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Décision

Meunier c. Francoeur

2021 QCTAL 2220

 

 

TRIBUNAL ADMINISTRATIF DU LOGEMENT

Bureau dE Longueuil

 

No dossier :

514113 37 20200313 G

No demande :

2982330

 

 

Date :

22 janvier 2021

Devant le juge administratif :

Marc C. Forest

 

Bruno Meunier

 

Lucie Gervais

 

Locataires - Partie demanderesse

c.

Robin Francoeur

 

Locateur - Partie défenderesse

 

D É C I S I O N

 

 

Introduction

[1]      Le locateur et les locataires sont liés par bail qui s'est terminé au mois juin 2020. Le loyer indiqué au bail est de 680 $.

[2]      Les locataires réclament une diminution de loyer puisqu'ils disent qu'ils n'ont pas la pleine jouissance de leur logement parce que le locateur n'a pas fait les travaux qu'il devait faire.

[3]      Ils réclament également des dommages-intérêts de 3 000 $, des dommages punitifs ou exemplaires de 5 000 $ ainsi que la résiliation du bail.

Questions juridiques

[4]      Le bail doit-il être résilié ?

[5]      Les locataires ont-ils droit aux dommages qu’ils réclament ?

Analyse

[6]      Les locataires expliquent au Tribunal les problèmes qu'ils vivent à leur logement comme suit :

[7]      Les locataires expliquent qu’en 2015-1016, ils ont aperçu des bulles sur un mur mais la situation ne s’est pas aggravée.


[8]      Ensuite en mars 2020, il y aurait eu une infiltration d’eau et à chaque averse, l’eau pénétrait au logement.

[9]      Ils ne soulèvent pas que certains de leurs biens ont été endommagés.

[10]   En réponse aux arguments des locataires, le locateur expose sa version des faits.

[11]   Le locateur ne se rappelle nullement que les locataires lui auraient dit qu’il y avait une infiltration d’eau avant de recevoir la mise en demeure.

[12]   Le locateur avait préalablement en novembre, procédé à un calfeutrage extérieur de son immeuble.

[13]   Le locataire confirme que la porte-patio coulait depuis quelques mois.

[14]   D’ailleurs les photos datent de mars 2020 et non avant.

[15]   Le Tribunal croit nécessaire de reproduire les articles pertinents du Code civil du Québec;

« 1851. Le louage, aussi appelé bail, est le contrat par lequel une personne, le locateur, s'engage envers une autre personne, le locataire, à lui procurer, moyennant un loyer, la jouissance d'un bien, meuble ou immeuble, pendant un certain temps.

Le bail est à durée fixe ou indéterminée. »

« 1854. Le locateur est tenu de délivrer au locataire le bien loué en bon état de réparation de toute espèce et de lui en procurer la jouissance paisible pendant toute la durée du bail.

Il est aussi tenu de garantir au locataire que le bien peut servir à l'usage pour lequel il est loué, et de l'entretenir à cette fin pendant toute la durée du bail. »

« 1855. Le locataire est tenu, pendant la durée du bail, de payer le loyer convenu et d'user du bien avec prudence et diligence. »

« 1863. L'inexécution d'une obligation par l'une des parties confère à l'autre le droit de demander, outre des dommages-intérêts, l'exécution en nature, dans les cas qui le permettent. Si l'inexécution lui cause à elle-même ou, s'agissant d'un bail immobilier, aux autres occupants, un préjudice sérieux, elle peut demander la résiliation du bail.

L'inexécution confère, en outre, au locataire le droit de demander une diminution de loyer; lorsque le tribunal accorde une telle diminution de loyer, le locateur qui remédie au défaut a néanmoins le droit au rétablissement du loyer pour l'avenir. »

[16]   Concernant la résiliation de bail, la question n’est plus pertinente puisque les locataires ayant quitté en juin 2020, le bail se trouve à avoir été résilié par déguerpissement des locataires selon la loi.

Diminution de loyer

[17]   Au sujet de la diminution de loyer, le Tribunal souscrit à l'opinion de Me Gilles Joly dans l'affaire Gagné c. Larocque :

« Le recours en diminution de loyer a pour but de rétablir l'équilibre dans la prestation de chacune des parties au bail; lorsque le montant du loyer ne représente plus la valeur de la prestation des obligations rencontrées par le locateur parce que certains services ne sont plus dispensés ou que le locataire n'a plus la pleine et entière jouissance des lieux loués, le loyer doit être réduit en proportion de la diminution subie.

Il s'agit en somme de rétablir le loyer au niveau de la valeur des obligations rencontrées par le locateur par rapport à ce qui est prévu au bail; la diminution ainsi accordée correspond à la perte de la valeur des services ou des obligations que le locateur ne dispense plus. Il ne s'agit donc pas d'une compensation pour des dommages ou des inconvénients que la situation peut causer. »

[18]   Avec la preuve obtenue et l'application de la loi, le Tribunal croit que les locataires ont droit à une diminution de loyer. Les locataires n'ont pas la pleine jouissance de leur logement dû à une situation particulière que le locateur ne veut pas ou tarde à régler. Le Tribunal octroie aux locataires, à titre de diminution de loyer pour couvrir toute la période couverte par la réclamation, un montant forfaitaire de 500 $. Durant cette période, les locataires n'ont pu jouir de leur logement comme ils auraient dû. Selon les photos, il est évident pour le Tribunal qu’il y avait une apparence de trou pouvant laisser pénétrer l’eau ou l’air extérieur.


Mise en demeure

[19]   L'honorable juge Luc Lefebvre de la Cour supérieure, dans la cause Bourlard c. Nova transtech inc.[1], mentionnait que l'envoi d'une mise en demeure est obligatoire si l'on veut forcer un débiteur à agir et lui réclamer des dommages s'il ne fait rien :

« [15] S'il est vrai que les défendeurs n'étaient pas satisfaits de ses services, ils auraient dû agir conformément à l'article 1595 C.c.Q. qui énonce ce qui suit:

« 1595. La demande extrajudiciaire par laquelle le créancier met son débiteur en demeure doit être faite par écrit.

Elle doit accorder au débiteur un délai d'exécution suffisant, eu égard à la nature de l'obligation et aux circonstances; autrement, le débiteur peut toujours l'exécuter dans un délai raisonnable à compter de la demande. »

[16] Or, ils n'ont rien fait.

[17] En conclusion, le Tribunal estime que le demandeur Bourlard a droit au montant réclamé, sauf en regard de la première facture au sujet de laquelle le Tribunal ne lui accorde que 600 $, soit le montant convenu initialement. Le demandeur a ainsi droit à une somme de 7 300 $. La demande reconventionnellement contre lui est rejetée pour défaut d'avoir transmis l'avis requis et pour faute de preuve. »

[20]   Les locataires ont transmis une mise en demeure au locateur le 20 mars 2020 afin de dénoncer la situation qu'ils vivent. Il est impossible de reprocher à quelqu'un de ne pas faire quelque chose, s'il ne sait pas qu'il y a quelque chose à régler. Comme il n'y a jamais eu de mise en demeure transmise au locateur avant cette date, le Tribunal ne peut ordonner à celui-ci de rembourser aux locataires une perte de jouissance de leur logement avant cette date.

Dommages-intérêts pour troubles et inconvénients

[21]   Concernant les dommages-intérêts réclamés par les locataires pour troubles et inconvénients, le Tribunal conclut que la preuve soumise ne permet pas au Tribunal d'octroyer des dommages à ce chapitre. Aucune preuve ne permet de conclure que les locataires ont subi des dommages. Les locataires ont peut-être subi des dommages, mais ils n’ont aucun reçu ou pièce justificative pour donner suite à leur demande.

Dommages punitifs ou exemplaires

[22]   Dans la cause Nalder c. Rogers communications inc.[2], la Cour du Québec mentionnait ceci concernant les dommages punitifs ou exemplaires :

« [87] Il y a atteinte illicite à un droit ou une liberté reconnus par la Charte des droits et libertés de la personne lorsque l'auteur de l'atteinte à un état d'esprit qui dénote une volonté de causer les conséquences de sa conduite fautive ou s'il s'agit en toute connaissance des conséquences immédiates ou probables que sa conduite engendrera.

Ce critère est moins strict que l'intention particulière, mais dépasse, toutefois, la simple négligence. Ainsi, l'insouciance dont fait preuve un individu quant aux conséquences de ses actes fautifs, si déréglée et téméraire soit-elle, ne satisfera pas, à elle seule, à ce critère.

[88] Comme la preuve ne révèle aucune intention malveillante de la part de Rogers, ni de négligence équivalant à une atteinte intentionnelle, le montant réclamé à titre de dommages punitifs n'est pas accordé. »

[23]   Pour avoir droit à une condamnation à des dommages punitifs ou exemplaires, les locataires doivent prouver, selon la jurisprudence, qu'il y a eu de la mauvaise foi de la part du locateur, de façon intentionnelle, dans l'intérêt marqué de causer des dommages aux locataires.

[24]   Le Tribunal n'a pas cette preuve.


POUR CES MOTIFS, LE TRIBUNAL :

[25]   CONSTATE la résiliation du bail;

[26]   ACCUEILLE la demande des locataires;

[27]   CONDAMNE le locateur à payer aux locataires la somme de 500 $, plus les intérêts au taux légal et l'indemnité additionnelle prévue à l'article 1619 du Code civil du Québec depuis le 13 mars 2020, plus les frais de justice de 101 $.

 

 

 

 

 

 

 

 

Marc C. Forest

 

Présence(s) :

les locataires

le locateur

Date de l’audience :  

16 novembre 2020

 

 

 


 



[1]    500-17-043291-080, 31 janvier 2013 C.S.

[2]    500-22-207716-138, 9 juin 2014

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