Gagnon c. Lafond |
2015 QCRDL 21746 |
RÉGIE DU LOGEMENT |
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Bureau dE Laval |
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No dossier : |
209491 36 20150402 T |
No demande : |
1751143 |
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Date : |
02 juillet 2015 |
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Régisseure : |
Sylvie Lambert, juge administratif |
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Jean-Guy Gagnon
Josiane Ouellet-Gagnon |
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Locataires - Partie demanderesse |
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c. |
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Louis-Philippe Lafond |
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Locateur - Partie défenderesse |
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D É C I S I O N
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[1] Les locataires demandent la rétractation de la décision rendue le 8 mai 2015 par le greffier spécial Me Jean-Sébastien Landry.
[2] Cette décision résilie le bail au motif que les locataires sont en retard de plus de trois semaines dans le paiement du loyer, expulse les locataires et tous les occupants du logement, ordonne l’exécution provisoire de la décision malgré l’appel et condamne les locataires à payer au locateur, la somme de 1 800 $ à titre de loyer, plus les intérêts et les frais.
[3]
L'article
Les locataires
[4] Au soutien de leur demande de rétractation, les locataires allèguent qu’ils n’ont jamais reçu l’avis de convocation, que la locataire est enceinte et qu’elle avait un rendez-vous médical le matin de l’audience, que le locataire Jean-Guy Gagnon avait un nouveau travail qu’il ne pouvait quitter.
[5] Ils soutiennent qu’ils n’ont pas reçu l’avis de convocation puisque leur boîte aux lettres n’est pas barrée à clé et que n’importe qui y a accès.
[6] La locataire mentionne que ce n’est pas la première fois qu’elle constate que des gens fouillent dans sa boîte aux lettres.
[7] Elle mentionne par ailleurs que parfois le courrier est livré au 1559 Trépanier alors qu’elle habite le 1559 A.
[8] Les locataires ne produisent aucune preuve matérielle attestant du rendez-vous médical qu’ils invoquent.
[9] Ils reconnaissent qu’ils devaient au locateur 1 800 $ à titre de loyers impayés à la date d’audience sur la demande originaire, soit le 4 mai 2015. Ils ont voulu négocier avec le locateur mais aucune entente n’a pu intervenir.
[10] Comme moyen de défense à la demande du locateur, ils invoquent ce qui suit : Il y avait un dégât d’eau majeur dans le logement que le propriétaire n’a toujours pas réglé. De plus, les locataires voulaient prendre entente avec le propriétaire.
[11] À ce jour, ils n’ont entrepris aucun recours devant le tribunal concernant le dégât d’eau.
Le locateur
[12] Le locateur fait entendre M. Demontigny, le locataire qui habite au 1559 Trépanier. Il déclare qu’il lui arrive parfois de recevoir du courrier adressé aux locataires mais qu’à chaque fois, il prend la peine de leur remettre.
[13] Il ajoute que le locataire lui a déclaré qu’il n’avait pas l’intention de se présenter à l’audience sur la demande de recouvrement de loyer du locateur puisqu’il devait de l’argent au locateur.
[14] Le locataire reconnaît avoir fait cette déclaration, mais que celle-ci a été lancée sous le coup de la colère alors qu’il venait de recevoir signification de la demande du locateur; il ajoute qu’il n’avait pas la réelle intention de ne pas se présenter.
ANALYSE ET DÉCISION
[15] Le recours en rétractation en est un d’exception au principe de l’irrévocabilité des jugements. En ce sens, les critères y donnant ouverture doivent être appliqués restrictivement et avec rigueur afin de préserver cette stabilité nécessaire à une saine administration de la justice. La procédure doit contribuer à la protection des droits de toutes les parties et la remise en question des décisions rendues ne doit pas devenir la règle, d’où le sérieux que doivent revêtir les motifs de rétractation.[1]
[16] Les locataires n’ont pas convaincu le Tribunal qu’ils n’ont pas reçu l’avis de convocation.
[17] De plus, ils n’ont produit aucune preuve attestant du rendez-vous médical allégué.
[18] En ce qui concerne le fait que le locataire Jean- Guy Gagnon n’a pu quitter son nouveau travail, aucune preuve ou document émanant de son employeur n’a été produit à cet effet.
[19] De plus, si les locataires ne pouvaient se présenter à l’audience pour les raisons qu’ils invoquent, ils auraient pu mandater une personne pour faire les représentations qui s’imposaient devant le tribunal et présenter les pièces justificatives.
[20] De plus, un autre motif conduit le tribunal à rejeter la demande de rétractation des locataires.
[21] En effet, la défense que les locataires entendent faire valoir à l’encontre de la demande originaire du locateur est vouée à l’échec. Pour ce seul motif, il y a lieu de rejeter leur demande.
[22] Dans l'affaire Charbonneau c. St-Laurent[2], la juge administrative Gravel mentionnait ce qui suit :
« On constate qu'un défendeur doit également prouver avoir un moyen de défense valable à faire valoir à l'encontre de la demande originaire. Dans l'éventualité où les moyens de défense invoqués sont voués à l'échec, il serait dès lors inutile de permettre la rétractation.
Tel qu'exprimé par la Cour d'appel du Québec, les motifs d'une demande de rétractation doivent être sérieux puisqu'elles ont pour effet de déroger au principe de l'irrévocabilité des jugements. »[3]
[23] En l’espèce, les locataires admettent qu’en date de l’audience sur la demande originaire, soit en date du 4 mai 2015, ils devaient la somme de 1 800 $ au locateur à titre de loyer impayé, soit le montant de leur condamnation dans la décision visée.
[24] Les moyens de défense qu’ils invoquent, soit le dégât d’eau et le fait que le locateur ne veuille plus négocier avec eux, ne sont pas des moyens de défense valables, en l’espèce, sur une demande en recouvrement de loyer et résiliation de bail.
[25] Par conséquent, le tribunal conclut à l’absence de motif de rétraction et qu’au surplus, la défense qu’entendent faire valoir les locataires à l’encontre de la demande originaire du locateur est vouée à l’échec. En conséquence, il y a lieu de rejeter la demande de rétractation.
[26] Le locateur demande au tribunal de déclarer les locataires forclos de présenter toute autre demande dans le présent dossier.
[27] Il témoigne que depuis la décision visée, les locataires ne
lui ont payé que 80 $ et qu’ils habitent toujours dans le logement. La
requête en rétractation est faite de mauvaise foi, selon lui, afin de gagner du
temps et d’empêcher l’exécution de la décision. Il demande au Tribunal d'appliquer les dispositions de l'article
« 63.2. [Recours abusif ou dilatoire] La Régie peut, sur requête ou d’office après avoir permis aux parties intéressées de se faire entendre, rejeter un recours qu’elle juge abusif ou dilatoire ou l’assujettir à certaines conditions.
Lorsque la Régie constate qu’une partie utilise de façon abusive un recours dans le but d’empêcher l’exécution d’une de ses décisions, elle peut en outre interdire à cette partie d’introduire une demande devant elle à moins d’obtenir l’autorisation du président ou de toute autre personne qu’il désigne et de respecter les conditions que celui-ci ou toute autre personne qu’il désigne détermine. »
[28] Le Tribunal est d’avis que les faits de la présente affaire rencontrent les exigences requises pour lui permettre de prononcer une ordonnance de forclusion à l’encontre des locataires.
POUR CES MOTIFS, LE TRIBUNAL :
[29] REJETTE la demande de rétractation des locataires qui en assument les frais;
[30] MAINTIENT la décision rendue le 8 mai 2015;
[31] INTERDIT aux locataires de produire toute demande dans le présent dossier, à moins d'obtenir l'autorisation du président ou de toute autre personne qu'il désigne et de respecter les conditions que celui-ci ou toute autre personne qu'il désigne détermine.
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Sylvie Lambert |
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Présence(s) : |
le locataire le locateur |
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Date de l’audience : |
15 juin 2015 |
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[1] Bergeron c. Carrière,
[2] Charbonneau c. St-Laurent, R.L.,Montréal, 31-0505508-055T-060905,26 septembre 2006.
[3] Banque de Montréal
c. Chaput,
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