Khandaker c. Guitard | 2024 QCTAL 39549 |
TRIBUNAL ADMINISTRATIF DU LOGEMENT |
Bureau dE Montréal |
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Nos dossiers : | 806248 31 20240708 G 806248 31 20240708 S | Nos demandes : | 4387654 4476553 |
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Date : | 29 novembre 2024 |
Devant la juge administrative : | Vanessa O’Connell-Chrétien |
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Abdul Motalib Khandaker | |
Locateur - Partie demanderesse |
c. |
Martin Eric Guitard | |
Locataire - Partie défenderesse |
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D É C I S I O N
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- Le locateur a formulé une demande relative au non-paiement du loyer à l’encontre du locataire. Cette demande a été reçue par le Tribunal le 8 juillet 2024. Le 8 novembre une audience se tenait devant la soussignée sur cette demande.
- Avant d’entendre cette demande, le Tribunal a entendu une demande préliminaire du locateur visant à le relever de son défaut d’avoir déposé au Tribunal sa preuve de notification de sa demande dans le délai de 45 jours de l’ouverture de son dossier comme le lui imposait l’article 56.2 de la Loi sur le Tribunal administratif du logement[1] :
« 56.2. La preuve de la notification ainsi qu’une liste des pièces au soutien de la demande doivent être déposées au dossier du Tribunal. Ce dernier peut refuser de convoquer les parties en audience tant que ces documents n’ont pas été déposés.
Si la preuve de notification n’est pas déposée dans les 45 jours suivant l’introduction de la demande, cette dernière est alors périmée et le Tribunal ferme le dossier.
Le présent article n’a pas pour effet d’empêcher le Tribunal de convoquer les parties sans délai lorsqu’il le juge approprié, auquel cas la preuve de notification de la demande doit être produite à l’audience sous peine du rejet de la demande. »
- Cette demande a été instituée le 1er octobre 2024 et ce, après une première audience tenue sur la demande principale le 23 septembre 2024. Le procès-verbal de cette audience fait mention que la signification avait été faite au-delà du délai requis. La remise du dossier avait été accordée au demandeur afin qu’il évalue ses options quant à la suite de ce dossier et d’un autre dossier du demandeur, à savoir le dossier numéro 806489, aussi sur ce même rôle et avec la même problématique.
- La soussignée comprend que, à la suite des commentaires du juge lors de l’audience du 23 septembre 2024, le locateur a choisi de demander d’être relevé de son défaut d’avoir notifié sa procédure dans un délai raisonnable et d’avoir déposé sa preuve de notification dans le délai de 45 jours qui lui était imparti.
- En effet, la notification d’une demande déposée au Tribunal doit être notifiée à la partie adverse. Elle doit l’être dans un délai raisonnable. Ce délai raisonnable ne peut excéder 45 jours du dépôt de la demande vu les articles 56.2 de la Loi sur le Tribunal administratif du logement[2] et 7 du Règlement sur la procédure devant le Tribunal administratif du logement[3].
- L’article 59 de la Loi sur le Tribunal administratif du logement[4] permet au Tribunal de relever une partie de son défaut d’avoir respecté un délai dans la mesure où un motif raisonnable explique ce manquement et que la partie adverse n’en subit aucun préjudice grave :
« 59. Le Tribunal peut, pour un motif raisonnable et aux conditions appropriées, prolonger un délai ou relever une partie des conséquences de son défaut de le respecter, si l’autre partie n’en subit aucun préjudice grave. »
- Le fardeau de convaincre le Tribunal reposait sur les épaules du demandeur que les conditions de l’article 59 de la Loi sur le Tribunal administratif du logement[5] étaient rencontrées pour lever la péremption du dossier et relever le demandeur de son défaut d’avoir respecté les délais qui lui étaient imposés.
- Les délais imposés à l’article 56.2 de la Loi sur le Tribunal administratif du logement[6] font écho à l’article 107 du Code de procédure civile[7] (« C.p.c. ») qui prévoit aussi l’obligation de déposer la preuve de notification au greffe et la péremption de la demande à défaut de notification dans les 3 mois de son dépôt.
- Comme l’article 59 de la Loi sur le Tribunal administratif du logement[8], l’article 107 C.p.c. ne requiert pas la preuve d’une impossibilité d’agir, tel que le mentionne la Cour du Québec dans la décision CSX Transportation Inc. c. Price[9]:
« [42] L’article 107 C.p.c. ne prévoit pas que le délai de trois mois est de rigueur. C’est donc dire que, pour être relevé de son défaut, la demanderesse n’avait pas du tout à faire la démonstration qu’elle avait été en fait dans l’impossibilité d’agir à l’intérieur de ce délai.
[43] Est-ce à dire que le Tribunal doit relever la partie qui le demande dans tous les cas, quelle que soit la raison, et peu importe sa conduite ou diligence dans le déroulement de l’instance ?
[44] Bien sûr que non. Il ne s’agit pas d’un automatisme, sans quoi le délai ne serait pas obligatoire. Comme le dit la Cour d’appel, la « discrétion ne peut être un remède à la négligence, à l’incompétence ou à l’incurie des procureurs »[13].
[45] En fait, en s’inspirant de la jurisprudence traitant d’autres dispositions du C.p.c. qui, tout en rendant obligatoire un délai, ne prévoient pas qu’il est de rigueur, le Tribunal est d’avis que, dans l’exercice de sa discrétion, il doit vérifier, notamment, si la demande judiciaire est sérieuse et si les raisons invoquées pour justifier le retard sont valables et explicables, si la partie demanderesse a été diligente dans le traitement de son dossier et si la preuve qu’elle présente est probante et suffisante pour justifier le défaut ou retard. Le Tribunal doit sans doute aussi vérifier si la conduite de la partie demanderesse est respectueuse des principes directeurs du C.p.c. »
- La procédure formulée par le demandeur mentionne que :
« Je soumets cette demande car le locataire avait refusé d’aller chercher la lettre par la poste et j’ai finalement engagé un huissier pour lui notifier. »
- Le procès-verbal de signification de l’huissier mentionne que la signification de la demande en non-paiement a été faite le 28 août 2024 sous pli cacheté. Cette preuve de signification a été reçue au bureau de Laval du Tribunal le 16 septembre 2024.
- Le délai de 45 jours découlant de l’article 56.2 de la Loi sur le Tribunal administratif du logement[10] se terminait le 23 août 2024. Il faut donc considérer qu’effectivement, la demande est actuellement périmée vu que la preuve de notification a été déposée hors du délai imparti.
- À l’audience, la soussignée a tenté d’obtenir plus de détails quant aux motifs raisonnables justifiant la demande du demandeur visant à être relevé de son défaut. La preuve de suivi d’envoi faite par Postes Canada aurait été utile pour répondre à certaines interrogations du Tribunal par rapport au motif énoncé à la demande subséquente du demandeur pour être relevé du défaut. Malheureusement, celle-ci n’a pas été soumise par le demandeur.
- Les réponses obtenues du demandeur convergeaient vers le fait que comme la signification ayant été refaite, le dossier était maintenant régularisé. Il semble donc y avoir une incompréhension du demandeur par rapport à la demande subséquente formulée. En effet, ce n’est pas parce qu’une demande subséquente, la demande numéro 4476553, a été formulée et signifiée, qu’elle régularise le dossier de facto. Il s’agit plutôt d’une demande qui doit être décidée à la lumière des motifs prouvés et en application des critères de la loi.
- Malheureusement, n’ayant pas de preuve d’une tentative de notification antérieure et de la diligence du demandeur quant au suivi de son dossier ou d’un quelconque motif raisonnable pouvant expliquer l’écoulement des délais, le Tribunal ne peut relever le demandeur de son défaut d’avoir respecté les délais qui s’imposaient à lui.
- La péremption de l’instance justifie de rejeter la demande du demandeur quant au fond du dossier.
POUR CES MOTIFS, LE TRIBUNAL :
- REJETTE les demandes du demandeur.
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| Vanessa O’Connell-Chrétien |
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Présence(s) : | le locateur |
Date de l’audience : | 8 novembre 2024 |
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