Décision

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R. c. Légaré

2022 QCCQ 1939

COUR DU QUÉBEC

 

CANADA

PROVINCE DE Québec

DISTRICT DE

Québec

LOCALITÉ DE

Québec

« Chambre criminelle et pénale »

 :

200-01-245666-213

 

 

 

 

 

DATE :

22 avril 2022

______________________________________________________________________

 

SOUS LA PRÉSIDENCE DE

L’HONORABLE

JEAN-LOUIS LEMAY, J.C.Q.

______________________________________________________________________

 

LA REINE

Poursuivante

 

c.

ÉRIC LÉGARÉ

Accusé

______________________________________________________________________

 

DÉCISION SUR LA PEINE

______________________________________________________________________

 

I. INTRODUCTION

[1]                Le 2 septembre 2021, l’accusé emboutit violemment deux véhicules immobilisés à une intersection alors qu’il roule à plus de 130km/h.

[2]                Il cause la mort de James Fletcher, 68 ans, sa fille Shellie Fletcher, 44 ans et ses deux jeunes enfants, Jackson Fortin, 14 ans et Emma Lemieux, 10 ans.

[3]                Du même coup, il inflige des lésions corporelles à Trésor Élie Ndeng-Nkouanga, 32 ans et à sa mère, Cécile Ongmoka, 56 ans, tous deux occupants du second véhicule.

[4]                Le 14 décembre 2021, l’accusé reconnaît sa culpabilité à quatre infractions d’avoir causé la mort d’une personne et à deux infractions d’avoir causé des lésions corporelles à une personne alors qu’il conduisait un véhicule à moteur et que son taux d’alcoolémie dépassait 80 milligrammes d’alcool par 100 millilitres de sang.

[5]                Le même jour, il plaide coupable sous quatre chefs d’accusation d’avoir causé la mort d’une personne et sous deux autres chefs d’avoir causé des lésions corporelles à une personne alors qu’il conduisait un véhicule à moteur de façon dangereuse pour le public.

[6]                Finalement, il plaide coupable d’avoir omis sans excuse raisonnable de s’arrêter ayant conduit un véhicule à moteur impliqué dans un accident avec un autre moyen de transport.

[7]                Suite aux déclarations de culpabilité, des suspensions conditionnelles des procédures sont  prononcées relativement aux quatre infractions d’avoir causé la mort d’une personne et à deux infractions d’avoir causé des lésions corporelles à une personne alors qu’il conduisait un véhicule à moteur et que sa capacité de conduire ce véhicule était affaiblie par l’effet de l’alcool et d’une drogue.

[8]                Le tribunal doit maintenant décider de la peine à imposer à l’accusé.

[9]                Le tribunal a dû malheureusement le mentionner à plusieurs reprises par le passé, il n’est pas question ici de déterminer le coût d’une vie ou d’une lésion corporelle, non plus d’un simple calcul mathématique ou encore d’une comparaison stérile de la souffrance de plusieurs familles meurtries, mais plutôt l’application pondérée et juste des principes, objectifs et facteurs prévus à la loi et précisés par la jurisprudence.

II. CONTEXTE

[10]           Les parties ont déposé un exposé conjoint des faits[1].

[11]           Le 2 septembre 2021 vers 13h30, l’accusé arrive seul à bord de son véhicule sur la rue Saint-Joseph Est à Québec.

[12]           Il se rend au Pub du Parvis et s’installe au bar afin d’y consommer un repas.

[13]           Il fraternise avec des gens sur place et consomme avec eux au courant de l’après-midi sept verres de vin et trois « shooters ».

[14]           Des caméras de surveillance permettent de constater qu’au fur et à mesure que l’après-midi progresse, ses déplacements à l’intérieur du Pub deviennent hésitants. Il titube à plusieurs reprises[2].

[15]           Il quitte à 17h30 et se rend péniblement à sa voiture perdant même l’équilibre en voulant saisir la poignée de la portière[3].

[16]           Malgré un espace généreux pour manœuvrer, il peine à sortir son véhicule de la case de stationnement en bordure de rue[4].

[17]           Il lui faut près de trois minutes et plusieurs impacts avec le véhicule stationné devant lui pour enfin réussir à s’engager sur la rue[5].

[18]           Après s’être engagé sur la voie publique, il louvoie et empiète sur le trottoir alors que des piétons y déambulent. Il tourne en direction inverse d’une rue à sens unique[6].

[19]           Alors qu’il tente de se sortir d’une impasse, l’accusé entre en collision avec un véhicule stationné et des murets de béton.

[20]           Reprenant la route, il omet de faire un arrêt obligatoire à l’intersection d’une artère névralgique du quartier[7].

[21]           Continuant sa route, il emprunte la voie inverse et effectue un dépassement à haute vitesse d’un véhicule tout en omettant de faire son arrêt obligatoire à une intersection quadruple située aux abords d’un parc et d’une école primaire alors qu’un autobus de transport collectif arrive dans l’autre direction[8].

[22]           Il s’engage sur l’autoroute Dufferin-Montmorency, il louvoie, roule très rapidement et effectue des dépassements dangereux[9].

[23]           Il arrive à la hauteur de la sortie François-de-Laval. À cet endroit précis se trouvent trois voies de circulation en direction est et une quatrième à l’extrême gauche exclusivement réservée à un virage pour quitter l’autoroute à l’appel d’un feu de circulation.

[24]           Les véhicules des victimes sont immobilisés au feu de circulation en attente de s’engager dans la sortie.

[25]           La limite de vitesse est de 70km/h à cet endroit. L’accusé s’engage dans cette voie de gauche à une vitesse estimée minimalement de 130km/h.

[26]           Sans jamais freiner, l’accusé frappe de plein fouet l’arrière du premier véhicule, celui de la famille Fletcher. Vu l’impact violent, ce véhicule ira emboutir lourdement le second occupé par monsieur Ndeng-Nkouanga et sa mère[10].

[27]           Les passagers avant du premier véhicule, le grand-père et sa fille, décèdent sur le coup. Les deux enfants assis à l’arrière, seront déclarés cliniquement morts le lendemain à l’hôpital en attente du don de leurs organes dans la semaine suivante.

[28]           Les deux occupants du second véhicule ont subi un traumatisme craniocérébral léger.

[29]           Lors de l’événement, la température est clémente, le ciel est gris, mais il n’y a aucune précipitation et la chaussée est sèche. Aucun élément mécanique n’a pu contribuer à la collision.

[30]           La seule cause de cette collision fatale est la conduite criminelle de l’accusé.

[31]           L’accusé est légèrement blessé lors de la collision. Prisonnier de son véhicule, certains témoins le voient rire, il semble prendre la situation à la légère.

[32]           Escorté à l’hôpital, les policiers procèdent à son arrestation et il exerce ses droits constitutionnels.

[33]           Requis de fournir un échantillon de sang suivant les prescriptions du Code criminel, celui-ci révélera qu’au moment de la collision l’accusé avait un taux de 209 milligrammes d’alcool par 100 millilitres de sang et 6,9 nanogrammes de THC[11] par millilitre de sang[12].

[34]           À l’hôpital, il dira aux policiers « qu’il avait fini [ de travailler ] à 16h et qu’il était allé au resto deux22 sur St-Jo ».

[35]           Quatre jours plus tard, en détention, il affirme aux enquêteurs qu’il ne prend pas beaucoup d’alcool et que malgré qu’il n’est pas alcoolique, il ne boira plus jamais.

[36]           Il ajoute consommer du cannabis occasionnellement.

[37]           Lors de ce même entretien, il dira sur le lieu de la collision que c’est un coin qu’il connaît bien. Au moment des événements, il n’avait pas l’intention de tourner à gauche à la sortie, il devait continuer tout droit pour se rendre chez lui.


[38]           Finalement, il précise avoir déjà complété par le passé le programme de sensibilisation « ÉducAlcool » dans le cadre du processus visant à récupérer son privilège de conduire suite à une première condamnation pour conduite avec les facultés affaiblies.

III. PREUVE SUR LA PEINE

  • Poursuite

[39]           Le dossier de conduite de l’accusé à la Société de l’assurance automobile du Québec contient huit inscriptions pour des infractions de vitesse excessive entre 2007 et 2020[13].

[40]           On note également deux infractions pour ne pas avoir effectué un arrêt obligatoire, toutes deux le 27 février 2015[14]. À cette même date, il est également arrêté une première fois pour conduite avec les facultés affaiblies par l’effet de l’alcool ou d’une drogue[15].

[41]           Il est condamné pour cette infraction le 3 octobre 2017 et interdit de conduire pour une durée de 12 mois à partir de ce moment[16].

[42]           Le ministère public réfère également à des statistiques canadiennes sur la conduite avec les facultés affaiblies datées du 15 juillet 2021[17] ainsi qu’à une admission des parties sur les coûts engendrés par la Société d’assurance automobile du Québec pour l’indemnisation, la prévention et la sensibilisation en lien avec l’alcool au volant[18], dont je traite plus loin.

[43]           Le tribunal prend également connaissance d’une preuve étoffée sur les conséquences du crime vécues par les victimes de l’événement.

[44]           Tantôt déposées sous forme de déclarations ou de lettres[19], tantôt lues par leurs auteurs ou par le procureur du directeur des poursuites criminelles et pénales ou encore rendues sous forme de témoignages à la cour, les victimes expriment toutes et tous, à tour de rôle, l’ampleur du drame qu’ils vivent.

[45]           La détresse et la douleur qui les habitent sont parfois difficilement communicables pour eux. On sent qu’ils peinent à trouver des mots assez forts pour exprimer leur souffrance.

[46]           Un père a perdu son petit clown mélomane, souriant et sportif. Un autre, sa fille douce et bienheureuse en même temps que sa femme aimante, organisée et généreuse.

[47]           Un fils a perdu son père aimant et travaillant, son homme d’honneur.

[48]           Une femme a perdu son mari des 47 dernières années, sa fille bien-aimée et deux de ses petits- enfants d’un seul coup.

[49]           Tenter de résumer les témoignages et traduire en mot le chagrin immense de ces 17 personnes serait injuste envers le courage qu’elles ont eu de se livrer entières et fragiles malgré la douleur.

[50]           Les images, les réflexions et les métaphores utilisées par la famille, les parents et les amis permettent de deviner des êtres fortement éprouvés et qui le seront à jamais.

  • Défense

[51]           La sœur, la mère et le père de l’accusé témoignent à l’audience.

[52]           Ils sont également fortement éprouvés par les événements. Ils sympathisent avec la famille des victimes et confirment que l’accusé est anxieux, triste et habité de remords.

[53]           Sa sœur relate qu’elle n’a pu déceler les signes que l’accusé allait moins bien avant les événements. Elle constate qu’il consomme davantage de cannabis depuis la pandémie.

[54]           Sa mère constate le même phénomène à l’été 2021. Elle en parle même à d’autres personnes pour s’assurer d’avoir un portrait juste.

[55]           Elle souligne que son fils était malheureux de leur dénoncer son premier antécédent de conduite avec les facultés affaiblies en 2017, il savait qu’il les décevait.

[56]           Son père relate la mort de sa propre sœur il y a plusieurs années à cause d’un conducteur ivre et du suicide subséquent de sa seconde sœur qui ne supportait plus cette perte.

[57]           La mère et le père diront qu’ils travaillent pour conserver les biens immobiliers de leur fils afin de l’aider à se réhabiliter à sa sortie de détention.

[58]           Finalement, l’accusé témoigne lors de l’audience sur la détermination de la peine.

[59]           En ouverture, il demande à lire une lettre. Il exprime aux familles des victimes des remords, des regrets sentis et des excuses sincères pour la souffrance et la douleur qu’il leur a causée.

[60]           Au moment des événements, l’accusé a 43 ans.

[61]           Il travaille depuis plus de 20 ans dans un centre de recherche et est copropriétaire d’une entreprise de tourisme d’aventure depuis plusieurs années.

[62]           Selon son témoignage, le confinement, conséquence de la pandémie, a altéré sa santé mentale. L’oisiveté, une relation amoureuse toxique, le cancer de son associé et une réorganisation à la direction de son travail ont exacerbé cette détérioration.

[63]           L’accusé ne réalise pas que ses habitudes de consommation changent et entraînent des effets néfastes sur son mode de vie.

[64]           D’une seule consommation quotidienne, l’usage du cannabis a évolué à près de quatre à cinq fois par soir.

[65]           L’usage de l’alcool augmente aussi durant la même période. Il admet que sa routine de consommation hebdomadaire au restaurant et au bar est problématique.

[66]           Il ne demande pas d’aide professionnel à l’époque.

[67]           Depuis son arrestation, il s’est engagé en détention dans un suivi individuel au programme Toxicomanie-Justice[20].  Il a l’intention de persévérer lors de son incarcération.

[68]           Suite à sa première condamnation pour conduite avec les facultés affaiblies, il a payé une amende, a dû prendre le transport en commun durant trois mois et conduire son véhicule muni d’un antidémarreur avec éthylomètre pour les 9 mois suivants.

[69]           Il était sensible à la perte de vie humaine en lien avec ce crime vu l’historique familial de son père.

[70]           Il reconnaît que toutes ces sanctions et cette sensibilisation n’ont pas été suffisantes pour l’empêcher de récidiver.

[71]           Il admet qu’il a manqué de jugement le jour des événements et qu’il avait l’occasion de prendre d’autres décisions.

[72]           Il se questionne à savoir pourquoi il n’a pas pris un taxi ou un service de raccompagnement communautaire, pourquoi il n’a pas appelé ses amis, ses parents, sa sœur.

[73]           Il rapporte avoir un souvenir partiel des événements, mais reconnaît tout de même entièrement sa responsabilité criminelle.

 

 

[74]           Il explique ses versions contradictoires aux policiers le soir des événements par un traumatisme crânien sévère. Celles livrées quatre jours plus tard s’expliqueraient plutôt par le stress et le désir de minimiser sa responsabilité.

[75]           Il termine son témoignage sur un poème de son cru réitérant au passage ses remords, mais principalement axé sur le support de sa famille et de ses proches.

[76]           Finalement, un rapport prédécisionnel est produit à la demande du tribunal. Dans son ensemble, il est somme toute relativement positif, mais nous communique peu d’éléments que l’on ne retrouve déjà dans la preuve déposée à la cour et les témoignages entendus.

IV. POSITION DES PARTIES

[77]           Pour les huit infractions d’avoir causé la mort de quatre personnes en conduisant un véhicule de façon dangereuse et avec un taux d’alcool supérieur à 80 milligrammes d’alcool par 100 millilitres de sang, le procureur du directeur des poursuites criminelles et pénales suggère qu’une peine de pénitencier oscillant entre 18 et 20 ans assortie d’une interdiction de conduire à perpétuité serait raisonnable dans les circonstances, compte tenu de la jurisprudence en semblable matière. Les quatre infractions de conduite ayant causé des lésions corporelles pourraient, elles, être punies d’une peine de deux ans concurrente.

[78]           Quant à l’accusation de délit de fuite, une peine à être purgée concurremment de six mois serait justifiée.

[79]           En contrepartie, le procureur de l’accusé plaide que la situation sociale de l’accusé, son potentiel de réhabilitation, ses remords et ses regrets militent pour une peine de 10 ans de pénitencier pour les quatre infractions de conduite d’un véhicule avec plus de 80 milligrammes d’alcool par 100 millilitres de sang causant la mort et pour les quatre chefs de conduite dangereuse causant la mort. Une peine de six ans pour les infractions de conduite ayant causé des lésions corporelles pourrait être imposée de façon concurrente. Il laisse à la discrétion du tribunal la peine pour le délit de fuite, tout comme la durée de l’interdiction de conduire, en soulignant que de retrouver éventuellement le privilège de conduire aidera l’accusé à demeurer un actif pour la société.

[80]           Il soutient que ces peines seraient justes et raisonnables parce qu’à la fois exemplaires tout en respectant les principes d’individualisation, d’harmonisation et de parité.


V. PRINCIPES DE DÉTERMINATION DE LA PEINE

[81]           Le Code criminel, à son article 718, énumère les principaux objectifs à atteindre lors de l’imposition d’une peine : dénoncer le comportement illégal, dissuader le délinquant et toute autre personne de commettre de telles infractions, isoler au besoin le délinquant du reste de la société, favoriser sa réinsertion sociale, assurer la réparation des torts causés aux victimes et, susciter chez le délinquant la conscience de sa responsabilité notamment par la reconnaissance des torts causés aux victimes.

[82]           Les articles 718 à 718.2 du Code criminel permettent tout de même de façonner une peine proportionnelle et adaptée à la nature et à la gravité de l’infraction, ainsi qu’à la situation personnelle du délinquant et à son degré de responsabilité. Ce processus individualisé doit s’ajuster aux circonstances aggravantes et atténuantes particulières à chaque affaire afin d’atteindre une peine juste[21], tout en tenant compte du principe de l’harmonisation tempérée par la règle de la proportionnalité[22].

[83]           Ces fourchettes de peines, qui découlent du principe de parité et du désir de maintenir une cohérence entre les peines, ne restent que des guides pour la cour. Elles ne constituent pas un « carcan » duquel on ne peut s’écarter.[23]

[84]           Elles ne doivent jamais être considérées contraignantes à quelque titre que ce soit[24]. Ce sont des lignes directrices et non des règles absolues[25].

[85]           La proportionnalité reste le pivot permettant d’atteindre une sanction juste, équitable et fondée sur les principes énoncés à l’article 718 du Code criminel. C’est le principe fondamental[26].

[86]           Les principes de parité et d’individualisation sont secondaires malgré leur importance[27].

[87]           De toute façon, l’individualisation émane de la proportionnalité. En effet, la peine doit être adaptée à la situation particulière du délinquant et aux circonstances particulières de l’infraction pour être proportionnelle à la gravité de l’infraction et au degré de responsabilité du délinquant[28].

[88]           C’est cette évaluation centrée sur l’accusé et son propre crime qui permettra d’atteindre la proportionnalité, mais aussi sur l’évaluation d’autres crimes commis par d’autres délinquants[29].

[89]           Il est en conséquence inévitable et normal de constater des écarts entre les différentes peines prononcées pour des crimes donnés[30].

[90]           Cela explique que parfois des peines qui n’ont jamais été prononcées à l’encontre d’infractions similaires doivent l’être en raison de la proportionnalité[31].

[91]           À ce sujet, le tribunal a pris connaissance de plusieurs décisions sur la peine rendues au Québec et à travers le pays pour ce type de crime[32].

[92]           Certaines d’entre elles font également état d’une étude minutieuse de plusieurs décisions dont entre autres l’affaire Comeau de notre Cour[33], confirmée par la Cour d’appel du Québec[34], ou l’affaire Martin de la Cour supérieure du Québec[35].

[93]           La défense soumet quelques décisions où les peines varient entre 4 ans et demi et 14 ans, en invitant toutefois le tribunal à constater les différences quant aux caractéristiques des crimes et des délinquants.

[94]           Le ministère public dépose aussi plusieurs décisions. On constate que les peines, selon les circonstances pour les individus, varient entre 3 ans et 14 ans pour des crimes similaires.

[95]           Ces écarts significatifs montrent bien ce que tentait d’exprimer le juge Lebel de la Cour suprême dans l’affaire L.M. : toute étude comparative comporte en soi des limites, si les circonstances le justifient, le principe de la parité n’interdit pas la disparité, ce qui nous ramène au critère de la proportionnalité[36].

[96]           Dans la détermination de la peine, le Tribunal doit également prendre en compte la possibilité de rendre une sanction moins contraignante que l’emprisonnement ou une alternative à celle-ci[37]. Toutefois, les circonstances décrites précédemment et la position des parties rendent cet objectif superfétatoire.

[97]           Enfin, il faut s’assurer d’éviter l’excès de nature ou de durée occasionnée par l’infliction de peines consécutives[38]. Ici, la concomitance des infractions commande plutôt des peines concurrentes, réglant du même coup cette préoccupation.

[98]           Il faut donc comprendre qu’aucun des objectifs prévus au Code ne prime sur les autres. Cependant, compte tenu des faits, l’importance à accorder à l’un ou plusieurs d’entre eux permettra d’ajuster la peine à l’intérieur de la fourchette des peines appropriées pour des infractions de semblable nature[39].

[99]           On comprend aussi que le tribunal peut et doit accorder plus de poids à certains objectifs en certaines circonstances.

 

VI. ANALYSE

[100]       Qu’en est-il maintenant des circonstances en l’espèce?

  • Circonstances aggravantes

[101]       Les circonstances entourant la perpétration des infractions comportent plusieurs facteurs aggravants.

[102]       La gravité objective des crimes pour lesquels l’accusé a plaidé coupable est très élevée. Bonifie également cette gravité l’avis de récidive déposé[40] obligeant l’octroi d’une peine minimale, quoique théorique en l’espèce.

[103]       Les huit chefs d’avoir causé la mort de quatre personnes par une conduite avec une alcoolémie supérieure à 80 milligrammes d’alcool par 100 millilitres de sang et une conduite dangereuse sont tous passibles de l’emprisonnement à perpétuité, peine la plus élevée se trouvant au Code criminel.

[104]       Les quatre chefs d’avoir causé des lésions corporelles à deux autres victimes en commettant les mêmes infractions sont tous passibles d’une peine maximale d’emprisonnement de 14 ans. Le chef de délit de fuite est punissable quant à lui, d’un emprisonnement maximal de 10 ans.

[105]       La responsabilité pénale de l’accusé est entière, son rôle dans cette tragédie est prééminent.

[106]       Sa verbalisation d’un souvenir partiel des événements contraste avec son niveau de conscience effectif constaté tantôt par l’envoi de courriels, le règlement de sa facture, l’orientation vers sa voiture ou encore vers sa résidence.

[107]       Un accident est un événement soudain et imprévu. Prendre la décision de conduire après avoir bu et que par ce geste on entraîne la mort ou des blessures, même si ce n’est pas prémédité, c’est bel et bien un crime et non un accident.

[108]       D’autant plus que l’accusé a fait fit d’examiner toutes les alternatives qui s’offraient à lui au lieu de conduire son véhicule.

[109]       Par ailleurs, les tribunaux supérieurs l’ont souligné avec justesse, un élément constitutif d’une infraction ne constitue pas un facteur aggravant et est déjà sanctionné par la déclaration de culpabilité de l’accusé[41].

[110]       Toutefois, la distance parcourue et la persistance de l’accusé à continuer sa route malgré les difficultés éprouvées à quitter le centre-ville avec son véhicule restent pertinentes, tout comme la cascade de crime qu’il commet dans un court laps de temps.

[111]       L’accusé avait 43 ans au moment des crimes. Il ne peut prétendre se comparer à un jeune homme vulnérable avec une culpabilité morale moins élevée, bien au contraire. L’accusé est un homme mature avec un bagage et une expérience de vie chargée nous éloignant de l’erreur de jeunesse[42].

[112]       C’est d’ailleurs sous cette enseigne qu’entre en jeu le potentiel de réinsertion sociale du délinquant, qui, faut-il ne pas l’oublier, est un objectif qui fait partie des valeurs morales fondamentales de notre pays[43].

[113]       Accabler un jeune adulte dans la vingtaine d’une lourde peine pourrait miner cette perspective. L’accusé, en raison de son âge aura un horizon professionnel déjà plus restreint au sortir du pénitencier, même dans la perspective suggérée par la défense.

[114]       Cela dit, son entreprise de plein air pourrait certes représenter une alternative salvatrice pour lui permettre de réintégrer la société.

[115]       De plus, ses parents veillent à conserver ses acquis immobiliers pour faciliter cette réinsertion sociale qui, selon le rapport présentenciel, présente une perspective positive.

[116]       Au nombre des circonstances aggravantes s’ajoute son dossier de conduite peu reluisant. Le nombre élevé d’infractions démontre l’attitude téméraire et irresponsable de l’accusé[44].

 

[117]       Les crimes de l’accusé constituent une récidive puisqu’il a déjà été condamné en octobre 2017 en semblable matière. C’est donc dire que lors de l’événement, l’accusé avait retrouvé un permis libre de sanctions depuis un peu moins de trois ans.

[118]       Le Code criminel codifie à l’article 320.22 certaines circonstances aggravantes que l’on retrouve ici par ailleurs.

[119]       Au paragraphe a), on invite le tribunal à considérer le nombre de victimes qui sont décédées ou qui ont subi une lésion. Il s’agit d’un ajout du législateur en 2018. Est-ce utile ici de rappeler que l’accusé a tué quatre membres d’une même famille tout en blessant deux autres personnes.

[120]       C’est d’ailleurs ce qui rend plus complexe l’objectif visant à assurer la réparation des torts causés aux victimes et à la collectivité.

[121]       Le tribunal note toutefois le désir de l’accusé à sa sortie de prison d’offrir de l’aide et du soutien à des pères en difficulté par le biais de son expérience en tourisme d’aventure.

[122]       L’alcoolémie de l’accusé au moment de la collision était de 209 milligrammes d’alcool par 100 millilitres de sang, c’est un peu moins que trois fois la limite légale permise et au-delà des 120 milligrammes d’alcool par 100 millilitres de sang, que le paragraphe e) indique comme une circonstance aggravante à prendre en compte.

[123]       La consommation de cannabis témoigne également de l’irresponsabilité de l’accusé[45].

[124]       Pour comparaison, le législateur a fixé la limite légale de THC à 2,5 nanogrammes par millilitre de sang si on conduit un moyen de transport à la fois intoxiqué par l’alcool et la drogue[46]. Or, l’accusé a 6,9 nanogrammes de THC par millilitre de sang au moment du prélèvement à l’hôpital.

[125]       L’infraction est d’ailleurs la conséquence directe de l’abus d’alcool et de drogue de l’accusé vu son incapacité et son absence de volonté à la contrôler. Dès lors, c’est un autre facteur que l’on additionne dans la gravité subjective du crime[47].

[126]       C’est entre autres un élément qui devra être amélioré pour amoindrir le risque de récidive selon le rapport présentenciel. D’ailleurs, l’auteure du rapport ne peut l’écarter à ce jour.

[127]       On ne peut non plus passer sous silence les conséquences dramatiques et les séquelles profondes des familles des victimes et de leurs proches.

[128]       Ils sont toutes et tous des victimes à part entière[48]. Les conséquences éprouvées et leur souffrance vécue constituent un facteur aggravant qui doit être pris en compte en l’espèce[49].

[129]       Si le comportement et l’attitude de l’accusé après la collision et ses déclarations à l’hôpital doivent être pris avec circonspections vu son état d’ivresse et le choc[50], il en va autrement de sa déclaration aux policiers quatre jours plus tard.

[130]       Conscient de ses droits constitutionnels, il ment délibérément aux enquêteurs dans le but avoué de minimiser sa responsabilité.

  • Circonstances atténuantes

[131]       À ce chapitre, elles se déclinent en moins grand nombre.

[132]       En tête de liste vient le plaidoyer de culpabilité rapide de l’accusé[51].

[133]       Il évite aux victimes survivantes de témoigner et permet aux familles et amis des victimes décédées de bénéficier rapidement du répit que génère la fin des procédures judiciaires et démontre une amorce de responsabilisation.

[134]       Par contre, un plaidoyer de culpabilité face à une preuve accablante comme en l’espèce perd de l’importance[52].

[135]       La preuve vidéo abondante retraçant minute par minute les agissements de l’accusé, du début de sa consommation à la fin tragique, les preuves scientifiques et les présomptions légales ne laissaient qu’une infime marge de manœuvre à l’accusé[53].

[136]       L’accusé s’adresse à la famille à l’audience et présente des excuses accompagnées de remords et de regrets qui semblent sincères.

[137]       À l’inverse du criminel endurci, on est en droit de s’attendre que l’accusé regrette, soit habité de remords et implore le pardon.

[138]       Sans en diminuer la valeur atténuante et malgré la sincérité apparente de ses remords, ils sont souvent reçus comme une mince consolation pour les victimes.

[139]       Cependant, additionnées au plaidoyer de culpabilité, ces dernières circonstances sont des facteurs à considérer en regard de l’objectif de susciter la conscience du délinquant à ses responsabilités et du tort qu’il a causé aux victimes et à la collectivité.

[140]       Le fait qu’il a cessé de boire et son implication dans un programme thérapeutique méritent d’être mentionnés, mais vu son incarcération, la portée de sa valeur atténuante demeure limitée.

[141]       Un rapport présententiel généralement positif est produit. Mais c’est normalement ce à quoi on devait s’attendre d’un type comme l’accusé mû par des valeurs prosociales.

[142]       Ces crimes sont généralement commis par des citoyens respectueux des lois comme l’accusé[54]. Si la vie d’un délinquant ayant connu une enfance malheureuse, reçut une mauvaise éducation ou vécu des traumatismes peuvent constituer des facteurs atténuants, il en va tout autrement pour l’accusé qui était très bien outillé pour affronter la vie.

[143]       Son enfance paisible, sa bonne éducation et ses valeurs prosociales ont un poids marginal ici.

[144]       D’ailleurs, une peine significative peut être indiquée même pour un individu sans antécédents judiciaires, de bonnes mœurs et étant un actif pour la société[55].

[145]       Finalement, le tribunal est sensible à la peine et au désarroi de la famille et des amis de l’accusé, mais ce facteur joue un rôle atténuant très négligeable. Sa valeur est mitigée en ce que cela constitue justement des conséquences du propre geste de l’accusé.

[146]       Ultimement, il ne s’agit donc pas de déterminer dans quelles catégories de circonstances les facteurs se retrouvent en plus grand nombre, mais du poids que l’on accorde à chacun dans l’analyse de l’individualisation qui est au cœur de la proportionnalité[56].

VII. LA PEINE APPROPRIÉE

[147]       Au final, le tribunal doit appliquer tous les principes énoncés précédemment et  ensuite tenter de trouver sa place dans une des trois catégories incluses à la fourchette établie dans la décision Comeau de la Cour d’appel du Québec en 2009[57].

 

[148]       Les parties concèdent toutefois, par leur suggestion, que l’on se retrouve dans la catégorie résiduelle décrite à la décision :

« Les peines d’incarcération supérieure à neuf ans seront ainsi réservées aux pires affaires, celles dans lesquelles l’on aura tendance à se rapprocher du scénario du pire crime commis par le pire des délinquants. »[58]

[149]       Pourtant, quelques mois plus tôt, la Cour suprême nous rappelait que la peine maximale ne devrait justement pas être réservée aux pires circonstances commises par le pire des criminels[59].

[150]       Le tribunal n’a donc pas à conjecturer et tenter de comparer son dossier à des scénarios d’horreur abstraits[60].

[151]       S’il semble plus facile d’identifier le pire des criminels, qu’en est-il du pire des crimes? Le pire des crimes aux yeux de qui? Aux yeux d’un initié du milieu judiciaire, de ceux d’un accusé repenti, d’un public exalté ou encore de victimes meurtries?

[152]       Perdre un seul enfant n’est-il pas la pire des circonstances? Perdre du même coup son enfant, ses deux petits-enfants et son mari ne nécessite aucunement la création d’un scénario d’horreur abstrait, il est bien réel ici.

[153]       De la façon dont elle a été rédigée, il y a maintenant 14 ans, cette dernière phrase dans la fourchette de l’affaire Comeau[61] ne semble plus être en phase avec l’évolution législative et jurisprudentielle.

[154]       Il est vrai que la Cour d’appel du Québec nous invite à faire preuve de retenue en regard des objectifs de dénonciation et de dissuasion, car les données empiriques ne permettent pas de préciser leurs effets, amenant certaines cours d’appel à leur octroyer un caractère incertain et limité[62].

[155]       Elle souligne de surcroît qu’il faut éviter de punir un crime plutôt qu’un délinquant en limitant l’exercice à ces considérations et rechercher un juste équilibre entre les différents objectifs pénologiques[63]. La peine doit donc être proportionnelle à la gravité de l’infraction et au degré de responsabilité du délinquant.

[156]       Mais ici, il est plutôt question du poids que le tribunal accorde à un objectif et non pas à l’absence de considération qu’il a pour les autres, bien au contraire.

[157]       Il reste que le législateur reconnaît toujours la pertinence de cet objectif en le maintenant au paragraphe b) de l’article 718 du Code criminel[64].

[158]       Au fil des années, l’intention du législateur a toujours été claire de marquer la gravité objective des crimes de conduite sous l’effet de l’alcool ou d’une drogue par une succession de modifications législatives. Tantôt en augmentant la peine maximale, tantôt en augmentant successivement le seuil des peines minimales, en excluant les facultés affaiblies causant la mort de l’octroi d’un sursis ou encore en codifiant de nouvelles circonstances aggravantes à prendre en compte[65].

[159]       Cette évolution législative des peines illustre le désir du législateur que ces infractions soient sanctionnées avec plus de sévérité[66].

[160]       De plus en 2018, de façon atypique, le législateur a même codifié dans un préambule de la section Infractions relatives aux moyens de transport du Code criminel que la conduite d’un moyen de transport est un privilège soumis à des règles particulières et à la sobriété[67].

[161]       Il ajoute également que doivent être favorisées toutes mesures visant à dissuader quiconque de conduire dangereusement ou avec les capacités affaiblies, car ce comportement représente une menace pour la vie, la santé et la sécurité des Canadiens et Canadiennes[68].

[162]       On a donc cristallice que la Cour suprême disait déjà en 1996 : le Code criminel exprime les valeurs communes que partagent les Canadiens et les Canadiennes[69].

[163]       Également, au fil du temps, de nombreux tribunaux ont souligné la réprobation sociale généralisée à l’encontre de ces infractions de conduite avec les facultés affaiblies.

[164]       En 2007, notre Cour d’appel souligne que le besoin pressant de dénoncer ce type de crime a amené des peines de plus en plus sévères[70].

[165]       Les peines augmentent car la gravité de ces crimes s’évalue plus en fonction des conséquences et de l’ampleur de celles-ci que du degré de conscience coupable d’un délinquant souvent non criminalisé et n’ayant pas voulu cet incident tragique[71].

[166]       Tour à tour la Cour d’appel de l’Ontario, la Cour supérieure de l’Ontario et la Cour supérieure du Québec, notent aussi cette tendance progressive au fil des ans[72].

[167]       Cela dit, il ne saurait être question de vengeance ici. Il s’agit plutôt de déterminer objectivement la peine appropriée suivant la culpabilité morale du délinquant en raison des risques qu’il a pris intentionnellement et du préjudice qu’il a causé. Il ne s’agit donc pas d’infliger des représailles qui, elles, seraient plutôt guidées par l’émotion ou la colère[73].

[168]       Malheureusement, la situation ne semble guère s’être améliorée depuis des décennies. En 1994, le juge Cory de la Cour suprême constatait que ce type de crime constituait la plus grande perte sociale au pays[74].

[169]       Vingt et un ans plus tard, le juge Wagner, juge en chef de la Cour suprême arrive au même constat dans l’affaire Lacasse. Les infractions de conduite avec les capacités affaiblies sont celles qui entraînent le plus de décès au Canada[75].

[170]       Et aujourd’hui, 28 ans après le cri du cœur du juge Cory, la conduite avec les facultés affaiblies demeure l’une des principales causes de mort criminelles au Canada.  Cette infraction est aussi la deuxième qui est la plus souvent traitée par les tribunaux[76]. 

[171]       La Société de l’assurance automobile du Québec y consacre annuellement 50 millions de dollars en indemnisation et 2 millions en prévention et en sensibilisation[77].

[172]       En l’espèce, la dissuasion générale peut opérer en envoyant un message à quiconque pourrait être tenté de commettre le même crime, mais en autant que l’accusé mérite une telle peine[78].

[173]       Dans les dossiers de conduites avec capacités affaiblies, la dénonciation et la dissuasion générale ont une saveur particulière en ce qu’elles s’adressent principalement à des citoyens respectueux des lois et sensibles à des peines sévères[79].

[174]       Ces constats transpirent également dans les arrêts Lacasse, Friesen et Parranto de la Cour suprême.

[175]       Dans le premier, quoique n’écartant pas nommément la fourchette établie dans l’affaire Comeau[80], les juges réaffirment le besoin de dénonciation et de dissuasion et la volonté du législateur de sanctionner plus sévèrement ce type d’infraction[81].

[176]       Dans Freisen de la Cour suprême, quoique traitant de crimes sexuels contre des enfants, on souligne que les peines peuvent être alourdies afin de correspondre à l’évolution de l’opinion que l’on se fait de leur gravité et du préjudice qui en découle[82].

[177]       Une fourchette peut donc devenir désuète si elle ne correspond plus à l’opinion que se fait le législateur et les tribunaux supérieurs de la gravité du crime[83].

[178]       Depuis les dernières années, la jurisprudence démontre que les peines pour la conduite avec les capacités affaiblies causant la mort ont augmenté[84].

[179]       La Cour suprême nous met aussi en garde d’aborder avec prudence les décisions qui se basent sur une jurisprudence peut être désuète qui n’a pas suivi l’évolution de la gravité du crime ou la culpabilité morale de certains délinquants[85].

[180]       Il est vrai que l’affaire Comeau [86]est postérieure à l’augmentation des peines à perpétuité pour ce type de crime[87], mais elle est antérieure aux deux dernières évolutions législatives[88] et aux affaires Lacasse, Friesen, Parranto, Martin, Muzzo, Ramage, Junkert, Kummer et Monique pour ne nommer que celles-ci[89].

[181]       Une fourchette est un portrait « historique » des décisions. Il peut arriver que surgisse une situation factuelle suffisamment différente pour que la fourchette soit élargie[90].

[182]       Devrions-nous être préoccupés ici par une fourchette qui semble restreindre le pouvoir du tribunal par un plafond de 9 ans ne pouvant qu’être dépassé dans des circonstances exceptionnelles[91]?

[183]       Le tribunal répond par l’affirmative.

[184]       Pas besoin de circonstances rares ou particulières pour imposer une lourde peine dans le cas où elle est proportionnelle et que le délinquant la mérite[92].

[185]       Le tribunal croit que c’est le cas en l’espèce.

[186]       Dans l’affaire Freisen[93], si la Cour suprême « dédouane » les juges d’instance des fourchettes établies jadis en matière de crimes sexuels sur des enfants en référant à l’affaire Lacasse[94] qui traite pourtant de conduite avec les capacités affaiblies causant la mort, c’est la moindre des choses de l’appliquer aussi quand on traite nommément de ce crime.

[187]       C’est ce que la Cour suprême réitère encore avec conviction dans l’affaire Parranto[95].

[188]       Donc, si les tribunaux n’ont pas besoin de circonstances exceptionnelles pour s’écarter de la fourchette[96], on peut donc être conforté de le faire si on se retrouve en présence d’une telle circonstance et que l’accusé mérite cette peine.

[189]       À l’instar de ce qui a été représenté par le ministère public, les recherches du tribunal nous amènent à conclure que nous faisons face ici au crime découlant de la conduite d’un véhicule à moteur ayant la gravité subjective la plus élevée au Québec en nombre de morts et de blessés.

[190]       La responsabilité pénale de l’accusé est entière et son degré de culpabilité morale est très élevé.

[191]       Sa responsabilité pénale dépasse celle de la majorité des membres de la société. Il a baigné dans un contexte familial marqué par les décès causés par la conduite avec les capacités affaiblies, il a lui-même été condamné pour ce type de crime il y a moins de quatre ans, son permis a donc été sanctionné et malgré ça, il n’utilise aucun moyen alternatif pourtant à sa portée le jour du drame.

[192]       C’est un euphémisme que de dire que l’ensemble de ses expériences n’a pas eu l’effet dissuasif escompté.

[193]       La culpabilité morale varie au gré du degré d’insouciance, plus il est élevé, plus sa culpabilité morale l’est également[97].

[194]       Le reste de sa situation personnelle ne peut pas être occultée, par contre on ne peut l’utiliser pour réduire une peine au point où celle-ci deviendrait disproportionnée suivant la gravité des circonstances[98].

[195]       Le tribunal a discuté précédemment de l’ensemble des décisions consultées. Je  considère qu’au final c’est une vue d’ensemble de celles-ci qui permet de décider de la peine appropriée.

[196]       Pour cause, nous l’avons vu, toute étude comparative comporte des limites[99] et souvent elle amène erronément à un exercice mathématique inéquitable de comparaison entre les circonstances atténuantes et aggravantes propres à chaque dossier, ce qui n’est pas l’essence de l’harmonisation.

[197]       Systématiquement, le nombre de morts et de blessés varie d’un dossier à l’autre. L’existence d’antécédents judiciaires ou non, le taux d’alcool, de drogue, la présence ou non de risque de récidive ou encore le nombre d’infractions fluctuent comme le moment du plaidoyer de culpabilité ou la tenue d’un procès.

[198]       On ne peut pas inventer un système où l’on attribue un pointage pour chaque élément et réviser à la hausse ou à la baisse une peine comparative. Invariablement, ça nous ramène au principe de la proportionnalité.

[199]       Ce qui est désolant dans ce genre de dossier, on l’a souligné, c’est que l’accusé, comme plusieurs autres personnes qui doivent répondre du même crime, est une personne de bonne famille, qui a un emploi et qui est un actif pour la société.

[200]       Pourtant, tous ces acquis ne l’ont pas empêché le jour du drame de faucher la vie de quatre victimes innocentes et d’en blesser deux autres.

[201]       La peine proposée par la défense ne répond pas aux objectifs de dénonciation, de dissuasion et de réprobation sociale. Elle est trop centrée sur les facteurs propres à l’accusé au détriment de l’ensemble des considérations devant être prises en compte. Faire droit à cette suggestion banaliserait l’infraction commise par l’accusé.

[202]       Plusieurs de ces facteurs personnels lui sont même défavorables. D’ailleurs, en l’absence de ceux qui au contraire lui sont favorables, le tribunal n’hésiterait pas à se rendre à la suggestion du ministère public.

[203]       Même si les réponses de la justice pénale ne permettent pas à elles seules de résoudre le problème de la conduite avec les facultés affaiblies, il incombe aux tribunaux d’utiliser les moyens fournis par le parlement pour s’attaquer à ce mal sociétal[100].

VIII. CONCLUSIONS

[204]       Tenant compte de l’ensemble des faits mentionnés précédemment, des facteurs et objectifs de la peine énumérée plus haut et s’inspirant des peines dans les différents dossiers consultés, l’imposition d’une peine de 16 ans de pénitencier s’impose pour les quatre infractions de conduite avec plus de 80 milligrammes d’alcool par 100 millilitres de sang ayant causé la mort et également pour les quatre chefs de conduite dangereuse ayant causé la mort.

[205]       Pour les quatre autres infractions d’avoir conduit de façon dangereuse et avec un taux d’alcool supérieur à 80 milligrammes d’alcool par 100 millilitres de sang et d’avoir causé des lésions corporelles, des peines de 2 ans devront être purgées concurremment.

[206]       Enfin, l’infraction de délit de fuite entraînera une peine de 6 mois concurrente à toute autre peine.

[207]       En vertu de l’article 719(3.1) du Code criminel, il faut retrancher de cette peine globale de 16 ans, 7 mois et 20 jours de détention provisoire au crédit majoré de 11 mois et 15 jours pour un reliquat de peine de 15 ans et 15 jours à purger du prononcé de la présente décision.

[208]       Dans la peine imposée, le tribunal tient compte de la confiscation prononcée le 16 mars 2022 comme bien infractionnel en vertu de l’article 490.1 du Code criminel le produit de l’indemnisation d’assurance du véhicule de l’accusé.

[209]       L’estimation de la durée adéquate de l’ordonnance d’interdiction de conduire fait partie du processus de détermination de la peine et tient compte de l’ensemble des facteurs énumérés précédemment.

[210]       En 2017, l’accusé s’est vu interdire de conduire pour 1 an. Loin de l’avoir dissuadé, le jour du drame, il ignore toutes les alternatives de raccompagnement qui s’offrent à lui. Comme on l’a vu, conduire est un privilège et le législateur veut s’assurer de la sobriété des conducteurs pour garantir la sécurité des Canadiennes et des Canadiens.

[211]       Comme on ne peut écarter une récidive à ce stade, n’étant pas encore en mesure de constater la réhabilitation effective de l’accusé, s’il veut conduire et qu’il se qualifie, il devra le faire en conformité avec la réglementation provinciale pour un certain temps puisque le tribunal l’interdit de conduire pour une période de 10 ans sur chacun des chefs de manière concurrente.

[212]       Comme le paragraphe 5.1 de l’article 320.24 du Code criminel fixe la prise d’effet de l’interdiction au prononcé de la peine et qu’elle doit être appliquée en plus de ladite peine en vertu du paragraphe 5 du même article, la période totale d’interdiction sera donc de 25 ans et 15 jours du prononcé de la peine.

[213]       En vertu de l’article 320.24(10) du Code criminel, la période d’interdiction minimale absolue sera de 1 an en plus de la peine de détention imposée, donc de 16 ans et 15 jours du prononcé de la peine.

[214]       Bien que les crimes commis par l’accusé constituent des infractions secondaires aux fins d’analyse génétique, je rends une ordonnance en vertu de l’article 487.051(3) du Code criminel compte tenu des antécédents judiciaires de l’accusé et des faits sous étude.

[215]       Le tribunal ne fera pas droit à la demande en vertu de l’article 109 du Code criminel concernant entre autres l’interdiction d’avoir en sa possession des armes à feu. Les crimes commis par l’accusé ne se qualifient pas auprès de cet article et non plus suivant la philosophie du législateur qui en découle.

[216]       Finalement, comme l’accusé avait un emploi au moment des événements, qu’il est propriétaire d’immeubles et que la suramende compensatoire participe à la proportionnalité de cette peine conformément à la gravité de l’infraction et la responsabilité de l’accusé, il devra donc verser une suramende compensatoire en  vertu de l’article 737 du Code criminel sur chacun des chefs suivant le délai légal.

 

 

 

 

__________________________________

JEAN-LOUIS LEMAY, J.C.Q.

 

 

 

Me Pierre-Alexandre Bernard

Procureur aux poursuites criminelles et pénales

 

Me Vincent Montminy

Me Julie Bégin

Procureurs de l’accusé

 

 

 

Dates d’audience :

14 décembre 2021, 15 et 16 mars 2022 et 8 avril 2022

 

 

 

 

 

ANNEXE A

 

 

Décisions soumises par la poursuite :

 

R. c. Parranto, 2021 CSC 46.

R. c. Friesen, 2020 CSC 9.

R. c. Lacasse, [2015] 3 R.C.S.1089.

R. c. L.M., [2008] 2 R.C.S. 163.

R. c. M.(C.A.), [1996] 1 R.C.S. 500.

Gervais c. R., 2021 QCCA 652.

De la Cruz Hernandez c. R., 2020 QCCA 1008.

Paré c. R. 2011 QCCA 2047.

R. c. Comeau, 2009 QCCA 1175.

R. c. Martin, 2017 QCCS 193.

R. c. Muzzo, 2016 ONSC 2068.

 

Décisions soumises par la défense :

 

Méthot c. R., 2016 QCCA 736.

R. c. Comeau, 2009 QCCA 1175.

R. c. Martin, 2017 QCCS 193.

R. c. Beaulieu Laforce, 2019 QCCQ 1658.

R. c. Dumas, 2016 QCCQ 99.

R. c. Monique, 2015 QCCQ 2097.

R. c. Kummer, 2011 ONCA 39.

R. c. Junkert, 2010 ONCA 549.

R. c. Muzzo, 2016 ONSC 2068.

 

Autres décisions consultées :

 

R. c. Nasogaluak, [2010] 1 R.C.S. 206.

R. c. B.W.P.; R. c. B.V.N., [2006] 1 R.C.S 941.

R. c. Proulx, 2000 CSC 5.

R. c. Bernshaw, [1995] 1 R.C.S. 254.

 

Lacelle Belec c. R., 2019 QCCA 711.

Denis-Damée c. R., 2018 QCCA 1251.

R. c. Régnier, 2018 QCCA 306.

Nguyen c. R., 2010 QCCA 1482.

R. c. Morneau, 2009 QCCA 1496.

R. c. Poulin, 2009 QCCA 2339.

Verreault c. R., 2008 QCCA 2284.

Bouchard c. R., 2007 QCCA 1836.

R. c. Gilbert, 2007 QCCA 1607.

R. c. Lavoie, 2007 QCCA 1658.

Lépine c. R., 2007 QCCA 69.

R. c. Paris, 2007 QCCA 1532.

Lepire c. R., 2006 QCCA 1465.

Olivier c. R., 2002 CANLii 40808 (CAQ).

 

R. c. Lessard, 2010 QCCS 55.

R. c. Gaulin, 2018 QCCQ 6746.

R. c. Lemay, 2015 QCCQ 9724.

R. c. Lehoux, 2014 QCCQ 8295.

R. c. Goulet, 2013 QCCQ 1491.

R. c. Gravel, 2013 QCCQ 10482.

R. c. Lacasse, 2013 QCCQ 11960.

R. c. Brodeur, 2012 QCCQ 18159.

R. c. G.B., 2010 QCCQ 8243.

R. c. Levesque, 2009 QCCQ 7792.

R. c. Papatie, 2009 QCCQ 4491.

R. c. Walsh, 2009 QCCQ 7794.

R. c. Comeau, 2008 QCCQ 4804.

R. c. Barriault, A2-50439075 (C.Q.).

R. c. Sagaloun, 2007 QCCQ 22.

 

R. c. Gagnon, 2006 QCCQ 12590.

R. c. Rioux, 2006 QCCQ 4711.

R. c. Boies, 2005 CANLii 10575 (C.Q.).

R. c. Tellier, 2005 CANLii 58830 (C.Q.).

R. c. Savoie, 2004 CANLii 21189 (C.Q.).

R. c. Côté, 2002 CANLii 27228 (C.Q.).

R. c. Charette, 2002 CANLii 19141 (C.Q.).

 

R. c. Williams, 2020 BCCA 286.

R. c. Gauthier-Carrière, 2019 ONCA 790.

R. c. Atkinson, 2015 NBCA 48.

R. c. Berner, 2013 BCCA 18.

R. c. Ross, 2013 SKCA 77.

R. c. Smith, 2013 BCCA 173.

R. c. Bush, 2012 ONCA 743.

R. c. Charles, 2011 BCCA 68.

R. c. Olsen, 2011 ABCA 308.

R. c. Stimson, 2011 ABCA 59.

R. c. Turnbull, 2011 ONCA 121.

R. c. Ramage, 2010 ONCA 488.

R. c. Ruizfuentes, 2010 MBCA 90.

R. c. Bear, 2008 SKCA 172.

R. c. Wood, 2005 O.J. No 1611 (CAO).

R. c. Mascarenhas, 2002 O.J. No 2989 (CAO).

 

R. c. Simms, 2021 ONCJ 374.

R. c. Anstie, 2020 ONSC 5505.

R. c. Davis-Locke, 2020 ONCJ 13.

R. c. Joyce, 2019 NLSC 77.

R. c. Laliberté, 2019 BCSC 318.

R. c. Koono, 2018 NUCJ 38.

R. c. Tanner, 2018 BCSC 583.

R. c. Fallows, 2017 ONCS 7786.

R. c. Okemahwasin, 2015 SKPC 71.

R. c. Cooper, 2007 N.S.J. No 179 (NSSC).

R. c. Dressler, 2005 O.J. 3163 (ONSC).

 


[1]  Pièce S-1.

[2]  Pièce S-3.

[3]  Pièce S-5.

[4]  Pièce S-4.

[5]  Id.

[6]  Pièce S-5.

[7]  Pièce S-6.

[8]  Pièce S-7.

[9]  Pièce S-2.

[10]  Id.

[11]  Le THC est la principale substance psychoactive retrouvée dans le cannabis; pièce S-15.

[12]  Pièces S-14 et S-15.

[13]  Pièce S-12.

[14]  Id.

[15]  Pièce S-13.

[16]  Id.

[17]  Pièce S-9.

[18]  Pièce S-10.

[19]  Pièces S-16 à S-30.

[20]  Pièce SD-1.

[21]  R. c. Nasogaluak, [2010] 1 R.C.S. 206, par. 43.

[22]  Nguyen c. R., 2010 QCCA 1482, par. 13.

[23]  R. c. Nasogaluak, préc., note 21, par. 44; R. c. Lacasse, [2015] 3 R.C.S. 1089, par. 57.

[24]  R. c. Parranto, 2021 CSC 46, par. 36.

[25]  R. c. Lacasse, préc., note 23, par. 60.

[26]  Art. 718.1 C.cr.

[27]  R. c. Parranto, préc., note 24, par. 10.

[28]  Id., par. 114.

[29]  R. c. Parranto, préc., note 24, par. 12; R. c. Lacasse, préc., note 23, par. 53.

[31]  R. c. Parranto, préc., note 24, par. 12.

[32]  Annexe A.

[33]  R. c. Comeau, 2008 QCCQ 4804.

[34]  R. c. Comeau, 2009 QCCA 1175.

[35]  R. c. Martin, 2017 QCCS 193.

[36]  R. c. L.M., [2008] 2 RCS 163, par. 36.

[37]  Art. 718.2d) du C.cr.

[38]  Art. 718.2c) du C.cr.

[39]  R. c. Nasogaluak, préc., note 21, par. 43.

[40]  Pièce S-8.

[41]  R. c. Lacasse, préc., note 23, par. 83; Paré c. R. 2011 QCCA 2047, par. 71.

[42]  H. Parent et J. Desrosiers, Traité de droit criminel, la peine, tome III, Éditions Themis, 2020, pp. 180 et ss.

[44]  Id., par. 80.

[45]  Id., par. 84.

[46]  Article 320.14d) du C.cr.; Règlement sur les concentrations d’alcool dans le sang, DORS 2018-148, art. 3.

[47]  H. Parent et J. Desrosiers, Traité de droit criminel, la peine, préc., note 42, pp. 163-164.

[48]  Ruby, Clayton C. [et als.], Sentencing, (2017) 9th edition, par. 19.11 et ss.

[50]  Paré c. R., préc., note 41, par. 72.

[51]  R. c. Lacasse, préc., note 23, par. 81.

[52]  R. c. Friesen, 2020 CSC 9, par. 164.

[53]  De la Cruz Hernandez c. R., 2020 QCCA 1008, par. 14.

[54]  R. c. Proulx, préc., note 30, par. 129; R. c. Lacasse, préc., note 23, par. 73.

[55]  R. c. Muzzo, 2016 ONSC 2068, par. 65.

[56]  R. c. Lacasse, préc., note 23, par. 78.

[57]  R. c. Comeau, préc., note 34.

[58]  Id., par. 37.

[59]  R. c. L.M., préc., note 36, par. 18 à 20.

[60]  Id.; R. c. Parranto, préc., note 24, par. 100; R. c. Friesen, préc., note 52, par. 114.

[61]  R. c. Comeau, préc., note 34, par. 37.

[62]  Lacelle Belec c. R., 2019 QCCA 711, par. 31.

[63]  Paré c. R., préc., note 41, par. 62.

[64]  R. c. B.W.P.; R. c. B.V.N., [2006] 1 RCS 941 par. 3; Paré. c. R., id., par. 57.

[65]  S.R.C. (1970) c. C-34; L.C. (1974-75-76), c. 93; L.R.C. (1985), c. 27; L.C. (1999), c.32; L.C. 2000, ch.25; L.C. 2007, ch. 12; L.C. 2008, ch.6; L.C. 2018, ch.21; L.C. 2019, c.25.

[66]  R. c. Friesen, préc., note 52, par. 97; R. c. Lacasse, préc., note 23, par. 7-62-63.

[67]  Art. 320.12a) C.cr.

[68]  Art. 320.12b) C.cr.

[69]  R. c. M.(C.A.), [1996] 1 RCS 500, par.81.

[70]  Bouchard c. R., 2007 QCCA 1836, par. 3.

[71]  R. c. Lépine, 2007 QCCA 70, par. 20-21; R. c. Lacasse, préc., note 23, par. 74.

[72]  R. c. Junkert, 2010 ONCA 549, par. 49; R. c. Kummer, 2011 ONCA 39, par. 15; R. c. Muzzo, préc., note 55, par. 69; R. c. Martin, préc., note 35, par. 226.

[73]  R. c. M.(C.A.), préc., note 69, par. 79-80-81.

[74]  R. c. Bernshaw, [1995] 1 RCS 254, par. 16.

[75]  R. c. Lacasse, préc., note 23, par. 7.

[76]  Pièce S-9.

[77]  Pièce S-10.

[78]  R. c. B.W.P.; R. c. B.V.N., préc., note 64, par. 2.

[79]  R. c. Lacasse, préc., note 23, par. 73; R. c. Proulx, préc., note 30, par. 129.

[80]  R. c. Comeau, préc., note 34.

[81]  H. Parent et J. Desrosiers, Traité de droit criminel, la peine, préc., note 42, pp. 918-919; R. c. Lacasse, Préc., note 23, par. 5-7.

[83]  Id., par. 109; R. c. Régnier, 2018 QCCA 306, par. 30-40-78.

[84]  R. c. Muzzo, préc., note 55, par. 69; R. c. Martin, préc., note 35, par. 226.

[85]  R. c. Friesen, préc., note 52, par. 110; R. c. Parranto, préc., note 24, par. 86.

[86]  R. c. Comeau, préc., note 34.

[87]  Préc., note 65.

[88]  Id.

[89]  R. c. Lacasse, préc., note 23; R. c. Friesen, préc., note 52; R. c. Parranto, préc., note 24; R. c. Martin, préc., note 35; R. c. Muzzo, préc., note 55; R. c. Ramage, 2010 ONCA 488; R. c. Junkert, préc., note 72; R. c. Kummer, préc., note 72; R. c. Monique, 2015 QCCQ 2097.

[90]  R. c. Lacasse, préc., note 23, par. 57-58.

[91]  R. c. Friesen, préc., note 52, par. 111.

[92]  Id., par. 112.

[93]  Id.

[94]  R. c. Lacasse, préc., note 23.

[96]  Id., par. 40

[97]  Denis-Damée c. R., 2018 QCCA 1251, par. 60.

[98]  R. c. Williams, 2020 BCCA 286, par. 37.

[99]  R. c. L.M., préc., note 36, par. 36.

[100]  R. c. Parranto, préc., note 24, par. 60; R. c. Friesen, préc., note 52, par. 45.

 

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