Décision

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Adam c. Thai

2023 QCTAL 27831

 

 

TRIBUNAL ADMINISTRATIF DU LOGEMENT

Bureau dE Montréal

 

No dossier :

671027 31 20221228 T

No demande :

3953617

 

 

Date :

13 septembre 2023

Devant la juge administrative :

Stella Croteau

 

Michel Adam

 

Locataire - Partie demanderesse

c.

Tuyet Mai Thai

 

Locateur - Partie défenderesse

 

D É C I S I O N

 

 

[1]         Le 29 juin 2023, le locataire demande au Tribunal la rétractation de la décision rendue le 6 juin 2023, laquelle rejette la rétractation de la décision du 27 mars 2023, qui résilie le bail et ordonne l’expulsion du locataire ainsi que le paiement de 1 950 $, plus les intérêts et les frais.

[2]         Le locateur demande une ordonnance de limitation procédurale à l'égard du locataire, de sorte qu'il lui soit interdit de déposer toute autre demande à l'égard de la décision attaquée vu son caractère purement dilatoire et abusif.

[3]         À la suite de cette demande, le locataire demande la même ordonnance à l’égard du locateur.

CONTEXTE FACTUEL

[4]         Il s’agit de la deuxième demande de rétractation du locataire dans ce dossier.

[5]         Il était présent lors de l’audience sur la demande originale ainsi que lors de l’audience sur sa première demande de rétractation.

[6]         Le locataire soutient comme moyen sommaire de défense qu’il est prêt à payer mais que le propriétaire ne vient pas chercher les loyers.

[7]         Il confirme que son moyen de défense est le même qu’il avait mentionné lors de la première demande de rétractation. Il a reçu la décision mais ne la comprend pas et il désire réitérer son moyen de défense.


ANALYSE

[8]         La demande du locataire est fondée sur l'article 89 de la Loi sur le Tribunal administratif du logement[1] (ci-après LTAL), lequel se lit comme suit :

« 89. Si une décision a été rendue contre une partie qui a été empêchée de se présenter ou de fournir une preuve, par surprise, fraude ou autre cause jugée suffisante, cette partie peut en demander la rétractation.

Une partie peut également demander la rétractation d’une décision lorsque le Tribunal a omis de statuer sur une partie de la demande ou s’est prononcé au-delà de la demande.

La demande de rétractation doit être faite par écrit dans les dix jours de la connaissance de la décision ou, selon le cas, du moment où cesse l’empêchement.

La demande de rétractation suspend l’exécution de la décision et interrompt le délai d’appel ou de révision jusqu’à ce que les parties aient été avisées de la décision.

Une partie qui fait défaut d’aviser de son changement d’adresse conformément à l’article 60.1 ne peut demander la rétractation d’une décision rendue contre elle en invoquant le fait qu’elle n’a pas reçu l’avis de convocation si cet avis a été transmis à son ancienne adresse. »

[9]         Ici, le locataire soutient que le locateur ne vient pas chercher ses loyers. Il reprend le même moyen de défense qu’il avait fait valoir lors de sa première demande de rétractation. Lequel est un moyen de défense sur la demande originale et non pour la demande de rétractation.

[10]     Cela dit, le locataire ne fait valoir aucun motif de rétractation. Il était présent lors de l’audience et il a eu l’occasion de faire valoir ses prétentions.

[11]     Le locataire n'ayant pu justifier de motif justifiant la rétractation de la décision, celle-ci sera rejetée.

Demande de limitation procédurale

[12]     L'ordonnance de limitation procédurale est prévue par l'article 63.2 LTAL, lequel se lit comme suit :

« 63.2. Le Tribunal peut, sur demande ou d’office après avoir permis aux parties intéressées de se faire entendre, rejeter un recours qu’il juge abusif ou dilatoire ou l’assujettir à certaines conditions.

Lorsque le Tribunal constate qu’une partie utilise de façon abusive un recours dans le but d’empêcher l’exécution d’une de ses décisions, il peut en outre interdire à cette partie d’introduire une demande devant lui à moins d’obtenir l’autorisation du président ou de toute autre personne qu’il désigne et de respecter les conditions que celui-ci ou toute autre personne qu’il désigne détermine.

Le Tribunal peut, en se prononçant sur le caractère abusif ou dilatoire d’un recours, condamner une partie à payer, outre les frais visés à l’article 79.1, des dommages-intérêts en réparation du préjudice subi par une autre partie, notamment pour compenser les honoraires et les autres frais que celle-ci a engagés, ou, si les circonstances le justifient, attribuer des dommages-intérêts punitifs. Si le montant des dommages-intérêts n’est pas admis ou ne peut être établi aisément au moment de la déclaration d’abus, le Tribunal peut en décider sommairement dans le délai et aux conditions qu’il détermine. »

[13]     À cet égard, dans Structures métropolitaines (SMI) inc. c. Cour du Québec du district judiciaire de Montréal[2], le juge Yves Poirier de la Cour supérieure s'exprimait comme suit :

« [20] La limitation procédurale prévue à l'article 63.2 de la Loi sur la régie du logement (« Loi sur la Régie du logement ») a comme objectif d'empêcher une partie d'utiliser un subterfuge visant à retarder indûment l'exécution d'une décision rendue par l'un des juges administratifs de la Régie.

(...)

[24] Cette limitation procédurale n'est donc pas fatale. Son imposition force la partie visée à requérir une autorisation particulière afin d'exercer ce recours. (...)

[25] L'abus peut être constaté d'office par le juge administratif ou requis par la partie adverse. » 


[14]     Étant donné que le locataire présente une deuxième demande en rétractation car il est insatisfait de la décision sur sa première demande de rétractation, le Tribunal est d'avis que la demande est purement dilatoire, ayant pour objectif de prolonger les délais et fait droit à la demande du locateur visant à obtenir une ordonnance de limitation procédurale.

[15]     En ce qui concerne la demande de limitation procédurale du locataire contre le locateur, elle est rejetée car le locateur n’utilise pas de façon abusive un recours dans le but d'empêcher l'exécution d'une décision.

POUR CES MOTIFS, LE TRIBUNAL :

[16]     REJETTE la demande en rétractation;

[17]     MAINTIENT la décision rendue le 6 juin 2023;

[18]     INTERDIT au locataire d'introduire une nouvelle demande en rétractation ou toute autre demande dans le présent dossier, devant le Tribunal administratif du logement, et ce, à moins d'obtenir l'autorisation du président du Tribunal ou de toute personne qu'il désigne, et de respecter les conditions que celui-ci ou cette autre personne qu'il désigne détermine;

[19]     REJETTE la demande de limitation procédurale contre le locateur.

 

 

 

 

 

 

 

 

Stella Croteau

 

Présence(s) :

le locataire

le locateur

Date de l’audience : 

26 juillet 2023

 

 

 


 


[1] RLRQ, c. T-15.01.

[2] 2019 QCCS 5368.

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