Filiachi c. Després-Morin | 2024 QCTAL 13714 |
TRIBUNAL ADMINISTRATIF DU LOGEMENT | ||||||
Bureau dE Sherbrooke | ||||||
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No dossier : | 724971 26 20230728 G | No demande : | 3987469 | |||
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Date : | 23 avril 2024 | |||||
Devant le juge administratif : | Marc Landry | |||||
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Tarek Filiachi |
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Locataire - Partie demanderesse | ||||||
c. | ||||||
Benjamin Després-Morin
Manuel Desprès-Morin |
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Locateurs - Partie défenderesse | ||||||
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D É C I S I O N
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[1] Le locataire demande une ordonnance de rétablir et de maintenir le chauffage indépendamment des saisons, une diminution mensuelle de loyer de 80 $ pour chaque mois passé sans chauffage et des dommages-intérêts moraux pour les troubles et inconvénients subis à cause de l’absence de chauffage en 2021-2022. Il allègue l’absence de chauffage, le froid subi. La demande est notifiée le 7 août 2023.
[2] Le locataire est dispensé du paiement des frais judiciaires.
[3] Il s’agit d’un bail à durée indéterminée depuis le 23 décembre 2015. Tous les frais d’énergie, dont le chauffage, sont stipulés à la charge des locateurs et inclus au bail.
[4] L’immeuble et les logements sont chauffés par un système central à eau chaude. Le logement dispose d’un thermostat permettant de réguler la température dans le logement.
[5] Vers le 14 juillet 2023, le locataire met en demeure les locateurs relativement au fait que le logement a été laissé sans aucun chauffage pour la période du 23 septembre 2021 au 5 février 2022 et que le chauffage du logement doit être fonctionnel à l’année, quelle que soit la saison.
[6] Le 28 juillet 2023, le locataire prend son recours.
MANQUE DE CHAUFFAGE EN 2021-2022
[7] Le témoignage du locataire n’est pas fiable et il n’a pas de valeur probante.
[8] Non seulement le locataire est contredit par le locateur, mais il se contredit lui-même dans sa preuve.
[9] Lors de l’audience, le locataire déclare plusieurs fois que le logement était surchauffé du 23 septembre au 15 novembre 2021, les fenêtres devant être laissées ouvertes tout le temps, oubliant ce qui est allégué dans sa mise en demeure du 14 juillet 2023 et ce qui est allégué sous serment[1] dans sa demande judiciaire du 28 juillet 2023 qui tous deux décrivent un logement laissé sans chauffage durant cette même période.
[10] Le locataire témoigne ensuite d’un logement laissé sans aucun chauffage du 15 novembre 2021 au 5 février 2022 et du grand froid qu’il y régnait.
[11] Dans un enregistrement du 15 novembre 2021 qu’il fait entendre, le locataire se plaint toutefois de la surchauffe du logement ce jour-là.
[12] Plus tard dans son témoignage, le locataire affirme qu’il n’y a jamais de chauffage entre le 1er mai et le 1er octobre, alors même qu’il se plaint auparavant de surchauffe à compter du 23 septembre en 2021.
[13] Le locateur souligne les contradictions du locataire. Il nie que le logement a été sans chauffage durant cette période. Il ajoute l’absence de dénonciation et de mise en demeure de la part du locataire, ce qui est invraisemblable pour une période alléguée aussi longue (5 mois) d’absence de chauffage. La réparation a été faite.
[14] Les articles 2803, 2804 et 2845 du Code civil du Québec prévoient que celui qui veut faire valoir un droit doit faire la preuve des faits au soutien de sa prétention, et ce, de façon prépondérante, la force probante du témoignage étant laissée à l'appréciation du tribunal.
[15] Il faut prouver ses prétentions par des faits et démontrer les faits par des preuves probantes et prépondérantes.
[16] La preuve doit être recevable, objective, suffisante, convaincante, probante et prépondérante.
[17] Devant un tribunal, il ne suffit donc pas d'alléguer ou de prétendre, il faut démontrer.
[18] C’est le locataire qui avait le fardeau d’apporter une preuve prépondérante de ses prétentions. Il doit supporter l’insuffisance de sa preuve et ses contradictions.
[19] Le Tribunal n’est pas ici en mesure d’évaluer l’étendue et la durée de la perte de jouissance et des dommages moraux réellement subis.
[20] Cette partie de la demande est rejetée.
LE MANQUE DE CHAUFFAGE ENTRE LE 1ER MAI ET LE 1ER OCTOBRE
[21] Le locataire prétend l’absence totale de chauffage du 1er mai au 1er octobre.
[22] Encore ici, le locataire est contredit en partie par sa propre preuve[2] et par le locateur.
[23] Le locateur explique que le système de chauffage central est muni de capteurs et que, si la température intérieure baisse en bas de 21°C, le chauffage devient disponible.
[24] L’article 2.3.3 du Règlement numéro 1209 sur la salubrité, l’occupation et l’entretien des bâtiments de la Ville de Sherbrooke prévoit une température minimale de 21°C à l’intérieur d’un logement et une température d’au moins 15°C dans les espaces intérieurs contigus à un logement.
[25] Le Tribunal n’est pas convaincu selon l’affirmation du locateur que le chauffage devient effectivement disponible dans le logement du locataire dès que la température baisse en bas de 21 degrés Celsius dans son logement.
[26] Il est donc ordonné aux locateurs de rendre le chauffage disponible, peu importe la saison, de manière à ce que le locataire puisse maintenir une température minimale de 21°C à l’intérieur de son logement.
[27] Cependant, le Tribunal n’est pas en mesure d’évaluer l’étendue et la durée de la perte de jouissance et des dommages moraux réellement subis par le locataire.
[28] La preuve du locataire est insuffisante pour accorder une diminution de loyer et des dommages-intérêts.
POUR CES MOTIFS, LE TRIBUNAL :
[29] ORDONNE aux locateurs de fournir le chauffage à l’année, peu importe la saison, de manière à ce que le locataire puisse maintenir une température minimale de 21°C à l’intérieur de son logement;
[30] REJETTE la demande quant aux autres conclusions.
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Marc Landry | ||
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Présence(s) : | le locataire le locateur Manuel Desprès-Morin | ||
Date de l’audience : | 15 avril 2024 | ||
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[1] Article 56.10 de la Loi sur le Tribunal administratif du logement.
[2] Voir plus haut.
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