Chouinard c. Cantara

2012 QCRDL 38539

 

 

RÉGIE DU LOGEMENT

Bureau de Montréal

 

No :          

31 120827 127 G

 

 

Date :

01 novembre 2012

Régisseur :

Robin-Martial Guay, juge administratif

 

Sylvie Chouinard

 

Locatrice - Partie demanderesse

c.

Jean-Louis Cantara

 

Locataire - Partie défenderesse

 

D É C I S I O N

 

 

[1]      Par un recours introduit au tribunal de la Régie du logement, le 27 août 2012, la locatrice qui craint pour la santé et la sécurité des autres locataires demande la résiliation du bail et l’expulsion immédiate et urgente du locataire du logement et la condamnation au paiement des frais.

[2]      La locatrice ne requiert pas du tribunal qu’il prononce l’exécution provisoire de la décision nonobstant appel de celle-ci.

[3]      Les parties sont liées depuis le 17 novembre 2008 par un bail à durée indéterminée au loyer mensuel de 340 $, payable le 1er jour de chaque mois (pièce P-4).

[4]      Le locataire, monsieur Jean- Louis Cantara, habite un logement constitué d’une chambre pourvu d’une unité de cuisine et évier. Son logement qui porte le numéro 205 est situé au deuxième étage d’un immeuble de quatre étages qui comptent au total cinquante (50) chambres. Il y a quatre unités sanitaires par étage de sorte que chaque locataire doit partager avec trois autres locataires l’unité sanitaire qui lui est assignée.

[5]      Chaque locataire doit participer au maintien en bon état de propreté l’unité sanitaire et de sa chambre.

Allégations et preuve du locataire

[6]      Au soutien de sa demande, la locatrice allègue dans une annexe à sa demande ce qui suit :

« Insalubrité

Odeurs nauséabondes dans le couloir

Contamination des voisins

Propos diffamatoires, vexatoires envers la propriétaire, le concierge

Propos vexatoires et harcèlement causant le déménagement d’une voisine

Voie de faits causant l’intervention de la police

Agressivité envers le concierge et les voisins

Urine foncée et rougeâtre avec sang dans le couloir et la salle de bains partagée causant des dangers pour la santé des voisins, refuse de nettoyer

Jugement de la Cour du Québec

A causé le déménagement de 5 locataires à ce jour. » (sic)


[7]      En l'instance, la locatrice a témoigné pour dire que le locataire, monsieur Jean-Louis Cantara, par son attitude et son comportement dans le logement lui cause un préjudice sérieux à elle et aux autres locataires.

[8]      De façon plus particulière, la locatrice a, par son témoignage, établi que les trois autres locataires qui doivent partager avec lui la même unité sanitaire sont au quotidien confrontés à l’indifférence et à l’insouciance du locataire Cantara en matière de règles d’hygiènes sur sa personne et dans les lieux communs.

[9]      Non seulement est-il responsable de l’insalubrité qui règne dans l’unité sanitaire après son passage au cabinet d’aisance ou dans la douche, que celui-ci ne nettoie rien, absolument rien, ni les traces laissées sur le plancher ni ses débordements d’une urine brunâtre.

[10]   C’est en vain qu’elle dit avoir, à maintes reprises, interpellé le locataire Cantara à propos des répercussions négatives que son hygiène personnelle défaillante a sur la qualité de vie des autres locataires.

[11]   La situation n’est guère différente dans sa chambre d’où se dégage en permanence une forte odeur d’urine qui fait dire au concierge et à la locatrice que monsieur Cantara ne se rend pas toujours au cabinet pour uriner en ce qu’il urine carrément dans l’évier de l’unité de cuisine qui est dans sa chambre; d’où l’odeur nauséabonde. La locatrice et le concierge de l’immeuble qui a témoigné à l’audience disent avoir constaté la présence d’urine sur le plancher de sa chambre et dans le couloir de l’étage. La locataire Maggie devait continuellement passer la serpillère sur les planchers pour effacer les traces d’urine du locataire viendront dire la locatrice et le concierge, monsieur Gilles Deber.

[12]   Confronté au témoignage de la locatrice à propos de l’urine, le locataire viendra dire que la locataire Maggie qui partageait avec lui l’unité sanitaire commune et qui se plaignait de lui était, selon ses dires, une personne faible d’esprit qui avait des lubies : « elle voyait de l’urine partout ».

[13]   Les débordements d’urine du locataire ne sont pas la seule cause de reproche qui est dénoncée par la locatrice. Elle assure que le locataire est responsable de l’inefficacité du programme d’extermination des coquerelles et punaises de lit de l’immeuble du fait que ce dernier n’applique pas les consignes en semblable matière. 

[14]   Selon le témoignage de la locatrice et du concierge de l’immeuble, il ne semble pas faire de doute que le foyer de coquerelles et de punaises de lit de l’immeuble se trouve dans la chambre même du locataire fautif qui ne collabore pas en ne respectant pas les consignes écrites des exterminateurs (pièce P-5) non plus que celles expédiées par la locatrice (pièce P-6) que les locataires doivent soigneusement appliqués tant avant qu’après le passage des exterminateurs à l’immeuble.

[15]   Le locataire Cantara fait totalement fi des consignes écrites qui doivent s’appliquer et dont il a reçu copie et qui lui ont été rappelées à la mémoire maintes fois, même par mise en demeure. Cette absence de collaboration du locataire n’est pas sans conséquence sur l’efficacité du contrat de service d’extermination de la locatrice qui lui coûte annuellement la forte somme de 5,346, $ (pièce P-7) ainsi que sur le confort des autres occupants comme le lui souligne pourtant si bien la locatrice dans sa missive du 17 mars 2011 (pièce P-6).

[16]   Insensible à l’idée simple de collaborer, la locatrice réitérait, en date du 14 juillet 2011, sa demande de collaboration au maintien de son logement en bon état de propreté et de la nécessité qu’il y avait pour lui d’appliquer les consignes de pré et post - extermination aux chambres tel qu’en fait foi la pièce (P-9).

[17]   Plus encore, la locatrice soutient, par ces affirmations, que le comportement du locataire qui habite l’immeuble depuis 4 ans s’est gravement détérioré au cours des deux dernières années en raison, croit-elle, de sa consommation quotidienne d’alcool. Le concierge, monsieur Deber et un autre témoin qui habite les lieux, monsieur Junior Augulun viendront confirmer les dires de la locatrice à propos de la consommation quotidienne d’alcool du locataire; devenu un rituel. C’est sur le coup de 15 h et en soirée que quotidiennement, le locataire se rend au dépanneur et reviens avec quelques grosses bouteilles de bière (pièce P-3-1).

[18]   Sous ce rapport, à l’audience, le locataire a déclaré qu’il avait admis au médecin qui l’avait examiné pour un examen clinique qu’il avait un problème de consommation d’alcool. Toutefois s’est-il empressé de dire : « je ne bois pas au point de me saouler ».

[19]   Pour sa part, la locatrice a témoigné pour dire que c’est régulièrement qu’elle le voit en état d’ébriété et de tituber de renchérir le concierge.


[20]   Au demeurant, aucun des témoins n’a prétendu que les débordements du locataire au niveau du delirium tremens étaient fréquents lorsque sous l’effet de boissons enivrantes; encore que le concierge, appuyé de photos, a fait la démonstration d’un incident au cours de laquelle le locataire a subi une importante coupure dont il porte encore les marques aujourd’hui après que la bouteille de bière qu’il avait à la main se soit fracassée lorsqu’il a fait une chute. Cela est sans compter tout le sang du locataire qui avait taché le plancher lorsqu’il s’est dirigé à l’unité sanitaire la plus proche pour s’essuyer, le temps que l’ambulance arrive sur les lieux (Pièce P-1, 1 et 2).

[21]   La locatrice qui, par ailleurs, juge le locataire prompt à s’emporter estime que de par son gabarit plutôt imposant, fait craindre, plus particulièrement lorsqu’il se montre agressif. Il n’est pas rare qu’il se montre arrogeant et qu’il abîme d’insultes la locatrice qu’il qualifie, dit-elle, de « bitch ou de crisse de folle ». Et le concierge, de témoigner pour dire qu’il ne faut pas contredire monsieur Cantara sinon celui-ci se fâche, et les gros mots, en parlant des blasphèmes, font leur entrés.

[22]   Voulant faire cesser le locataire de colporter des ragots et de tenir des  propos vexatoires et diffamatoires à son endroit, la locatrice lui fera d’ailleurs transmettre une mise en demeure en date du 1er septembre 2011 (Pièce P-10).

[23]   Toujours selon la locatrice, monsieur Cantara a fait preuve de violence par le passé à l’endroit du locataire Junior Augulun qui réside au troisième étage, mais qui rendait souvent visite à ses amis qui résidaient au deuxième niveau. Encore aujourd’hui, elle dit craindre qu’il ne récidive dans le futur contre Augulun.

[24]   Toujours en rapport avec cet événement, de son propre aveu, le locataire a témoigné au cours de l’audience pour dire que n’eut été du fait que le locataire monsieur junior Augulun était un homosexuel, qu’il aurait assurément frappé celui-ci en pleine face après qu’il l’eut, dit-il, surpris à faire des médisances sur sa personne avec un autre des locataires des lieux. « J’étais exacerbé » de dire le locataire Cantara.

[25]   L’événement est contemporain en ce qu’il s’est produit en 2012. Notons que le concierge monsieur Gilles Deber était présent lors de cet épisode de violence.

[26]   Jadis, à la police qui s’était rendu sur les lieux après que monsieur Augulun eu requis la présence de la force policière en contactant le 911, il semble que monsieur Cantara aurait convaincu les policiers qu’il avait simplement fait du mime « shadow Boxing » avec monsieur  Augulun de sorte qu’aucune plainte formelle n’a été retenue contre le locataire.

[27]   Appelé à témoigner à l’audience, monsieur Augulun viendra dire, sur un ton pausé et convaincant, que monsieur Cantara qui l’a déjà menacé de mort était, ce jour-là, en colère contre lui et agressif. C’est de peu qu’il dit avoir esquivé le coup de poing que Cantara lui destinait en plein visage en faisant deux pas en arrière. Selon lui, prétendre qu’il faisait du mime de boxe, c'est-à-dire du (shadow boxing) et n’avait pas l’intention de le frapper est totalement faux. Depuis lors, lui qui habite le troisième étage de l’immeuble ne se rend plus au deuxième étage soit celui de Cantara de peur qu’il ne s’en prenne à lui et ne le frappe.

[28]   Le témoin Juonior Augulun qui habite l’immeuble depuis deux ans viendra, par la même occasion, dire qu’il a personnellement constaté, à quelques reprises, l’état lamentable de la chambre de Cantara et la forte odeur nauséabonde d’urine qui s’en dégage lorsque sa porte est entrouverte. Il en va de même de l’unité sanitaire de l’étage après le passage de monsieur Cantara. Elle est toujours maculée d’urine brunâtre viendront dirent monsieur Augulun et le concierge de l’immeuble de 50 chambres sur quatre étages, monsieur Gilles Deber. Le témoin Augulun a aussi déclaré avoir personnellement vu des punaises de lit et des blattes sortir de la chambre de monsieur Cantara et se diriger vers le couloir.

[29]   Comme le concierge monsieur Deber qu’il accompagnait en septembre 2012 lorsque les exterminateurs se sont présentés à la chambre de Cantara pour faire leur travail, il a relaté avoir vu les deux exterminateurs relever le collet de leurs chandails pour le porter au dessus de leurs nez pour s’épargner la forte odeur d’urine qui provenait de la chambre de Cantara lorsqu’ils sont entrés dans celle-ci.

[30]   Au sortir de la chambre, ils se sont exprimés pour dire : « On ne croyait pas que c’était à ce point grave dans cette chambre » et qu’il, en s’adressant au concierge, devrait « s’adresser à la ville pour qu’elle intervienne ». Et les exterminateurs d’ajouter, en sortant de la chambre « on fait tout ça pour rien » en parlant des traitements d’exterminations.


[31]   Cette odeur répugnante d’urine fait que le concierge refuse aujourd’hui de se rendre à l’intérieur de la chambre du locataire. Plus d’une fois, il lui a dit clairement que « Ça pu dans ta chambre, fais le ménage ». D’ailleurs, il ne s’en cache pas tel qu’il appert du courriel qu’il envoyait à la locatrice à qui il faisait rapport de la situation en date du 12 juillet 2011 (pièce P-8).

[32]   Le concierge viendra finalement dire que Cantara criait souvent contre la locataire prénommée Maggie qu’il traitait de « grosse folle »; elle qui pourtant nettoyait constamment les lieux communs après le passage de monsieur Cantara à l’unité sanitaire. Quant au locataire Dubuc, il aurait eu droit,  pour sa part, à l’insulte de « gros chien sale ».

[33]   Comme le reste d’ailleurs, le locataire nie avoir proféré des menaces de mort à l’endroit du locataire Junior Augulun. Cette dénégation générale du locataire a fait dire, plus d’une fois, à la locatrice que monsieur Cantara vit dans le déni le plus total.

[34]   Autant dire qu’elle n’a pas tout à fait tort lorsque l’on sait le locataire nier tous les faits que l’on lui reproche alors que les photos (Pièces P-1, P-2 et P-3) prises par le concierge et qui témoignent de l’état des lieux, qu’il s’agisse de sa chambre, du couloir ou de l’unité sanitaire que partage le locataire, confirment les témoignages entendus par le tribunal.

[35]   Aussi, il sied de relever le fait que le locataire a aussi admit avoir parlé fort au concierge de l’immeuble monsieur Gilles Deber à au moins deux occasions et pour cause : « C’est tellement compliqué dans sa tête » en parlant du concierge Gilles Deber qui est en exercice dans l’immeuble depuis maintenant quatre ans.

[36]   Quant au fait que cinq personnes ont quitté les lieux à cause de lui et des insectes provenant de sa chambre, il estime qu’une seule personne a quitté à cause des insectes à savoir le locataire du 207, monsieur Bernard, une personne mesquine, un méchant numéro dira-t-il. Outre cette admission, le tribunal estime que pour le reste, la preuve du départ des quatre autres personnes en raison du locataire repose sur du ouï-dire et, par conséquent, n’a pas été établie par la preuve.

[37]   Autant dire que les nombreux griefs élevés contre le locataire Cantara ont trouvé écho dans un affidavit collectif (pièce P-11) signé par les locataires dont le logement était situé à proximité de celui de Cantara ainsi que par le concierge et la locatrice.

[38]   Le concierge a d’ailleurs témoigné pour dire qu’il était présent dans la chambre 208 lorsque les locataires ont signé l’affidavit. Tous ont signé bien volontairement et tous étaient ravis de voir que la locatrice allait faire une démarche devant la Régie du logement.

[39]   Pour sa part, le locataire a attaqué la valeur de cette pétition en soulignant qu’il avait rendu visite aux signataires du document parce qu’il ne voulait pas les voir « se mettre les pieds dans les plats eu égard au parjure auquel ils se livraient ».

[40]   Qu’elle ne fut pas alors la surprise de la locatrice au moment d’apprendre à l’audience que le locataire Cantara connaissait l’existence de ce document qui devait pourtant  demeuré confidentielle jusqu’à son dépôt devant la Régie du logement du fait que les locataires signataires sont pour la plupart des étrangers qui craignent pour leur statut au Canada. C’est d’ailleurs ce qui explique, selon elles, leurs absences devant la Régie aujourd’hui pour venir témoigner. Tous à l’exception de monsieur Augulun se sont défilés parce qu’ils craignent les représailles. C’est ainsi que tous lui ont fait savoir qu’ils ne viendraient pas témoigner à l’audience.

[41]   Aujourd’hui, dira-t-elle, elle comprend mieux leurs absences devant la Régie après la visite et les menaces de Cantara et ces allusions au parjure qu’ils commettraient en témoignant contre lui.

[42]   D’emblée, le tribunal constate que même si le document est chapeauté du titre « affidavit », il n’en constitue pas un puisqu’aucun des signataires n’a prêté serment devant une personne autorisée à recevoir le serment des déclarants.

[43]   Par conséquent, il ne s’agit pas de déclarations écrites qui peuvent être admissibles en preuve en vertu de l’article 36.1 du Règlement de procédure devant la Régie du logement dans la mesure où elles remplissent certaines conditions. Incidemment, le tribunal n’accorde pas de valeur probante au contenu de ce document.

[44]   La preuve a aussi révélé que les interventions du locateur ont été nombreuses pour que le locataire amende son comportement et se montre collaborateur du fait que l’unité sanitaire devait être partagée entre quatre locataires. On peut dire que, dans les circonstances, la locatrice a, dans l’intérêt et pour le mieux-être collectif des locataires du deuxième étage de l’immeuble, agi en personne diligente, prudente et en toute bonne foi. Selon elle, toutes les mises en demeure qui ont été expédiées au locataire fautif sont malheureusement demeurées lettre morte.


[45]   En la présente instance, il appartient à la locatrice  suivant l'article 2803 du Code civil du Québec, de démontrer que le locataire contrevient à ses obligations et que la conduite du locataire lui cause un préjudice sérieux et  justifie la résiliation du bail.

[46]   Le tribunal juge que la locatrice, par son témoignage et celui des témoins Junior Augulun et Gilles Deber a établi, selon la prépondérance de preuve, que le locataire Cantara n'agit pas de façon à assurer aux autres locataires, la jouissance paisible et normale des lieux auxquels ils ont droit en vertu du Code civil du Québec.

[47]   De fait, en l’espèce, la locatrice soutient que le locataire Cantara, par ses agissements, son comportement et son attitude, trouble la jouissance normale des lieux aux autres locataires, ce qui est contraire aux stipulations de l’article 1860 Code civil du Québec. En conséquence la locatrice demande au tribunal d’appliquer les articles 1860 et 1863 (1) du Code civil du Québec qui se lisent comme suit :

« 1860.      Le locataire est tenu de se conduire de manière à ne pas troubler la jouissance normale des autres locataires.

                 Il est tenu, envers le locateur et les autres locataires, de réparer le préjudice qui peut résulter de la violation de cette obliga­tion, que cette violation soit due à son fait ou au fait des personnes auxquelles il permet l'usage du bien ou l'accès à celui-ci.

                 Le locateur peut, au cas de violation de cette obligation, demander la résiliation du bail.»

 

«1863.       L'inexécution d'une obligation par l'une des parties confère à l'autre le droit de deman­der, outre des dommages-intérêts, l'exécution en nature, dans les cas qui le permettent.  Si l'inexécution lui cause à elle-même ou, s'agis­sant d'un bail immobilier, aux autres occupants, un préjudice sérieux, elle peut demander la résilia­tion du bail.

                 L'inexécution confère, en outre, au loca­taire le droit de demander une diminution de loyer; lorsque le tribunal accorde une telle diminution de loyer, le locateur qui remédie au défaut a néanmoins le droit au rétablis­sement du loyer pour l'avenir.»

[48]   C’est donc dire qu’en présence d'un manquement du locataire à ses obligations contractuelles, en plus de dommages-intérêts et de l'exécution en nature dans les cas qui le permettent, le locateur peut notamment exiger la résiliation du bail, dans la mesure où il est établi que l'inexécution par le locataire des obligations qui lui incombent cause un préjudice sérieux.

[49]   Dans le présent cas, il résulte de l’ensemble de la preuve tant testimoniale que documentaire que la locatrice peut, à bon droit, réclamer le remède prévu par l’article 1863 du Code civil du Québec et ainsi obtenir du tribunal que soit prononcé la résiliation du bail du locataire, Jean- Louis Cantara, compte tenu du  préjudice sérieux qu’elle subie, elle et les locataires de l’immeuble.

[50]   En effet, le tribunal, après avoir évalué la preuve dans son ensemble en est venu à la conclusion que le locataire Cantara, par son hygiène défaillante et son comportement, est une source importante de troubles, d’ennuis et de tracasseries pour la locatrice, le concierge de l’immeuble et les autres locataires à qui il cause un préjudice sérieux.

[51]   La preuve révèle que le locataire Cantara pose un problème d’hygiène aigu tant dans son logement que dans les aires communes. Par son manque d’hygiène, son indifférence et son insouciance à l’égard d’autrui, il compromet la qualité de vie des autres locataires et occupants de l’immeuble a qui il cause un préjudice sérieux.

[52]   En l’espèce, la situation est telle qu’elle se situe, de l’opinion du tribunal, à la limite de ce qui correspond à la définition d’un logement « impropre à l’habitation » contenue à l’article 1913 Code civil du Québec, lequel autorise le tribunal à déclarer d’office un tel logement et à résilier le bail d’un logement du fait qu’il constitue une menace sérieuse à la santé ou à la sécurité des occupants ou du public.

[53]   Le tribunal juge qu’il n’est pas ici, comme l’a prétendu le locataire, en présence « d’un scénario élaboré contre lui avec deux acteurs de style à savoir la locatrice et le concierge de l’immeuble. »

[54]   À ce jour, toutes les tentatives de la locatrice pour impliquer le locataire dans une recherche de solutions durables se sont révélées jusqu’ici infructueuses puisque le locataire nie toute responsabilité dans les griefs qui lui sont adressés par la locatrice.


[55]   Or, il se trouve parmi les obligations du locataire, celle de maintenir le logement en bon état de propreté en vertu de l’article 1911 Code civil du Québec. À elle seule, les photos du logement du locataire qui ont été prises par le concierge montrent sans l’ombre d’un doute une indifférence du locataire à cette obligation de propreté.

[56]   Après avoir mis en demeure le locataire, le trouble persiste indûment. La locatrice a droit, conformément aux dispositions de l'article 1863 du Code civil du Québec, à la résiliation du bail.

POUR CES MOTIFS, LE TRIBUNAL :

[57]   ACCUEILLE la demande de la locatrice;

[58]   RÉSILIE le bail intervenu entre les parties;

[59]   ORDONNE l’expulsion du logement du locataire et de tous les occupants;

[60]   CONDAMNE le locataire à payer à la locatrice, les frais judiciaires de 68 $;

[61]   RÉSERVE à la locatrice ses autres recours.

 

 

 

 

 

Robin-Martial Guay

 

Présence(s) :

la locatrice

le locataire

Date de l’audience :  

17 octobre 2012

 


 

AVIS :
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