Décision

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Immeubles Murray c. Parsons

2022 QCTAL 27844

 

 

TRIBUNAL ADMINISTRATIF DU LOGEMENT

Bureau dE Québec

 

Nos dossiers :

581411 18 20210726 G

586639 18 20210901 G

Nos demandes :

3307487

3334400

 

 

Date :

03 octobre 2022

Devant la juge administrative :

Micheline Leclerc

 

Immeubles Murray

 

Locateur - Partie demanderesse

(581411 18 20210726 G)

(586639 18 20210901 G)

c.

Kenny Parsons

 

Locataire - Partie défenderesse

(581411 18 20210726 G)

Partie demanderesse

(586639 18 20210901 G)

et

 

Claude Murray

 

Frédéric Murray

 

Maude Murray

 

Locateurs – Partie défenderesse

(586639 18 20210901 G)

 

D É C I S I O N

 

 

[1]         Le locateur demande la résiliation du bail, l’éviction du locataire et de tous les occupants, le loyer dû à la date de l’audience avec les intérêts et les frais.

[2]         Le locataire demande le rejet de la demande du locateur, qu’il soit ordonné au locateur d’exécuter des travaux, une compensation pour diminution de service (déneigement), une diminution de loyer de 75 $ par mois, le remboursement du trop-perçu de 8 400 $ équivalent à 70 $ par mois pendant 10 ans, se prononcer sur la validité des avis de reconduction de bail pour les dix dernières années, des dommages punitifs de 2 000 $ pour tentative d’induire en erreur le Tribunal, des dommages moraux de 2 000 $ et le remboursement des frais.


[3]         Les demandes ont été réunies, conformément à l’article 57 de la Loi sur le Tribunal administratif du logement.

LA PREUVE

[4]         Les parties sont liées par un bail reconduit depuis le 30 juin 2012 et, à l'audience du 4 juillet 2022, le représentant du locateur, monsieur Bédard, a fait part que tous les loyers avaient été payés et que le locateur ne réclame que les frais.

[5]         Au soutien de sa demande, le locataire dit que le robinet de l’évier coulait et qu’il a été remplacé par un robinet placé sur le côté de l’évier (L-1) en attendant de changer le comptoir.

[6]         Il demande donc que le comptoir pourri soit changé, que la robinetterie soit réinstallée adéquatement et que les trous dans le dosseret où était fixée l’ancienne robinetterie soient bouchés.

[7]         Il demande aussi la réparation du mur de douche parce que l’eau coule entre le mur et la brique extérieure où se trouvait le porte-savon intégré, le changement du plancher de tuiles qui décollent, que la porte du balcon et le balcon soient peinturés, la porte de la sortie de secours réparée, une lumière extérieure fonctionnelle, du gravier pour la cour et de couper un arbre (L-4).

[8]         Il explique que la cour est pleine de boue depuis le mois de mai (L-6), il y a des écureuils dans la corniche (L-7), il n’y a pas d’éclairage extérieur (L-8), il y a des fils à découvert (L-9), l’eau s’infiltre par les blocs de verre dans la cage d’escalier (L-10), une lumière est brûlée, la porte de sortie de secours pour le deuxième étage pend L-11), la toilette branle et le beigne devrait être changé (L-12).

[9]         De plus, le chauffage a été coupé dans l’entrée.

[10]     Le rapport de visite de la Ville de Québec du 26 août 2021 a été produit (L-2).

[11]     Ainsi, le locataire demande une compensation pour une diminution de services et parce que le déneigement du stationnement n’est pas fait.

[12]     Il demande aussi une somme de 75 $ par mois parce que le bail a été conclu au loyer mensuel de 750 $, alors que le loyer antérieur déclaré au bail est de 675 $.

[13]     Il admet, toutefois, ne pas avoir refusé les augmentations de loyer parce que le logement est situé en face de l’école que son fils fréquentait.

[14]     Quant aux dommages moraux, il allègue avoir vécu du stress et l’insomnie parce qu’il n’arrivait pas à communiquer avec le locateur, il a attendu des travaux dans la salle de bain pendant un an et demi, alors qu’une odeur d’urine se dégageait de la toilette et il attend d’autres travaux depuis 10 ans, parce qu’il n’a pu trouver de colocataire en raison de l’état du logement et parce qu’il a payé des frais de déneigement pendant un hiver, alors que ce service est à la charge du locateur.

[15]     De plus, il dit que le représentant du locateur, monsieur Bédard, l’a menacé s’il ne payait pas le loyer, en plus de l’insulter, il a contacté les policiers et une fois, il lui a dit qu’il allait faire saisir son véhicule.

[16]     Le lendemain, monsieur Bédard se serait retrouvé sur le toit de l’école et lui aurait fait un signe de doigt (L-13).

[17]     Finalement, il demande le rejet de la demande en non-paiement du locateur pour abus de procédure et des dommages punitifs de 2 000 $.

[18]     À cet effet, il dit que le locateur a déposé sa demande le 26 juillet 2021 en alléguant un retard de plus de 3 semaines, alors que son chèque daté du 21 juillet 2021 de 800 $ avec la mention « paiement final » avait été encaissé 3 jours avant.

[19]     De plus, il allègue que le locateur n’a pas présenté de preuve de retards fréquents lors des audiences précédentes.

[20]     Quant à l’augmentation de loyer, il dit qu’il a reçu l’avis de reconduction de bail portant le loyer mensuel à 875 $ et il a dit au locateur qu’il paierait l’augmentation de loyer lorsque les travaux seront faits.


[21]     Monsieur Bédard dit que les chèques du locataire n’étaient pas au bon montant et portaient la mention « paiement final », ce dont ils se sont aperçus plus tard, ce qui justifie la demande en résiliation de bail pour défaut de paiement de l’augmentation de loyer.

[22]     De plus, le loyer du mois de février a été payé le 4e jour de ce mois.

[23]     Sur les travaux demandés, il dit que le locataire retient le loyer, ce qui rend leur exécution difficile et que la cour est dans l’état apparaissant aux photos depuis 10 ans.

[24]     Il admet que le comptoir de cuisine doit être changé et dit qu’il y a eu une entente avec la Ville de Québec quant aux autres travaux à exécuter.

[25]     Le Tribunal a autorisé la production de cette entente au plus tard le 11 juillet.

[26]     Il nie avoir intimidé le locataire et dit qu’il est allé au logement une seule fois pour le loyer du mois de février.

[27]     Quant à l’homme sur le toit de l’école, il dit que ce n’est pas lui et que, ce jour-là, il était en formation à la maison Portage pour changer de métier.

[28]     Sur la liste des travaux demandés, il dit que le locateur n’a rien eu et il n’est pas au courant du déneigement.

DÉCISION

[29]     Les articles 1854 et 1864 du Code civil stipulent ce qui suit:

« 1854. Le locateur est tenu de délivrer au locataire le bien loué en bon état de réparation de toute espèce et de lui en procurer la jouissance paisible pendant toute la durée du bail.

Il est aussi tenu de garantir au locataire que le bien peut servir à l'usage pour lequel il est loué, et de l'entretenir à cette fin pendant toute la durée du bail. »

« 1864. Le locateur est tenu, au cours du bail, de faire toutes les réparations nécessaires au bien loué, à l'exception des menues réparations d'entretien; celles-ci sont à la charge du locataire, à moins qu'elles ne résultent de la vétusté du bien ou d'une force majeure. »

[30]     Sur la validité des avis de reconduction de bail, il appartenait au locataire de refuser les augmentations de loyer dans les 30 jours de l’avis du locateur, ce qu’il n’a pas fait, sauf pour l’année en cours.

[31]     Il ressort que les parties sont liées par un bail reconduit au loyer mensuel de 875 $ pour la période du 1er juillet 2021 au 30 juin 2022 et au même loyer pour la période du 1er juillet 2022 au 30 juin 2023 puisque le locataire a refusé l’augmentation de loyer et qu’aucune demande en fixation de loyer n’a été introduite par le locateur.

[32]     Le locataire n’ayant pas payé le loyer de 875 $ pour le mois de juillet, le locateur avait raison d’alléguer que le loyer était en retard de plus de 3 semaines puisque son chèque n’était pas au montant de 875 $.

[33]     Sur les travaux demandés, il ressort, des photos produites, que le comptoir de cuisine est dans un état inacceptable, que la robinetterie fonctionnelle est placée sur le côté de l’évier et qu’il y a 2 trous dans le dosseret, lui-même délabré, il y a un trou dans le mur entourant le bain où se trouvait le porte-savon, ce qui risque de causer des dommages à l’immeuble, il n’y a pas d’ampoule pour le luminaire extérieur, la peinture lève sur le mur de l’entrée et la porte de sortie est pratiquement décrochée.

[34]     De plus, il ressort de l’avis de la Ville de Québec, à la suite de la visite du 23 août 2021, que les infractions suivantes doivent être rectifiées (P-1):

« No

Description

Délai

 

1.

Mur de la salle de bain non étanche

Réparer ou remplacer les revêtements de manière à ce qu’ils soient étanches et les maintenir en bon état.

30 sept. 2021

31 août 2022


2.

Mur de la cuisine

Réparer ou remplacer les revêtements de manière à ce qu’ils soient étanches et les maintenir en bon état.

30 sept. 2021

31 août 2022

3.

Comptoir de la cuisine

Réparer ou remplacer le comptoir de la cuisine de manière à ce qu’ils soient étanches et les maintenir en bon état.

30 sept. 2021

31 août 2022

4.

Murs et plafonds endommagés du hall d’entrée

Réparer, entretenir et peinturer les murs et les plafonds afin de les maintenir en bon état et exempts de trous ou de fissures.

30 sept. 2021

31 août 2022

5.

Parties du bâtiment endommagées (bâtiment d’habitation)

Vous avez obtenu un permis pour abattre l’arbre en cour arrière.

Procéder à l’abattage de l’arbre et nettoyer la toiture des banches et feuilles mortes.

Réparer, traiter ou remplacer les parties constituantes de la toiture et structure du tambour du bâtiment et les maintenir en bon état.

30 sept. 2021

30 sept. 2022

6.

Système électrique déficient

  • Entretenir, réparer ou remplacer les fils électriques qui sont à découvert et non protégés;
  • Réparer ou remplacer la partie du tuyau du mât électrique.

30 sept. 2021

30 sept. 2022

7.

Parties du bâtiment endommagées (bâtiment d’habitation)

Réparer, traiter ou remplacer les parties constituantes du bâtiment et les maintenir en bon état.

  • La maçonnerie présente des signes de détérioration susceptibles d’en affecter la solidité (absence et perte de mortier, les briques se disloquent de la structure, absence de briques, briques cassées, bombement sur le mur latéral droit, etc.);
  • Réparer ou remplacer le seuil de porte en façade;
  • Réparer, ou remplacer la sortie de ventilation située sur le mur latéral droit;

En vertu de ce qui précède, il est de votre responsabilité d’assurer immédiatement la sécurité des lieux.

Permis non requis pour la réparation partielle de la maçonnerie, par contre si vous souhaitez refaire le mur en entier, une demande de permis de construction sera nécessaire.

30 sept. 2021 »

30 sept. 2022


8.

Parties du bâtiment endommagées (bâtiment d’habitation)

Enregistrer une demande de permis de construction accompagnée des documents requis (plans et description détaillée, type de matériaux, couleur, photographies, copie du certificat de localisation, etc.) pour réparer, traiter ou remplacer les parties constituantes du bâtiment et les maintenir en bon état

De manière non limitative, voici les éléments à corriger :

  • Balcons avant (pourriture des éléments de structure et de soutien du balcon, des planchers, des soffites et des toitures), etc.

Les balcons présentent des signes de détérioration susceptibles d’en affecter l’intégrité.

En vertu de ce qui précède, il est de votre responsabilité d’assurer immédiatement la sécurité des lieux.

30 sept. 2021

30 sept. 2022

Reproduit tel quel, pour les 3 premières colonnes

Le Tribunal a ajouté la 4e colonne qui correspond au texte manuscrit ajouté au rapport

[35]     La documentation produite en cours de délibéré, tel qu’autorisée, ne fait pas état d’une entente, mais des annotations ont été faites en marge de l’avis d’infraction modifiant le délai accordé en ce qui a trait aux paragraphes 1, 2, 3, 4 et au 30 septembre 2022 en ce qui a trait aux paragraphes 5, 6, 7 et 8.

[36]     Le Tribunal a constaté les mêmes défectuosités, sauf l’état du plancher de la cuisine pour lequel aucune photo n’a été produite et dont le rapport de visite de la Ville ne fait pas mention.

[37]     À ces défectuosités, le Tribunal ajoute l’état lamentable de la cour.

[38]     Quant au remboursement du loyer payé versus le loyer déclaré au bail au cours des 12 mois précédents, le locataire ne s’est pas prévalu de l’article 1950 du Code civil du Québec :

« 1950. Un nouveau locataire ou un sous-locataire peut faire fixer le loyer par le tribunal lorsqu'il paie un loyer supérieur au loyer le moins élevé des 12 mois qui précèdent le début du bail ou, selon le cas, de la sous-location, à moins que ce loyer n'ait déjà été fixé par le tribunal.

La demande doit être présentée dans les 10 jours de la conclusion du bail ou de la sous-location. Elle doit l'être dans les deux mois du début du bail ou de la sous-location lorsqu'elle est présentée par un nouveau locataire ou par un sous-locataire qui n'ont pas reçu du locateur, lors de la conclusion du bail ou de la sous-location, l'avis indiquant le loyer le moins élevé de l'année précédente; si le locateur a remis un avis comportant une fausse déclaration, la demande doit être présentée dans les deux mois de la connaissance de ce fait. »

[39]     Il est maintenant trop tard pour réclamer la fixation de loyer ou un remboursement.

[40]     Finalement, il ressort du bail que le déneigement du stationnement est de la responsabilité du locateur, ce qui n’a pas été respecté.

[41]     La preuve n’ayant pas démontré le paiement allégué par le locataire, le Tribunal ne peut y faire droit, mais peut accorder une diminution de loyer de 75 $ par mois pour les mois de novembre à mars jusqu’à ce que le locateur assume cette obligation.

[42]     Le Tribunal ne peut, non plus, accorder des dommages punitifs puisqu’aucune disposition légale n’a été violée.

[43]     Quant aux dommages moraux, il ressort que le locataire attend des travaux qui ne viennent pas, malgré l’évidence quant à la nécessité d’en effectuer certaines, ce qui l’a stressé.


[44]     Le Tribunal accorde donc des dommages moraux de 500 $.

[45]     Il ressort que monsieur Bédard et le locataire ont une relation conflictuelle, mais le locateur ne peut être tenu responsable.

POUR CES MOTIFS, LE TRIBUNAL :

[46]     ACCUEILLE, en partie, la demande du locataire ;

[47]     ORDONNE au locateur d’effectuer les travaux suivants, en sus des travaux exigés par la Ville de Québec :

          Remplacer le comptoir de cuisine;

          Installer la robinetterie selon les normes usuelles;

          Refaire le dosseret de la cuisine;

          Réparer le mur de la douche;

          Peinturer le balcon et la porte du balcon;

          Installer une porte de sortie de secours adéquate;

          Installer un luminaire extérieur fonctionnel;

          Mettre le matériau requis dans la cour pour qu’il n’y ait plus de boue;

          Couper un arbre;

          Solidifier ou remplacer la toilette.

[48]     ORDONNE au locateur d’exécuter ces travaux au plus tard le 31 octobre 2022;

[49]     ACCORDE une diminution de loyer de 75 $ par mois du mois de novembre au mois de mars de chaque année à compter du mois de novembre 2022, jusqu’à ce que le locateur exécute son obligation de déneiger le stationnement, l’entrée et l’escalier, conformément au bail;

[50]     ACCORDE une diminution de loyer additionnelle de 75 $ par mois à compter du 1er octobre 2022 et jusqu’à ce que les travaux ordonnés ci-dessus soient exécutés, à l’exception des travaux exigés par la Ville de Québec;

[51]     CONDAMNE le locateur à payer au locataire des dommages moraux de 500 $ et AUTORISE le locataire à déduire cette somme sur le paiement du loyer du mois d’octobre 2022;

[52]     Chaque partie assumant ses frais;

[53]     La demande du locateur doit donc être rejetée.

 

 

 

 

 

 

 

 

Micheline Leclerc

 

Présence(s) :

le mandataire du locateur Immeubles Murray

le locataire

Date de l’audience : 

4 juillet 2022

 

 

 


 

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