Décision

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Décision

Tremblay c. Larouche

2017 QCRDL 37720

 

 

RÉGIE DU LOGEMENT

Bureau dE Saguenay

 

Nos dossiers :

246235 02 20151116 G

275934 02 20160505 G

Nos demandes :

1872935

1993900

 

 

Date :

08 août 2017

Régisseur :

Daniel Laflamme, juge administratif

 

Caroline Tremblay

 

 

Locataire - Partie demanderesse

(246235 02 20151116 G)

Partie défenderesse

(275934 02 20160505 G)

c.

Hélène Larouche

 

Richard Poirier

 

 

Locateurs - Partie défenderesse

(246235 02 20151116 G)

Partie demanderesse

(275934 02 20160505 G)

 

D É C I S I O N

 

 

[1]      La locataire a produit, le 16 novembre 2015, une demande en résiliation du bail depuis le1er décembre 2015, en diminution de loyer de 400 $ par mois depuis le mois d’août 2015 jusqu’à son départ, le remboursement des frais, et l’exécution en nature des obligations des locateurs.

[2]      Les locateurs ont produit, le 5 mai 2016, une demande en dommages-intérêts à titre d’indemnité de relocation pour les mois de décembre 2015 et janvier 2016, en dommages intérêts additionnels de 574,88 $ à titre de remboursement des sommes engagés pour la réparation d’un escalier de bois, le tout avec les intérêts et l’indemnité additionnelle prévue au Code civil, et les frais.

[3]      En vertu de l’article 57 de la Loi sur la Régie du logement, les deux demandes ont été réunies aux fins d’audition et font l’objet de la présente décision.

[4]      Il s’agit d’un bail qui couvre la période du 1er juillet 2015 au 30 juin 2016 au loyer mensuel de 800 $ pour la location d’un logement situé au rez-de-chaussée de la maison des locateurs. 

[5]      La locataire a quitté les lieux le 1er décembre 2016.

[6]      La locataire allègue au soutien de sa demande que les lieux étaient devenus inhabitables à cause du bruit provenant de la maison des locateurs. Comme elle travaille de nuit, elle était privée de son sommeil par, selon son témoignage, des bruits pourtant de vie normale.


[7]      Ainsi, l’article 976 du Code civil du Québec édicte que :

« Les voisins doivent accepter les inconvénients normaux du voisinage qui n'excèdent pas les limites de la tolérance qu'ils se doivent, suivant la nature où la situation de leur fonds, ou suivant les usages locaux. »

[8]      Donc chacun doit supporter les bruits et les inconvénients raisonnables inhérents à la vie dans un immeuble à logement multiple, sans cependant être obligé de subir les excès.

[9]      Cette partie de la demande de la locataire est donc rejetée.

[10]   La locataire allègue de plus que les locateurs ont tardé à réparer certaines défectuosités dans le logement concerné, notamment pour ce qui est des réparations suite à un dégât d’eau, de fournir un système de chauffage adéquat dans une chambre, de ne pas avoir réparé la cheminée, et de ne pas avoir installé des prises de courant additionnels.

[11]   L'article 1854 du Code civil du Québec édicte que :

« Le locateur est tenu de délivrer au locataire le bien loué en bon état de réparation de toute espèce et de lui en procurer la jouissance paisible pendant toute la durée du bail.

Il est aussi tenu de garantir au locataire que le bien peut servir à l'usage pour lequel il est loué, et de l'entretenir à cette fin pendant toute la durée du bail. »

[12]   Ainsi, cette obligation de garantie s'applique pour tout problème naissant en cours de bail.

[13]   Cependant un inconvénient bénin ou une simple trivialité ne permettent pas d'invoquer la garantie. En effet, prétendre le contraire serait d'imposer un fardeau déraisonnable au locateur et rendrait le commerce de location résidentiel presque impossible. Seuls les problèmes réduisant réellement la jouissance des lieux peuvent être considérés.

[14]   De plus, il ressort de la preuve que les travaux nécessaires ont tous été faits dans un délai raisonnable après dénonciation.

[15]   L'article 2803 du Code civil du Québec prescrit que :

« Celui qui veut faire valoir un droit doit prouver les faits qui soutiennent sa prétention.

Celui qui prétend qu'un droit est nul, a été modifié ou est éteint doit prouver les faits sur lesquels sa prétention est fondée. »

[16]   Ainsi, c'est sur les épaules de la locataire, à titre de demanderesse, que repose le fardeau de prouver de façon prépondérante le bien-fondé de ses prétentions. Le Tribunal considère que la locataire n'a pas établi cette preuve de façon à lui permettre de conclure dans le sens recherché.

[17]   La preuve a cependant établi qu’une garde-robe située dans l’entrée du logement concerné pouvait être utilisée par les locateurs qu’une ou deux fois par année selon l’entente intervenue entre les parties. Or, la preuve non contredite a démontré que les locateurs sont entrés dans le logement sans avis, 27 fois depuis le début du bail afin de récupérer des biens dans ledit garde-robe.

[18]   La locataire, de bon droit, considère que cela l’avait privé de son intimité en plus de la priver de sommeil. Ce comportement des locateurs justifie que le bail soit résilié à compter du 1er décembre 2015.

[19]   En effet, au sujet des intrusions des locateurs dans le logement à l'insu de la locataire, les articles 6, 7 et 8 de la Charte des droits et libertés de la personne du Québec prévoient :

« 6. Toute personne a droit à la jouissance paisible et à la libre disposition de ses biens, sauf dans la mesure prévue par la loi. »

« 7. La demeure est inviolable. »

« 8. Nul ne peut pénétrer chez autrui ni y prendre quoi que ce soit sans son consentement exprès ou tacite. »

[20]   En espèce, il n'y avait aucune raison qui justifiait les locateurs de pénétrer autant de fois sans préavis chez la locataire.


[21]   La demande en indemnité de relocation des locateurs est donc rejetée.

[22]   Le recours en diminution de loyer vise strictement la diminution de jouissance et a pour but de rétablir l'équilibre entre les prestations respectives des parties. Elle ne peut cependant être une compensation pour les inconvénients subis.

[23]   De plus, les montants réclamés doivent être raisonnables et cohérents avec la valeur du litige.

[24]   Le Tribunal est d’avis qu’il serait juste et raisonnable d’accorder à la locataire la somme de 100 $ par mois pour les intrusions des locateurs ainsi que pour sa perte de sommeil, ce qui représente la somme totale de 400 $.

[25]   Finalement, les locateurs ont produit des photos à l’audience afin de démontrer que les escaliers du logement concerné avaient été endommagés lors du déménagement de la locataire, ce qui est nié catégoriquement par la locataire.

[26]   L'article 1890 du Code civil du Québec édicte que :

« 1890. Le locataire est tenu, à la fin du bail, de remettre le bien dans l'état où il l'a reçu, mais il n'est pas tenu des changements résultant de la vétusté, de l'usure normale du bien ou d'une force majeure.

L'état du bien peut être constaté par la description ou les photographies qu'en ont faites les parties; à défaut de constatation, le locataire est présumé avoir reçu le bien en bon état au début du bail. »

[27]   La demande des locateurs pour la réparation de l’escalier est donc bien fondée et est maintenue pour la somme de 574,88 $.

[28]   CONSIDÉRANT l'ensemble de la preuve;

POUR CES MOTIFS, LE TRIBUNAL :

[29]   DÉCLARE le bail résilié depuis le 1er décembre 2015;

[30]   ACCUEILLE de plus la demande de la locataire pour la somme de 400 $;

[31]   ACCUEILLE la demande des locateurs pour la somme de 574,88 $;

[32]   OPÈRE COMPENSATION ENTRE LES DEUX DETTES ET CONDAMNE la locataire à payer aux locateurs la somme de 174,88 $ avec intérêts au taux légal et l'indemnité prévue par l'article 1619 du Code civil du Québec à compter du 5 mai 2016;

[33]   Chaque partie assume les frais de sa demande.

 

 

 

 

 

 

 

 

Daniel Laflamme

 

Présence(s) :

les locateurs

la locataire

Date de l’audience :  

2 août 2017

 

 

 


 

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