Décision

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Nozifort c. Guertin

2023 QCTAL 40376

 

 

TRIBUNAL ADMINISTRATIF DU LOGEMENT

Bureau dE Gatineau

 

No dossier :

661380 22 20221025 T

No demande :

4036876

 

 

Date :

19 décembre 2023

Devant la juge administrative :

Annie Hallée

 

Marie-Carmen Nozifort

 

Locataire - Partie demanderesse

c.

Pierre Guertin

 

Locateur - Partie défenderesse

 

D É C I S I O N

 

 

[1]         La demanderesse requiert la rétractation de la décision rendue le 30 août 2023 par la juge administrative Anne A. Laverdure et dont l’audience s’est tenue le 2 août 2023.

FAITS :

[2]         La locataire a pris connaissance de cette décision le 8 septembre 2023 et a déposé sa demande le 8 septembre 2023.

[3]         Elle déclare avoir pris connaissance de l’avis d’audience le 2 août 2023 en après-midi alors que l’audience avait déjà eu lieu ce même jour en avant-midi.

[4]         La boîte aux lettres étant brisée depuis le mois de juin, elle devait se rendre au Bureau de poste pour récupérer son courrier, ce qu’elle n’était pas en mesure de faire régulièrement.

[5]         En effet, elle explique qu’elle s’est blessée à l’hiver de la même année lors d’une chute et puisqu’elle occupe le logement situé au troisième étage, elle avait de la difficulté à se déplacer durant cette période pour se rendre au bureau de poste.

[6]         Elle affirme n’avoir reçu aucune lettre pour l’aviser que la boîte aux lettres aurait été réparée vers le 15 juillet 2023.

[7]         De son côté, la mandataire du locateur soutient que l’avis d’audition devait se trouver dans la boîte aux lettres de la locataire depuis au moins deux (2) semaines lorsqu’elle en a pris connaissance le 2 août 2023.


ANALYSE ET DROIT APPLICABLE :

[8]         La présente demande se fonde sur l’article 89 de la Loi sur Tribunal administratif du logement[1] (Loi) qui prévoit :

« 89. Si une décision a été rendue contre une partie qui a été empêchée de se présenter ou de fournir une preuve, par surprise, fraude ou autre cause jugée suffisante, cette partie peut en demander la rétractation.

Une partie peut également demander la rétractation d’une décision lorsque le Tribunal a omis de statuer sur une partie de la demande ou s’est prononcé au-delà de la demande.

La demande de rétractation doit être faite par écrit dans les dix jours de la connaissance de la décision ou, selon le cas, du moment où cesse l’empêchement.

La demande de rétractation suspend l’exécution de la décision et interrompt le délai d’appel ou de révision jusqu’à ce que les parties aient été avisées de la décision.

Une partie qui fait défaut d’aviser de son changement d’adresse conformément à l’article 60.1 ne peut demander la rétractation d’une décision rendue contre elle en invoquant le fait qu’elle n’a pas reçu l’avis de convocation si cet avis a été transmis à son ancienne adresse. »

[9]         À maintes reprises, les tribunaux ont déterminé que la rétractation est un moyen procédural exceptionnel, car le principe de l'irrévocabilité des jugements est important. Ce principe a été réitéré par la Cour d'appel du Québec :

« Le principe de l'irrévocabilité des jugements est nécessaire à une saine administration de la justice, d'où le sérieux que doivent avoir les motifs de rétractation. La procédure doit contribuer à la protection des droits des deux parties et la remise en question des décisions doit demeurer l'exception et ne pas devenir la règle. »[2]

[10]     L’absence d’une partie ne donne pas ouverture systématiquement à la rétractation de jugement tel que le mentionnent les auteurs Rousseau-Houle et De Billy[3] :

« Le seul fait qu’une partie soit absente à l’audience ne lui donnera pas automatiquement droit à une demande de rétractation. En vertu de l’article 89, la partie doit motiver son absence par une cause jugée suffisante »

[11]     À la lumière de ces principes, le Tribunal est d’avis que la demanderesse a fait la preuve d’un motif sérieux de rétractation.

[12]     En effet, la preuve prépondérante démontre qu’en raison du bris de la boîte aux lettres, il était plus difficile pour la demanderesse de récupérer régulièrement son courrier durant cette période.

[13]     Il appert également qu’elle n’a reçu aucun avis pour l’informer de la réparation de la boîte aux lettres effectuée vers le 15 juillet 2023.

[14]     La bonne administration de la justice requiert qu’elle puisse faire valoir ses droits. De plus, à titre de demanderesse de la demande originaire, elle n’avait pas intérêt à retarder le déroulement des procédures.

POUR CES MOTIFS, LE TRIBUNAL :

[15]     ACCUEILLE la demande en rétractation;

[16]     RÉTRACTE la décision rendue le 30 août 2023;


[17]     DEMANDE au Maître des rôles de convoquer à nouveau les parties pour enquête et audition au mérite de la demande originaire.

 

 

 

 

 

 

 

 

Annie Hallée

 

Présence(s) :

la locataire

la mandataire du locateur

Date de l’audience : 

23 octobre 2023

 

 

 


 


[1] RLRQ c. T-15.01.

[2] Entreprises Roger Pilon Inc et al. c. Atlantis Real Estate Co., (1980) C.A. 218.

[3] Le bail de logement: analyse de la jurisprudence, Wilson & Lafleur Ltée (1989) Montréal, p. 307. 

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