Décision

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Immeubles Laberge c. Baranovskiy

2024 QCTAL 30530

 

 

TRIBUNAL ADMINISTRATIF DU LOGEMENT

Bureau de Montréal

 

No dossier:

713895 31 20230601 F

No demande:

3929523

RN :

 

4388308

 

Date :

25 septembre 2024

Devant la greffière spéciale : 

Me Chantal Houde

 

Les Immeubles Laberge SOCIÉTÉ EN NOM COLLECTIF

Locatrice - Partie demanderesse

c.

Anton Baranovskiy

 

Marina Makeeva

Locataires - Partie défenderesse

 

DÉCISION

 

 

[1]         La locatrice a produit une demande de fixation de loyer conformément aux dispositions de l’article 1947 du Code civil du Québec.

[2]         Les parties sont liées par un bail du 1er octobre 2022 au 30 septembre 2023, à un loyer mensuel de 964,00 $, comprenant le coût de l’espace de stationnement.

[3]         Considérant la connexité entre les demandes relatives à l’immeuble situé sur le boulevard Gouin à Montréal, celles-ci ont été réunies afin de favoriser la tenue d’un processus efficace et ainsi être entendues et jugées sur la même preuve, conformément à l'article 57 de la Loi sur le Tribunal administratif du logement [1].

[4]         Le Tribunal rendra cependant une décision distincte pour chaque logement concerné.

[5]         Une des locataires présente lors de l’audience soulève que la piscine a été enlevée en 2023.

Qu’en est-il du retrait de la piscine?

[6]         Lors d’une demande de fixation de loyer, le Tribunal peut réduire le loyer d'une valeur correspondant à la perte d'un service ayant eu lieu durant les douze mois précédant la période pour laquelle le loyer est à fixer, conformément à l'article 8 du Règlement sur les critères de fixation de loyer, lequel se lit comme suit:

« 8. Le tribunal réduit le loyer exigible dans la mesure où le locateur a fait défaut durant les 12 mois précédant la période pour laquelle le loyer est à fixer de maintenir la qualité des services ou de procurer l’usage d’un accessoire ou d’une dépendance de l’immeuble ou du logement concerné. »

[7]         En l’espèce, l’utilisation d’une piscine peut faire l’objet d’une réduction de loyer [2].

[8]         Selon l’application de l’article 8, la perte subie doit, en plus de précéder les 12 mois de la période du loyer à fixer, revêtir un caractère de permanence [3].

[9]         La locatrice a choisi d’enlever la piscine vers la fin de l’année 2023. Rappelons que la perte de ce service doit avoir lieu douze mois précédant la période pour laquelle le loyer est à fixer. À titre d’exemple, pour un loyer débutant le 1er mai 2023, le retrait doit avoir eu lieu vers avril 2022.

[10]     Considérant que la perte de l’utilisation de la piscine ne constitue pas 12 mois continus précédant les loyers à fixer, les locataires n’ont pas droit à une réduction de loyer pour la présente période de fixation.

[11]     Une des locataires soutient qu’elle n’a pas reçu les documents que la locatrice lui a signifiés. À la lecture du procès-verbal de l’huissier, la demande de modification du bail et la fixation 2023-2024 ont été remises en mains propres au destinataire à son domicile.

Qu’en est-il de la signification des procédures par huissier?

[12]     Les conditions entourant la notification et la signification d'une demande ou d’une autre procédure sont prévues à l’article 7 du Règlement sur la procédure devant le Tribunal administratif du logement [4]

« 7. La notification ou la signification d’une demande ou d’une requête se fait dans un délai raisonnable, une fois qu’elle est produite au Tribunal, par poste recommandée ou par huissier. Elle peut aussi être faite par tout autre mode permettant de prouver sa réception. Preuve de la notification ou la signification devra être faite au membre.

Le membre peut, sur requête même verbale, autoriser un autre mode de notification notamment par avis public. Il peut encore, sur le vu du procès-verbal d’un huissier qui a tenté sans succès de signifier une demande ou une requête, autoriser cette personne à la notifier en la manière qu’il détermine.

Lorsqu’un huissier a tenté de signifier une procédure et qu’il a consigné ce fait à son procès-verbal, il peut, sans autorisation, procéder à la signification en laissant sur place copie de la procédure à l’intention du destinataire. »

[13]     L’article 7 du Règlement a été rédigé en conformité avec les règles applicables à la procédure civile ordinaire en référence à l’article 116 du Code de procédure civile du Québec :

« 116. La signification ou la notification faite par l’huissier est réalisée par la remise du document à son destinataire en mains propres, ou si cela ne se peut, en laissant le document au domicile ou à la résidence du destinataire entre les mains d’une personne qui paraît apte à le recevoir. Si le document ne peut être ainsi remis, il doit être laissé dans un endroit approprié, sous pli cacheté ou sous une autre forme propre à en assurer la confidentialité.

Si le document est signifié, l’huissier appose sa signature et son cachet sur le document et y indique la date et l’heure.

Si le destinataire refuse de le recevoir, l’huissier constate ce refus sur le document, lequel est réputé avoir été signifié ou notifié en mains propres au moment du refus. L’huissier doit alors laisser la copie du document par tout moyen approprié. »

[14]     Le Code de procédure civile actuel prévoit que l’huissier peut déposer les procédures sous le huis de la porte. Il n’a plus à faire une tentative préalable ou obtenir une autorisation et peut simplement déposer le rapport et les documents sans autre formalité dans un endroit approprié, sous pli cacheté.

[15]     Concernant la signification sous le huis de la porte ou la remise de la procédure au destinataire en mains propres, ce mode de transmission ne peut être contesté que par la voie d’une inscription en faux [5]. Le procès-verbal d’huissier est un acte authentique, lequel ne peut pas être contredit par simple témoignage [6]:

[16]     En conséquence, la locataire devra présenter une inscription en faux afin de contester le procèsverbal de l’huissier qui a consigné la signification de la procédure, en sa qualité d’officier de justice.

FIXATION

[17]     La locatrice a fourni le formulaire de renseignements nécessaires à la fixation du loyer, ainsi que les pièces justificatives et les factures au soutien de ces renseignements.


[18]     La locatrice a le fardeau de prouver, selon la règle de la prépondérance de la preuve et de la balance des probabilités, les dépenses et les montants inscrits dans le formulaire de renseignements nécessaires pour permettre au Tribunal de calculer l'augmentation du loyer selon les critères prévus au Règlement sur les critères de fixation de loyer [7].

[19]     Dans le cadre d’une demande de fixation du loyer présentée en vertu de l'article 1947 du Code civil du Québec, le Tribunal ne peut pas tenir compte des inconvénients soulevés, lesquels n'ont pas pour effet de contrer la fixation du loyer au terme du bail à renouveler, tel qu’expliqué lors de l’audience.

[20]     Le Tribunal a retranché les frais de fausses alarmes au montant de 8 044,89 $. Il est de jurisprudence constante[8] d’exclure ces frais du calcul de fixation, puisque cette dépense n’a pas pour but de maintenir la valeur de l’immeuble ou ses accessoires en bon état [9].

[21]     Rappelons que les coûts d’entretien sont généralement des réparations usuelles, récurrentes, qui visent à entretenir l’extérieur ou l’intérieur de l’immeuble. Ces travaux sont effectués dans les aires communes ou dans les logements. Ils sont répartis sur l’ensemble des logements résidentiels de l’immeuble selon la quote-part de chaque locataire. En somme, ces frais visent la remise en état de ce qui est détérioré. Il s’agira de corriger les éléments défectueux, de les remplacer ou de les restaurer.

[22]     Après calcul, l’ajustement du loyer permis en vertu du Règlement sur les critères de fixation de loyer est de 38,59 $ par mois, s’établissant comme suit :

 

Taxes municipales et scolaires

2,87 $

Assurances

 2,46 $

Gaz

 8,30 $

Électricité

 1,95 $

Mazout

 0,00 $

Frais d’entretien

10,07 $

Frais de services

0,00 $

Frais de gestion

 1,69 $

Réparations majeures, améliorations majeures,

mise en place d’un nouveau service

 

 1,43 $

Ajustement du revenu net

 9,82 $

 

 

TOTAL

 

 38,59 $

 

Réserve d’une dépense

[23]     La locatrice présente une facture d’honoraires professionnels de 20,300,30 $ concernant un plan d’urbanisme pour l’aménagement d'une partie du terrain.

[24]     Cependant, la locatrice explique que ces travaux seront exécutés en 2023 ou ultérieurement.

[25]     Le Tribunal est d’avis que le principe général applicable doit tenir compte de la date où les travaux sont complétés et non de la date de paiement [10]. Ce qui permet aux locataires d’en bénéficier.

[26]     En conséquence, le Tribunal réserve la dépense de 20,300,30 $ pour le prochain renouvellement de bail ou lorsque les travaux seront complétés.

[27]    
CONSIDÉRANT l'ensemble de la preuve faite à l'audience;

[28]     CONSIDÉRANT qu’un ajustement mensuel de 38,59 $ est justifié;

[29]     CONSIDÉRANT l’absence de preuve justifiant la condamnation des locataires au paiement des frais de la demande;

POUR CES MOTIFS, LE TRIBUNAL :

[30]     FIXE le loyer, après arrondissement au dollar le plus près, à 1 003,00 $ par mois du 1er octobre 2023 au 30 septembre 2024, comprenant le coût de l’espace de stationnement.

[31]     RÉSERVE la dépense au montant de de 20,300,30 $ concernant le plan d’urbanisme de l’aménagement d'une partie du terrain pour le prochain renouvellement de bail ou lorsque les travaux seront complétés.

[32]     Les autres conditions du bail demeurent inchangées.

[33]     La locatrice assume les frais de la demande.

 

 

 

 

 

 

 

 

Me Chantal Houde, greffière spéciale

 

Présence(s) :

les mandataires de la locatrice

les locataires

Date de l’audience : 

5 juillet 2024

 

 

 


 


[1] RLRQ, c. T-15.01.

[2] Chouinard c. St-Jean, 2013 CanLII 141771 (QC TAL).

[3] Chaltchi c. Mallay, 31-060511-118F, 6 février 2007, Me Ginette Chartrand; Bessette c. Mathieu, 2020 QCRDL 5527 (CanLII), 2020 QCTAL 5527.

[4] RLRQ, c. T-15.01, r. 5.

[5] Naydenov c. 8664501 Canada inc., 2021 QCTAL 17295 (CanLII).

[6] Vassiliadis c. Domaine de la pépinière inc., 2020 QCRDL 7601 (CanLII),

[7] RLRQ, c. T-15.01, r. 2.

[8] Hazelview Property Services Inc. c. Daniel, 2022 QCTAL 15082 (CanLII); R&H Management 2011 inc. c. Chavez, 2022 QCTAL 16717 (CanLII).

[9] Terrasses Greenfield Canada Inc. c. Martel-Harvey, R.L. révision, 37-880419-041V-890321, 8 janvier 1990, rr. Joly et Bernard (J.L. 90-32).

[10] Résidence 3615 Ridgewood c. Giacobbe, R.L. 31-080222-051P-080416, 30 janvier 2009, g.s. Jodoin, SOQUIJ AZ-50574501, J.L.E. 2009JL-20.

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