Décision

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Place Benoit inc. c. Blaize

2024 QCTAL 1512

 

 

TRIBUNAL ADMINISTRATIF DU LOGEMENT

Bureau dE Montréal

 

No dossier :

722571 31 20230717 G

No demande :

3974295

 

 

Date :

17 janvier 2024

Devant la juge administrative :

Leyka Borno

 

Place Benoit Inc.

 

Locatrice - Partie demanderesse

c.

Juliana Blaize

 

Locataire - Partie défenderesse

 

D É C I S I O N

 

 

[1]         La locatrice demande la résiliation du bail au motif que la locataire paie fréquemment son loyer en retard.

[2]         Elle demande également la résiliation du bail pour le non-respect d’une ordonnance rendue par le Tribunal administratif du logement le 20 avril 2023 lui enjoignant de payer son loyer le premier jour de chaque mois.

Contexte factuel

[3]         Les parties sont liées par un bail reconduit du 1er juillet 2023 au 30 juin 2024, au loyer mensuel de 900 $, payable le premier jour de chaque mois.

[4]         À la date de l’audience, tous les loyers sont payés.

[5]         Le 20 avril 2023, le Tribunal rend une ordonnance intimant la locataire de payer son loyer le premier jour de chaque mois, à compter de la signature de la décision.

[6]         L’exécution provisoire n’étant pas ordonnée, la décision est exécutoire à compter du 1er juin 2023.

[7]         La locatrice invoque les retards fréquents de la locataire à payer son loyer. Elle mentionne que le loyer a été payé en retard à 8 reprises au cours des 12 derniers mois.

[8]         La locatrice produit en preuve les dates de paiement du loyer de la locataire depuis le 1er juillet 2021[1].

[9]         Il ressort de ce document que depuis le 1er juin 2023, la locataire a payé son loyer en retard à deux reprises, soit les loyers de juillet et d’octobre 2023. Ceux-ci ont été payés le 5 juillet et le 2 octobre 2023 respectivement.


[10]     En défense, monsieur Evereste Blaize, fils de la locataire témoigne à l’audience.

[11]     Il explique que sa mère, la locataire, est âgée de 85 ans. Cette dernière demeure avec sa fille, Libriana Blaize, et ses petits-enfants.

[12]     Depuis environ un an, le paiement du loyer se fait par virement bancaire. Comme sa mère n’est pas à l’aise avec cette méthode de paiement, M. Blaize explique que c’est sa sœur qui s’occupe de faire les virements.

[13]     Il explique également que sa mère est hospitalisée depuis juin 2023 et l’est encore à ce jour. Il souligne au passage que sa mère n’a pas reçu la présente demande de résiliation du bail de la locatrice.

[14]     Il ajoute que bien que la décision du 20 avril 2023 ait été envoyée à l’adresse de sa mère, M. Blaize affirme que cette dernière n’en a pas eu connaissance de celle-ci, car elle était également hospitalisée durant cette période.

[15]     Il précise que les retards dans le paiement du loyer depuis la décision du 20 avril 2023 résultent du fait qu’il n’est pas toujours possible pour sa sœur ou un autre membre de sa famille d’effectuer les transactions bancaires.

[16]     Madame Libriana Blaize, la fille de la locataire, témoigne à l’audience.

[17]     Elle affirme que sa mère est gravement malade. Elle corrobore le témoignage de M. Blaize selon lequel sa mère est hospitalisée depuis juin 2023 jusqu’à ce jour.

[18]     Elle ajoute que sa mère a été hospitalisée également en avril 2023, ce qui explique son absence à l’audience portant sur la demande de non-paiement de la locatrice.

[19]     Elle reconnait avoir reçu la décision du 20 avril 2023, enjoignant à sa mère de payer le 1er du mois, mais confirme ne pas la lui avoir remise.

[20]     Elle confirme qu’elle est responsable des virements bancaires depuis que ce mode de paiement est exigé par la locatrice en raison de la COVID, sa mère ne sachant pas comment faire.

[21]     Elle termine en mentionnant qu’elle est maintenant en mesure de faire les paiements le 1er de chaque mois, maintenant qu’elle reçoit de l’aide de ses enfants. Elle précise que ces derniers ont maintenant un emploi à temps plein, ce qui n’était pas le cas auparavant.

Analyse et décision

[22]     Traitons d’abord du motif lié au non-respect de l’ordonnance prononcée le 20 avril 2023.

[23]     Le recours de la locatrice est fondé 1973 du Code civil du Québec qui prévoit ce qui suit :

« 1973. Lorsque l’une ou l’autre des parties demande la résiliation du bail, le tribunal peut l’accorder immédiatement ou ordonner au débiteur d’exécuter ses obligations dans le délai qu’il détermine, à moins qu’il ne s’agisse d’un retard de plus de trois semaines dans le paiement du loyer.

Si le débiteur ne se conforme pas à la décision du tribunal, celui-ci, à la demande du créancier, résilie le bail. »

[24]     Lorsqu'une ordonnance est rendue conformément à l'article 1973 du Code civil du Québec précité, la seule preuve du défaut de la locataire de respecter une telle ordonnance entraîne la résiliation du bail.

[25]     Il faut noter que l'objectif recherché par l'article 1973 du Code civil du Québec est d'accorder une ultime et dernière chance à la locataire de se conformer à son obligation lorsque la preuve soumise lors de l'audience antérieure justifiait la résiliation du bail et que le préjudice sérieux avait été démontré.

[26]     La preuve révèle qu’une ordonnance enjoignant à la locataire de payer son loyer le 1er du mois est rendue par le Tribunal le 20 avril 2023.

[27]     Il appert de la preuve que la locataire a délégué à sa fille les obligations concernant le paiement du loyer vis-à-vis la locatrice, et ce, depuis le début de la pandémie de COVID.


[28]     Bien qu’elle ait mandaté sa fille, la locataire demeure tout de même responsable des obligations découlant du bail, dont le paiement du loyer le 1er de chaque mois.

[29]     La preuve non contredite révèle que la fille de la locataire a reçu l’ordonnance, rendue le 20 avril 2023, et la demande de locatrice pour non-respect de l’ordonnance.

[30]     Malgré tout, il appert que le loyer a été payé à deux reprises en retard depuis le 1er juin 2023, date à laquelle la décision est exécutoire.

[31]     La preuve démontre donc que par ces retards, la locataire a fait défaut de respecter l’ordonnance l’intimant de payer le premier jour de chaque mois, ordonnance rendue en vertu de l’article 1973 du Code civil du Québec.

[32]     Conséquemment, il y a lieu de résilier le bail pour non-respect de l’ordonnance en question.

[33]     Considérant la décision du Tribunal sur ce motif de résiliation, il n’y a pas lieu de se prononcer sur le retard fréquent.

[34]     L’exécution provisoire de la présente décision n’est pas justifiée aux termes de l’article 82.1 de la Loi sur le Tribunal administratif du logement.

POUR CES MOTIFS, LE TRIBUNAL :

[35]     ACCUEILLLE la demande de la locatrice;

[36]     RÉSILIE le bail et ORDONNE l’expulsion de la locataire et de tous les occupants du logement;

[37]     CONDAMNE la locataire à payer à la locatrice les frais de justice de 107 $.

 

 

 

 

 

 

 

 

Leyka Borno

 

Présence(s) :

le mandataire de la locatrice

Me Nikita Parkhaev, avocat de locatrice

le mandataire de la locataire

Date de l’audience : 

17 octobre 2023

 

 

 


 


[1] Pièce P-3.

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