Multidor c. Habitations communautaires de la Shapem | 2022 QCTAL 34493 |
TRIBUNAL ADMINISTRATIF DU LOGEMENT | ||||||
Bureau dE Montréal | ||||||
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No dossier : | 616257 31 20220228 T | No demande : | 3711392 | |||
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Date : | 01 décembre 2022 | |||||
Devant la juge administrative : | Sylvie Lambert | |||||
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Gyselene Multidor |
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Locataire - Partie demanderesse | ||||||
c. | ||||||
Habitations communautaires de la Shapem |
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Locatrice - Partie défenderesse | ||||||
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D É C I S I O N
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[1] Le 10 novembre 2022, la locataire demande la rétractation de la décision rendue le 6 mai 2022 (décision visée).
[2] Elle demande également d'être relevée du défaut d'avoir produit sa demande de rétractation dans le délai de 10 jours de la connaissance de la décision.
[3] La décision visée résilie le bail de la locataire pour retard de plus de trois semaines dans le paiement de son loyer, ordonne l’exécution provisoire de la décision et condamne la locataire à payer à la locatrice la somme de 2 216 $ en loyers impayés avec les intérêts et l’indemnité additionnelle, plus les frais.
[4] L'article 89 de la Loi sur le Tribunal administratif du logement[1] (la loi) sur lequel la locataire fonde son recours prévoit qu'une partie peut demander la rétractation d'une décision rendue contre elle si cette partie a été empêchée de se présenter ou de fournir une preuve, par surprise, fraude ou autres causes jugées suffisantes.
[5] Cet article exige également que la demande de rétractation soit produite dans les 10 jours de la connaissance de la décision.
[6] La locataire soutient qu’elle n’a jamais reçu l’avis de convocation à l’audience. Elle affirme également qu’elle n’a jamais reçu la décision transmise par le Tribunal.
[7] Or, l'adresse de la locataire est valide et l'avis de convocation et la décision n’ont pas été retournés au Tribunal par Postes Canada. La locataire est présumée, de prime abord, avoir reçu ces documents[2].
[8] La preuve démontre que la locatrice a signifié à la locataire par huissier, en date du 22 octobre 2022, un avis d’exécution avec copie de la décision.
[9] La locataire soutient avoir pris connaissance de ces documents à son retour de son séjour d’un mois aux États-Unis, soit le 28 octobre 2022. Elle ne produit aucune preuve attestant de son séjour aux États-Unis.
[10] Le témoignage de la locataire quant à sa date de départ et sa date de retour des États-Unis est chaotique et confus. Elle change sa version des faits au fur et à mesure que le Tribunal relève les invraisemblances dans son témoignage.
[11] Il apparaît peu vraisemblable que la locataire n’ait pas reçu l’avis de convocation à l’audience ainsi que la décision du Tribunal avant qu’elle quitte pour les États-Unis. Elle ne fournit aucune explication sur ce point.
[12] La demande de prolongation de délai de la locataire est fondée sur l'article 59 de la Loi sur le Tribunal administratif du logement[3]:
[13] Dans l'affaire Van c. Eddarissi[4], la juge administrative Francine Jodoin s'exprime ainsi au sujet de l'article 59 de la loi :
« Dans la décision Thevenot c. Turcotte, le Tribunal écrit :
« Au sujet du motif raisonnable permettant de recevoir une demande de prolongation de délai, les auteurs Thérèse Rousseau-Houle et Martine de Billy dégagent ce qui suit de l'analyse qu'elles ont fait de la jurisprudence en la matière :
« En revanche, le retard à aller au bureau de poste, la négligence et l'ignorance de la Loi ne peuvent être retenus comme motifs raisonnables justifiant une demande d'extension de délai.
(….)»
[14] En appliquant ces principes à la présente affaire, le Tribunal conclut que la locataire n’a pas démontré un motif raisonnable justifiant de la relever de son défaut d'avoir produit sa demande dans le délai imparti de 10 jours.
[15] Mais il y a plus.
[16] Même si le Tribunal avait relevé la locataire de son défaut de respecter le délai de 10 jours, la demande de rétractation aurait tout de même été rejetée.
[17] Dans l'affaire Charbonneau c. St-Laurent[5], la juge administrative Jocelyne Gravel mentionnait ce qui suit :
« On constate qu'un défendeur doit également prouver avoir un moyen de défense valable à faire valoir à l'encontre de la demande originaire. Dans l'éventualité où les moyens de défense invoqués sont voués à l'échec, il serait dès lors inutile de permettre la rétractation.
Tel qu'exprimé par la Cour d'appel du Québec, les motifs d'une demande de rétractation doivent être sérieux puisqu'elles ont pour effet de déroger au principe de l'irrévocabilité des jugements. »
[18] En l’espèce, la preuve démontre que la locataire n’a pas de défense sérieuse à faire valoir. À la date de l’audience, elle devait les montants pour lesquels le Tribunal l’a condamnée.
[19] D’ailleurs, la preuve démontre qu’elle a pris entente avec la locatrice afin de payer sa dette avec des modalités de paiement.
POUR CES MOTIFS, LE TRIBUNAL :
[20] REJETTE la demande de la locataire qui en assume les frais.
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Sylvie Lambert | ||
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Présence(s) : | le locataire la mandataire du locateur | ||
Date de l’audience : | 28 novembre 2022 | ||
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[1] RLRQ, c. T-15.01.
[2] Selon l’article 16 du Règlement sur la procédure devant le Tribunal administratif du logement (RLRQ, c. T-15.01, r. 5), l'attestation d'expédition de l'avis fait preuve prima facie de sa réception par le destinataire.
[3] Article 59 de la Loi sur le Tribunal administratif du logement.
[4] Van c. Eddarissi, R.D.L., 2015-05-05, 2015 QCRDL 14373,
[5] Charbonneau c. St-Laurent, R.L., Montréal, 31-0505508-055T-060905,26 septembre 2006.
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