Décision

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Howell c. Goda

2024 QCTAL 32942

 

 

TRIBUNAL ADMINISTRATIF DU LOGEMENT

Bureau dE Longueuil

 

No dossier :

820609 37 20240919 G

No demande :

4463850

 

 

Date :

16 octobre 2024

Devant le juge administratif :

Robin-Martial Guay

 

Linda Howell

 

William Howell

 

Locataires - Partie demanderesse

c.

Adnan Goda

 

Locateur - Partie défenderesse

 

D É C I S I O N

 

 

[1]         Par un recours introduit le 20 septembre 2024, les locataires demandent une ordonnance pour l'exécution en nature de l’obligation du locateur de fournir et respecter la place de stationnement prévue au bail.

[2]         Outre l’exécution provisoire de la décision, malgré l’appel de l’ordonnance, les locataires demandent le paiement des frais judiciaires.

[3]         La demande a été signifiée au locateur par la poste recommandée, ce qui est admis à l’audience.

La preuve

[4]         Les parties sont liées par un bail du 1er septembre 2024 au 31 août 2025 au loyer mensuel de 1 340 $.

[5]         Le logement concerné est constitué d’une unité de condominium que les locataires habitent depuis maintenant 24 années consécutives.

[6]         En vertu du bail, les locataires disposent d’un espace de stationnement extérieur ainsi que de deux espaces de double stationnement contigus qui sont eux situés dans le garage intérieur et lesquels sont désignés comme étant les lots numéro 109 et 110.

[7]         Les deux espaces de double stationnement intérieurs sont situés à proximité de la porte commune qui mène aux logements de l’immeuble, ce qui n’est pas de répondre aux besoins de la locataire dont la condition médicale est gravement affectée selon la preuve documentaire déposée.


[8]         Selon les usages et coutumes bien établis et connus de tous les occupants de l’immeuble, les locataires disposent des lots de stationnements identifiés comme étant les lots numéro 109 et 110.

[9]         Le 24 avril 2024, le locateur donnait aux locataires un avis d’augmentation de loyer et de modification d’une autre condition du bail (pièce #3).

[10]     L’avis du 24 avril 2024 avise les locataires que le loyer actuel de 1 350 $ sera augmenté à 1 540 $. L’avis fait aussi état d’une autre modification à savoir :

« One of the two double indoor garage spot will be taken as of Sep 1st, 2024. Therefore your lease will include only one indoor double garage spot. »

[11]     Le 3 mai 2024, les locataires avisaient le locateur qu’ils refusaient l’avis d’augmentation de loyer ainsi que la modification d’une autre condition du bail qu’ils ont reçu le 24 avril 2024 (pièce#7).

[12]     Sur réception de l’avis de refus des locataires, le locateur a introduit une demande de modification du bail (F) en date du 30 mai 2024.

[13]     Dans sa demande, le locateur demande uniquement au Tribunal de fixer le loyer mensuel en tenant compte des normes fixées par le règlement à compter du 1er septembre 2024 et de condamner la partie défenderesse au paiement des frais. C’est là dire que le locateur ne demande pas au Tribunal de statuer sur la modification d’une condition du bail en lien avec les espaces de stationnement dont disposent les locataires en vertu du bail.

[14]     Toujours selon la preuve, en date du 11 septembre 2024, le locateur, plus précisément son fils Alla Goda, a mis à exécution son avis de modification du bail en s’appropriant unilatéralement et sans droit un des deux espaces de double stationnement du garage intérieur en attribuant celui-ci à sa belle-sœur enceinte que d’admettre celui-ci.

[15]     À l’audience, les locataires exigent de recouvrer cet espace de double stationnement qui, au surplus, répond à la condition médicale de la locataire, madame Linda Howell.

[16]     La locataire demande au Tribunal une ordonnance pour que les espaces de stationnement du garage intérieur actuellement désignés comme étant les lots numéro 109 et 110 soient désignés comme étant leurs deux espaces exclusifs de stationnement.

[17]     Pour sa part, le représentant du locateur, en l’occurrence son fils Alla Goda, insiste pour dire que les locataires n’ont pas besoin de deux espaces de double stationnement dans le garage intérieur, mais que d’un seul espace de stationnement.

[18]     Le représentant du locateur ajoute qu’il habite lui aussi l’immeuble depuis plus de 20 ans et que le bail des locataires n’indique pas spécifiquement que leurs espaces de stationnement portent les numéros 109 et 110. Pour autant, il admet qu’il est de connaissance publique des autres occupants de l’immeuble que les locataires occupent ces deux espaces de stationnement que sont les numéros 109 et 110 depuis maintenant 24 années.

[19]     C’est ainsi que depuis le 11 septembre 2024, le fils du locataire occupe avec sa voiture ou celle de sa belle-sœur l’espace de stationnement numéro 110.

Le droit applicable

[20]     Les locataires requièrent du Tribunal qu'il émette une ordonnance pour obliger le locateur à respecter le bail en désignant clairement les espaces de double stationnement du garage intérieur portant les numéros 109 et 110 comme étant leurs espaces de stationnement exclusifs.

[21]     Plus précisément, le recours des locataires est fondé sur l'article 1863 du Code civil du Québec qui édicte que :

« 1863. L'inexécution d'une obligation par l'une des parties confère à l'autre le droit de demander, outre des dommages-intérêts, l'exécution en nature, dans les cas qui le permettent. Si l'inexécution lui cause à elle-même ou, s'agissant d'un bail immobilier, aux autres occupants, un préjudice sérieux, elle peut demander la résiliation du bail.

L'inexécution confère, en outre, au locataire le droit de demander une diminution de loyer; lorsque le tribunal accorde une telle diminution de loyer, le locateur qui remédie au défaut a néanmoins le droit au rétablissement du loyer pour l'avenir. »


[22]     Ainsi, lorsqu'une partie ne respecte pas ses obligations découlant du bail ou de la loi, l’autre partie peut exiger une ordonnance du Tribunal pour que cette partie respecte ses obligations.

[23]     Il vaut par ailleurs de rappeler que les parties doivent se conformer aux droits et obligations prévus dans le Code civil du Québec et agir conformément aux règles relatives à la bonne foi selon les articles 6, 7 et 1375 C.c.Q.

Discussion

[24]     La preuve prépondérante démontre qu’en date du 1er septembre 2024, le fils du locateur, monsieur Alla Goda, a unilatéralement modifié une condition du bail des locataires en occupant avec sa voiture ou celle de sa belle-sœur l’un des deux espaces de double stationnement des locataires

[25]     Cette utilisation de l’un des espaces de stationnement intérieurs dont disposent les locataires en vertu de leur bail est faite sans droit aucun puisqu’elle contrevient au bail liant les parties et que cette condition au bail n’a pas fait l’objet d’une demande de modification d’une condition au bail auprès Tribunal administratif du logement.

[26]     Le Tribunal prononcera donc des ordonnances appropriées aux circonstances à l’encontre du locateur en enjoignant ce dernier à désigner comme espaces de stationnement intérieurs exclusifs aux locataires les lots numéros 109 et 110 situés près de la porte commune qui mène aux logements de l’immeuble.

[27]     Aussi, le Tribunal autorise les locataires à faire poser une affiche didactique de stationnement pour personne handicapée sur chacun des lots numéro 109 et 110 étant entendu que la locataire bénéficie d’une vignette émise par la SAAQ.

[28]     Il sera aussi ordonné au locateur d’installer, de maintenir et d’entretenir à ses frais une affiche interdisant à quiconque, sauf les locataires, d’utiliser les deux espaces de stationnement que sont les lots 109 et 110 sous peine de remorquage.

[29]     À défaut par le locateur d’installer, de maintenir et d’entretenir cette affiche à ses frais dans un délai de 30 jours de la décision, les locataires sont autorisés à installer ou faire installer ladite affiche aux frais du locateur.

[30]     Ces ordonnances seront valides tant et aussi longtemps que le bail ne sera pas modifié de consentement des parties ou par décision du Tribunal administratif du logement.

[31]     La preuve soumise ne justifie pas toutefois l'exécution provisoire de la décision.

POUR CES MOTIFS, LE TRIBUNAL :

[32]     ACCUEILLE la demande des locataires;

[33]     DÉCLARE que le bail comprend un espace de stationnement situé à l’extérieur et deux espaces de double stationnement situés dans le garage intérieur de l’immeuble lesquels sont exclusifs aux locataires et plus amplement désignés comme étant les numéros 109 et 110;

[34]     PRONONCE les ordonnances suivantes :

-            ORDONNE au locateur de désigner comme espaces de double stationnement exclusifs aux locataires les lots numéro 109 et 110

-            ORDONNE au locateur d’installer, de maintenir et d’entretenir à ses frais une affiche interdisant à quiconque, sauf les locataires et leurs invités, d’utiliser cet espace de stationnement exclusif sous peine de remorquage;

-            À défaut par le locateur d’installer, de maintenir et d’entretenir cette affiche à ses frais dans un délai de 30 jours de la décision, AUTORISE les locataires à installer ou faire installer ladite affiche aux frais du locateur;


-            AUTORISE les locataires à poser ou faire poser une affiche didactique de stationnement pour personne handicapée sur chacun des lots numéro 109 et 110;

Les présentes ordonnances et autorisations sont valides tant et aussi longtemps que le bail ne sera pas modifié à cet égard;

[35]     CONDAMNE le locateur à payer aux locataires les frais de justice de 96,75 $.

 

 

 

 

 

 

 

 

Robin-Martial Guay

 

Présence(s) :

les locataires

le mandataire du locateur

Date de l’audience : 

8 octobre 2024

 

 

 


 

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