Décision

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F.N. c. Epic Games Canada

2022 QCCS 4551

COUR SUPÉRIEURE

(actions collectives)

CANADA

PROVINCE DE QUÉBEC

DISTRICT DE

 montréal

 

No :

500-06-001024-195

 

 

DATE :

Le 7 décembre 2022

______________________________________________________________________

 

SOUS LA PRÉSIDENCE DE

L’HONORABLE

SYLVAIN LUSSIER, J.C.S.

______________________________________________________________________

 

F.N., en sa qualité de tuteur de l'enfant mineur L.N.

et.

J.Z., en sa qualité de tuteur de l’enfant mineur JO.Z..

et.

M.D., en sa qualité de tuteur de l’enfant mineur R.G.

 

 Demandeurs

c.

EPIC GAMES CANADA ULC

et

EPIC GAMES INC.

et

EPIC GAMES INTERNATIONAL S.A.R.L.

 

Défenderesses

 

______________________________________________________________________

 

JUGEMENT

(Sur DEMANDE D’AUTORISATION D’EXERCER UNE ACTION COLLECTIVE)

______________________________________________________________________

 

LE CONTEXTE

[1]                Le 3 octobre 2019, les demandeurs déposaient une demande d’autorisation d'exercer une action collective pour le compte de toutes les personnes faisant partie du groupe suivant :

Toutes les personnes physiques et/ou leur représentant légal et/ou leur tuteur, domiciliées ou ayant été domiciliées au Québec, qui depuis le 1er septembre 2017, ont développé une dépendance après avoir joué au jeu vidéo « FORTNITE BATTLE ROYALE » développé, fabriqué, publié, mis en marché et commercialisé par les défenderesses;

Ou tout autre groupe déterminé par la Cour.

[2]                La demande référait également à un sous-groupe défini à l’origine comme suit :

Tous les membres du groupe qui ont commencé à jouer au jeu vidéo « FORTNITE BATTLE ROYALE » alors qu’ils étaient âgés de moins de 13 ans et qui ont fait des achats intégrés à l’aide de VBUCKS, et/ou leurs représentants légaux et/ou leurs tuteurs.

[3]                La partie défenderesse Epic Games Inc. est une société américaine spécialisée dans le développement de jeux vidéo à l’échelle mondiale, qui a notamment développé et commercialisé le jeu vidéo Fortnite Battle Royale[1], dont Epic Games Canada ULC est la filiale canadienne.

[4]                Fortnite est un jeu vidéo coopératif de tir et de survie qui a été développé et commercialisé par les parties défenderesses et qui est disponible pour téléchargement gratuit sur plusieurs plateformes numériques, notamment Microsoft Windows, MacOS, PlayStation 4, Xbox One, Nintendo Switch, IOS et Android, depuis le mois de septembre 2017.

[5]                Selon les allégations de la demande, Fortnite permet à jusqu’à 100 joueurs de combattre, dans un mode de jeu « joueur contre joueur », seul ou en équipe de deux ou quatre joueurs, dans des espaces de plus en plus restreints au fur et à mesure que la partie avance et que les joueurs sont éliminés, jusqu’à ce qu’une seule personne ou équipe ne survive.

[6]                La demande fait état de 250 millions de joueurs à l’échelle mondiale.

[7]                Fortnite est offert pour téléchargement gratuitement, mais les joueurs sont invités à faire des achats intégrés incluant notamment des objets cosmétiques comme des modèles de personnages, des « skins » ou autres, ainsi que la passe de combat du jeu, qui permet un élargissement de la gamme d'objets achetables.

[8]                Les joueurs peuvent utiliser de l’argent du monde réel pour acheter la monnaie du jeu appelée V-Bucks.  Ces fonds sont utilisés pour acheter des skins Fortnite pour les personnages, des armes, des outils de récolte, des planeurs et des véhicules.

[9]                L’assortiment de la boutique d’objets en jeu comprend également des articles tels que des emotes, des danses, des sprays, des bandes sonores musicales du menu du jeu ou des écrans de chargement.

[10]           La demande reproche à Fortnite de créer une dépendance au jeu, qu’elle assimile à celle que peut créer l’héroïne ou la cocaïne :

« En 2018, l’OR.G.anisation mondiale de la santé (ci-après l’« OMS ») a reconnu et classifié la dépendance aux jeux vidéo, qu’elle qualifie de « Trouble du jeu vidéo », comme une maladie. La pathologie est définie comme étant « un comportement lié à la pratique des jeux vidéo ou des jeux numériques, qui se caractérise par une perte de contrôle sur le jeu, une priorité accrue accordée au jeu, au point que celui-ci prenne le pas sur d’autres centres d’intérêt et activités quotidiennes, et par la poursuite ou la pratique croissante du jeu en dépit de répercussions dommageables ».[2]

[11]           Toujours selon la demande, les symptômes de la dépendance à Fortnite, sont physiques et psychologiques et incluent des migraines, des douleurs dorsales et cervicales, des manquements à l’hygiène de base, des troubles du sommeil ainsi que des troubles sociaux importants. Plusieurs des joueurs auraient développé des problèmes tels qu’ils ne mangent pas, ne se douchent pas, et ne socialisent plus.

[12]           La dépendance à Fortnite encouragerait la dépense excessive puisque les joueurs dépenseraient sans compter et achèteraient des V-BUCKS dont il serait très difficile de traduire la valeur en monnaie courante.

[13]           Selon la demande, Fortnite a été conçu pour être un jeu hautement accoutumant.

[14]           Les demandeurs sont les tuteurs de mineurs qui auraient développé une dépendance à Fortnite et en subiraient les effets néfastes, psychologiques, sociaux et financiers.

[15]           Après l’audition des représentations à l’autorisation, les demandeurs ont demandé la modification de la description du groupe pour qu’il soit dorénavant défini comme suit :

Toutes les personnes physiques et/ou leur représentant légal et/ou leur tuteur, domiciliées ou ayant été domiciliées au Québec, qui depuis le 1er septembre 2017, ont développé (…) après avoir joué au jeu vidéo « FORTNITE BATTLE ROYALE » développé, fabriqué, publié, mis en marché et commercialisé par les Défenderesses, une dépendance, soit une perte de contrôle sur le jeu et/ou une priorisation de celui-ci, ayant eu des répercussions dommageables sur l’une ou l’autre des sphères d’activités suivantes:

 

a. activités personnelles;

b. activités familiales;

c. activités sociales;

d. activités éducatives;

e. activités professionnelles; ou

f. autres domaines importants du fonctionnement;

 

ou tout autre GROUPE 1 déterminé par cette Honorable Cour.

[16]           Le sous-groupe disparaîtrait.

[17]           S’ajouterait également un deuxième groupe, qui ne semble plus être un sous-groupe du premier :

(…) Toutes les personnes physiques, domiciliées ou ayant été domiciliées au Québec, qui alors qu’ils étaient âgés de moins de (…) 18 ans, ont fait des achats intégrés à l’aide de VBUCKS, et/ou leurs représentants légaux et/ou leur tuteurs »,

 

ou tout autre GROUPE 2 déterminé par cette Honorable Cour.

[18]           Les demandeurs laissent tomber, dans cette procédure modifiée, leurs prétentions relatives à une contravention à la Loi sur la protection du consommateur[3] quant à l’interdiction de la publicité qui s’adresse aux enfants.

[19]           Les défenderesses s’opposent à la modification.

QUESTIONS EN LITIGE

[20]           La modification du groupe doit-elle être autorisée?

[21]           L’action collective devrait-elle être autorisée? Pour les raisons qui suivent, le Tribunal estime que l’action doit être autorisée.

[22]           Si l’action est autorisée, quelles seront les questions en litige et les conclusions recherchées?

[23]           Si l’action est autorisée, dans quel district judiciaire procèdera-t-elle?

ANALYSE

  1. La modification de la description du groupe

[24]           Dans un arrêt récent, la Cour d’appel reprend les principes relatifs à la modification. La juge Bich y écrit pour la Cour [4]:

 [55]      Certes, la modification des procédures est la règle, plutôt que l’exception, et le droit de modifier est accordé avec largesse, jusqu’« avant le jugement/[a]t any time before judgment » (art. 206 et 208 C.p.c.), tout comme sont acceptés les ajustements à la théorie de la cause. Mais cette bienveillance procédurale connaît une limite : ce qui contrevient à l’intérêt de la justice ne sera pas autorisé. C’est ainsi que la modification proposant une demande entièrement nouvelle, sans rapport avec la demande initiale, ou la modification retardant l’instance seront refusées, car contraires à cet intérêt, ce qui sous-tend la prohibition législative dont elles font expressément l'objet. Dans les autres cas, l’intérêt en question sera apprécié en fonction des règles de la proportionnalité et d’une saine gestion de l’instance ainsi qu’en fonction du maintien de l’équilibre et de l’équité entre les parties. Une partie ne peut donc pas réinventer sa théorie de la cause à répétition ou encore à la dernière minute, car la partie adverse a le droit de savoir sur quel pied danser, c’est-à-dire de connaître en temps utile ce qu’on lui reproche, de manière à pouvoir se défendre adéquatement, en fait comme en droit.

 

(Références omises)

[25]           Dans ce dossier Khader, la modification avait été refusée en Cour supérieure, confirmée par la Cour d’appel. Il faut cependant noter que la modification avait été proposée à la fin de l’audition, en plaidoirie, malgré le dépôt, trois jours auparavant, d’une nouvelle demande introductive d’instance, la neuvième, qui ne laissait pas présager le nouvel argument.

[26]           Dans notre dossier, nous sommes à l’étape de l’autorisation et la demande vise à tenir compte de propos tenus par le soussigné lors des représentations à l’autorisation. La demande introductive d’instance n’est donc même pas au dossier. La modification fait également suite aux reproches adressés en défense quant à la « circularité » de la définition du groupe.

[27]           Par ailleurs, le Tribunal ne peut empêcher une partie de se désister de certains arguments[5], en l’espèce, les reproches basés sur la publicité visant supposément les enfants.

[28]           Que ce soit parce qu’il s’agit d’un désistement partiel ou d’une modification, en présumant que la permission du Tribunal soit nécessaire, ce désistement partiel ne porte pas atteinte à l’intégrité du système judiciaire, pour reprendre les termes de l’arrêt Belz. À la lecture des prétentions formulées dans la procédure initiale, le Tribunal estime plutôt qu’il s’agit d’une décision avisée. L’avocat des demandeurs avait lui-même qualifié cette catégorie de reproches comme « faible ».

[29]           Le Tribunal n’est pas lié par la définition du groupe et des questions en litige qui lui sont proposées. C’est le tribunal qui les formule[6] :

576. Le jugement d’autorisation décrit le groupe dont les membres seront liés par le jugement et désigne le représentant; il identifie les principales questions qui seront traitées collectivement et les conclusions recherchées qui s’y rattachent. Le cas échéant, il décrit les sous-groupes constitués et détermine le district dans lequel l’action sera introduite.

[30]           Après autorisation, il peut les réviser ou les modifier[7]: article 588 C.p.c.

[31]           Il est donc préférable d’ajuster la définition du groupe et des questions en litige à l’autorisation, en fonction des allégations qui sont faites. Ce ne sont pas les allégations qui sont modifiées, mais les conséquences juridiques qui découlent de celles-ci.

[32]           Cette remarque s’adresse particulièrement à la création du deuxième groupe. Il ressort en effet des allégations de la demande en autorisation que les enfants mineurs des demandeurs ont dépensé des sommes importantes pour des « skins » à l’aide de VBUCKS, alors qu’on peut très sérieusement s’interroger sur le caractère lésionnaire de ces achats, ce que le soussigné a fait à l’audition.

[33]           Le fait de payer plus de 6 000$ pour des « skins », c’est-à-dire des accessoires sans valeur tangible, ce qui serait le cas pour R.G.,[8] soulève la possibilité de voir appliquer l’article 1406 C.c.Q. qui prévoit :

1406. La lésion résulte de l’exploitation de l’une des parties par l’autre, qui entraîne une disproportion importante entre les prestations des parties; le fait même qu’il y ait disproportion importante fait présumer l’exploitation.

 

Elle peut aussi résulter, lorsqu’un mineur ou un majeur protégé est en cause, d’une obligation estimée excessive eu égard à la situation patrimoniale de la personne, aux avantages qu’elle retire du contrat et à l’ensemble des circonstances.

[34]           Dans le cas de L.N., la modification est justifiée par les allégations suivantes :

96)  À ce jour, L.N., maintenant âgé de 10 ans, a dépensé près de 600$ afin d’acheter des VBUCKS dans FORTNITE;

 

97)  L’existence sur FORTNITE d’un magasin virtuel où il peut facilement, avec l’achat de cartes prépayées PlayStation payer des VBUCKS, lui permettant d’acquérir des objets virtuels attrayants afin de performer dans le jeu est une problématique qui est difficilement contrôlable même si F.N. reçoit des courriels sur son compte lorsque son fils effectue un achat puisque l’achat est déjà fait, le tout tel qu’il appert des extraits de courriels reçu par F.N. lors d’achat dont copie est produite aux soutiens des présentes sous la cote « Pièce P-24 »;

[35]           De ce fait, il n’en résulte pas « une demande entièrement nouvelle sans rapport avec la demande initiale », puisqu’elle en découle. La modification ne retarde pas les procédures, qui suivront le cours réservé aux actions collectives.

[36]           Ceci ne veut pas dire que le Tribunal est lié par cette nouvelle définition. Celle-ci devra se justifier eu égard aux faits allégués.

[37]           Considérées globalement, les modifications proposées ne sont pas contraires aux intérêts de la justice. Le Tribunal les autorise.

  1. Autorisation de l’action collective

a)     Principes généraux

[38]           L’autorisation d’exercer une action collective est accordée si chacun des quatre critères de l’article 575 C.p.c. est rempli. Cet article prévoit :

575. Le tribunal autorise l’exercice de l’action collective et attribue le statut de représentant au membre qu’il désigne s’il est d’avis que :

1. les demandes des membres soulèvent des questions de droit ou de fait identiques, similaires ou connexes;

2. les faits allégués paraissent justifier les conclusions recherchées;

3.  la composition du groupe rend difficile ou peu pratique l’application des règles sur le mandat d’ester en justice pour le compte d’autrui ou sur la jonction d’instance;

4. le membre auquel il entend attribuer le statut de représentant est en mesure d’assurer une représentation adéquate des membres.

[39]           En l’espèce, seul le critère (3) n’est pas en litige. Quant au quatrième critère, il est contesté en lien avec l’absence d’intérêt juridique des demandeurs, soulevé en argument à l’encontre de l’apparence de droit énoncée au paragraphe 2 de l’article 575 C.p.c..

[40]           La Cour suprême et la Cour d’appel ont écrit abondamment au sujet des critères d’autorisation et les enseignements à tirer de ces jugements sont notamment résumés dans les arrêts Infineon[9], Vivendi[10], et Oratoire Saint-Joseph[11].

[41]           Au nom de la majorité, le juge Kasirer reprend, dans Desjardins Cabinet de services financiers inc. c. Asselin[12], ce qu’il faut en retenir :

[27] Je propose donc de m’en tenir à l’état actuel du droit suivant les arrêts Infineon, Vivendi et Oratoire. Comme nous le savons, l’autorisation d’un recours collectif au Québec nécessite l’atteinte d’un seuil peu élevé. Une fois les quatre conditions énoncées à l’art. 1003 de l’ancien C.p.c. (maintenant l’art. 575 du nouveau C.p.c.) satisfaites, la juge d’autorisation doit autoriser le recours collectif; elle ne bénéficie d’aucune discrétion résiduelle lui permettant de refuser l’autorisation au prétexte que, malgré l’atteinte de ces quatre conditions, le recours ne serait pas le véhicule « le plus adéquat » (voir Vivendi, par. 67). Les questions de droit peuvent être résolues par un ou une juge d’autorisation lorsque le sort de l’action projetée en dépend, mais ce choix relève généralement de la discrétion du tribunal (voir Oratoire, par. 55). Ceci témoigne de la vocation de l’étape de l’autorisation du recours collectif : exercer une fonction de filtrage pour écarter les demandes frivoles, sans plus (voir Oratoire, par. 56, citant notamment Infineon, par. 61, 125 et 150). Enfin, il n’y a aucune exigence au Québec que les questions communes soient prépondérantes par rapport aux questions individuelles (voir Vivendi, par. 56-57). Au contraire, une seule question commune suffit si elle fait progresser le litige de façon non négligeable. Il n’est pas nécessaire que celle-ci soit déterminante pour le sort du litige (voir Vivendi, par. 58; Oratoire, par. 15).

[42]           Il est acquis que l’action collective vise tant l’indemnisation des victimes que la dissuasion de comportements répréhensibles. Ses principaux avantages demeurent « l’économie de ressources judiciaires, l’accès à la justice et la modification des comportements »[13].

[43]           À ces fins, une approche souple, libérale et généreuse, afin de faciliter l’exercice de l’action collective, doit être adoptée.

[44]           Il appartient au demandeur de démontrer que les critères de l’article 575 C.p.c. sont remplis. Son fardeau en est un de démonstration et non de preuve[14].

[45]           Il suffit pour le demandeur de présenter une cause ayant une apparence sérieuse de droit, c’est-à-dire une cause ayant une chance de réussite, sans nécessiter pour lui d’établir une possibilité raisonnable de succès[15]. Le mécanisme de filtrage ne doit empêcher que les « demandes frivoles »[16].

[46]           Les faits allégués dans la demande d’autorisation sont tenus pour avérés à moins qu’une preuve non contredite ne démontre qu’ils sont faux.  Les faits allégués par la défense ne sont pas tenus pour avérés s’ils sont susceptibles d’être éventuellement contredits par le demandeur.[17]

[47]           Par contre, les faits allégués ne peuvent être vagues et imprécis[18].

[48]           De plus, le Tribunal ne peut pas tenir compte de ce qui est allégué dans un plan d’argumentation en l’absence d’assise factuelle dans la demande[19]. Les opinions, les hypothèses, et l’argumentation ne constituent pas des faits allégués et ne lient aucunement le Tribunal.

[49]           Enfin, le juge d’autorisation doit s’abstenir de trancher le fond de l’affaire en appréciant les faits. S’il s’agit d’une pure question de droit, le Tribunal a la discrétion, et non l’obligation, de la trancher :

« Les questions de droit peuvent être résolues par un ou une juge d’autorisation lorsque le sort de l’action projetée en dépend, mais ce choix relève généralement de la discrétion du tribunal.[20] »

[50]           La Cour d’appel nous rappelait récemment, sous la plume du juge Frédéric Bachand [21]:

[16]      As the Supreme Court made clear in L’Oratoire SaintJoseph du MontRoyal and Asselin, the role of a motion judge on an application for authorization to institute a class action is very limited. His or her task is not to “make […] determination[s] as to the merits in law of the conclusions in light of the facts being alleged”, but rather to “filter out frivolous claims, and nothing more”. This explains why, in order to clear the hurdle set by article 575(2) C.C.P., “[t]he applicant need establish only a mere ‘possibility’ of succeeding on the merits, as not even a ‘realistic’ or ‘reasonable’ possibility is required”.

(Références omises)

[51]           Il reprenait par ailleurs les propos du juge Brown dans l’arrêt Oratoire St Joseph [22]:

[58]                        Le fardeau qui incombe au demandeur au stade de l’autorisation consiste simplement à établir l’existence d’une « cause défendable » eu égard aux faits et au droit applicable (…) Il s’agit d’un « seuil peu élevé » (…) En effet, le demandeur n’a qu’à établir une simple « possibilité » d’avoir gain de cause sur le fond, pas même une possibilité « réaliste » ou « raisonnable » 

b)     Questions communes

[52]           L’arrêt Vivendi établit que l’existence d’une question dont la résolution commune permette de faire avancer la cause des membres du groupe est suffisante pour satisfaire au premier critère de l’article 575 C.p.c..

[53]           En l’espèce, la question de la création d’une dépendance au jeu Fortnite est une question commune aux membres du premier groupe proposé.

[54]           Seront également communes, si les allégations justifient l’apparence de droit requise, la question de la responsabilité du fabricant ou concepteur du jeu à l’égard du risque que celui-ci comporte, sa connaissance, présumée ou actuelle de ce risque, ainsi, le cas échéant, que la question de la création délibérée d’un jeu créant la dépendance.

[55]           Quant au deuxième groupe, la question du caractère lésionnaire de l’achat de VBUCKS par un mineur sera commune à tous les membres du groupe. En effet, la disproportion des prestations peut s’évaluer en tenant compte de la valeur intrinsèque des VBUCKS par rapport au bénéfice qui en est retiré. Il appartiendrait de faire la preuve de la situation patrimoniale du membre par rapport aux « avantages » qu’il retire du contrat à l’étape des recouvrements individuels.

c)     Apparence de droit

[56]           La demande d’autorisation procède en deux étapes : elle détaille premièrement les caractéristiques de Fortnite et le fait que, selon les demandeurs, ce jeu crée de la dépendance, et qu’il a été spécifiquement et délibérément conçu à cet effet. Deuxièmement, la demande fait état des dossiers de trois mineurs, L.N.[23], J.O.Z.[24] et R.G.[25], qui seraient devenus dépendants à Fortnite et les conséquences découlant de cette dépendance.

[57]           L’allégation de création d’une dépendance aux jeux vidéo repose principalement sur la reconnaissance de celle-ci par l’Organisation mondiale de la santé[26] en janvier 2018, qui la définissait ainsi [27]:

« Définition du trouble du jeu vidéo

 

Le trouble du jeu vidéo est défini dans le projet de 11ème révision de la Classification internationale des maladies (CIM-11) comme un comportement lié à la pratique des jeux vidéo ou des jeux numériques, qui se caractérise par une perte de contrôle sur le jeu, une priorité accrue accordée au jeu, au point que celui-ci prenne le pas sur d’autres centres d’intérêt et activités quotidiennes, et par la poursuite ou la pratique croissante du jeu en dépit de répercussions dommageables.

 

Pour que ce trouble soit diagnostiqué en tant que tel, le comportement doit être d’une sévérité suffisante pour entraîner une altération non négligeable des activités personnelles, familiales, sociales, éducatives, professionnelles ou d’autres domaines importants du fonctionnement, et en principe, se manifester clairement sur une période d’au moins 12 mois. »

[58]            La demande allègue également plusieurs articles de journaux qui font état d’une dépendance au jeu vidéo. Plusieurs d’entre eux font références à Fortnite. Citant une psychothérapeute de Washington, la journaliste Suzanne Kane écrit [28]:

Dr. Gadhia-Smith acknowledges that electronic gaming addiction is on the rise. She says she has worked with numerous families who are experiencing the phenomenon of their sons and daughters being addicted to online video games, particularly Fortnite.

[59]           Un article électronique de Bloomberg, fait spécifiquement références à des troubles provenant de jeu excessif à Fortnite[29].

[60]           Même si certains textes peuvent être promotionnels, comme celui d’un centre de désintoxication[30], il n’en reste pas moins qu’il existe une « certaine preuve »[31] à l’appui des prétentions de la demande.

[61]           Les défenderesses soutiennent qu’en l’espèce, la preuve est insuffisante: il n’y a selon elles aucun rapport d’expertise du lien causal, aucun dossier médical qui pose un diagnostic de « dépendance » et aucune monographie des effets indésirables d’un jeu vidéo. Elles invoquent le jugement de la Cour supérieure refusant l’autorisation d’exercer une action collective dans Pollués de Montréal-Tudeau (LPDMT) c. Aéroports de Montréal (ADM)[32]:

25 Donc, de l'avis du Tribunal, les allégations et la preuve soumise par la Requérante elle-même à ce stade démontrent que des études scientifiques additionnelles sont requises avant de conclure qu'il existe un danger pour la santé publique.

 

26 De plus, il n'y a pas d'allégation voulant qu'une personne soit actuellement devenue malade ou qu'elle ait été diagnostiquée avoir subi des conséquences médicales en lien avec la prétendue pollution causée par les activités aéroportuaires, même pas la personne désignée.

[62]           Ce jugement a été porté en appel et une demande de rejet d’appel a été refusée[33].

[63]           Il est exact que selon lAmerican Psychiatric Association, « there is currently insufficient evidence to support gaming disorder as a unique mental disorder, calling for further research »[34]. Ce n’est pas le texte cité au support de l’existence d’un trouble médical qui fait état de la nécessité de recherche supplémentaire. L’OMS utilise un vocabulaire catégorique. Le fait que les psychiatres américains demandent plus de recherche ou que ce diagnostic n’ait pas encore été officiellement reconnu au Québec ne rend pas les prétentions en demande « frivoles » ou « sans fondement ». À titre analogique, l’effet nocif du tabac n’a pas été reconnu ou admis du jour au lendemain.

[64]           Il en va de même du fait que la dépendance au jeu puisse affecter certaines personnes ayant d’autres troubles ou prédispositions. La Cour d’appel écrivait à ce sujet, quant à la préexistence de troubles psychologiques, invoqués en défense comme moyen d’exonération [35]:


[80]        Le fait que l’appelante souffrait déjà de symptômes reliés à la dépression avant la diffusion du reportage n’est pas en soi un obstacle à sa réclamation, en raison de la théorie « Thin skull rule », que les auteurs Baudouin, Deslauriers et Moore décrivent en ces termes :

 

1-408 – Situation de la victime – Le principe de la réparation intégrale exige aussi que l'auteur de la faute prenne la victime dans l'état où elle se trouve au moment où le dommage est causé. Cette règle, connue en common law sous le nom de « thin skull rule », signifie simplement que l'auteur du dommage assume les risques inhérents à la qualité et à la personnalité de sa victime. Selon qu'il blesse un millionnaire ou un chômeur, la situation pour lui risque donc d'être fort différente. Également, en raison d'une fragilité de santé particulière de sa victime, les conséquences de l'acte fautif peuvent être beaucoup plus considérables qu'elles ne l'auraient été sur une personne ordinaire. Par contre, s'il ne fait qu'aggraver une situation antérieure défavorable, l'auteur n'est responsable que de l'augmentation du préjudice causée directement par lui. (…)

 

[81]        Dans l’affaire Janiak c. Ippolito[36],  la Cour suprême a d’ailleurs confirmé une telle approche à l’égard de dommages d’ordre psychologique.

[65]           Dépendant de la preuve qui sera faite à l’étape de la preuve sur les questions communes, des critères pourraient être établis pour permettre l’indemnisation individuelle des membres en fonction de certaines prédispositions. Ce n’est pas le moment d’en traiter à l’étape de l’autorisation.

[66]           Le reproche voulant qu’il n’y ait pas de rapport d’expert au support de la demande n’est pas non plus concluant. Comme l’écrivait la juge Marie-Josée Hogue[37]:

[14]        Il est bien établi que le fardeau d’un demandeur dans le cadre d’une requête pour autorisation d’exercer une action collective en est « un de logique et non de preuve » et qu’il n’y a pas lieu d’y faire un pré-procès. Ainsi, les débats d’experts n’ont pas leur place au stade de l’autorisation.

 

[15]        Or, l’argument des requérantes voulant que la déclaration du Dr Lutz ne soit destinée qu’à expliquer aux profanes l’essentiel du propos qu’on retrouve à l’article publié par Quan et al., et cité par l’experte retenue par les intimées, ne peut être retenu. La déclaration du Dr Lutz va plus loin que cela et ouvre la porte à un véritable débat scientifique relevant du fond.

 

(Références omises, le Tribunal souligne)

[67]           Par ailleurs, un diagnostic de dépendance au jeu a effectivement été posé à l’égard du fils d’un des demandeurs, R.G. :

167) Le 25 octobre 2019 à 13h, R.G. rencontre une travailleuse sociale au Centre intégré de santé et de services sociaux du bas Saint-Laurent (ci-après le « CLSC ») pour discuter de sa cyberdépendance. Cette dernière le réfère au médecin de garde;

 

168) À 14h20 la même journée, R.G. rencontre le médecin de garde au CLSC qui pose un diagnostic de cyberdépendance, le tout tel qu’il appert du rapport de fermeture du CLSC, produit au soutien des présentes sous la cote Pièce P-26;

[68]           Les défenderesses soulèvent que la pièce P-26 n’est pas un rapport de médecin et ne pose pas de diagnostic. Il est néanmoins allégué qu’un médecin a posé ce diagnostic. Le suivi dont R.G. a fait lobjet, qui n’est pas contredit, tend à accréditer lallégation. Puisque les défenderesses réfutent ces allégations elles auront l’occasion de le faire au fond.

[69]           Le Tribunal conclut qu’il existe une question sérieuse à débattre, soutenue par des allégations suffisantes et précises quant à l’existence de risques ou même de dangers naissant de l’utilisation de Fortnite.

[70]           De prime abord, Fortnite doit être considéré comme un « bien » au sens des articles 899 et 907 C.c.Q. Bien que mis en marché gratuitement, son utilisation fait l’objet d’un contrat et d’une distribution.

[71]           De ces faits, il pourrait en résulter une responsabilité du fabricant aux termes des articles 1468 et 1469 du Code civil du Québec qui disposent :

1468. Le fabricant d’un bien meuble, même si ce bien est incorporé à un immeuble ou y est placé pour le service ou l’exploitation de celui-ci, est tenu de réparer le préjudice causé à un tiers par le défaut de sécurité du bien.

 

Il en est de même pour la personne qui fait la distribution du bien sous son nom ou comme étant son bien et pour tout fournisseur du bien, qu’il soit grossiste ou détaillant, ou qu’il soit ou non l’importateur du bien.

 

1469. Il y a défaut de sécurité du bien lorsque, compte tenu de toutes les circonstances, le bien n’offre pas la sécurité à laquelle on est normalement en droit de s’attendre, notamment en raison d’un vice de conception ou de fabrication du bien, d’une mauvaise conservation ou présentation du bien ou, encore, de l’absence d’indications suffisantes quant aux risques et dangers qu’il comporte ou quant aux moyens de s’en prémunir.

[72]           Ce fabricant est présumé connaître les risques associés à son produit. Il lui appartiendra le cas échéant, de faire la preuve qu’il peut s’exonérer de cette responsabilité :

1473. Le fabricant, distributeur ou fournisseur d’un bien meuble n’est pas tenu de réparer le préjudice causé par le défaut de sécurité de ce bien s’il prouve que la victime connaissait ou était en mesure de connaître le défaut du bien, ou qu’elle pouvait prévoir le préjudice.

 

Il n’est pas tenu, non plus, de réparer le préjudice s’il prouve que le défaut ne pouvait être connu, compte tenu de l’état des connaissances, au moment où il a fabriqué, distribué ou fourni le bien et qu’il n’a pas été négligent dans son devoir d’information lorsqu’il a eu connaissance de l’existence de ce défaut.

[73]           Se posera également la question de l’application possible de l’article 53 de la LPC qui édicte :

53. Le consommateur qui a contracté avec un commerçant a le droit d’exercer directement contre le commerçant ou contre le fabricant un recours fondé sur un vice caché du bien qui a fait l’objet du contrat, sauf si le consommateur pouvait déceler ce vice par un examen ordinaire.

 

Il en est ainsi pour le défaut d’indications nécessaires à la protection de l’utilisateur contre un risque ou un danger dont il ne pouvait lui-même se rendre compte.

 

Ni le commerçant, ni le fabricant ne peuvent alléguer le fait qu’ils ignoraient ce vice ou ce défaut.

 

Le recours contre le fabricant peut être exercé par un consommateur acquéreur subséquent du bien.

[74]           Les demandeurs soutiennent par ailleurs que les concepteurs de Fortnite ont délibérément conçu un jeu créant de la dépendance. Leurs allégations reposent principalement sur les propos tenus par une des conceptrices du jeu, madame Célia Hodent, psychologue[38].

[75]           Le soussigné a lu attentivement l’entrevue donnée par madame Hodent au journal le Monde en mai 2018[39] et écouté la vidéo où elle explique les forces du jeu et son intérêt pour les joueurs[40]. Le Tribunal n’a pu déceler dans ces propos l’intention de concevoir un jeu qui crée de la dépendance. Certes, on y constate une « direction artistique très cartoon et pleine d’humour. »

[76]           On ne peut reprocher au concepteur d’un jeu vidéo d’avoir créé un produit intéressant, engageant et attrayant. On conçoit mal le créateur du jeu le concevant ennuyant, lent et incolore (drab).

[77]           La mise en circulation d’un produit populaire et enthousiasmant n’est pas synonyme d’une création délibérément destinée à créer la dépendance. Les allégations à cet effet, y compris celles que l’on retrouve dans l’article Parents Guide to Fortnite Addiction- Game Quitters,[41] relèvent de l’opinion et de l’argumentation.

[78]           Le Tribunal conclut qu’il n’existe pas « une certaine preuve » quant à ces allégations de création délibérée d’un jeu créant la dépendance. Ceci n’exclut en rien la possibilité que le jeu crée en fait de la dépendance et que son concepteur et distributeur soient présumés le savoir.

[79]           Les allégations propres à chacun des enfants des demandeurs sont suffisantes pour fonder les prétentions des demandeurs quant aux effets nocifs du jeu excessif qui résulterait de la dépendance créée par Fortnite. Sans répéter mot à mot ces allégations, retenons celles-ci :

[80]           Dans le cas de JO. Z.:

104) Le ou vers le mois d’octobre 2017, JO.Z.. a découvert l’existence du jeu FORTNITE, soit quelques semaines après sa mise-en-marché, et ce, par l’intermédiaire de ses amis;

 

105) JO.Z.. a ensuite téléchargé gratuitement le jeu FORTNITE à partir de sa console de jeu Playstation 4;

 

106) Suite au téléchargement de FORTNITE, l’enfant mineur JO.Z.., alors âgé de 13 ans, a créé un profil de joueur sous un pseudonyme

 

112) Au début, JO.Z. jouait au jeu FORTNITE quelques heures ici et là mais après quelques semaines il a commencé apprivoiser le jeu et à y consacrer de plus en plus de temps;

 

113) Plus JO.Z. jouait à FORTNITE et évoluait dans ce monde parallèle, plus il ressentait le besoin de consacrer du temps à y jouer;

 

115) en l’espace de quelques semaines, le temps que JO.Z. consacre au jeu

FORTNITE est passé de quelques heures par semaine à plusieurs heures par jour;

 

116) En date des présentes, JO.Z. a participé à 7 781 parties, tous modes de jeu confondus, et ce, en moins de deux ans;

 

117) JO.Z. joue quotidiennement à FORTNITE, au minimum trois heures par jour, et ce quasi-quotidiennement;

 

118) Il arrive fréquemment que JO.Z. se couche, les soirs de fin de semaine, à 3 heures du matin, et ce, uniquement afin de pouvoir jouer à FORTNITE;

 

119) Les soirs de semaine, alors qu’il doit être à l’école le lendemain matin, JO.Z. se couche fréquemment vers 1 heure du matin, encore une fois uniquement afin de pouvoir jouer à FORTNITE;

 

122) JO.Z. ressent beaucoup de frustration lorsqu’il ne peut pas jouer à FORTNITE ou qu’il doit interrompre une partie à la demande de ses parents, ce qui crée des conflits familiaux importants;

 

123) De plus, les interactions sociales de JO.Z. ont grandement diminuées depuis qu’il a commencé à jouer à FORTNITE, et ce, puisqu’il consacre la quasi-totalité de ses temps libre à y jouer;

 

126) JO.Z. fait aussi des achats intégrés par l’entremise de la plateforme, et ce, afin d’acquérir des personnages et des danses. Il a dépensé entre 300 $ et 400 $ depuis qu’il joue à FORTNITE;

[81]           Dans le cas de R.G., qui avait 15 ans quand il a commencé à jouer à Fortnite:

141) Au début, R.G. jouait au jeu FORTNITE quelques heures ici et là, mais, après quelques semaines, il a commencé à apprivoiser le jeu et à y consacrer de plus en plus de temps;

 

143) R.G. consacrait plusieurs heures par jour à jouer à FORTNITE, que ce soit à la maison ou pendant ses pauses au travail;

 

144) Plus particulièrement, en date du 17 mars 2020, l’enfant R.G. avait joué 6 923 parties de FORTNITE, ce qui correspond à 59 954 minutes de jeu, soit près de 42 jours complets de jeu, le tout tel qu’il appert de la capture d’écran dont la copie est produite au soutien des présentes sous la cote « Pièce P-25 »;

 

145) R.G. joue donc à FORTNITE sur une base journalière depuis plusieurs mois et il devient très frustré et fâché lorsque ses parents tentent de limiter le temps qu’il passe à jouer;

 

147) Le fait que l’ordinateur soit situé près de la cuisine permet aux parents de R.G. d’avoir un certain contrôle sur son utilisation, mais ils parviennent difficilement à contrôler l’utilisation de FORTNITE sur les autres appareils;

 

148) Les parents de R.G. ont été forcés, à un certain moment, de mettre un cadenas à clé sur l’ordinateur afin de limiter le temps de jeu de R.G.;

 

149) R.G. n’est plus intéressé par les activités en famille et ses parents ont du mal à l’intéresser à d’autres choses que le jeu FORTNITE;

 

150) Le temps de jeu de R.G. impacte aussi grandement ses résultats scolaires, car il néglige ses études pour passer plus de temps à jouer à FORTNITE;

 

151) De plus, les interactions sociales de R.G. ont grandement diminué puisqu’il consacre la quasi-totalité de son temps libre à jouer à FORTNITE ce qui limite le temps qu’il est en mesure de consacrer à sa vie sociale;

 

153) Lorsqu’il joue à FORTNITE en réseau avec ses amis, le langage de R.G. devient très agressif et vulgaire alors que ce n’est pas le cas dans la vie courante et ça n’a jamais été le cas avant qu’il ne commence à jouer à FORTNITE;

 

154) Lorsqu’il perd, R.G. s'énerve et continue à jouer inlassablement jusqu’à ce que ses parents lui demandent d’arrêter, ce qui est une grande source de conflit pour la famille;

 

155) Par des moments de frustration, R.G. va même jusqu’à malmener son équipement de jeu afin de libérer la colère que lui cause FORTNITE;

 

156) M.D. n’avait jamais observé ce genre de comportement chez R.G. lorsqu’il jouait à d’autres jeux vidéo;

 

157) Vers le mois de janvier 2019, R.G. a fait une première crise de panique en jouant à FORTNITE, se sentant dépassé par la pression du jeu;

 

158) R.G. a chaud, respire très vite, et a de la difficulté à formuler des pensées, et ce pendant plusieurs minutes;

 

159) C’était la première fois que R.G. faisait une crise de panique;

 

160) En octobre 2019, les parents de R.G. apprennent, lors d’une visite avec R.G. à son institution bancaire, que son compte en banque avait diminué de plusieurs milliers de dollars;

 

162) Le 24 octobre 2019, alors confronté par ses parents, R.G. avoue avoir dépensé la grande majorité des montants contenus dans son compte en banque, qui devaient être déposés dans son REEE, par l’entremise de la plateforme PayPal afin d’acheter des VBUCKS qui lui permettent d’acquérir des objets cosmétiques comme des modèles de personnages, des danses ou encore la passe de combat du jeu FORTNITE, cette dernière permettant d’élaR.G.ir la gamme d'objets achetables;

 

163) La plateforme PayPal permettait à R.G. de dépenser directement à partir de son compte en banque dans le jeu FORTNITE, qui était relié à son compte bancaire;

 

164) Les parents de R.G. ne connaissaient pas le fonctionnement de la plateforme

PayPal et encore moins que R.G. avait un compte sur cette plateforme;

[82]           Après avoir décrit des comportements similaires, les parents de L.N. font état de l’achat de plusieurs centaines de dollars en VBUCKS :

96) À ce jour, L.N., maintenant âgé de 10 ans, a dépensé près de 600$ afin d’acheter des VBUCKS dans FORTNITE;

 

97) L’existence sur FORTNITE d’un magasin virtuel où il peut facilement, avec l’achat de cartes prépayées Playstation payer des VBUCKS, lui permettant d’acquérir des objets virtuels attrayants afin de performer dans le jeu est une problématique qui est difficilement contrôlable même si F.N. reçoit des courriels sur son compte lorsque son fils effectue un achat puisque l’achat est déjà fait,

[83]           Les défenderesses soutiennent que les demandeurs n’ont pas fait la preuve médicale ou par étude ou rapport scientifique de l’existence d’un dommage subi en raison de Fortnite[42]. Ils invoquent à cet égard l’affaire Dermatech[43] où la juge Suzanne Courteau avait rejeté l’autorisation d’une action fondée sur les effets secondaires subis après l’injection d’implants permanents. Parlant des prétentions de la demanderesse, la juge écrit :

[80]            Elle semble considérer que son opinion, ses conclusions personnelles sont suffisantes pour établir, prima facie, une apparence sérieuse de droit.

 

[81]            Elle ne réfère à aucun fait particulier pour établir la nocivité ou dangerosité des produits non plus qu'à quelque élément indiquant que ces produits pourraient présenter des risques « graves » ou « sévères » de formation de granulomes et nodules.

 

[82]            Doris Durand ne fait référence à aucune étude scientifique, aucun rapport d'expertise, aucun communiqué ou article, aucune statistique, rien qui permettrait de connaître, ou du moins de soupçonner, les éléments de dangerosité, les effets nocifs ou le défaut de sécurité des produits visés.

[84]           Nous avons vu ci-haut que tel n’est pas le cas dans notre dossier. Les effets nocifs du jeu sont décrits dans le cas de chaque mineur impliqué. Les reproches faits à Fortnite sont appuyés sur une preuve embryonnaire, mais existante. Il est bien établi maintenant que l’autorisation n’est pas l’étape à laquelle doit se faire une preuve d’expert.

[85]           Les défenderesses font une analyse minutieuse et détaillée des allégations, invitant le Tribunal a calculer le temps effectivement passé par les enfants à jouer à Fortnite et à conclure que ce temps n’est pas excessif. Avec égards, elles invitent ainsi le Tribunal a jouer le rôle du juge du fond.

[86]           Le Tribunal est d’avis que les faits allégués quant aux enfants des demandeurs permettent de prétendre, si on les met en rapport avec les propos de certains experts quant à la création d’une dépendance aux jeux vidéo, et plus particulièrement à celui de Fortnite, que les demandeurs ont un recours valable en responsabilité du fabricant à faire valoir contre les défenderesses. Le recours n’apparait pas frivole ou manifestement mal fondé.

d)     Représentation adéquate des membres

[87]           Estimant que les demandeurs n’ont pas l’intérêt suffisant pour agir étant donné que leurs recours personnels ne remplissent pas le fardeau de démonstration exigé pour satisfaire aux critères de l’article 575 (2), les défenderesses soutiennent que les demandeurs ne peuvent être des représentants valables pour assurer une représentation adéquate des membres.

[88]           Comme nous l’avons vu, le Tribunal estime plutôt que les demandeurs ont une cause défendable à faire valoir. Ils ont donc l’intérêt requis au sens de l’article 85 C.p.c..

[89]           Il n’est pas soulevé par ailleurs que les demandeurs n’ont pas la compétence requise ou qu’il y aurait un conflit entre eux et les membres du groupe[44].

[90]           Le quatrième critère de l’article 575 est satisfait.

  1. Quelles sont les questions qui feront l’objet de l’action collective et quelles sont les conclusions recherchées?

[91]            La modification apportée à la définition du groupe à l’audition permet de répondre aux préoccupations des défenderesses exprimées dans leur Plan d’argumentation. La définition du groupe telle que proposée respecte l’ensemble des paramètres habituels. Elle est précise, n’est pas tributaire de l’issue du litige et permet aux membres de facilement déterminer leur appartenance au groupe par des critères neutres et objectifs.

[92]           Il devra être précisé, quant au Groupe 2, que l’achat a été fait par le mineur seul.

[93]           À la lumière des considérations qui précèdent, les questions qui feront l’objet de l’action collective sont les suivantes :

Quant au Groupe 1 :

a) Les parties défenderesses ont-elles développé, fabriqué, publié, mis-en marché et commercialisé un produit dangereux et nocif pour la santé des membres?

 

b) Les parties défenderesses avaient-elles connaissance ou étaient-elles présumées avoir connaissance des risques et dangers associés à l’utilisation de FORTNITE par les membres?

 

c) Les parties défenderesses ont-elles omis ou négligé de divulguer aux membres les risques et dangers associés à l’utilisation de FORTNITE?

 

d) Les membres connaissait-ils ou étaient-ils en mesure connaître les risques et dangers associés à l’utilisation de FORTNITE?

 

e) Les parties défenderesses ont-elles fourni aux membres toutes les indications nécessaires afin de les protéger contre les risques et dangers associés à l’utilisation de FORTNITE?

 

f) En passant sous silence les risques et dangers associés à l’utilisation de FORTNITE par les membres, les parties défenderesses ont-elles commis une pratique interdite au sens de l’article 215 de la Loi sur la protection du consommateur?

 

g) Les parties défenderesses, par leur stratégie marketing et publicitaire, ont-elles tentés de banaliser ou de nier les risques et dangers associés à l’utilisation de FORTNITE?

 

h) Les parties défenderesses ont-elles porté atteinte aux droits à la vie, à la sécurité et à l’intégrité des membres selon la Charte des droits et libertés de la personne, par leur attitude insouciante et téméraire?

 

i)  Les demandeurs et les membres ont-ils droit à des dommages punitifs en vertu de la Charte ou de la LPC?

 

k) La responsabilité des parties défenderesses à l’égard des parties demanderesses et des membres est-elle conjointe et solidaire?

 

Quant au Groupe 2 :

 

a) Y-a-t-il une disproportion considérable entre les prestations respectives des parties à l’achat de « skins » ou autres articles virtuels par des mineurs?

 

b) Le consentements des membres du Groupe 2 a-t-il été vicié par la lésion à l’utilisation des VBUCKS?

 

  1. Le district judiciaire dans lequel l’action devrait être exercée

[94]           Les demandeurs proposent que l’action collective soit exercée dans le district judiciaire de Montréal. Les adresses des demandeurs sont caviardées. La preuve révèle que R.G. réside dans la Municipalité régionale de comté des Basques, soit probablement dans le district judiciaire de Kamouraska. Cependant, il est affirmé que les deux autres demandeurs sont dans le district de Montréal.

[95]           Les avocats, tant en demande qu’en défense, ont leurs bureaux à Montréal.

[96]           Il y a lieu d’ordonner de procéder dans le district de Montréal.

POUR CES MOTIFS LE TRIBUNAL :

[97]           AUTORISE la modification de la Demande en autorisation d’exercer une action collective;

[98]           ACCUEILLE la demande remodifiée pour autorisation d’exercer une action collective;

[99]           AUTORISE l’action collective proposée aux conditions suivantes :

[100]        ATTRIBUE aux demandeurs M.D., F.N. et J.Z. le statut de représentant aux fins d'exercer l’action collective envisagée pour le compte du Groupe 1 ainsi décrit :

Toutes les personnes physiques ou leur représentant légal ou leur tuteur, domiciliées ou ayant été domiciliées au Québec, qui depuis le 1er septembre 2017, ont développé (…) après avoir joué au jeu vidéo « FORTNITE BATTLE ROYALE » développé, fabriqué, publié, mis en marché et commercialisé par les Défenderesses, une dépendance, soit une perte de contrôle sur le jeu ou une priorisation de celui-ci, ayant eu des répercussions dommageables sur l’une ou l’autre des sphères d’activités suivantes:

 

a. activités personnelles;

b. activités familiales;

c. activités sociales;

d. activités éducatives;

e. activités professionnelles; ou

f. autres domaines importants du fonctionnement.

[101]       ATTRIBUE aux demandeurs M.D., F.N. et J.Z. le statut de représentant aux fins d'exercer l’action collective envisagée pour le compte du Groupe 2 ainsi décrit :

Toutes les personnes physiques domiciliées ou ayant été domiciliées au Québec, qui alors qu’elles étaient âgées de moins de 18 ans, ont fait seules des achats intégrés à l’aide de VBUCKS, ou leurs tuteurs ou représentants légaux.

[102]       IDENTIFIE comme suit les principales questions de faits et de droit qui seront traitées collectivement :

Quant du Groupe 1 :

a) Les parties défenderesses ont-elles développé, fabriqué, publié, mis-en marché et commercialisé un produit dangereux et nocif pour la santé des membres?

b) Les parties défenderesses avaient-elles connaissance ou étaient-elles présumées avoir connaissance des risques et dangers associés à l’utilisation de FORTNITE par les membres?

c) Les parties défenderesses ont-elles omis ou négligé de divulguer aux membres les risques et dangers associés à l’utilisation de FORTNITE?

d) Les membres connaissaient-ils ou étaient-ils en mesure connaître les risques et dangers associés à l’utilisation de FORTNITE?

e) Les parties défenderesses ont-elles fourni aux membres toutes les indications nécessaires afin de les protéger contre les risques et dangers associés à l’utilisation de FORTNITE?

f) En passant sous silence les risques et dangers associés à l’utilisation de FORTNITE par les membres, les parties défenderesses ont-elles commis une pratique interdite au sens de l’article 215 de la Loi sur la protection du consommateur?

g) Les parties défenderesses, par leur stratégie marketing et publicitaire, ont-elles tenté de banaliser ou de nier les risques et dangers associés à l’utilisation de FORTNITE?

h) Les parties défenderesses ont-elles porté atteinte aux droits à la vie, à la sécurité et à l’intégrité des membres selon la Charte des droits et libertés de la personne, par leur attitude insouciante et téméraire?

i)  Les demandeurs et les membres ont-ils droit à des dommages punitifs en vertu de la Charte ou de la LPC?

k) La responsabilité des parties défenderesses à l’égard des parties demanderesses et des membres est-elle conjointe et solidaire?

Quant au Groupe 2 :

a) Y-a-t-il une disproportion considérable entre les prestations respectives des parties à l’achat de « skins » ou autres articles virtuels par des mineurs?

b) Le consentements des membres du Groupe 2 a-t-il été vicié par la lésion à l’utilisation des VBUCKS?

[103]       IDENTIFIE comme suit les conclusions recherchées qui s'y rattachent :

a) ACCUEILLIR la demande introductive d'instance des demandeurs;

 

b) CONDAMNER les défenderesses conjointement et solidairement à payer aux demandeurs des dommages et intérêts à être évalués par le Tribunal avec intérêt depuis la date de signification de la présente demande ainsi que l’indemnité additionnelle de l’article 1619 C.c.Q.;

 

c) CONDAMNER les défenderesses conjointement et solidairement à payer aux demandeurs des dommages punitifs à être évalués par le Tribunal;

 

d)  DÉCLARER la nullité de tous les achats intégrés de VBUCKS effectués par les enfants des demandeurs alors qu’ils étaient âgés de moins de 18 ans et CONDAMNER les défenderesses à la restitution aux demandeurs de l’ensemble des prestations versées dans le cadre de ces achats, avec les intérêts et l’indemnité additionnelle depuis la date de signification de la présente demande;

 

e)      CONDAMNER les défenderesses à payer aux demandeurs les dommages punitifs à être évalués par la Cour;

f)       CONDAMNER les défenderesses conjointement et solidairement à payer à chacun des membres du Groupe 1 des dommages et intérêts à être évalués par le Tribunal, avec intérêts et l’indemnité additionnelle depuis la date de signification de la présente demande;

g)     DÉCLARER la nullité de tous les achats intégrés de VBUCKS effectués par les enfants membres du Groupe 2 et CONDAMNER les défenderesses à la restitution aux membres du Groupe 2 de l’ensemble des prestations versées dans le cadre de ces achats, avec les intérêts et l’indemnité additionnelle depuis la date de signification de la présente demande;

h)     CONDAMNER les défenderesses à payer aux membres des Groupes 1 et 2 les dommages punitifs à être évalués par la Cour;

i)       ORDONNER que les dommages précités fassent l'objet d'indemnisations collectives, conformément aux articles 595 à 598 du Code de procédure civile sauf pour les sommes qui découlent de la restitution des prestations aux membres du Groupe 2 qui feront l’objet d’une indemnisation individuelle;

j)       LE TOUT, avec les frais, comprenant les frais de publication des avis.

 

[104]       DÉCLARE qu'à moins d'exclusion, les membres seront liés par tout jugement à intervenir sur l’action collective de la manière prévue par la Loi;

[105]       FIXE le délai d'exclusion à trente (30) jours après la date de publication de l'avis aux membres, délai à l'expiration duquel les membres qui ne se seront pas prévalus des moyens d'exclusion seront liés par tout jugement à intervenir;

[106]       ORDONNE la publication d'un avis aux membres selon les termes et modalités que le Tribunal verra à déterminer, après avoir entendu les parties;

[107]       LE TOUT, avec frais, incluant les frais de publication des avis aux membres.

 

 

 

 

__________________________________SYLVAIN LUSSIER, J.c.s.

Me Alessandra Esposito Chartrand

Me Jean-Philippe Caron

Calex Legal inc.

Avocats des demandeurs

 

Me Rory McGovern

Avocat des demandeurs

 

Me Faiz Munir Lalani

Me Nick Rodrigo

Davies Ward Phillips & Vineberg S.E.N.C.R.L. s.e.n.c.

Avocats des défenderesses

 

Dates d’audience :

6 et 7 juillet 2022

 

 

 


[1]  « Fortnite ».

[2]  Paragr. 15 de la Demande modifiée pour autorisation d’exercer une action collective.

[3]  RLRQ c P-40.1; la « LPC ».

[4]  Khader c. SNC-Lavalin inc., 2021 QCCA 1296.

[5]  Par extension, École communautaire Belz c. Bernard, 2021 QCCA 905.

[6]  Charbonneau c. Location Claireview, 2022 QCCA 659, paragr. 27.

[7]  Société québécoise de gestion collective des droits de reproduction (Copibec) c. Université Laval, 2017 QCCA 199, paragr. 109 et 132.

[8]  Aux paragr. 172 et suivants de la demande en autorisation modifiée.

[9]  Infineon Technologies AG c. Option consommateurs, 2013 CSC 59.

[10]  Vivendi Canada inc. c. Dell’Aniello, 2014 CSC 1.

[11]  L’Oratoire Saint-Joseph du Mont-Royal c. J.J., 2019 CSC 35.

[12]  2020 CSC 30.

[13]  Hollick c. Toronto (Ville de), 2001 CSC 68, paragr. 27.

[14]  Durand c. Subway Franchise Systems of Canada, 2020 QCCA 1647, paragr. 53.

[15]  Daigle c. Club de golf de Rosemère, 2019 QCCS   5801, paragr. 17.

[16]  Desjardins Cabinet de services financiers inc. c. Asselin, 2020 CSC 30, paragr. 25 et 27.

[17]  Durand c. Subway Franchise Systems of Canada, 202 QCCA 1647, par.52

[18]  Infineon Technologies AG c. Option consommateurs, 2013 CSC 59, paragr. 67 ; Harmegnies c. Toyota Canada inc., 2008 QCCA 380.

[19]  Li c. Equifax inc., 2019 QCCS 4340, para. 21 et 41

[20]  Desjardins Cabinet de services financiers inc. c. Asselin, 2020 CSC 30, paragr. 27; L’Oratoire Saint-Joseph du Mont-Royal c. J.J., 2019 CSC 35, paragr. 55 : Benamor c. Air Canada, 2020 QCCA 1597, paragr. 42 et 48.

[21]  Davies c. Air Canada, 2022 QCCA 1551.

[23]  Aux paragr. 73 à 101.

[24]  Aux paragr. 102 à 130.

[25]  Aux paragr. 131 à 179.

[26]  « L’OMS », une des institutions spécialisées de l’ONU.

[27]  Pièce P-4.

[28]   Pièce P-5: Kane, S. (2019). More Evidence Fortnite Is Bad for Your Child’s Health. Psych Central. Retrieved on October 1, 2019, from https://psychcentral.com/lib/more-evidence-fortnite-is-bad-for-your-childs-health/

[29]  Pièce P-6, https://www.bloombeR.G..com/news/articles/2018-11-27/fortnite-addiction-prompts-parents-to-turn-to-video-game-rehab

[30]   Pièce P-8, de Ryan Hanson, Executive Director of Caron Renaissance, Behind the Numbers: Fortnite May Be as Addictive as Heroin, July 23, 2019.

[31]  Oratoire St-Joseph, paragr. 59; Durand c. Subway Franchise Systems of Canada, 2020 QCCA 1647, paragr. 53.

[32]  2021 QCCS 367.

[33]  EYB 2021-409432 (C.A.).

[34]  Pièce P-5, page 1.

[35]  Bonneau c. RNC Média inc., 2017 QCCA 11; voir Arthur c. Gravel, 1991 CanLII 3107 (QC CA).

[36]  1985 CanLII 62 (CSC), [1985] 1 R.C.S. 146, paragr. 10.

[37]  Intervet Canada Corp. c. Gagnon, 2020 QCCA 248.

[38]  Plus particulièrement aux paragr. 29, 31 et 55 de la Demande remodifiée pour exercer une action collective.

[39]  Pièce P-11.

[40]  Dont le lien se retrouve à la pièce P-12.

[41]  Pièce P-12.

[42]  Paragr. 52 de leur plan d’argument.

[43]  Durand c. Dermatech, 2009 QCCS 3874.

[44]  Tenzer c. Huawei Technologies Canada Co. Ltd., 2020 QCCA 633.

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