R.[53], où le juge Michel Pennou a rejeté sommairement une requête pour l’émission d’un bref en Certiorari et de mandamus, en indiquant ceci :
[10] Ainsi, en l’espèce, le Tribunal n’est pas saisi d’une inscription en appel. Et ce qui vaut en matière de rejet sommaire d’une inscription en appel ne vaut pas pour la requête pour émission d’un bref de prérogative produite en cours d’instance. Le tribunal saisi d’une telle requête possède le pouvoir de la rejeter sommairement si elle n’offre aucune chance raisonnable de succès (référence omise), d’autant plus que son dépôt entraine la suspension des procédures en première instance, et qu’en règle générale, le Tribunal devrait exercer sa discrétion en déclinant d’en disposer, à moins qu’il ne soit dans l’intérêt de la justice qu’il intervienne immédiatement, et s’immisce dans le cours d’une procédure criminelle qui n’est pas arrivée à terme (référence omise).
III
[11] Après avoir entendu les parties exposer sommairement leurs prétentions, le Tribunal tire les constats suivants :
• La juge d’instance n’a pas refusé d’admettre une preuve ou d’accorder un ajournement en invoquant son absence de compétence, ou par défaut de trancher les demandes soumises. Elle ne peut pas avoir pris les décisions attaquées sans avoir exercé sa compétence et sa discrétion. Les allégations de refus de la juge d’instance d’exercer sa compétence sont donc dénuées de fondement;
• Les erreurs qu’invoque D... ne sont pas de nature juridictionnelle. Leur commission ne permettrait pas de conclure à un excès de compétence. Ainsi, même si le Tribunal était d’avis que la juge d’instance a commis une ou toutes les erreurs invoquées, il ne pourrait pas conclure à un excès de compétence justifiant l’émission d’un bref.
[12] À sa face même, la requête présentée par D... est donc vouée à l’échec.
[13] De plus, à sa requête, de même que lors de l’audition sur la demande de rejet sommaire, D... n’invoque aucune circonstance particulière commandant que, dans l’intérêt de la justice, le Tribunal intervienne sur le champ dans un procès en cours dont l’équité serait compromise sans son intervention. Le Tribunal n’a donc pas de raison de ne pas décliner juridiction.
[51] La Cour d’appel a confirmé le bien-fondé du jugement du juge Pennou. La Cour a notamment indiqué que « la présente affaire concerne précisément une décision interlocutoire susceptible d’être éventuellement réformée en appel au fond ».[54]
[52] Encore plus récemment, la juge Myriam Lachance de la Cour supérieure a rejeté sommairement une requête pour l’émission d’un bref pour prohibition avec Certiorari ancillaire en indiquant que ce pouvoir doit s’appuyer « sur l’absence de chance raisonnable de succès afin de prévenir tout abus de procédure « et de veiller au bon fonctionnement des rouages de la cour ».».[55]
[53] Le Tribunal estime que le recours en Certiorari de Bruno n’a pas de chance véritable de succès et qu’il est voué à l’échec. Aussi, la continuation de l’audition de cette requête en Certiorari dépourvue de mérite serait une perte de temps précieux pour la Cour.
[54] Le Tribunal conclut qu’il doit dès maintenant mettre fin au recours en Certiorari, lequel constitue un appel interlocutoire qui ne vise qu’à ralentir le système de justice criminel et les procédures eu égard à Bruno et aux autres coaccusés[56].
[55] À ce stade, le Tribunal estime qu’il doit « jouer son rôle de gardien de l’administration de la justice en contrôlant les procédures et en éradiquant les délais inutiles » conformément aux recommandations de la Cour suprême dans l’arrêt Jodoin[57] où le juge Gascon pour la majorité de la Cour a indiqué ceci :
[56] Les propos du juge s’accordent avec les enseignements récents de notre Cour dans l’arrêt R. c. Jordan, 2016 CSC 27 (CanLII), [2016] 1 R.C.S. 631, où la majorité dénonce notamment la culture de complaisance vis-à-vis des délais qui nuit à l’efficacité du système de justice criminelle. Dans Jordan, la Cour insiste sur l’importance de rendre justice en temps utile et rappelle que tous les participants au système de justice criminelle doivent collaborer pour que l’administration de la justice soit raisonnablement prompte. Dans cette perspective, il est essentiel de permettre aux tribunaux de jouer leur rôle de gardien de l’intégrité de l’administration de la justice en contrôlant les procédures et en éradiquant les délais inutiles. C’est ce que la Cour supérieure a fait ici.
[Soulignement du Tribunal.]
[56] Enfin, très récemment, la Cour d’appel dans l’arrêt DPCP c. Grich[58] a rappelé l’importance du pouvoir de rejeter sommairement une procédure sans chance véritable de succès en faisant écho des propos de la Cour suprême dans l’arrêt Cody[59]. La Cour s’exprime ainsi :
[21] Le pouvoir des juges d’instances de rejeter sommairement des requêtes en arrêt de procédures a été expressément reconnu par la Cour suprême dans l’arrêt Cody:
[Citation du paragraphe 38 de l’arrêt Cody omise.]
[22] Qu’ils le fassent en accueillant une requête en irrecevabilité ou en rejetant tout simplement la requête qui leur est présentée sans tenir de débat au fond n’a pas d’importance. Ce pouvoir leur appartient et il n’y a pas lieu de le remettre en question.
[23] Il est d’ailleurs essentiel qu’ils aient ce pouvoir puisqu’à défaut, les requêtes en arrêt des procédures pourraient aisément être utilisées, avec succès, à des fins purement dilatoires, contribuant par le fait même, ironiquement, à encombrer les tribunaux. L’audition au fond d’une requête en arrêt des procédures dépourvue de tout mérite est une perte de temps. Le temps de la Cour, qui est précieux, doit être utilisé à bon escient et il revient aux juges d’instance d’en gérer l’utilisation qu’en font les parties. Les ressources, faut-il le répéter, ne sont pas infinies et les justiciables, fussent-ils accusés d’une infraction, n’ont pas le droit absolu d’en faire un usage illimité et incontrôlé.
[Soulignement du Tribunal.]
[57] En résumé, il ressort clairement du dossier que les erreurs alléguées à l’encontre de la décision de la juge d’instance de refuser un ajournement, ne constituent pas un excès de compétence donnant ouverture au recours en Certiorari. Si tant est que la juge d’instance a commis des erreurs intra-juridictionnelles, celles-ci sont réformables, le cas échéant en appel.
[58] En l’absence d’erreur juridictionnelle, le Tribunal doit intervenir rapidement et rejeter sommairement un recours en Certiorari dépourvu de toute chance raisonnable de succès. L’intérêt de la justice nécessite que le Tribunal ne s’immisce pas dans le cours d’une procédure criminelle en cours.
[59] Enfin, le Tribunal déplore que les ressources précieuses des tribunaux soient ainsi utilisées, d’autant plus qu’en raison de l’actuel article 25 des Règles de pratique de la Cour supérieure, les procédures devant la juge d’instance sont automatiquement suspendues. L’importance de mettre fin dès maintenant à ce recours voué à l’échec s’avère d’autant plus pressant pour permettre que les procédures criminelles en cours se poursuivent.
Pour ces motifs, lE TRIBUNAL :
ACCUEILLE la requête en rejet sommaire de la requête pour l’émission d’un bref de Certiorari;
REJETTE sommairement la requête pour l’émission d’un bref de Certiorari;
DÉCLARE sans objet la requête pour ordonner la continuation des procédures nonobstant la signification d’une requête pour l’émission d’un bref de Certiorari;
RENVOIE le dossier à la Cour du Québec pour la suite des procédures;
LE TOUT sans frais de justice.
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__________________________________ Éric Downs, J.C.S. |
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Me François Blanchette et Me Josianne Cyr |
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Procureurs pour la requérante-poursuivante |
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Me Martin Delisle |
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Procureur pour l’intimé-accusé |
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Date d’audience : |
Le 15 janvier 2019 |
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[1] R. c. Rivard, 2016 QCCA 1895, paragr. 1.
[2] R. c. Bruno, 2018 QCCQ 7263 - Décision sur la demande d’ajournement no 1.
[3] Les trois autres coaccusés ayant requis un ajournement sont : Francesco Fiorino, Nicola Iammarrone et Americo Comparelli.
[4] BT Céramiques inc c. R., 2018 QCCA 600.
[5] R. c. Accurso, 2018 QCCQ 8980 - Décision sur la demande d’ajournement no 2.
[6] Les cinq autres coaccusés ayant requis un ajournement sont : Antonio Accurso, Americo Comparelli, Francesco Fiorino, Adriano Furgiuele, Nicola Iammarrone.
[7] Requête de Francesco Bruno pour l’émission d’un bref de Certiorari.
[8] Plan d’argumentation sur la requête en rejet sommaire et continuation des procédures de l’intimé Francesco Bruno, déposé lors de l’audition des requêtes le 15 janvier 2019.
[9] En matière pénale, l’article 265 du Code de procédure pénale prévoit que les règles en matière de révision judiciaire édictées au Code de procédure civile s’appliquent. De sorte que l’article 530(2) du Code de procédure civile s’applique. Ce dernier article prévoit qu’une introduction d’un tel recours extraordinaire n’opère pas sursis des procédures, sauf permission du Tribunal.
[10] R. c. Cody, 2017 CSC 31, paragr. 37-38.
[11] R. c. Awashish, 2018 CSC 45, paragr. 10, 11 et 17.
[12] Les prochaines dates fixées pour la continuation des procédures sont les suivantes : 4 au 8, 11 au 15, 18 au 22 et 25 février 2019.
[13] R. c. Cody, 2017 CSC 31, paragr. 36.
[14] DPCP c. Jodoin, 2017 CSC 26, paragr. 56.
[15] À l’audition du 15 janvier 2019 des requêtes en rejet sommaire et en continuation des procédures, Bruno a cependant indiqué que le paragraphe 34 de la requête en continuation des procédures était contesté. Aussi, dans son plan d’argumentation à la requête en rejet sommaire et en continuation des procédures, il indique ceci au paragraphe 47 : « Ainsi, l’allégation au paragraphe 34 de la requête en continuation de la Requérante est inexacte. La Requérante se base sur une prétendue contradiction entre le paragraphe 35 et les paragraphes 75, 76 et 82 de la requête en certiorari de l’intimé. Cependant, elle ne semble pas comprendre que le paragraphe 35 affirmant « que la trame factuelle dans ARQ c. B.T. recoupe celle dans le Projet Coche » ne veut pas dire un changement de position de l’intimé. ».
[16] Transcriptions du 23 janvier 2018 aux pp. 68-69 et transcriptions du 12 février 2018 aux pp. 113-114 et 146 et la décision sur la demande d’ajournement nº2 aux paragr. 10-11 et 19-21.
[17] R. c. BT Céramiques inc., 2017 QCCS 4262, au paragr. 13 : « Comme le Tribunal doit accepter les éléments de preuve et les faits étayant les conclusions de la juge d’instance, il convient de se référer au jugement d’instance pour établir les assises factuelles du présent jugement ».
[18] Transcriptions du 3 novembre 2017 aux pp. 100-101.
[19] Transcriptions du 23 janvier 2018 à la p. 79.
[20] Transcriptions du 23 janvier 2018 à la p. 82.
[21] R. c. Bruno, 2018 QCCQ 1759, au para. 20.
[22] L’avocat de Bruno avait initialement estimé la durée de sa propre requête à une semaine, en précisant que : «Ce qui va m’intéresser, c’est peut-être cinq (5) ou six (6) témoins, Madame la juge, provenant de la GRC. Et tout dépendant de ce que mon collègue va me divulguer comme preuve, je vais pas d’avance me lier à cinq-six (5-6) témoins, mais vous comprendrez que ça va pas être vingt-cinq (25) témoins, puis trente (30) témoins. C’est quelque chose de très court, qui peut se faire de façon très, très, très courte dans le temps ». Voir les transcriptions du 23 janvier 2019, à la p. 78 et les transcriptions du 12 février 2018, aux pp. 151-152.
[23] BT Céramiques inc c. R., 2018 QCCA 600.
[24] Sauf les 14 et 17 décembre 2018.
[25] R. c. Bruno, 2018 QCCQ 7263 - Décision sur la demande d’ajournement nº1.
[26] Même dans le cadre de sa requête pour l’émission d’un bref de Certiorari, Bruno semble maintenir l’incertitude concernant l’impact de la décision en appel dans ARQ c. BT : voir le paragraphe 35 de sa requête, qui contredit ce qui est allégué aux paragraphes 75, 76 et 82. Voir aussi le paragraphe 18 dans R. c. Bruno et al. (6 décembre 2018), Montréal 500-73-003792-120, 500-73-003991-136, 500-73-004096-141 (C.Q.) - Décision sur la demande d’ajournement no 2 et les paragraphes 13 et 21 dans R. c. Bruno, 2018 QCCQ 7263- Décision sur la demande d’ajournement no 1 qui confirme de toute façon l’intention de Bruno de faire en sorte que le dossier en Cour d’appel ne tranchera pas le dossier de manière définitive : Bruno a l’intention d’aller jusqu’en Cour suprême du Canada.
[27] R. c. Bruno et al. (6 décembre 2018), Montréal 500-73-003792-120, 500-73-003991-136, 500-73-004096-141 (C.Q.) - Décision sur la demande d’ajournement no 2. Ce jugement est maintenant répertorié comme suit : R. c. Accurso, 2018 QCCQ 8980 - Décision sur la demande d’ajournement no 2.
[28] R. c. Bruno, 2018 QCCQ 1759.
[29] Comparelli c. R., 2018 QCCQ 1767.
[30] Le procès de Iammarrone était initialement fixé à partir du 25 mars 2019, pour une durée de 23 jours. Cependant, le 20 décembre 2018, ces dates ont été annulées à la demande de l’avocate de Iammarrone en raison du délai de préparation insuffisant entre la fin anticipée de l’audition des requêtes de type Jarvis le 25 février 2019 et le début du procès le 25 mars 2019.
[31] R. c. Bruno, 2018 QCCQ 7263 - Décision sur la demande d’ajournement no 1.
[32] R. c. Accurso, 2018 QCCQ 8980 - Décision sur la demande d’ajournement no 2.
[33] R. c. Bruno, 2018 QCCQ 7263 - Décision sur la demande d’ajournement no 1.
[34] R. c. Accurso, 2018 QCCQ 8980 - Décision sur la demande d’ajournement no 2.
[35] R. c. Beauregard, 2015 QCCA 77, paragr. 6. Voir aussi : Manhas c. La Reine, 1980 CanLII 172 (CSC) et Darville v. The Queen, 1956 CanLII 463 (SCC).
[36] R. c. Beauregard, 2015 QCCA 77, au paragr. 6.
[37] R. c. M.V., (2004) 2004 CanLII 60132 (QC CA), 189 C.C.C. (3d), 230, paragr. 11.
[38] R. c. Beauregard, 2015 QCCA 77, paragr. 6, citant R. c. M.V., 2004 CanLII 60132 (QC CA), paragr. 11.
[39] R. c. Awashish, 2018 CSC 45, paragr. 20.
[40] R. c. Awashish, 2018 CSC 45.
[41] R. c. Accurso, 2018 QCCQ 8980 - Décision d’ajournement no 2, paragr. 12. La juge référant à la décision R. c. Adams, 1995 CanLII 56 (CSC).
[42] R. c. Cody, 2017 CSC 31, paragr. 37.
[43] Il faut signaler que la juge d’instance a rendu à ce jour plusieurs décisions dans le cadre de la gestion d’instance dont les jugements suivants: R. c. Bruno, 2017 QCCQ 1759 (Requête de type Jordan); R. c. Bruno, 2018 QCCQ 5174 (Divulgation #1); R. c. Bruno et al (19 octobre 2018), Montréal 500-73-003792-120, 500-73-03991-136, 500-73-004096-141 (C.Q.) (Divulgation #2); R. c. Bruno et al. (26 octobre 2018), Montréal 500-73-003792-120, 500-73-003991—136, 500-73-004096-141 (C.Q.) (Divulgation #3).
[44] R. c. Cody, 2017 CSC 31, paragr. 37.
[45] Belleau c. R., 2015 QCCA 1916, paragr. 6-7, Hurens c. R., 2013 QCCA 1700, paragr. 2-3.
[46] Hurens c. R., 2013 QCCA 1700, paragr. 2.
[47] R. c. Awashish, 2018 CSC 45, paragr. 10-11.
[48] R. c. Awashish, 2018 CSC 45, paragr. 11.
[49] R. c. Awashish, 2018 CSC 45, paragr. 10.
[50] R. c. Cody, 2017 CSC 31, paragr. 38.
[51] Lacoste-Méthot c. DPCP, 2018 QCCA 228 (Autorisation de pourvoi rejeté, C.S.C. 23.08.2018, no 38065.
[52] Voir R. c. Roberge, 2018 QCCS 376 (juge François Dadour), (appel rejeté, 2018 QCCA 228, autorisation de pourvoi rejetée, C.S.C. 23.08.2018, no 38065); Lacoste-Methot c. DPCP, 2018 QCCA 228 (autorisation de pourvoi rejetée, C.S.C., 23.08.2018, no 38065); Zampino c. DPCP, 2017 QCCS 4187 (juge Michael Stober); Gagnon c. R., 2017 QCCS 4145 (juge Michel Lacroix).
[53] E.D. c. R., 2018 QCCS 6017.
[54] E.D. c. R., 2018 QCCA 263, paragr. 7.
[55] R. c. Lafortune, C.S. Laval no 540-36-001030-187, 4 décembre 2018.
[56] R. c. Awashish, 2018 CSC 45, paragr. 10.
[57] DPCP c. Jodoin, 2017 CSC 26, paragr. 56.
[58] DPCP c. Grich, 2019 QCCA 6.
[59] R. c. Cody, 2017 CSC 31.
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