Guérard c. Gaudette |
2014 QCRDL 12605 |
RÉGIE DU LOGEMENT |
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Bureau dE Montréal |
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No dossier: |
119137 31 20131101 G |
No demande: |
1352857 |
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Date : |
08 avril 2014 |
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Régisseur : |
Éric Luc Moffatt, juge administratif |
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Eric Guérard |
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Locateur - Partie demanderesse |
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c. |
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Gilles Gaudette
Marie-Jeanne Laflèche (Gaudette) |
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Locataires - Partie défenderesse |
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D É C I S I O N
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[1] Le
locateur a introduit une demande d’autorisation pour reprendre le logement, et
ce, afin de s’y loger à partir du 1er juillet 2014. Le recours du
locateur se fonde sur l’article
« 1963. Lorsque le locataire refuse de quitter le logement, le locateur peut, néanmoins, le reprendre, avec l'autorisation du tribunal.
Cette demande doit être présentée dans le mois du refus et le locateur doit alors démontrer qu'il entend réellement reprendre le logement pour la fin mentionnée dans l'avis et qu'il ne s'agit pas d'un prétexte pour atteindre d'autres fins.»
[2] Un avis de reprise a été transmis aux locataires en date du 28 octobre 2013 (pièce P-1 en liasse). Le 29 octobre 2013, les locataires avisaient le locateur qu’ils refusaient la reprise annoncée.
[3] La demande a été introduite dans le délai prévu par la loi.
[4] Les parties sont liées par un bail reconduit et couvrant la période du 1er juillet 2013 au 30 juin 2014, au loyer mensuel de 465 $.
[5] Le locateur a acquis l’immeuble au cours de l’année 2012.
[6] Le logement concerné se compose de 4 pièces et demie et est situé au rez-de-chaussée d’un immeuble qui abrite 5 logements.
[7] Un logement de 5 pièces et demie se trouve au sous-sol. Deux logements de quatre pièces et demie se trouvent au rez-de-chaussée et de même à l’étage.
[8] Le locateur habite le quartier Sainte-Rose à Laval avec sa conjointe et ses 3 enfants. Deux des enfants y demeurent en garde partagée avec son ex-conjointe. Les enfants sont âgés de 12, 10 et 3 ans. Le locateur dit vouloir se rapprocher de son milieu de travail et de ses clients qui se trouvent principalement au centre-ville de Montréal, le locateur œuvrant dans le domaine de l’informatique. Le locateur indique avoir constaté, avec le temps, qu’il ne consacrait plus 40 ou 45 minutes pour se rendre au centre-ville mais que cela prenait maintenant de 75 à 90 minutes. D’autre part, le locateur indique manquer d’espace dans la maison unifamiliale qu’il occupe actuellement, laquelle est devenue trop exiguë pour s’y loger avec sa famille, le locateur précisant que ses 2 filles âgées de 10 et 12 ans occupent actuellement la même chambre.
[9] De plus, vu la présence de son jeune enfant âgé de 3 ans, il dit préférer ne pas avoir d’escalier mais un logement sur un seul étage.
[10] Le locateur explique qu’il occupera le logement sis au 2043 Saint-Zotique en ce que le logement sera jumelé au 2045 qui y est contigu au rez-de-chaussée. Ses plans ont été préparés aux fins du projet (Pièce P-4 en liasse) afin de transformer les 2 logements en un seul vaste logement qui comportera 4 chambres à coucher. Le locateur dit s’être entendu avec les locataires occupant le 2045 pour qu’il devienne vacant à partir du 1er juillet 2014. De surcroît, il montre avoir reçu un avis de non-reconduction du bail (pièce P-3) des locataires qui occupent le logement sis au 2045 Saint-Zotique Est. La fin du bail est prévue pour le 30 juin 2014.
[11] Quant à son projet de reprise, le témoignage du locateur est crédible et probant. Son témoignage est corroboré par celui de sa conjointe Pascale Godbout. Il prévoit vendre sa maison actuelle pour financer les travaux prévus dans l’immeuble de la rue Saint-Zotique, lesquels coûteraient environ 40 000 $ et les autorités municipales lui ont confirmé que le permis nécessaire pourra lui être délivré. De l’avis du tribunal, le locateur a démontré la faisabilité et le sérieux de son projet.
[12] Le locateur dit être propriétaire d’un deuxième immeuble locatif, soit un duplex où se trouvent des logements de 6 pièces et demie pour lesquels il n’a reçu aucun avis de non-reconduction de bail et qui génèrent ensemble un revenu mensuel de 2 475 $. Selon le locateur, la superficie de ces logements est insuffisante et il ne pourrait bénéficier d’un garage comme sur la rue Saint-Zotique où il pourra faire usage d’un garage double. La perte de revenus locatifs serait plus élevée si le locateur jumelait les 2 logements du duplex pour s’y loger.
[13] Malgré les quelques différends qui ont pu exister entre les parties, notamment en ce qui concerne la hausse du loyer ou les bruits dans l’immeuble lors des travaux de rénovation du sous-sol, les locataire n’ont pas convaincu le tribunal, suivant appréciation objective des faits mis en preuve, que la demande de reprise est faite en guise de représailles ou constitue une mesure vindicative à leur endroit et qui viserait à se débarrasser de locataires devenus indésirables.
[14] Le locataire habite le logement concerné depuis 22 ans avec sa conjointe, lesquels sont respectivement âgés de 76 et 73 ans. Il se déclare diabétique depuis 2006, mais lorsque contre - interrogé, à savoir s’il en ressent des symptômes, le locataire répond « pas encore ». toutefois, il se déclare « à la veille de mourir » et dit avoir mal aux jambes et avoir de la difficulté à marcher. Le locataire dit « avoir trop de stock » pour déménager, qu’il a des biens « pour un 5 et demie », mais ajoute que « bien sûr qu’on va se débarrasser du stock ».
[15] Après avoir entendu
les parties et analysé l’ensemble de la preuve, le tribunal est convaincu que
le locateur entend réellement reprendre le logement pour s’y loger et qu’il ne
s’agit pas d’un prétexte pour atteindre d’autres fins. La présente demande est
conforme aux conditions et exigences prévues à l’article
[16] D’autre part, les locataires réclament une indemnité dans l’éventualité où la demande de reprise est accueillie, et ce, en raison du déménagement forcé que la reprise entraîne et des frais qu’ils devront assumer à cette fin.
[17] L’octroi d’une
indemnité aux locataires de fonde sur l’article
« 1967. Lorsque le tribunal autorise la reprise ou l'éviction, il peut imposer les conditions qu'il estime justes et raisonnables, y compris, en cas de reprise, le paiement au locataire d'une indemnité équivalente aux frais de déménagement.»
[18] Bien que le locateur exerce un droit légitime en voulant reprendre le logement concerné, il s’agit là de faire échec au droit au maintien dans les lieux et le législateur a donc prévu que le tribunal peut, en pareil cas, en atténuer les conséquences pour le locataire qui doit quitter son logement et assumer des frais de déménagement, le tout, par l’octroi d’une indemnité aux fins de couvrir ces frais imprévus, ce qui comprend les frais de transfert ou de branchement des différents services publics (Téléphonie, Hydro, Câble, Transfer postal).
[19] Après analyse, des faits pertinents mis en preuve, le tribunal estime qu’il est juste et raisonnable d’accorder aux locataires une indemnité de 2 500 $ et ce, afin de compenser les frais de déménagement ci-haut décrits.
[20] Les faits de la présente affaire ne justifient pas le report de la date de reprise.
POUR CES MOTIFS, LE TRIBUNAL :
[21] ACCUEILLE la demande du locateur;
[22] AUTORISE le locateur à reprendre le logement à partir du 1er juillet 2014 pour s’y loger;
[23] CONDAMNE le locateur à payer aux locataires la somme globale et unique de 2 500 $, laquelle sera payable au départ des locataires qui devront quitter le logement au plus tard pour le 1er juillet 2014;
[24] Le locateur assume les frais judiciaires relatifs au présent recours.
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Éric Luc Moffatt |
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Présence(s) : |
le locateur Me Robin Dejardin, avocat du locateur les locataires Me Giuseppe Di Donato, avocat des locataires |
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Date de l’audience : |
11 février 2014 |
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