Décision

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Rana c. Delpeche

2024 QCTAL 23120

 

 

TRIBUNAL ADMINISTRATIF DU LOGEMENT

Bureau dE Salaberry-de-Valleyfield

 

No dossier :

792316 27 20240506 G

No demande :

4317155

 

 

Date :

15 juillet 2024

Devant la juge administrative :

Danielle Deland

 

Bipin Rana

 

Locateur - Partie demanderesse

c.

Makeda Delpeche

 

Locataire - Partie défenderesse

 

D É C I S I O N

 

 

[1]         Le locateur demande la résiliation du bail et l'expulsion de la locataire, le recouvrement du loyer (1 434 $) ainsi que le loyer dû au moment de l'audience, plus l'exécution provisoire de la décision malgré l'appel, les intérêts et les frais.

La demande a été signifiée par huissier sous pli cacheté le 31 mai 2024 au logement concerné.

[2]         Les parties sont liées par un bail du 6 janvier 2023 au 30 juin 2023 au loyer mensuel de 695 $, payable le premier jour de chaque mois, reconduit jusqu'au 30 juin 2024 au loyer mensuel de 700 $.

[3]         La preuve démontre que la locataire a quitté le logement à la fin juin 2024 et doit 2 100 $, soit le loyer des mois d'avril, mai et juin 2024, plus 25,50 $ représentant les frais de signification prévus au Règlement.

[4]         La locataire admet devoir cette somme. La locataire allègue qu’il y avait des problèmes dans le logement, notamment la présence d’amiante qui faisait mourir ses plantes et la rendait malade. Elle témoigne avoir donc dû quitter le logement et assumer ses frais de déménagement. Elle admet cependant ne jamais avoir envoyé de mise en demeure au locateur, ni avoir introduit de demande au Tribunal administratif du logement, ni avoir envoyé au locateur d’avis d’abandon. Elle a tout simplement envoyé au locateur un avis de non-renouvellement du bail dans les délais prévus par le Code civil du Québec.

[5]         Le Tribunal constate qu’il n’y a aucune preuve de présence d’amiante dans le logement ni de preuve médicale démontrant qu’un problème quelconque dans le logement avait pu rendre la locataire malade.

[6]         La locataire semble réclamer l'application de la défense d'exception d'inexécution prévue à l'article 1591 du Code civil du Québec.


[7]         Cet article prévoit en effet que :

« 1591. Lorsque les obligations résultant d'un contrat synallagmatique sont exigibles et que l'une des parties n'exécute pas substantiellement la sienne ou n'offre pas de l'exécuter, l'autre partie peut, dans une mesure correspondante, refuser d'exécuter son obligation corrélative, à moins qu'il ne résulte de la loi, de la volonté des parties ou des usages qu'elle soit tenue d'exécuter la première. »

[8]         Dans l’affaire Fadlallah c. Gagnon[1], la juge administrative Francine Jodoin écrivait :

« La jurisprudence bien établie ne reconnaît pas à une partie le droit unilatéral de se faire justice à elle-même et de retenir le loyer pour forcer une autre partie à exécuter ses propres obligations ou pour se compenser des inconvénients subis(8). Il n'appartient pas au locataire de décider de l'octroi de cette compensation ni de son montant. »  (Référence omise)

[9]         L'auteur Pierre-Gabriel Jobin écrit quant à lui :

« 186. Louage résidentiel. Dans le louage résidentiel, la retenue de loyer, pour exercer l'exception d'inexécution, doit obligatoirement être exercée en suivant la procédure spéciale du dépôt de loyer au tribunal. »[2]

[10]     Le Tribunal ne peut donc pas retenir la défense de la locataire d’autant plus que d'une part, la locataire n'a jamais mis le locateur en demeure d'exécuter ses obligations et que d'autre part, la retenue de loyer effectuée par la locataire n'a pas été faite dans une mesure correspondante.

[11]     La locataire ne pouvait donc pas se faire justice elle-même et décider de retenir son loyer de façon unilatérale.

POUR CES MOTIFS, LE TRIBUNAL :

[12]     CONSTATE le non-renouvellement du bail;

[13]     CONDAMNE la locataire à payer au locateur la somme de 2 100 $, plus les intérêts au taux légal et l'indemnité additionnelle prévue à l'article 1619 C.c.Q., à compter du 6 mai 2024 sur la somme de 1 400 $, et sur le solde à compter de l'échéance de chaque loyer, plus les frais de justice de 112,50 $;

[14]     REJETTE la demande quant aux autres conclusions.

 

 

 

 

 

 

 

 

Danielle Deland

 

Présence(s) :

le locateur

la locataire

Date de l’audience : 

3 juillet 2024

 

 

 


 


[1]  Fadlallah c. Gagnon, 2016 QCRDL 2149.

[2]  Pierre-Gabriel Jobin, Le louage, 2e édition, Collection Traité de droit civil, 1997, Éditions Yvon Blais.

AVIS :
Le lecteur doit s'assurer que les décisions consultées sont finales et sans appel; la consultation du plumitif s'avère une précaution utile.