Union des employés et employées de service, section locale 800 et Services ménagers Roy ltée (grief syndical) | 2021 QCTA 570 |
TRIBUNAL D’ARBITRAGE
ME DENIS NADEAU, AD.E.
ARBITRE
UNION DES EMPLOYÉS ET EMPLOYÉES DE SERVICE,
SECTION LOCALE 800
ET
LES SERVICES MÉNAGERS ROY LTÉE.
SIGNATURE, SERVICE D’ENTRETIEN
GDI SERVICES (QUÉBEC) SEC
GSF CANADA INC.
CONCIERGERIE SPEICO INC.
GRIEF DÉCLARATOIRE
LE 15 NOVEMBRE 2021
SENTENCE ARBITRALE
APERÇU
Des clients de différentes entreprises d’entretien ménager de la région de Montréal ont informé celles-ci qu’elles exigeront, à compter de dates imminentes, une attestation de leur part à l’effet que les personnes salariées qui seront affectées à leurs édifices sont « adéquatement vaccinées »
Les personnes salariées de ces entreprises d’entretien sont toutes représentées par le syndicat.
Les employeurs au présent dossier et le syndicat ont convenu de soumettre, par le biais d’un grief déclaratoire, une série de questions quant à la conformité en droit de cette exigence liée au statut vaccinal. Je souligne que les clients concernés ne sont pas parties au présent dossier.
Essentiellement, la partie syndicale soulève que les employeurs ne peuvent recueillir les informations relatives au statut vaccinal de tous leurs salariés car ceci contreviendrait au droit fondamental au respect de leur vie privée garanti à l’article
Afin de soutenir la légalité de l’exigence requise, les employeurs invoquent que cette condition, devenue une exigence normale du travail à accomplir, s’appuie sur une série d’obligations imposées, entre autres, aux employeurs et aux travailleurs en vertu de la Loi sur la santé et la sécurité du travail.
Après analyse, je suis d’avis que l’exigence de fournir une attestation vaccinale porte atteinte au droit au respect de la vie privée prévu à l’article
La seconde partie de la décision détermine les mécanismes de la convention collective qui seront applicables à l’égard des personnes salariées qui ne fourniront pas l’attestation vaccinale requise et qui désirent travailler dans des édifices où cette condition n’est pas exigée.
I) LE CONTEXTE
1. Dans le cadre d’un grief de type déclaratoire, les parties ont convenu d’une série d’admissions jointes à l’Annexe A de la présente décision. Elles ont également soumis diverses situations factuelles ayant un lien avec la situation à l’étude. On retrouve le texte de ces situations à l’annexe B de la sentence.
2. Avant de présenter les positions respectives des parties, il importe de souligner certains points :
a) Les parties ont convenu que, « vu le contexte exceptionnel de la pandémie », la présente sentence arbitrale ne constitue pas un précédent pour l’application des articles de la convention collective ;
b) Eu égard à la situation factuelle E (annexe B), impliquant un client du secteur de la santé (CISSS) visé par le Décret 1276-2021, le syndicat et les employeurs conviennent que les salariés qui ne seraient pas adéquatement protégés au sens de ce Décret ou qui n’en fourniraient pas la preuve ne pourraient accéder à son édifice, et, qu’en conséquence, ces salariés seront mis en congé administratif ans solde ;
c) Relativement à l’exigence de la preuve de statut vaccinal, les employeurs reconnaissent que les refus de vaccination fondés sur des raisons médicales (handicap) ou des motifs religieux feront l’objet d’un traitement particulier et individualisé. La présente sentence ne traitera donc pas de ces cas spécifiques.
II) ANALYSE
3. Les parties ont convenu d’une série de questions précises qui sont reproduites à l’Annexe C. Essentiellement, elles sont de deux ordres. Celles-ci seront examinées de façon séparée :
(1) la conformité en droit de la cueillette obligatoire, par les employeurs, du renseignement relatif au statut vaccinal auprès de leurs salariés, en totalité ou en partie, en raison des exigences en ce sens posées par certains de leurs clients ;
(2) la mise en application de la convention collective à l’égard des personnes salariées qui ne pourront attester de leur statut vaccinal en raison de leur refus d’être adéquatement vaccinées.
PARTIE I - Collecte du statut vaccinal
4. D’entrée de jeu, je souligne que les employeurs n’exigent pas, eux-mêmes, de la part de leurs salariés une preuve de statut vaccinal pour travailler au sein de leurs entreprises respectives. Tel que mentionné en introduction, et mis en lumière dans les situations factuelles exposées à l’Annexe B, ce sont certains clients des employeurs qui exigent (ou exigeront sous peu) que toutes les personnes appelées à travailler dans leurs locaux soient entièrement vaccinés. À cette fin, ces clients exigent que les employeurs attestent, par écrit, du respect de cette exigence pour les personnes salariées qui seront affectées à leurs édifices.
5. Cette précision liminaire est importante car elle met en relief toute la difficulté du présent litige, soit son cadre tripartite. Les clients des employeurs ne sont pas visés par la convention collective et aucun n’a été entendu lors de l’audience. Évidemment, le présent tribunal d’arbitrage n’a aucune juridiction à leur égard.
6. Ceci étant, les employeurs sont liés par des contrats avec ces clients et sont assujettis aux conditions et exigences que ces derniers formulent quant à l’exécution de leurs contrats. L’exigence vaccinale en est une qui s’est ajoutée récemment dans le contexte de la pandémie de la COVID-19. Il est admis par les parties que le défaut de respecter une telle exigence est susceptible de mener à la résiliation du contrat liant un employeur et un client ; ceci impliquant que tous les salariés affectés à ce contrat soient soumis à la procédure de mise à pied.
7. La partie syndicale allègue que les employeurs ne peuvent obtenir les informations liées au statut vaccinal de la part de toutes les personnes salariées qu’ils emploient sans exception compte tenu, notamment, du droit à la vie privée prévu à l’article
8. C’est à cet égard que la principale difficulté se pose. La partie patronale n’étant pas celle qui exige formellement la preuve de vaccination complète, elle allègue qu’elle ne peut justifier une exigence qui n’est pas la sienne, et ce, au-delà de la preuve factuelle (Annexe B), des admissions (Annexe A) et des principes juridiques applicables. Ainsi, à son avis, l’analyse de cette première question devrait plutôt se limiter au caractère nécessaire de l’obtention du renseignement lié au statut vaccinal, sans aborder en profondeur la question de la justification posée par l’exigence des clients puisque ces derniers ne sont ni parties, ni intervenants au présent litige.
9. Je ne suis pas d’accord avec cette proposition. Tout en reconnaissant que l’exigence de la preuve du statut vaccinal n’émane pas des employeurs, ce sont néanmoins ces derniers qui en font dorénavant une exigence du travail à accomplir. Certes, la marge des employeurs à cet égard est mince, étant entendu que leurs clients en font une condition d’importance, pouvant mener dans certains cas, à la résiliation de leurs contrats.
10. En somme, sans en être les auteurs, sans en être la partie qui énonce initialement l’exigence de la preuve vaccinale, les employeurs, sur le plan juridique, partagent néanmoins celle-ci à l’égard de leurs personnes salariées et, en cas de contestation, ne peuvent invoquer qu’elle n’émane pas d’eux et qu’ils ne peuvent la justifier au sens de la Charte. Certes, le cadre qui a été retenu pour la présente audition est particulier, mû par une certaine urgence et une volonté des parties d’avoir une décision déclaratoire afin d’éviter, en aval, une multitude de contestations.
11. Une preuve détaillée concernant les particularités de chaque client aurait requis, tous en sont conscients, une audience de plus longue durée que la seule journée qui y a été consacrée.
Je tiens donc pour acquis que les arguments et motifs invoqués par la partie patronale afin de justifier l’exigence de la preuve vaccinale seront examinés à la même enseigne que si cette exigence provenait des présents employeurs.
12. Autre point important à souligner : les parties ont convenu des questions posées dans le cadre de la présente décision (Annexe C). En premier lieu, celles-ci ont trait à la « collecte du statut vaccinal » que les employeurs veulent effectuer afin de se conformer aux exigences de certains de leurs clients à ce sujet. La partie syndicale allègue principalement que cette cueillette n’est pas nécessaire et constitue une entrave à la vie privée interdite par l’article
13. J’insiste sur ce point afin de faire ressortir que la présente décision ne soulève pas, du moins directement, la question du droit d’exiger la vaccination eu égard à d’autres droits fondamentaux prévus à la Charte, dont ceux à l’intégrité et à la liberté de la personne. (art. 1) Tout en invoquant que la condition de passeport vaccinal implique inévitablement la prise d’un vaccin, et donc une atteinte à l’intégrité physique et à la liberté d’une personne, la partie syndicale n’a pas abordé le présent grief d’interprétation sous l’angle d’une remise en cause directe de l’obligation de vaccination, même si ses arguments entrelacent parfois vie privée et intégrité physique. En raison du cadre bien déterminé du présent grief d’interprétation, je me prononcerai quant à l’argument principal soulevant l’entrave alléguée au droit à la vie privée en raison de l’exigence de passeport vaccinal, tout en soulignant, à l’occasion, les liens inévitables entre cette condition et l’intégrité physique et la liberté des personnes concernées. Toutefois, la présente décision ne tranche pas cet aspect.
14. Dernière remarque liminaire : contrairement à d’autres dossiers examinés ailleurs au Canada et aux États-Unis, le fait qu’une personne salariée ne puisse démontrer son statut vaccinal n’implique pas, du moins automatiquement, qu’elle perdra son travail ou en sera suspendue. En effet, je le rappelle, les présents employeurs ne requièrent pas une telle preuve de vaccination, sauf à l’égard de leurs clients qui en font une condition d’accès à leurs locaux. La preuve n’a pas révélé le pourcentage représenté par ces clients pour les présents employeurs. J’ai toutefois compris, lors des plaidoiries, que les personnes salariées qui ne produiront pas une preuve de vaccination pourront, en principe, être affectés à d’autres clients (contrats) où le passeport vaccinal n’est pas exigé et ce, en fonction des règles prévues à la convention collective. Cependant, les parties ne s’entendent pas sur les mécanismes alors applicables. J’examinerai cette question en seconde partie de la sentence.
15. Je ne crois pas nécessaire d’insister sur le caractère privé de toute information relative au statut vaccinal d’une personne. Il s’agit là de renseignements confidentiels ou personnels, en lien direct avec l’état de santé d’une personne, et qui font partie de la sphère de sa vie personnelle ou privée. (Godbout c. Ville de Longueuil,
16. La partie patronale allègue que le statut vaccinal d’une personne n’est pas un renseignement dont la simple collecte porte atteinte de façon importante à la vie privée de cette dernière. Elle invoque le fait que la vaccination s’est déroulée largement dans des centres publics et ouverts - dont, à certains endroits, dans les locaux d’entreprises - que plusieurs personnes ont révélé leur vaccination en publiant des photos sur les réseaux sociaux et en ont fait part à leurs connaissances. En somme, je retiens de cette proposition que si le renseignement est de nature privée, plusieurs personnes ont renoncé à ce caractère. Évidemment, une telle attitude de la part de personnes, aussi nombreuses ont-elles été, n’est pas interdite. Cependant, celle-ci n’implique pas que, pour les autres personnes ayant préféré la discrétion, la nature purement privée de ces renseignements en lien avec le statut vaccinal serait amoindrie, voire annihilée.
17. Par ailleurs, deux tribunaux judiciaires, dont la Cour supérieure du Québec, ont décidé que des questions posées à des personnes quant à leur statut vaccinal ne représentaient pas une « intrusion déraisonnable dans le vie privée » de celles-ci (R. c. Barnabé-Paradis,
18. À mon avis, chaque personne salariée travaillant pour les différents employeurs du présent dossier peut invoquer la protection prévue à l’article
19. L’atteinte à un droit protégé par la Charte est donc établie. Toutefois, la démarche d’analyse n’est pas complétée. Dans le récent arrêt Ward c. Québec (Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse),
Les libertés et droits fondamentaux s’exercent dans le respect des valeurs démocratiques, de la laïcité de l’État, de l’ordre public et du bien être général des citoyens du Québec.
La loi peut, à cet égard, en fixer la portée et en aménager l’exercice.
20. Au nom de la majorité, le juge en chef Wagner et la juge Côté précisaient :
[38] Le premier alinéa de cet article constitue « une indication de la manière d’interpréter l’étendue [des] libertés et droits fondamentaux [garantis par la Charte québécoise » (Ford c. Québec (Procureur général),
21. La référence aux propos repris au Journal des débats par le ministre de la Justice de l’époque, Me Marc-André Bédard, est intéressante et a été effectuée à d’autres occasions par la Cour suprême. Dans l’arrêt Bruker c. Marcovitz, mentionné dans l’extrait précité de Ward, la juge Abella, au nom de la majorité de la Cour, écrivait :
[76] Au Québec, l’art.
[77] L’article 9.1 confirme le principe selon lequel la revendication du droit à la liberté de religion doit être conciliée avec les droits, les valeurs et le préjudice opposés. Une appréciation des droits et valeurs opposés semble correspondre à l’intention du législateur au moment de l’adoption de l’art. 9.1 en 1982, comme l’indique le propos suivant du ministre de la Justice du Québec de l’époque, Me Marc‑André Bédard :
L’article 9.1 a pour objet d’apporter un tempérament au caractère absolu des libertés et droits édictés aux articles 1 à 9 tant sous l’angle des limites imposées au titulaire de ces droits et libertés à l’égard des autres citoyens, ce qui est le cas pour le premier alinéa . . .
(Journal des débats : Commissions parlementaires, 3e sess., 32e lég., 16 décembre 1982, p. B‑11609)
(Voir Amselem, [
22. Au-delà de l’intérêt même de cet arrêt Bruker, deux points sont à retenir de la référence à cette décision. D’une part, l’arrêt rappelle l’importance de concilier les droits fondamentaux (dans cette affaire la liberté de religion invoquée par un mari qui refusait d’accorder le get à son épouse) et « les droits, valeurs et le préjudice opposés ». En second lieu, la juge Abella mentionne que « [S]eul le premier paragraphe de l’art. 9.1 s’applique » (mes italiques) dans le cadre de l’exercice de pondération prévu par la Charte. Cette précision est tout particulièrement pertinente à retenir dans le cadre du présent dossier qui implique des parties privées et non pas, comme c’est souvent le cas dans des litiges impliquant les droits fondamentaux, des actions législatives.
23. Cette référence, par la juge Abella, au seul premier alinéa de l’article
24. Selon le professeur Chevrette :
Il semble bien que le premier alinéa de l’article 9.1 ait une portée autonome et que ce serait en contraindre indûment le texte que d’y voir un simple objectif, réalisable uniquement par l’instrument prévu au deuxième. (…) S’il en est ainsi, l’article 9.1, en son premier alinéa, dans la mesure où il dispense de l’appui de la loi, ne viserait que des rapports de droit privé. Sur ce point, et même s’il ne s’est pas clairement expliqué, nous croyons que le ministre [de la Justice] ayant parrainé l’adoption de cet article a eu raison de conclure que son alinéa premier référait aux atteintes, par un citoyen, aux droits d’autres citoyens.
(mes italiques, p. 466)
25. L’auteur reconnaît toutefois :
Au fond, tout serait affaire de degré bien plus que de différence de nature. Une limitation aux droits et libertés en contexte de rapports privés nécessiterait un support légal moins précis que celui exigé par la notion de loi du deuxième alinéa (…) (p. 467, référence omise)
26. Je souligne que ce nécessaire « support légal » auquel le professeur Chevrette réfère a été invoqué par la partie patronale afin de justifier, au sens de l’article
27. L’analyse des arrêts Ward, Bruker, Amselem et Aubry - toutes des décisions provenant du Québec, impliquant seulement des parties privées et invoquant des droits fondamentaux prévus à la Charte des droits et libertés du Québec - confirme l’approche privilégiée par le doyen Chevrette. Contrairement aux dossiers impliquant une intervention de l’État - expression utilisée ici au sens large - où la justification et pondération des droits doivent être examinés, par analogie, à la lumière du test de l’article 1 développé initialement par l’arrêt R. c. Oakes,
28. Tel que rappelé récemment par la majorité de la Cour suprême dans Ward et se référant à la juge Abella dans Bruker, « [T]oute revendication d’un droit doit donc être « conciliée avec les droits, les valeurs et le préjudice opposés ». (Ward, par. 38) Comme l’écrivait la juge Abella, l’exercice est nécessairement « complexe, nuancé et tributaire des faits propres à chaque espèce (…) ». (Bruker, par. 78)
29. Eu égard au texte actuel de l’article
Quant au concept d’ordre public, il ne paraît guère poser de difficulté. Quand il est utilisé avec d’autres concepts, par exemple ceux de sécurité nationale, de sûreté publique, de santé ou de morale publique, on peut trouver nécessaire de les distinguer des autres. Mais employé seul, c’est un concept à portée indiscutablement très large, qui inclut fort probablement tous les autres ci-haut mentionnés de même que le bon fonctionnement du système judiciaire, la prévention du crime et la protection des droits et libertés d’autrui. (p. 472, références omise, mes italiques)
30. À propos de la notion de « bien-être général », l’auteur Chevrette expliquait :
Une interprétation large du concept d’ordre public comme celle retenue plus haut laisse peut-être assez peu de contenu au concept de bien-être général. On peut néanmoins y rattacher, outre le contrôle de la santé publique, des mesures de type socio-économique - expropriation, sécurité du travailleur par exemple - qu’une conception traditionnelle de l’ordre public pourrait ne pas englober et qui pourraient éventuellement se trouver en conflit avec une conception, elle aussi traditionnelle, de la propriété privée et de la libre jouissance de ses biens. (p. 472, mes italiques)
31. Enfin, la référence « aux citoyens de Québec », le professeur Chevrette écrivait « qu’elle ne désigne rien d’autre que les personnes se trouvant au Québec » soit « le bien-être de la population ou plus exactement des personnes. » (p.473)
32. À mon avis, ce cadre théorique, que je partage entièrement, est important. Il permettra, en effet, de mieux évaluer la question soumise. Je vais d’abord examiner les motifs invoqués par les employeurs afin de justifier l’exigence à l’étude.
33. J’ai souligné précédemment que ce ne sont pas les présents employeurs qui ont formulé ces motifs, mais plutôt certains de leurs clients. Néanmoins, pour les raisons déjà exprimées, ces motifs seront examinés à la même enseigne que si cette exigence provenait des présents employeurs.
34. Outre la situation factuelle E impliquant un client régi par le Décret 1276-2021 (« Décret de la santé »), soit un Centre intégré de santé et de services sociaux (CISS) où, comme je l’ai déjà mentionné, les parties conviennent que les salariés qui ne seraient pas adéquatement protégés au sens du Décret seront mis en congé administratif sans solde (situation factuelle E), les parties ont déposé quatre situations factuelles. (Annexe B) Deux des clients concernés (leur identité n’a pas été divulguée), sont visés par les exigences de vaccination contre la COVID-19 pour les fonctionnaires fédéraux (situations factuelles A et B), le troisième est un propriétaire ou gestionnaire d’un édifice à bureaux (situation C) et le dernier est un locateur d’immeubles dont un de ses locataires pose une exigence vaccinale. (situation D).
35. La lecture de ces situations factuelles A à D fait principalement ressortir les raisons invoquées par les clients afin d’exiger, de la part des présents employeurs, une attestation selon laquelle les personnes salariées affectées à leurs locaux (ou contrats, selon le terme généralement utilisé dans ce secteur) sont vaccinés adéquatement. Tous les documents se réfèrent à la pandémie de COVID-19, au fait que celle-ci continue d’avoir une incidence importante sur la santé de la population canadienne et que « la vaccination est essentielle car elle permet de réduire les risques d’infection et de protéger la santé publique en général. » (pièce A-4, situation A). L’objectif de la Politique fédérale (pièce A-03) est de « [P]rendre toutes les précautions raisonnables, dans les circonstances, pour la protection de la santé et sécurité des employés. La vaccination est un élément clé dans la protection des employés contre la COVID-19 ». (art. 3.1.1)
36. Les autres documents liés aux quatre situations factuelles vont essentiellement dans le même sens : ils soulèvent le caractère sérieux de la pandémie et l’importance de la vaccination afin de réduire les risques d’infection et de protection de la santé publique. L’importance d’offrir un environnement de travail sain et sécuritaire pour les personnes qui travaillent dans les locaux de ces différents clients, et qui sont assujetties à l’obligation de fournir une preuve de vaccination, est reprise dans tous les documents produits. Ceux-ci invoquent également que cet objectif vise à protéger leurs clients, leurs fournisseurs, leurs visiteurs, bref, qu’il vaut « pour tous » et s’inscrit dans une contribution « à l’effort collectif, soutenu par la santé publique et les différentes autorités gouvernementales. »
37. La partie syndicale invoque que ces motifs sont trop larges afin de justifier l’atteinte à la vie privée des personnes salariées. Je reviendrai sur cet argument plus loin.
38. En second lieu, la partie patronale, en plaidoirie, a insisté sur les obligations des employeurs découlant de la Loi sur la santé et la sécurité du travail (S-2.1) et, plus spécifiquement, quant à l’objet même de cette Loi prévu à son article 2 :
La présente loi a pour objet l’élimination à la source même des dangers pour la santé, la sécurité et l’intégrité physique des travailleurs.
39. L’obligation pour les employeurs, prévue à l’article
L’employeur doit prendre les mesures nécessaires pour protéger la santé et assurer la sécurité et l’intégrité physique du travailleur. Il doit notamment:
1° s’assurer que les établissements sur lesquels il a autorité sont équipés et aménagés de façon à assurer la protection du travailleur;
2° désigner des membres de son personnel chargés des questions de santé et de sécurité et en afficher les noms dans des endroits visibles et facilement accessibles au travailleur;
3° s’assurer que l’organisation du travail et les méthodes et techniques utilisées pour l’accomplir sont sécuritaires et ne portent pas atteinte à la santé du travailleur;
4° contrôler la tenue des lieux de travail, fournir des installations sanitaires, l’eau potable, un éclairage, une aération et un chauffage convenable et faire en sorte que les repas pris sur les lieux de travail soient consommés dans des conditions hygiéniques;
5° utiliser les méthodes et techniques visant à identifier, contrôler et éliminer les risques pouvant affecter la santé et la sécurité du travailleur; (…) (mes italiques)
40. Dans le cadre bien précis d’une relation tripartite comme celle rappelée précédemment, l’article
La personne qui, sans être un employeur, utilise les services d’un travailleur aux fins de son établissement doit respecter les obligations imposées à un employeur par la présente loi.
41. Enfin, la partie patronale rappelle, en se référant à l’article
Le travailleur doit:
1° prendre connaissance du programme de prévention qui lui est applicable;
2° prendre les mesures nécessaires pour protéger sa santé, sa sécurité ou son intégrité physique;
3° veiller à ne pas mettre en danger la santé, la sécurité ou l’intégrité physique des autres personnes qui se trouvent sur les lieux de travail ou à proximité des lieux de travail;
4° se soumettre aux examens de santé exigés pour l’application de la présente loi et des règlements;
5° participer à l’identification et à l’élimination des risques d’accidents du travail et de maladies professionnelles sur le lieu de travail; (…) (mes italiques)
42. Les alinéas mis en italiques dans ces trois articles sont particulièrement pertinents à l’analyse du présent dossier. Une jurisprudence abondante a été déposée au soutien de ces diverses obligations découlant de la Loi sur la santé et la sécurité du travail.
43. Toujours au chapitre de la justification, l’employeur souligne qu’il faille également tenir compte des deux admissions suivantes, qualifiées par les parties de « constats scientifiques actuels » :
a) S’il contracte la COVID-19, le salarié non vacciné est susceptible de subir les conséquences les plus graves de la COVID-19, et ce, contrairement à un salarié vacciné;
b) S’il contracte la COVID-19, le salarié non vacciné a une charge virale plus élevée qu’un salarié vacciné et, conséquemment, il est plus susceptible de transmettre ce virus. (Admissions, par. 10)
44. Ces « constats scientifiques actuels » sont primordiaux dans la présente analyse. Ils reconnaissent que le salarié non vacciné s’expose à subir les conséquences les plus graves de la COVID-19, mais également que cette personne non vaccinée est plus susceptible de transmettre le virus. Nécessairement, une telle transmission peut survenir dans la vie privée de la personne, mais tout autant dans le cadre de son travail. Et ce, entre autres, à l’égard de personnes salariées qui se trouvent sur des lieux de travail où le salarié non vacciné adéquatement peut être appelé à œuvrer.
45. Ces deux constats mènent à dégager un élément déterminant dans la présente étude, soit le fait qu’une personne salariée qui n’est pas vaccinée est susceptible de mettre en péril non seulement sa santé, en raison des conséquences les plus graves qu’elle peut subir si elle est infectée par le virus de la COVID-19, mais également la santé - voire même l’intégrité physique dans les cas les plus graves - des personnes à qui elle peut transmettre le virus. Je note que c’est, entre autres, afin d’éviter cette conséquence que des clients exigent la preuve de vaccination. (supra, par. 35-36)
46. Je reviens maintenant à la démarche d’analyse découlant du premier alinéa de l’article
47. D’autre part, l’article 9.1 exige de prendre en considération le fait que les libertés et droits fondamentaux doivent s’exercer « dans le respect (…) de l’ordre public et du bien-être général des citoyens du Québec » ; disposition qui se situe dans le prolongement du cinquième alinéa du Préambule de la Charte selon lequel « (…) les droits et libertés de la personne humaine sont inséparables des droits et libertés d’autrui et du bien-être général. »
48. Ainsi, les droits des personnes salariés affectées par l’exigence des employeurs (au nom de leurs clients) ne doivent pas occulter ceux « d’autrui ». En l’espèce, je me limiterai à souligner, sous ce vocable « d’autrui », les personnes qui travaillent aux endroits visés par les clients, quoique cette notion s’étend nécessairement à toutes celles qui sont appelées à fréquenter ces édifices à d’autres titres. Les personnes qui travaillent à ces endroits, et pour qui la vaccination est requise, sont également titulaires de droits, dont celui à l’intégrité physique.
49. De plus, je note qu’au chapitre des droits économiques et sociaux couverts par la Charte, l’article 46 reconnait à toute personne qui travaille le droit, conformément à la loi, « à des conditions de travail justes et raisonnables et qui respectent sa santé, sa sécurité et son intégrité physique ». (mes italiques) Cet article est « conforme » et compatible avec l’obligation spécifique de protection de la santé et de la sécurité des salariés prévue à l’article
50. À l’étape de la conciliation « avec les droits, les valeurs et le préjudice opposés », les droits des uns doivent être mis en balance avec ceux des autres (Bruker, par. 79). Si la partie syndicale insiste sur le non-respect du droit à la vie privée pour contester l’exigence de la preuve de vaccination, les employeurs s’appuient largement sur les dispositions de la Loi sur la santé et la sécurité du travail afin de justifier leur position. Je rappelle, en premier lieu, que cette loi est d’ordre public (art. 4). La partie syndicale, en invoquant l’arrêt Québec (Commission des normes, de l’équité, de la santé et de la sécurité du travail) c. Caron,
51. Je partage entièrement ces principes. Dans le cadre de la conciliation prévue à l’article
52. C’est dans cette perspective que les employeurs invoquent les dispositions précitées de la Loi sur la santé et la sécurité du travail. Dans l’arrêt Dionne c. Commission scolaire des Patriotes,
[18] Les mesures de protection énoncées dans la Loi reflètent une longue histoire de mesures législatives prises au Québec en vue de s’attaquer aux problèmes, et d’améliorer la situation, de la santé et de la sécurité du travail. (…) À l’issue de ce processus, la législature a adopté en 1979 la Loi sur la santé et la sécurité du travail dans le but non seulement de protéger la santé et la sécurité des travailleurs sur le lieu de travail, mais aussi d’y éliminer les causes d’accidents et de maladies. (mes italiques)
53. Au nom de la Cour, la juge Abella soulignait que :
[19] Pour atteindre cet objectif de protection, la Loi impose aux employeurs l’obligation de ne pas exposer les travailleurs à des conditions de travail dangereuses ou malsaines. (mes italiques)
54. Dans cette foulée, la Cour d’appel du Québec citait l’opinion de l’ancien Tribunal du Travail quant à la portée de l’article
Dans l’affaire Couture c. Hydro-Québec, le juge Bernard Lesage expose ainsi l’obligation générale édictée à l’art.
L’obligation plus large imposée par l’article
55. Plus récemment, et en lien avec le masque de procédure N95 et la pandémie, le Tribunal administratif du travail écrivait dans l’affaire PSSU-FIQP et CHSLD Vigi Reine-Elizabeth,
[84] L’article
56. Le Tribunal administratif du travail ajoutait :
[85] Cette obligation de prendre les moyens nécessaires, humainement logiques et raisonnables ne doit pas s’interpréter comme un seuil minimal que doit démontrer l’employeur pour s’exonérer de toute responsabilité dans la gestion du risque professionnel présent dans un milieu de travail. Au contraire, cette obligation qui repose sur les épaules de l’employeur doit tendre vers les plus hauts standards tant dans l’identification des risques, de la formation et de l’information, de l’organisation du travail et de la mise en place d’équipement et de mesures de protection individuelle. (mes italiques)
57. Je souligne que le Tribunal administratif du travail fait ressortir qu’à son avis, le principe de précaution est inclus dans le paragraphe introductif de l’article
[88] De plus, l’analyse du Tribunal doit prendre en compte l’application du principe de précaution. Bien que le Tribunal juge que ce principe est implicitement enchâssé dans le paragraphe introductif de l’article
[93] En somme, la prise en compte du principe de précaution dans l’appréciation des obligations des Employeurs signifie que devant les incertitudes scientifiques quant à l’identification du risque professionnel et sur la gestion de celui-ci en termes d’organisation du travail et d’ÉPI, la posture des Employeurs doit, face à leurs obligations, intégrer une certaine part d’anticipation et de prévention afin d’éviter une détérioration du milieu de travail. (mes italiques)
58. En fonction du principe de précaution, le Tribunal administratif du travail concluait, au sujet de la fourniture de masques N95 :
[173] D’une part, malgré ces incertitudes scientifiques, comme le retient et l’explique le Tribunal un peu plus haut, la preuve prépondérante confirme la transmission aérienne ou par inhalation du virus SRAS-CoV-2 et la plus grande efficacité des masques N95 sur les masques médicaux. Dans ce contexte, les Employeurs, dans l’exercice de leurs obligations prévues à l’article
59. Je n’ai pas à me prononcer sur la question qui était en litige dans ce dossier. Cependant, je partage l’avis du Tribunal administratif du travail quant à la portée de la responsabilité des employeurs en matière de prévention, et, plus particulièrement, en ce qui a trait à l’objectif d’éliminer à la source les dangers pour la santé, la sécurité et l’intégrité physique des travailleurs. À ce titre, la reconnaissance que le paragraphe introductif de l’article
60. Cet « ordre public », on l’a vu, s’impose au premier titre aux employeurs, directs ou de façon indirecte (art.
61. De façon inexorable, ces dispositions nous permettent de mieux évaluer le dernier volet de l’article
62. Or, à mon avis, c’est à la lumière de ces éléments d’ensemble que la preuve des « constats scientifiques actuels » admis par les parties doit être examinée. (supra, par. 43) À la lecture de ces deux « constats », il apparaît clairement (1) que le salarié non vacciné s’expose aux conséquences les plus graves de la COVID-19 et ce, contrairement à un salarié vacciné ; et (2) que ce salarié non vacciné, s’il contracte le virus, a une charge virale plus élevée qu’un salarié vacciné et « est plus susceptible de transmettre ce virus ». De là, faut-il le rappeler, l’exigence des clients, reprise par les présents employeurs, d’obtenir la preuve de vaccination adéquate afin de protéger, entre autres, les personnes salariées qui travaillent dans leurs édifices publics.
63. La personne salariée qui ne peut fournir cette preuve vaccinale - et donc, qui n’est pas vaccinée (je rappelle ici que je ne me prononce pas sur les situations où une condition médicale ou religieuse serait invoquée) - représente donc un risque lorsqu’elle se trouve sur les lieux de travail. Ce risque vaut pour elle-même et également à l’égard des autres personnes qui se trouvent sur les mêmes lieux ou à proximité.
64. En s’exposant lui-même ainsi que les autres personnes à un tel risque, le travailleur visé par la LSST contrevient, en principe, à ses obligations (art. 49 (2) (3) et (5). Son employeur (art. 51) ou, comme en l’espèce, les clients qui font appel aux services de sous-traitants (art. 51.1), sont en droit de prendre les « méthodes et techniques visant à identifier, contrôler et éliminer les risques pouvant affecter la santé et la sécurité du travailleur ». (art. 51 (5))
65. La « méthode » retenue est d’exiger une preuve de vaccination adéquate. Cette obligation, je l’ai établi précédemment, porte atteinte au respect de la vie privée des personnes salariées. Cependant, cette atteinte peut être justifiée. Dans le récent arrêt Ward, la majorité de la Cour expliquait à nouveau la fine articulation entre les droits fondamentaux prévus aux articles
[40] (…) En effet, avant de conclure à l’existence d’une discrimination dans la reconnaissance ou l’exercice d’un droit prévu à l’un ou l’autre des art. 1 à 9, encore faut-il que la protection de ce droit s’impose au regard des « valeurs démocratiques, de l’ordre public et du bien-être général des citoyens du Québec » dont il est question à l’art. 9.1, tel qu’il existait à l’époque pertinente. Il n’y a pas de discrimination si, dans un contexte donné, cette disposition assure la préséance du droit exercé par le défendeur sur le droit que le demandeur conjugue à l’art. 10. (mes italiques)
66. En somme, je retiens qu’en fin d’analyse menée en vertu de l’article
67. En l’espèce, les « constats scientifiques actuels » admis par les parties et les principes fondamentaux de la LSST, une loi d’ordre public, dont les obligations de prévention et de précaution des employeurs qui y sont énoncées; celles corrélatives des clients qui font appel à des travailleurs, et enfin celles des travailleurs visés eux-mêmes par cette Loi, sont autant d’assises me menant à la conclusion que la protection du droit à la vie privée invoquée par la partie syndicale afin de s’opposer à l’exigence des employeurs ne s’impose pas au regard des « valeurs démocratiques, de l’ordre public et du bien-être général des citoyens du Québec »
68. Par analogie, tel que la majorité de la Cour suprême l’indiquait dans l’arrêt Amselem, la liberté de religion - tel était le droit alors en jeu - « peut être subordonnée au respect de préoccupations sociales supérieures » et toute entrave à l’exercice d’un droit « n’ouvre pas droit à action, compte tenu des restrictions à l’exercice des droits fondamentaux reconnus par la Charte québécoise. (par. 63, mes italiques)
69. Ces « préoccupations sociales supérieures » sont déterminantes dans le présent contexte de pandémie. Les employeurs, à la demande de certains de leurs clients qui sont régis par les mêmes obligations en matière de santé et sécurité, adoptent une mesure - l’exigence d’une preuve de vaccination adéquate - qui, tant sur le plan des constats scientifiques actuels (supra, par. 43), que légal, s’inscrit dans un objectif probant de protection de la santé et sécurité des travailleurs - qui sont eux-mêmes des citoyens du Québec - et qui rejaillit également, et de façon positive, sur « le bien-être général » de l’ensemble de ces citoyens. On rejoint ainsi ces « préoccupations sociales supérieures » qui, tout particulièrement en période de pandémie, ont un ascendant majeur dans l’évaluation d’une situation. Je souligne d’ailleurs que les deux constats scientifiques admis ne limitent pas les conséquences découlant de la non-vaccination d’une personne salariée à son seul milieu de travail ; ce qui inclut nécessairement le possible impact des situations énoncées à l’égard du « bien-être général ».
70. La partie syndicale soulève qu’il est pour le moins paradoxal que les présents employeurs, via leurs clients, réclament une preuve vaccinale pour travailler dans leurs édifices, alors que le gouvernement québécois ne l’exige pas à l’égard de ses propres salariés et a renoncé récemment à le faire dans le domaine, pourtant très sensible, de la santé. On pourrait ajouter que cette même remarque peut valoir également pour d’autres secteurs névralgiques (éducation, CPE, etc.)
71. Je n’ai évidemment pas à me prononcer à propos des choix et orientations adoptés par le gouvernement ou le législateur québécois. Tel que je l’indiquais dans ma présentation antérieure, les décisions gouvernementales, si elles sont mises en vigueur et contestées, devraient être évaluées, entre autres, à travers le prisme du second alinéa de l’article
72. Pour ma part, et avec égard, je ne crois pas que la présence ou l’absence d’actions de l’État constitue la seule norme permettant d’évaluer l’exigence, purement privée, à l’étude. Rien ne conditionne, en effet, la mise en œuvre des obligations des employeurs et des travailleurs prévues à la LSST à des interventions préalables du gouvernement ou du législateur. S’il est évident que ces derniers sont sûrement les premiers et principaux acteurs en matière de protection de l’intérêt public et du bien-être général, la LSST - et ce n’est pas la seule mesure, mais celle qui est pertinente en l’espèce - confie, pour le monde du travail, de larges responsabilités et devoirs qui s’inscrivent dans les mêmes objectifs généraux. Dans le cadre de l’exercice de celles-ci, il revient donc aux différents sujets de droit visés par cette Loi de se conformer aux obligations énoncées.
73. À ce titre, la nature de l’entreprise opérée par un employeur, et forcément des personnes salariées qui y travaillent, me paraît un élément important à considérer dans le cadre de l’évaluation globale de la question à l’étude. Dans le présent dossier, les employeurs exploitent des entreprises d’entretien régies par le Décret sur le personnel d’entretien d’édifices publics de la région de Montréal, D-2, r.15, L’article 1.01a) du Décret définit, à son paragraphe c), le « travail d’entretien » comme suit :
travaux de lavage, de nettoyage, de balayage ou autres travaux analogues exécutés à l’intérieur ou à l’extérieur d’un édifice public.
74. Nul ne remettra en question le caractère nécessaire, voire indispensable, du travail d’entretien dans les « édifices publics » ; notion large définie à l’article 1.01 a) du Décret. Les préposés qui font ce travail d’entretien, un travail très souvent invisible, permettent aux utilisateurs de ces édifices de pouvoir travailler ou y circuler dans des endroits propres et hygiéniques. Dans le contexte de la pandémie, ces personnes salariées ont joué - et continuent de le faire à travers leurs tâches quotidiennes - un rôle central et essentiel afin de réduire le plus possible les risques de propagation du virus de la COVID-19 à l’intérieur de leurs lieux de travail.
75. Or, nous avons vu que les « constats scientifiques actuels » reconnaissent que les risques encourus par le biais des personnes non vaccinées, en raison de leur charge virale plus élevée si elles sont infectées - que ce soit pour elles ou à l’égard des autres - sont significatifs.
76. Sans me prononcer sur l’ensemble des secteurs d’activités du Québec, la relation étroite entre la nature même du travail effectué par les salariés des employeurs impliqués dans le présent dossier me semble indissociable du contexte général vu précédemment où l’élimination à la source des dangers pour la santé, la sécurité et l’intégrité physique des travailleurs, ainsi que le principe de précaution (supra, par. 57-58), se révèlent, en raison de leur caractère essentiel, des assises factuelles et juridiques permettant de justifier, au sens du premier alinéa de l’article
77. Certes, l’obligation de dévoiler son statut vaccinal - et donc un renseignement personnel et confidentiel - empiète sur la vie privée des personnes salariées. Toutefois - et pour reprendre par analogie l’approche de la majorité de la Cour dans Bruker (par. 93)- une telle atteinte « est sans conséquence en comparaison des inconvénients » majeurs, et reconnus par les « constats scientifiques actuels », provenant de la présence de personnes non vaccinées en milieu de travail. Les effets préjudiciables, le « préjudice » ou les « inconvénients » pouvant émaner, dans un milieu de travail, de personnes salariées non vaccinées pèsent, à mon avis, beaucoup plus lourdement sur le « bien-être général » des autres personnes qui fréquentent ce même endroit - et qui, tout en étant vaccinées, peuvent être infectées par le virus et en subir, ainsi que leur entourage, tous les effets en découlant - que du côté des salariés qui seront appelés à dévoiler un volet de leur vie privée, soit leur statut vaccinal. A priori, il est possible de considérer que cette même conclusion vaut également à l’égard des salariés qui refusent d’être vaccinés en soulevant leur autonomie personnelle, liberté ou atteinte à l’intégrité physique dans la mesure où, en l’espèce, ceux-ci pourront néanmoins être affectés, en principe, à d’autres sites de travail où la preuve de vaccination ne sera pas requise. (infra, par. 109-119)
78. La partie syndicale invoque que la preuve des justifications des employeurs est beaucoup trop générale et ne rencontre donc pas les exigences applicables dans le cadre de l’article
79. D’une part, et ce point est majeur, je rappelle, si ceci est nécessaire, que la présente décision est de nature déclaratoire, et ceci à la demande expresse des parties. Ces dernières ont convenu de me soumettre des admissions et cinq situations factuelles et des documents joints à titre de preuve afin que je puisse, avec célérité et après une seule journée d’audition, me prononcer sur une série de questions. Dans ce contexte, il est certain que je n’ai pas entendu de preuve traitant spécifiquement de chaque client concerné et des édifices publics visés par l’exigence de la preuve vaccinale. Ainsi, la preuve n’a pas indiqué le nombre de personnes salariées visées par le présent dossier, les horaires de travail dans les édifices spécifiques, les routes de travail des salariés dans les différents lieux de travail, le fait que les personnes travaillent en solo, en équipe, dans des locaux grands ou exigus, en présence ou non de d’autres personnes, etc. Toute cette preuve, qui aurait sûrement été produite et requise dans le cadre d’un litige « classique », et dont la durée d’audience aurait fort probablement excédé une journée, a été évacuée par les parties au profit d’une décision déclaratoire.
80. Ceci étant rappelé, j’estime néanmoins que la preuve soumise au dossier, dont les « constats scientifiques actuels », les objectifs poursuivis par les clients au soutien de leur demande d’attestation vaccinale, la nature des entreprises concernées et le contexte de la pandémie qui est toujours en cours, constituent autant d’éléments qui permettent de soutenir ma conclusion précédente quant à la justification au sens de l’article
qui travaille seul sur le quart de nuit dans un édifice vide de ses occupants, pourrait alors, même infecté, ne pas représenter un risque pour les autres, je crois, avec égard, que l’absence de cette preuve n’est pas un empêchement pour me prononcer, sur le plan déclaratoire, quant aux questions posées et les principes fondamentaux applicables.
81. Dans le cadre de notes complémentaires transmises à la suite des plaidoiries, et ce, je le souligne jusqu’à tout récemment, les parties ont ajouté divers arguments afin de soutenir leurs positions respectives. Une décision arbitrale ontarienne a également été transmise. À l’égard de celle-ci, j’ai indiqué que je n’y ferais pas référence, non pas en raison de sa valeur intrinsèque, mais plutôt parce que le cadre juridique applicable au Québec, et plus spécifiquement les particularités de la Charte des droits et libertés de la personne, commandent une analyse qui possède ses spécificités, d’ailleurs reconnues par la Cour suprême du Canada, qui diffèrent du droit ontarien.
82. Je note toutefois que la partie syndicale a invoqué, dans sa dernière supplique, « que le port du masque, en plus d’avoir été rendu obligatoire par décret, ne brime pas la vie privée des personnes salariées, et qu’il constitue, dans un contexte pandémique, un moindre mal tout à fait justifiable. » Elle ajoute qu’il s’agit là de « mesures efficaces qui respectent les droits de tous, et qui permettent aux clients et aux employeurs de rencontrer leurs obligations en matière de santé et sécurité au travail. » Avec égard, je souligne que dans le présent cadre d’une décision déclaratoire, les parties ont convenu d’une série de questions. Aucune de celles-ci ne consiste, du moins c’est ce que j’ai compris, à déterminer si des moyens alternatifs, tel le port du masque ou le lavage des mains, pourraient être des substituts à l’obligation d’attestation vaccinale posée par les employeurs au nom de leurs clients. Aucune preuve soumise ne traite de ces aspects. Je préfère donc m’abstenir de me prononcer sur ces arguments.
83. Enfin, quant aux références de la partie syndicale à l’arrêt Dagenais c. S.R.C.,
84. En réponse à la première question posée, je suis donc d’avis que les employeurs peuvent donc recueillir le renseignement relatif au statut vaccinal. Peuvent-ils toutefois le faire à l’égard de tous leurs salariés ou se limiter à faire une telle collecte auprès des personnes salariées affectées à un édifice pour lequel un client a requis l’attestation vaccinale ?
85. Sur cette question, les parties soumettent des positions opposées. Les employeurs font valoir que les exigences vaccinales entraîneront des mouvements de personnel importants au sein de leurs organisations et que ceux-ci exigeront des réactions rapides afin de fournir les services convenus. D’où la proposition que tous les salariés, affectés présentement ou non à des clients exigeant le passeport vaccinal, soient tenus de fournir l’information requise. La position syndicale consiste à limiter plutôt la portée de cette exigence aux seuls détenteurs d’un poste ou d’un remplacement de poste auprès d’un client ayant formulé cette demande.
86. Je rappelle, en premier lieu, que les employeurs impliqués dans le présent dossier n’exigent pas la preuve de vaccination pour l’ensemble de leurs salariés, mais seulement pour ceux qui sont affectés auprès de leurs clients énonçant une telle attestation. Même si je suis sensible aux préoccupations de gestion rapide de main-d’œuvre, je suis d’avis qu’une exigence formelle de preuve de vaccination à l’égard de l’ensemble de leurs salariés dépasse le cadre de ce qui a été justifié précédemment, soit celui de clients qui, de façon spécifique et expresse requièrent une telle attestation.
87. Les personnes salariées concernées par la demande de preuve vaccinale doivent donc se limiter à celles qui sont affectées ou qui se font offrir d’être affectées à un édifice pour lequel un client formule cette exigence, ou à l’égard de salariés effectuant des remplacements dans l’un de ces édifices.
88. Par ailleurs, j’estime que les employeurs peuvent indiquer à l’endroit des salariés qui ne sont pas visés par le paragraphe précédent, qu’ils devront satisfaire l’exigence de la preuve vaccinale - et ce, de façon rapide s’ils désirent que leur nom soit considéré - si leur employeur envisage de les affecter à un édifice où cette condition est requise par un client.
89. Quant à la nature des renseignements pouvant être recueillis par les employeurs, la partie syndicale rappelle la condition de « nécessité » énoncée à l’article
90. Je ne partage pas cette proposition. J’ai établi précédemment que l’exigence de l’attestation vaccinale, là où elle est requise, est légale et justifiée au sens de la Charte. À ce titre, j’ai tenu compte, entre autres, de la nature spécifique du type d’entreprise impliquée dans le présent dossier, soit spécialisée dans le travail d’entretien d’édifices publics. Je ne crois pas qu’il serait opportun d’avoir à évaluer, poste par poste, tâche par tâche, étage par étage, corridors, salles de réunion, etc., si l’exigence est justifiée au sens de l’article
91. Ainsi, le « renseignement » lié à cette preuve de vaccination me paraît rencontrer à tous égards l’exigence de « nécessité » requise par la Loi sur la protection des renseignements personnels dans le secteur privé et la convention collective.
92. Quant à la personne qui doit procéder à cette collecte de renseignement, je suis d’avis qu’elle devrait être effectuée par un représentant des ressources humaines plutôt que par les supérieurs immédiats ou hiérarchiques. De cette manière, la divulgation, même si requise, demeurera à l’intérieur d’un cercle beaucoup plus restreint de personnes dont le rôle consiste généralement à travailler avec des informations confidentielles.
93. Relativement à la nature du renseignement pouvant être exigé afin d’établir le statut vaccinal d’une personne salariée, la constatation sur l’application Vaxicode, du statut « Adéquatement protégé », soit par le moyen d’un balayage du passeport vaccinal électronique ou, à défaut, la demande d’une version papier de ce document, me paraît constituer le renseignement adéquat et suffisant permettant aux employeurs concernés de répondre aux demandes de leurs clients. J’estime que des demandes relatives au nombre de doses reçues et aux dates de celles-ci ne devraient pas, sauf en cas d’impossibilité de fournir le passeport vaccinal ou les documents officiels attestant d’une vaccination adéquate, être exigés. Il en est de même quant à une demande de signature d’une déclaration solennelle attestant, au-delà de ces constats, d’une vaccination adéquate.
94. Quant à la conservation du renseignement obtenu relativement au statut vaccinal des personnes salariées concernée, seul celui relatif au statut vaccinal (adéquatement vacciné ou non) d’une personne salariée, est pertinent et devrait être conservé par les employeurs.
95. Enfin, les employeurs doivent s’abstenir de communiquer à leurs clients une liste nominative du statut vaccinal et autres renseignements connexes des personnes salariées affectées aux clients formulant une telle exigence. Seule une confirmation d’un employeur à l’effet qu’à compter de telle date, l’ensemble des salariés affectés à un édifice d’un client ayant formulé cette exigence sont adéquatement vaccinés devrait être communiquée au client concerné.
PARTIE II - Situation de la personne salariée refusant d’être adéquatement vaccinée
96. Je rappelle d’abord que cette seconde partie de la décision ne s’applique pas aux personnes salariées qui invoquent, au soutien de leur refus, des motifs de santé ou de religion. Ces situations particulières seront examinées par les employeurs de façon individualisée en fonction des règles applicables.
97. Second rappel : les parties ont convenu qu’en raison du « contexte exceptionnel de la pandémie - et ceci vaut tout particulièrement pour cette partie - la présente sentence ne constitue pas un précédent pour l’application des articles de la convention collective.
98. Dans le cadre des plaidoiries, les parties ont invoqué deux approches différentes afin de prévoir les solutions à apporter à l’endroit de personnes salariées qui refuseront d’être adéquatement vaccinées et qui sont affectées à des clients (contrats/édifices) exigeant l’attestation vaccinale. À ce stade, je comprends qu’il n’est pas possible de déterminer le nombre de personnes qui pourraient se retrouver dans cette situation.
99. En résumant les propositions, la partie syndicale invoque que les employeurs doivent appliquer les mécanismes prévus à la convention collective afin de permettre aux salariés concernés de pouvoir fournir leur prestation de travail.
100. De leur côté, les employeurs distinguent la situation du salarié, non encore adéquatement vacciné, qui indique à son employeur qu’il a l’intention de le faire au cours des 8 prochaines semaines, de celle de la personne salariée qui refuse de se faire vacciner. Dans le premier cas, la partie patronale estime que la personne devrait être en congé administratif sans solde et pourra se faire offrir des remplacements de courte durée au sens de l’article 16.01 de la convention collective dans la mesure du possible.
101. Dans le second cas - celui du refus de vaccination - la partie patronale est d’avis qu’aucune disposition invoquée par le syndicat (arts. 17.01, 17.02, 17.03) n’est applicable. À son avis, le salarié qui ne peut attester d’une vaccination adéquate ne remplit pas les exigences de son poste et ou n’est donc pas ou plus en mesure d’offrir sa prestation de travail. En conséquence, la partie patronale soutient que cette situation doit être considérée comme un abandon de poste. Selon la partie patronale, la personne concernée pourra alors démissionner ou choisir d’être inscrite sur la liste de rappel avec les caractéristiques de son poste. Cette personne salariée pourra également remplir le Formulaire de demande de poste, de remplacement ou de disponibilité (qui est prévu à l’Annexe C de la convention collective) pour demander un poste avec d’autres caractéristiques, incluant à l’Intérieur ou à l’extérieur du rayon, ou des remplacements.
102. Je souligne que le procureur patronal a indiqué qu’en raison de la pénurie de main-d’œuvre qui touche également les employeurs, les personnes salariées qui se conformeraient à ces diverses options ne devraient pas, en principe, avoir de difficulté à pouvoir travailler à d’autres endroits où leurs clients, autres que ceux concernés par le présent dossier, n’exigent pas la preuve de vaccination.
103. J’ai examiné attentivement les propositions principales et subsidiaires des deux parties. Celles-ci s’appuient, en totalité ou en partie, sur des dispositions d’une convention collective qui -ceci me paraît certain - n’a pas été négociée et signée (le 20 décembre 2017) en tenant compte de la possibilité d’une pandémie mondiale qui viendrait bouleverser la vie, le travail, les études de chacun d’entre nous.
104. La solution à la question délicate posée en cette seconde partie de la sentence passe donc, selon moi, par un retour sur les principes de base du contrat de travail et par une lecture des dispositions de la convention collective qui doit tenir compte du contexte fort particulier de la pandémie et de ses implications dans l’organisation du travail.
105. Il a déjà été établi que l’exigence vaccinale n’émane pas directement des présents employeurs, mais résulte plutôt de certains de leurs clients. Dans la relation contractuelle liant ces parties, il est admis que le défaut de respecter une telle exigence est susceptible de mener à la résiliation du contrat les liant, impliquant que l’ensemble des salariés affectés à ce contrat seront soumis à la procédure de mise à pied. (Admissions, par. 12)
106. Afin d’éviter ces conséquences, les employeurs intègrent donc cette obligation aux conditions de travail des personnes salariées. Ces dernières, afin d’être affectées à un ou l’autre des édifices des clients concernés, devront donc attester de leur vaccination adéquate. J’ai déjà décidé que cette exigence, dans le présent contexte, est conforme à la Charte et aux lois applicables. Entre autres, et plus particulièrement en lien avec les règles relatives au contrat de travail, cette condition rejoint l’obligation de l’employeur en matière de protection de la santé et de la sécurité des salariés prévue à l’article
107. Cette condition devient donc, pour les seules personnes salariées concernées par les clients formulant cette obligation, une « exigence normale du travail à accomplir. » (art.15.01) Certes, cette « exigence » n’est pas liée aux caractéristiques de la classification des postes (travaux lourds d’entretien ménager, travaux légers ; voir l’article 6.03 d), mais, en raison de son caractère horizontal et pour les motifs analysés en première partie de la présente décision, elle peut être requise et doit être considérée comme une « exigence normale du travail à accomplir » pour les salariés affectés aux clients (contrats) où elle est formulée.
108. La personne salariée qui ne rencontre pas cette « exigence normale » ne peut donc travailler à ces endroits. À mon avis, et avec égard, cette personne ne fait pas l’objet d’une « exclusion à la demande du client ». La lecture de l’article 17.03 de la convention collective fait clairement ressortir que la situation visée par les parties à cette disposition vise des cas individualisés où un client « en relation avec le salarié » en demande l’exclusion. Je ne vois pas de tels éléments dans la trame factuelle à l’étude.
109. À mon avis, c’est plutôt l’article 17.01, intitulé « Transfert administratif » qui doit être appliqué en l’espèce :
a) Le transfert d’un salarié est une mesure administrative et non une alternative à la gestion du personnel.
b) Aucun salarié ne peut être transféré à un autre contrat sans cause juste et suffisante et sans entente préalable avec le syndicat.
110. Sans aucun doute, le transfert d’un salarié en raison de sa non-conformité à l’exigence de l’attestation vaccinale est une « mesure administrative » découlant d’un contexte particulier - et, à priori, temporaire; l’état de pandémie et les mesures afin d’endiguer ou de contrôler celle-ci n’ayant pas une vocation de permanence - et non pas une alternative à la gestion du personnel. (art. 17.02 a).
111. Par ailleurs, le transfert de cette personne salariée est exclusivement fondé sur une « cause juste et suffisante », soit le fait que celle-ci ne rencontre pas une des exigences normales qui est requise pour travailler à l’un ou l’autre des « contrats » spécifiques (clients), soit celle d’attester de sa vaccination adéquate.
112. Je reconnais que l’expression « cause juste et suffisante » est principalement associée, en droit du travail, au volet disciplinaire. Cependant, tel que je l’indiquais précédemment, le contexte exceptionnel de la pandémie et les entorses que celle-ci entraîne à l’égard des droits individuels - ceci a été examiné en première partie - ne peuvent être ignorés lorsqu’il s’agit de donner un sens à des termes de la convention collective.
113. Avec égard, je suis d’avis que la partie patronale ne peut invoquer, comme je l’ai rappelé en première partie, que l’exigence de l’attestation vaccinale est primordiale, s’inscrit dans le cadre de ses obligations de prévention et de précaution en vertu de la LSST et justifie une atteinte à la vie privée au sens de la Charte ayant pour effet d’empêcher un salarié d’être affecté à un contrat où le client en fait une obligation, et soutenir, d’autre part, que le transfert qui en découle nécessairement ne serait pas attribuable à une « cause juste et suffisante ». Dans le présent contexte, je suis d’avis que l’affectation d’une personne salariée non vaccinée à un autre lieu de travail, parce que celle-ci ne se conforme pas à l’exigence de l’attestation vaccinale d’un client, représente une cause juste et suffisante que la partie syndicale ne peut contester, du moins pour les motifs examinés en première partie.
114. En effet, j’ai établi, en première partie, que l’exigence de l’attestation vaccinale était conforme aux lois applicables. En fonction des contrats avec les clients concernés, les employeurs ne peuvent donc affecter à ces endroits des salariés qui ne rencontrent pas cette preuve vaccinale. Le transfert administratif devant nécessairement découler de cette situation est donc fondé sur une cause juste et suffisante.
115. L’article 17.01 b) prévoit que ce transfert doit être fait avec entente préalable avec le syndicat. La procédure de « transfert administratif » est prévue à l’article 17.02. Essentiellement, celle-ci s’effectue par « échange de postes ».
116. La partie patronale soulève que l’application de cette procédure est susceptible d’entraîner de nombreuses difficultés, dont la principale étant qu’un salarié adéquatement vacciné devra échanger de poste, ou sera éventuellement supplanté, par un salarié qui n’est pas vacciné. Ainsi, selon la partie patronale, il y a un risque que ce soit la personne salariée qui a suivi les recommandations de la santé publique en se faisant vacciner qui se fera imposer un transfert administratif, ou une supplantation pouvant mener à une mise à pied, par une personne salariée qui refuse de se faire vacciner. Selon la partie patronale, les clients qui n’exigent pas d’attestation vaccinale pourraient perdre, en raison de ces transferts, des salariés qualifiés ; affectant ainsi la qualité de la prestation de services. Enfin, la partie patronale estime que cette procédure de transfert administratif risque d’inciter d’autres clients à mettre en place des exigences vaccinales s’ils commencent à en subir les conséquences collatérales.
117. Avec égard, tous ces arguments relèvent essentiellement d’hypothèses qui, dans le cadre de la présente décision déclaratoire, ne sont appuyées d’aucune preuve. Je rappelle que la preuve soumise n’indique aucun chiffre, voire statistiques, qui permettraient d’évaluer même minimalement, l’impact concret de la mise en œuvre prochaine de l’exigence de l’attestation vaccinale chez les clients concernés. Il est donc impossible d’anticiper si les transferts administratifs qui en découleront - voire même, s’il y en aura vraiment - auront les répercussions négatives soulevées par la partie patronale. Face à l’exigence de fournir une preuve vaccinale afin de pouvoir continuer d’être affectées à un contrat (édifice) et compte tenu de la présente décision, il n’est pas exclu que des personnes salariées, jusqu’ici réfractaires ou hésitantes à la vaccination, décident de se conformer à cette condition. À cet égard, la proposition patronale à l’effet que la personne non vaccinée soit considérée comme ayant abandonné son poste ou son emploi, ou qu’elle démissionne et que celle-ci soit assortie d’une inscription à la liste de rappel me semble une approche qui ne peut être retenue dans le présent contexte. Celle-ci aurait pour effet de remettre directement en jeu le lien d’emploi des personnes salariées concernées - ce qui est majeur en droit du travail - et fait abstraction, selon moi, des mécanismes de transfert prévus à la convention collective dont les objectifs généraux sont compatibles avec un maintien de l’emploi à travers une procédure détaillée qui a été négociée par les parties.
118. Quant au fait que de possibles transferts administratifs provoquent des tensions entre salariés vaccinés et non vaccinés, les employeurs et le syndicat seront les parties les mieux placées pour expliquer les motifs de ces mesures et rappeler le contexte particulier dans lesquelles elles s’inscrivent.
119. Enfin, les employeurs invoquent que les conséquences négatives des transferts administratifs peuvent amener d’autres clients à recourir également à l’obligation d’attestation vaccinale. Eu égard à mon analyse faite en première partie quant aux obligations légales imposées aux employeurs québécois dans le présent contexte pandémique, j’estime que cette possible réaction de la part de d’autres clients ne devrait pas représenter une inquiétude mais plutôt une preuve du caractère nécessaire de l’adoption de mesures concrètes afin de contrôler l’épidémie du virus de la COVID-19. Certes, dans une telle éventualité où tous les clients des employeurs formuleraient une telle exigence, les personnes salariées non vaccinées ne pourraient alors être transférées selon la procédure prévue à l’article 17.02 et, en raison du manque de travail en découlant, se retrouveraient en situation de mise à pied. (art. 6.18)
120. Compte tenu de ma conclusion concernant l’application de l’article 17.01 b) et 17.02, il n’est pas requis que je me prononce sur les autres alternatives suggérées par les parties. Concernant l’application de la procédure de transfert administratif, il serait approprié que les parties mettent en place un processus d’échange souple et efficace afin d’éviter des blocages pouvant affecter les opérations auprès des clients concernés.
III) CONCLUSIONS
Dans le cadre du présent dossier de nature déclaratoire, j’ai répondu aux diverses questions posées par les parties. De façon plus spécifique, et avec les développements les accompagnant, les réponses à ces questions se trouvent principalement aux paragraphes 76 à 84, 86-87, 90-95 et 109 à 120.
Gatineau, ce 15 novembre 2021
Me Denis NADEAU, Ad.E.
Arbitre
Me Magalie GINGRAS
Me Sarah CÔTÉ-PILON
Procureures du Syndicat
Me Jean-François CLOUTIER
Me Deborah FURTADO
Procureur.e.s des Employeurs
ANNEXE A
ADMISSIONS
a) Parties
b) Situation contractuelle
1.01. Dans ce décret, les expressions suivantes désignent :
a) « édifice public » : une école, un centre de formation professionnelle et un centre d’éducation des adultes établis par une commission scolaire, un collège institué en vertu de la Loi sur les collèges d’enseignement général et professionnel (chapitre C-29), un établissement d’enseignement de niveau universitaire au sens de la Loi sur les établissements d’enseignement de niveau universitaire (chapitre E-14.1), un établissement d’enseignement privé visé par la Loi sur l’enseignement privé (chapitre E-9.1), un établissement au sens de la Loi sur les services de santé et les services sociaux (chapitre S-4.2), un établissement occupé par un organisme à but non lucratif à vocation sociale et communautaire, une garderie, un jardin d’enfants, une halte-garderie ou un centre de la petite enfance au sens de la Loi sur les centres de la petite enfance et autres services de garde à l’enfance (chapitre C‑8.2), une clinique, une maison de convalescence, une maison de refuge ou autres établissements pour nécessiteux, une bibliothèque, une maison de la culture, un musée, un centre d’expositions, un centre d’interprétation du patrimoine, une église, une chapelle, un couvent, un monastère, un noviciat, une salle de spectacle, un cinéma, un théâtre, un café, un club, un bar, un restaurant, une cafétéria, une taverne, une brasserie, un hôtel, un motel, une auberge, une salle de conférence, une salle municipale, une exposition, une foire, les estrades situées sur un champ de course ou utilisées pour des divertissements publics, sportifs ou autres, un aréna, une usine, une industrie, un atelier, une manufacture, un entrepôt, un édifice gouvernemental, un bureau, un édifice à bureaux, une banque, une caisse, un magasin, un centre commercial, un tunnel, une gare, un terminus de transport aérien, maritime, ferroviaire ou routier, une maison à plusieurs appartements ou logements et tout autre lieu semblable à un des édifices mentionnés dans ce paragraphe ou utilisés comme tel;
[…]
c) « travail d’entretien » : les travaux de lavage, de nettoyage, de balayage ou autres travaux analogues exécutés à l’intérieur ou à l’extérieur d’un édifice public;
[…]
6.04 Clients
La personne physique ou morale qui a contracté avec l’employeur pour la fourniture d’un service où un salarié fournit une prestation de travail, ou le mandataire de celle‑ci.
6.06 Contrat
a) Contrat désigne le ou les édifices ou partie d’édifice où l’employeur s’est engagé envers un client à fournir des services.
b) Aux fins de l’application de la convention collective, lorsqu’elle réfère à la notion d’édifice, le contrat est restreint à l’édifice ou partie d’édifice à l’intérieur duquel un salarié effectue son travail.
c) Exigence vaccinale
a) S’il contracte la COVID-19, le salarié non vacciné est susceptible de subir les conséquences les plus graves de la COVID-19, et ce, contrairement à un salarié vacciné;
b) S’il contracte la COVID-19, le salarié non vacciné a une charge virale plus élevée qu’un salarié vacciné et, conséquemment, il est plus susceptible de transmettre ce virus.
ANNEXE B
d) Situations factuelles soumises à l’arbitre
i) Situation factuelle A – Un Client, dont l’Édifice abrite des ministères fédéraux, pose une exigence vaccinale
La pandémie de COVID-19 continue d’avoir une incidence sans précédent sur la santé de la population canadienne. À cet égard, les vaccins contre la COVID-19 sont essentiels, car ils permettent de réduire le risque d’infection et de protéger la santé publique en général.
Conscient de ses responsabilités d’employeur, le gouvernement du Canada est déterminé à protéger la santé et la sécurité de ses employés. C’est pourquoi il a annoncé le 6 octobre 2021 que la vaccination contre la COVID-19 serait obligatoire dans l’ensemble de la fonction publique fédérale.
En accord avec cette mesure importante, il est attendu que tous les entrepreneurs et sous-traitants appelés à travailler dans les lieux de travail fédéraux soient, eux aussi, entièrement vaccinés. Cette exigence entre en vigueur le 15 novembre 2021.
Les entrepreneurs concernés sont priés de s’assurer que leurs employés et leurs sous-traitants sont informés de cette exigence et qu’ils sont en mesure de s’y conformer pleinement.
Ainsi, les lieux de travail fédéraux seront sûrs, et les employés qui y travaillent seront protégés.
[Nos soulignements]
À compter du 15 novembre 2021, tous les employés des fournisseurs du gouvernement du Canada devront être entièrement vaccinés pour avoir accès aux lieux de travail du gouvernement fédéral. Les fournisseurs devront présenter une attestation à cet effet à leur autorité contractante.
[…]
Exigence relative à la vaccination des employés des fournisseurs
À compter du 15 novembre 2021, les employés des fournisseurs qui doivent avoir accès à des lieux de travail du gouvernement fédéral doivent être entièrement vaccinés. Par « lieux de travail du gouvernement fédéral », on entend tous les locaux dont le gouvernement du Canada est responsable et où se trouvent des employés du gouvernement fédéral.
L'exigence relative à la vaccination ne s’applique pas aux :
Contrats et entrepreneurs existants
L’exigence relative à la vaccination s’applique aux employés des entrepreneurs titulaires de contrats existants qui doivent avoir accès aux lieux de travail du gouvernement fédéral pour réaliser des travaux.
Satisfaction de l’exigence relative à la vaccination
Une personne est considérée pleinement vaccinée si elle a reçu :
Pour en savoir plus sur les vaccins approuvés contre la COVID-19, vous pouvez consulter la page Vaccins contre la COVID-19.
Processus de certification
Les fournisseurs devront présenter un formulaire d’attestation avant le 29 octobre 2021, qui démontre que leurs employés nécessitant un accès aux lieux de travail du gouvernement fédéral seront entièrement vaccinés en date du 15 novembre 2021.
Le gouvernement du Canada communiquera prochainement des précisions et des instructions concernant l’application de l’exigence relative à la vaccination des employés contractuels.
Contrats existants
Les agents de négociation des marchés communiqueront prochainement avec les entrepreneurs actuellement titulaires d’un contrat avec le gouvernement du Canada pour leur fournir le formulaire d’attestation qu’ils devront remplir et soumettre afin de certifier que leurs employés nécessitant un accès aux lieux de travail du gouvernement fédéral seront entièrement vaccinés en date du 15 novembre 2021. Les entrepreneurs qui ne soumettent pas cette attestation pourront faire l’objet de mesures pouvant aller jusqu’à la résiliation de leur contrat.
Contrats futurs
À compter du 15 octobre 2021, les fournisseurs désirant soumissionner à un contrat qui exige l’accès de leurs employés à des lieux de travail du gouvernement fédéral devront présenter, à titre de condition de leur soumission, une attestation prouvant qu’ils satisfont à l’exigence relative à la vaccination. Les soumissions qui ne comprennent pas l’attestation seront ignorées. Le formulaire d’attestation figurera dans les demandes de propositions concernées.
Circonstances spéciales et exemptions
Certains facteurs peuvent empêcher des employés contractuels de se faire vacciner complètement :
Dans de tels cas, les entrepreneurs sont censés informer l’autorité contractante responsable dès que possible :
Les dérogations et toute mesure d’atténuation pourront être soumises à l’approbation de l’autorité contractante et du responsable technique.
Les entrepreneurs ne devraient communiquer aucun renseignement personnel à l’autorité contractante, comme des détails sur :
Surveillance
Il appartiendra aux organisations clientes de surveiller la conformité des entrepreneurs à l’exigence relative à la vaccination. L’organisation cliente ou l’autorité contractante communiquera au besoin des informations supplémentaires à propos des exigences particulières aux entrepreneurs concernés.
Manquement à l’exigence
Les fournisseurs qui ne produisent pas les attestations requises ou dont les attestations s’avèrent fausses après coup pourront faire l’objet de mesures pouvant aller jusqu’à la résiliation de leur contrat.
[Nos soulignements]
La pandémie de COVID-19 continue d’avoir une incidence sans précédent sur la santé de la population canadienne. À cet égard, les vaccins contre la COVID-19 sont essentiels, car ils permettent de réduire le risque d’infection et de protéger la santé publique en général.
Conscient de ses responsabilités d’employeur, le gouvernement du Canada est déterminé à protéger la santé et la sécurité de ses employés. C’est pourquoi il a annoncé le 6 octobre 2021 que la vaccination contre la COVID-19 serait obligatoire dans l’ensemble de la fonction publique fédérale.
Conformément à cette mesure importante, les SPAC ont publié un Avis aux entrepreneurs du gouvernement fédéral et Exigence relative à la vaccination des fournisseurs contre la COVID-19 demandant à tous les entrepreneurs et sous-traitants qui font affaire avec le gouvernement du Canada d’être vaccinés. Cela garantit la sécurité des lieux de travail fédéraux et la protection des employés qui y travaillent. Cette exigence entre en vigueur le 15 novembre 2021.
Les entrepreneurs impliqués devraient prendre les mesures nécessaires pour s’assurer que leurs employés et sous-traitants sont au courant de cette exigence et qu’ils sont en mesure de s’y conformer pleinement.
***
Les fournisseurs doivent fournir une attestation d’ici le 29 octobre 2021, certifiant que leur personnel qui accède aux lieux de travail du gouvernement du Canada sera entièrement vacciné à compter du 15 novembre 2021. Pour certifier, veuillez cocher la case ci-dessous, signer et dater.
J’atteste que tous mes employés travaillant pour/avec l’ASFC sont vaccinés
ii) Situation factuelle B – Un Client, une entreprise de compétence fédérale, pose une exigence vaccinale
La vaccination est l’outil le plus efficace pour réduire le risque de transmission de la COVID-19 aux Canadiens et pour protéger la santé publique. C’est notre instrument le plus important et c’est pourquoi nous continuons à prendre des mesures pour que le plus grand nombre de Canadiens possible soient vaccinés.
Le gouvernement du Canada a annoncé aujourd’hui son intention d’exiger la vaccination dans l’ensemble de la fonction publique fédérale dès la fin septembre. Les vaccins constituent notre meilleur moyen de défense, et, dans le cas des quelques personnes qui ne peuvent pas être vaccinées, il y aura des mesures d’adaptation ou des solutions de rechange, comme les tests et le dépistage, selon la situation, afin d’assurer une protection plus vaste de la santé publique en réduisant le risque lié à la COVID-19.
À titre d’employeur le plus important du pays, le gouvernement du Canada s’est engagé à jouer un rôle de chef de file en protégeant davantage la santé et la sécurité des fonctionnaires et des collectivités où ils vivent et travaillent, au Canada et ailleurs dans le monde.
De plus, dès que possible à l’automne et au plus tard à la fin octobre, le gouvernement du Canada exigera que les employés des secteurs du transport aérien, ferroviaire et maritime sous réglementation fédérale soient vaccinés.
L’exigence de vaccination s’étendra également à certains voyageurs, notamment tous les passagers des vols commerciaux, des trains interprovinciaux et des grands navires avec hébergement, comme les bateaux de croisière.
Le gouvernement travaillera avec les principaux intervenants, y compris les agents négociateurs et les exploitants du secteur des transports, pour planifier la mise en œuvre de ces initiatives. Les détails seront communiqués au fur et à mesure que les travaux progressent. Le processus consistera notamment à déterminer comment mettre en œuvre cette exigence, au moyen d’une confirmation de vaccination contre la COVID-19 et d’autres moyens de protection, tels que les tests, au besoin.
En outre, le gouvernement du Canada s’attend à ce que les sociétés d’État et les autres employeurs du secteur sous réglementation fédérale exigent également la vaccination de leurs employés. Le gouvernement travaillera avec ces employeurs pour s’assurer d’obtenir ce résultat.
[Nos soulignements]
Le premier ministre Justin Trudeau et la vice-première ministre Chrystia Freeland ont annoncé aujourd’hui les détails des plans du gouvernement visant à exiger la vaccination contre la COVID-19 dans l’ensemble de la fonction publique fédérale et des secteurs des transports sous réglementation fédérale.
Aux termes de cette nouvelle politique, les fonctionnaires fédéraux de l’administration publique centrale, y compris les membres de la Gendarmerie royale du Canada devront confirmer leur statut vaccinal d’ici le 29 octobre 2021. Ceux qui refusent de divulguer leur statut vaccinal ou d’être entièrement vaccinés seront mis en congé administratif sans solde dès le 15 novembre 2021.
Les employeurs des secteurs du transport aérien, ferroviaire et maritime sous réglementation fédérale auront jusqu’au 30 octobre 2021 pour mettre en place des politiques de vaccination qui s’assureront que les employés sont vaccinés. […]
Les sociétés d’État et les organismes distincts sont invités à mettre en œuvre des politiques de vaccination qui reflètent les exigences annoncées aujourd’hui pour le reste de la fonction publique. Le chef d’état-major de la Défense par intérim publiera également une directive exigeant la vaccination pour les membres des Forces armées canadiennes. Le gouvernement continuera de travailler avec les employeurs des autres milieux de travail sous réglementation fédérale pour s’assurer que la vaccination des travailleurs de ces secteurs est une priorité.
[Nos soulignements]
iii) Situation factuelle C – Un Client pose une exigence vaccinale
iv) Situation factuelle D – Un locataire du Client pose une exigence vaccinale
v) Situation factuelle E – Le Client, un Centre intégré de santé et de services sociaux (« CISSS »), pose une exigence vaccinale
ANNEXE C
Collecte du statut vaccinal
a) Les Employeurs peuvent-ils recueillir le renseignement relatif au statut vaccinal auprès de l’ensemble des salariés ?
b) À défaut, les Employeurs peuvent-il recueillir le renseignement relatif au statut vaccinal auprès :
i) des salariés affectés ou se faisant offrir d’être affectés à un Édifice pour lequel le Client a requis qu’ils soient adéquatement vaccinés ?
ii) des salariés effectuant des remplacements dans l’un des Édifices pour lesquels les Clients ont requis qu’ils soient adéquatement vaccinés ?
c) Si les Employeurs peuvent demander le statut vaccinal, quelle est la nature des renseignements pouvant être collectés par le supérieur immédiat ou hiérarchique ou un représentant des ressources humaines pour établir le statut vaccinal :
i) Constater sur l’application le statut « Adéquatement protégé » (couleur verte) ou « scanner » le passeport vaccinal ou demander une version papier de ce document ?
ii) Demander la date et le nombre de doses reçues d’un vaccin approuvé ou, à défaut d’être vacciné, le motif et les pièces justificatives ?
iii) Demander de signer une déclaration solennelle attestant qu’ils sont adéquatement vaccinés ?
iv) À défaut, quelles sont les informations qui peuvent être récoltées ?
Conservation du statut vaccinal
d) Étant entendu que ces renseignements seraient accessibles uniquement aux employés des Employeurs dont les fonctions requièrent d’y avoir accès, les Employeurs peuvent-ils conserver :
i) L’ensemble des renseignements qui ont été collectés ?
ii) Uniquement le statut vaccinal, à savoir : vacciné adéquatement ou non ?
Communication du statut vaccinal au Client
e) Les Employeurs peuvent-ils communiquer aux Clients :
i) Une liste nominative du statut vaccinal de l’ensemble des salariés affectés à l’Édifice ?
ii) Le statut vaccinal des salariés y ayant consenti ?
iii) Un pourcentage des salariés adéquatement vaccinés ?
iv) Une confirmation que l’ensemble des salariés affectés à l’Édifice sont adéquatement vaccinés ?
Situation du salarié refusant d’être adéquatement vacciné
f) Si un Salarié refuse d’être adéquatement vacciné et, de ce fait, ne remplit pas l’exigence vaccinale du Client pour accéder à son Édifice :
i) Ce salarié peut-il faire l’objet d’un déplacement ?
ii) Ce salarié doit-il être mis en congé administratif sans solde ?
iii) Ce salarié a-t-il fait l’objet d’une exclusion à la demande du Client en vertu du paragraphe 17.03 de la Convention ?
iv) Ce salarié doit-il être transféré administrativement ?
v) Ce salarié a-t-il fait l’objet d’une mise à pied et se voit appliquer la procédure de mise à pied prévue à l’article 18 de la Convention, soit selon le cas, le paragraphe 18.05 concernant la mise à pied d’un salarié ou l’article 18.06 concernant la mise à pied de plusieurs salariés ?
vi) Ce salarié a-t-il abandonné son poste et doit-il être inscrit sur la liste de rappel ?
AVIS :
Le lecteur doit s'assurer que les décisions consultées sont finales et sans
appel; la consultation
du plumitif s'avère une précaution utile.